L’HISTORIEN ET LES MÉMOIRES DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE EN FRANCE
Introduction
• La Seconde Guerre mondiale a été un conflit qui a rompu l’unité de la nation, divisé les forces politiques et sociales et conduit à des affrontements qui tiennent de la guerre civile. Étudier la 2nde GM, c’est donc étudier une question sensible. Les affrontements, les prises de position, les actes des uns et des autres ont été tels que les mémoires qui en découlent sont très différentes d’un groupe à un autre. Les jugements moraux qu’elles entraînent sont également très tranchés.
• Cette question est l’occasion d’une réflexion sur la différence entre mémoire et histoire.
- La mémoire est un phénomène complexe largement subjectif qui laisse une large place à l’émotion. Elle fabrique du mythe voire du sacré grâce aux commémorations. Elle sélectionne, elle déforme, elle peut être refoulée ou revitalisée (« devoir de mémoire ») ou finir par s’effacer avec le temps. Il peut donc exister des mémoires d’un même événement.
- Elle est donc tout le contraire de l’histoire qui cherche à comprendre, qui est fondamentalement une « mise à distance » s’appuyant sur l’étude problématisée des faits à partir de documents.
• En revanche, la mémoire est devenue un objet de l’histoire. L’historien se sert des mémoires, il les met à distance, en en faisant une analyse critique. C’est l’historicisation des mémoires.
L’historien peut donc faire une histoire de la mémoire ou des mémoires collectives (ce qui est intégré, ce qui est refoulé, ce qui est distordu) pour mieux comprendre le rapport que la société entretient avec son histoire.
• Mais son travail peut entrer en concurrence avec ces mémoires. La Seconde Guerre mondiale en France est un cas d’école. Il est au cœur des controverses car les sujets sont délicats et il est tributaire d’un accès aux sources encore limité.
Pourquoi les historiens ont-ils dû affronter tant de controverses avec les mémoires de la Seconde Guerre mondiale ?
Conclusion
Pendant plus de 40 ans, l’Occupation et le régime de Vichy furent synonymes d’« un passé qui ne passe pas ».
Doc 24 : Eric Conan et Henry Rousso, Vichy, un passé qui ne passe pas (1994)
La France assume enfin aujourd’hui ce passé. La mémoire juive est désormais reconnue. L’époque de Vichy et de la Shoah reste éminemment tragique, mais elle est devenue un objet historique qu’on peut étudier de manière lucide et dépassionnée.
Cependant, le regard de l’historien se heurte toujours aux revendications mémorielles (de telle ou telle minorité) et doit lutter contre la vulgate qui s’est imposée depuis les années 1970.
L’histoire renouvelle en permanence les débats : Doc 31 Marie-Louise Roberts, Des GI’s et des femmes, 2014.