L’année de mes onze ans…. Mais aussi l’année de la guerre.Je résidais alors dans ma famille maternelle à Nanterre (actuel département des Hauts-de-Seine). Ma famille paternelle était domiciliée à Sartrouville (actuel département des Yvelines).1940 :A notre retour d’exode, j’apprends que mon grand-père paternel ainsi que mon oncle Georges, un frère de mon père (tous deux ressortissants anglais), ont été arrêtés par la police allemande, puis internés à la caserne de Saint-Denis transformée en stalag.Ma grand-mère paternelle d’origine irlandaise née en France n’a pas été inquiétée.Mon oncle Henri, le deuxième frère de mon père né en France est toujours soldat mais en Syrie.1941 :La police de Vichy prend le relais, avec zèle, de la police allemande.– Ma grand-mère paternelle est assignée à résidence.– A la maison, nous avons la visite de deux policiers vichystes. Ils demandent que je justifie de ma nationalité française, ma mère le fait sans difficulté avec son premier livret de famille.
Alors ils attaquent la mémoire de mon père : « S’il est devenu français, c’est grâce à des lois votées par des députés serviles et corrompus à la solde d’une République décadente ». Ma mère leur fait remarquer que ces lois incriminées avaient été votées sous la première République et non sous la troisième.
Ne pouvant contester ces arguments, ils s’en sont pris alors à moi, en déclarant que je ne serais qu’un Français de deuxième ordre, car je n’étais pas de souche. Il s’en suivit une joute oratoire entre ma mère et ces deux individus.
Ils nous quittèrent en nous annonçant qu’ils allaient faire un rapport et que leur hiérarchie déciderait de la suite à donner à cet entretien ……
L’aumônier de la paroisse est passé dans les familles, pour annoncer la reprise des activités des mouvements de jeunesse.
Ma mère profita de sa visite pour lui parler de cette histoire de nationalité.
– Après réflexion, il nous dit d’être très prudents. De son côté, il allait faire son possible pour me soustraire à cette inquisition.
Peu de jours après sa visite, ma mère reçut la proposition que je sois intégré dans un groupe de jeunes qui était en attente de départ pour le Maroc, afin d’éviter les possibles tracasseries de la nouvelle administration.
Après la signature de l’accord parental, la visite médicale et les piqûres réglementaires, le départ fut fixé au début du mois d’octobre pour un séjour d’un temps indéterminé au Maroc.Dix jours après notre arrivée à Casablanca, la dispersion du groupe eut lieu dans tout le pays – Je me suis retrouvé à Mazagan dans un internat pour y poursuivre mes études.Pour les fêtes de fin d’année, je fus reçu dans une famille d’accueil. (Mon séjour se présenta alors sous de très bons auspices).1942 :