Chez les Bara, même le hommes avaient les cheveux très longs. Lors d'un décès, il semble que tous les cheveux et rajouts étaient rassemblés à ceux du même clan (raza) pour être déposés dans une rivière spécifique au clan. Et pendant la période de deuil, il est d'usage que les femmes laissent leurs chevelures pendre naturellement.
Les ombiasa n'échappaient pas non plus à la coiffure sophistiquée, Il arrivait que ces derniers confectionnent des protections aoly avec des paires de ciseaux incrustées dans une corne de zébu. Etaient-elles destinaient à la protection des coiffeurs ?
D'après Louis Michel les conquérants français ses sont heurtés à deux revendications majeures de la part des Bara, pour la préservation leur identité :
le port d'arme
le maintien de leur coiffure
Au lendemain de l'annexation française, les Bara ont revendiqué deux éléments constituants leur identité : le port d'armes et le maintient de la coiffure longue. Ainsi le recrutement de tirailleurs en 1914 a généré de fortes désertions, pour refus de rasage de la tête. Pareillement dès 1926, il était obligatoire d'avoir les cheveux courts même chez les jeunes pendant le SMOTIG (Service delà Main-d’œuvre des Travaux d’Intérêt Général).
Les Bara portaient fièrement de laborieuses tresses ou RANDRA. "La chevelure était également l’objet de soins particuliers" constatait Louis Michel succinctement. Par contre, le récit du Révérend Shaw était plus riche en détails :
"Leur coiffure différait beaucoup d’un groupement à l’autre. Une fois tous les mois ou toutes les six semaines, les cheveux sont lavés puis roulés en une foule de nœuds variant de la grosseur d’une petite bille à celle d’une orange. Une fois soigneusement roulés ou même cousus (car les Bara ajoutent, s’il le faut, des cheveux étrangers), on les enduisait d’une couche épaisse de cire d’abeille mêlée à de la graisse de bœuf, de sorte que, lorsqu’elle était refroidie, chaque nœud ou boule était solidement cimenté au voisin, et toute apparence de cheveux disparaissait. Quand l’arrangement était de date récente, on eût cru des blocs d’argile grise mis sur la tête et les boules rendaient, lorsqu’on les frappait, « un sourd son comme si on frappait du bois".
Plus récemment, la monographie de Faublée sur les Bara renferme toute une kyrielle de précisions sur chaque modèle de coiffures :
"Ils se font tresser les cheveux en nattes relativement courtes, mais très fines. Ces nattes sont disposées avec un grand souci décoratif, soit en forme de roue, soit suivant d’autres dessins très curieux, et toujours originaux. Ces jeunes gens conçoivent une certaine vanité de leur coiffure. Celle-ci n’est d’ailleurs que le résultat des soins que leur consacrent ou leurs sœurs ou leur mère, ou une épouse fière de suivre un jeune mâle aussi bien coiffé.
Pour ceux qui ne sont pas les objets de tant de sollicitude, ils portent les cheveux aussi ras sur le derrière de la tête, mais tressés en forme de crête sur le devant. Cette coiffure est appelée fidely-minea.
Il faut regretter que cette description n’ai pas reçu le complément d’une illustration, mais on doit en retenir qu’à l’heure actuelle, quelques jeunes encore conservent la tradition ancienne, et sans doute sont-ce, avec les sery, les derniers de Madagascar.
En fait, les anciennes coiffures Bara présentaient de nombreux types, plus ou moins variables suivant les clans :
KIDOKY : tresses roulées en grosses boules ou hahakidoky appliquées sur la tête.
KESAKESA ou RARANDRAKASA : on divisait d’abord la toison en deux parties par une médiane, du front à la nuque, chaque moitié était à son tour séparée en trois parts, chacune d’elles comprenait des tresses fines roulées ensuite en petites boules ou KESA, nombreuses et bien alignées.
LOHAVALALA : il fallait posséder des cheveux assez longs. Ceux du front et de la nuque formaient de fines tresses disposées presque horizontalement et nouées ensemble sur les côtés, à la hauteur des oreilles. D’après un Malgache de Ranohira, cette disposition était censée imiter les petites digues des rizières. Avec le surplus, on formait deux grosses boules ou VOIVOY au sommet de la tête.
KIROTRA ou JOBOROTRA : tous les cheveux en fines tresses à extrémité nouée, elles peuvent tomber jusque sur les épaules en cachant les oreilles et même une partie du front et des joues.
Chez les Bara Imamono, hommes comme femmes portaient, jusqu’à la première guerre mondiale, soit des boules appuyées directement sur la peau, soit des boules un peu plus petites, terminant des tresses longues de 8 à 10 cm. Toutefois, d’après Barbier, "quelques homme savaient déjà les cheveux ras, soit par imitation des Européens, soit parce que leur chevelure, crépue et trop courte, ne se prêtait pas au tressage.
Les coiffures n’étaient refaites qu’une fois par mois environ ; elles étaient enduites de tanifotsy ou argile blanche, et de fiente de bœuf mêlées à beaucoup de graisse de bœuf.
Les combinaisons n’étaient pas limitatives et des variantes intervenaient au gré de chacun. Elles n’étaient pas rares, notamment dans la région de Sakaraha. Voici trois d’entre elles :
Un cimier transversal large à la base de 7 ou 8 cm et haut d’une dizaine, surmontant le front d’une oreille à l’autre ; au sommet, une dizaine de tresses d’environ 25 cm, elles-mêmes nattées ensemble dans leur tiers inférieur et constituant une sorte de boudin au-dessus de la nuque. Le reste de la tête rasée de près.
Sur tout le sommet du crâne et le haut de la nuque, une masse de cheveux en tignasse épaisse d’une dizaine de cm, enroulée d’une auréole rasée. En avant, de part et d’autre d’une raie médiane, une douzaine de fines tresses disposées horizontalement, nouées à l’extrémité. Sur les temporaux et jusqu’aux oreilles, d’autres tresses plus épaisses et pendantes, terminées par des nœuds épais.
Une calotte d’environ 15 cm de diamètre, de cheveux laineux et mélangés au sommet de la tête ; le pourtour entièrement rasé ; une fine tresse frontale d’une douzaine de centimètres, commençant au contact de la calotte et descendant en avant sur le nez ; pour qu’elle ne soit pas gênante, elle est immobilisée par un cordon passant par le front et attaché derrière la tête.
Les chefs de clan ou de groupe, quel que fût la coiffure adoptée par eux, et même si parfois ils avaient les cheveux ras à la suite d’un deuil, conservaient toujours une tresse au sommet de la tête, en symbole de pouvoir ou de commandement.
Quant aux enfants, ils portaient vers 1920 les cheveux courts, mais on leur laissait souvent de petites tresses frontales faites avec plus ou moins de soin, et qui n’étaient guères que des tortillons.
Chez les Bara Iantsantsa, les petites boules couvraient toute la tête en couronnes concentriques. Une photo du chef Isambo faite vers 1900 par le Service géographique de Madagascar, le montre avec cette coiffure, couverte d’une épaisse graisse blanche.
Chez les Bara Be, les boules dominaient aussi. Quand elles disparurent, certains jeunes gens, au lieu de couper leurs cheveux ras, les gardèrent assez long, mais en brosse sur le devant ; un peigne de bois agrémentait l’ensemble.
Certains jeunes aussi se singularisaient par une haute fantaisie. A Ivohibe, en 1926, un homme d’une trentaine d’année portait, sur un crâne ras une sorte de couronne de cheveux en broussaille, large de 4 à 5 cm, à l’intérieur de laquelle un cimier, de même largeur, était interrompu sur 3 cm vers l’occiput. En avant, deux petites tresses tombaient sur le front et de chaque côté de celles-ci, étaient conservées trois bandes étroites de cheveux.
Dans la même contrée et vers la même époque, un autre jeune homme portait, sur sa tête rasée, la même couronne ; à l’intérieur de celle-ci, huit tresses, en deux rangées de quatre, partait du milieu de la tête pour se diriger vers les côtés, sans atteindre la couronne.
Chez les Bara Antivonjy , les coiffures masculines comme féminines étaient constituées jadis soient des boules de taille moyenne, soit de tresses enroulées sur elles-mêmes en grosses torsades dans un même plan, et , par conséquent, aplaties ; leur nombre était de 10 ou 12 (une ornementation compliquée pouvait venir s’ajouter. Lemaire (Itinéraires dans le sud de Madagascar. Journal officiel de Madag., 1897, p 241) a vu le frère du roi de Betroka, un Zafimarozaha, portant autour de la tête un cordon auquel étaient attachés, parmi de petits sachets de cuir, des pattes de coq et de lémurien.).
En 1923 se produisit un changement radical. Tandis que les hommes âgés conservaient encore l’usage traditionnel, et que les anciens tirailleurs portaient au contraire les cheveux courts, tous les autres jeunes gens adoptaient une mode nouvelle qui surprenait par son étrangeté. Qu’on imagine une chevelure épaisse de 1 à 2 cm au plus. Dans cette toison, la coiffeuse a rasé certaines parties suivant la plus extrême fantaisie, donnant aux tonsures toutes sortes de dessins, mais leur conservant en général des formes plus ou moins géométriques. Tantôt c’étaient tout autour de la tête et jusqu’au sommet, des tonsures en lignes concentriques ; tantôt des losanges, des rectangles ; tantôt sur la nuque, deux cercles côte à côte imitaient une paire de lunettes. Parfois la tonsure s’étendait et les parties rasées prenaient une importance supérieure aux parties chevelues ; alors il ne demeurait plus que deux ou trois « macarons » de cheveux, de grosseur et d’emplacement variables, parfois même un seul, de la dimension de l’ancienne pièce de cinq francs, placé au sommet du crâne ou sur le côté ; ces macarons pouvaient même parfois se réduire à la dimension d’une de un franc. Mais aucun de ces jeunes n’était entièrement rasé.
Cette mode nouvelle était en quelque sorte une généralisation des cas isolés signalés précédemment çà et là dans d’autres tribus, mais où ils étaient toujours restés exceptionnels. Elle dura une dizaine d’année pour disparaître progressivement.
Quelle en était l’origine ? Les autochtones, interrogés à l’époque, m’ont unanimement affirmé qu’elle n’avait d’autre but que de faciliter, de rendre plus honnête le moraingy (ringa en dialecte Bara) qui est le jeu de lutte à main plate dans un corps à corps individuel (voir sur le moraingy : R. Decary A cette lutte, les jeunes se livraient avec frénésie, d’autant plus qu’elle entrainait pour les vainqueurs de nombreux succès féminins. Or, lorsqu’ils faisaient antérieurement le moraingy, certains se trouvaient en état d’infériorité quand l’adversaire les saisissait par leurs longs cheveux, « coup » qui était en principe interdit. La coupe des tresses ou des boules empêchait cette fraude, et les tonsures n’étaient qu’une coquetterie. Un Bara me dit un jour : « Ce sont comme des tatouages que nous avons sur la tête ».
Il est d’autre part possible qu’il existât alors une raison rituelle qu’on ait voulu taire.
Voici enfin une coiffure particulière, rencontrée une seule fois, en 1926, chez un Bara des environs de Midongy du Sud. Sur chaque tempe, un gros « paillasson » roulé sur lui-même dans un plan ; côtés de la tête rasés, sur le sommet, cheveux libres et crépus, en cimier de casque ; sur la nuque, quatre grosses tresses atteignant le cou. C’était une combinaison des modes anciennes et nouvelles.
Les sery ont été jadis signalés à propos des Antaisaka. Les Bara, et surtout parmi eux les Antivonjy qui vivent au contact des Antaisaka, possèdent aussi des compagnies de danseurs. Leur coiffure, qu’ils conservent encore à l’heure actuelle et qui constitue leur originalité consiste en 30 à 50 tresses très serrées et huilées, à bout noué et tombant jusque sur le cou.
Parfois les RANDRA frontaux sont dirigés obliquement pour passer sous d’autres provenant de l’occiput, et auxquels ils sont attachés par un fil. L’ensemble est complété par une foule d’ornements. Les uns sont fixés sur les tresses : fela blancs de tailles diverses, pièces de monnaie d’argent percées, ect. ; les autres sont de sortes de diadèmes ou de résilles de perles de couleurs, arrangés avec goût en dessins variés et qui peuvent couvrir entièrement la partie antérieure de la tête. Il s’y ajoute enfin une houppe soyeuse de poils, volomboatsira. La poitrine et les bras sont aussi couverts de colliers et bracelets.
Un musicien vu à Betroka en même temps que ces sery (1939) portait les cheveux du sommet redressés et emmêlés en tignasse haute d’une dizaine de centimètres ; au-dessous, sur les tempes et les oreilles tombaient de chaque côté 9 fines tresses longues de 15 à 18 cm. La nuque était rasée".
Le cas de Remony du village bara vinda d'Amparimiaiky nous montre une coiffure travaillée, enrichie du fameux peigne plantée dans sa chevelure. Son visage est sublimée par un tatouage sur le front, composé de 2 points superposés avec une sagaie reliant ses 2 sourcils. Ce tatouage au charbon, piqué à l'aiguille, est l'oeuvre de sa femme.
Il arrive aussi que les hommes soient coiffés d'un couvre chef au gré de leur goût. Le Bara contemporain se reconnait facilement car il a faible pour le chapeau en feutre. Un souverain bara dispose de sa coiffe royale de tissus rouge. un convoyeur de zébus est tout simplement coiffé de sa réserve de riz !
Depuis toujours, les femmes Bara maîtrisent aussi l'art capillaire. Les manifestations officielles sont les occasions pour exhiber leurs fameuses coiffures ainsi que les fameux chapeaux Bara en feutre. C'était le cas à l'occasion de l'investiture du nouveau chef de la région Atsimo-Andrefana.
Sources :
SHAW, Georges A (1876) The Ibara tribes (in Chron. London Mission, Soc) page 237
LE BARBIER (1916-1917) Notes sur le pays des Bara Imamono (in Bulletin Académique Malgache) tome III) Page 73
MICHEL, Louis (1957) Mœurs et coutumes des Bara (in Mémoire de l'Académie Malgache - fascicule XL) pages 30 - 192
DECARY, Raymond (1965) Les anciennes coiffures masculines à Madagascar (in "Journal de la Société des Africaniste" – Vol 35 – n° 35-2) page 282-316