Vincent COSTARELLA
photographies sténopés
du 1er au 26 juin 2016 du mercredi au dimanche de 15h à 19h
vernissage le jeudi 2 juin à 18h30 - soirée cabaret à partir de 20h30 au Petit 38
présence de l'artiste tous les samedis et dimanches
Rencontre-lecture avec Jean-Louis ROUX le jeudi 9 juin à 19h
à l'occasion de la sortie de son livre de poésie "Un corps y dort" aux éditions Jérôme Millon - entrée libre, inscription par courriel
Rencontre-lecture "ATTENTION TRAVAUX" le samedi 18 juin de 18h à 19h
Lecture de poésie, de prose, de poésie en prose par Marie Fabre (Personne ne peut se donner le monde), Christopher Lapierre (Le Comité directeur) et Brice Bonfanti (Chant d'utopie, XVII). En savoir plus... - entrée libre, inscription par courriel
© Vincent Costarella
© Vincent Costarella
© Vincent Costarella
© Vincent Costarella
Devant le temps
" Vincent Costarella présente à Alter-Art une série de sténopés en noir et blanc, discipline qu’il pratique depuis cinq ans. Cette série est consacrée à la ville (dont Grenoble) ainsi qu’aux gens qui l’habitent. Mais pourquoi choisir le sténopé ? A l’ère du numérique et du selfie, l’image photographique se doit d’être immédiate dans sa prise de vue comme dans sa concrétisation, sans attendre le retour d’épreuve du laboratoire, et réalisée avec l’objet technologique le plus « neuf » (à défaut d’être le plus performant), promu par la dernière version des portables et autres gadgets médiatiques. Dans ce contexte, récupérer une boite en carton ou en fer et la transformer manuellement en sténopé relève d’une forme actuelle de contre-culture. C’est évidemment aussi revenir à un artisanat de la photographie qui prend à contre-pied le besoin d’instantanéité de notre époque, puisque la prise de vue nécessite souvent plusieurs minutes ; il faut ensuite décharger et recharger la boîte d’un nouveau papier dans le noir ; puis il faut le développer et scanner le négatif pour l’inverser en positif et l’agrandir.
Vincent Costarella souhaite entrer dans une autre perception de l’acte photographique, qui laisse place à l’aléatoire, à la surprise. Le trou d’aiguille (origine du mot sténopé) qui fait rentrer la lumière n’est pas parfait, il est réalisé par le photographe qui n’utilise pas les trous réalisés industriellement au laser ; chaque boîte est unique et sa forme détermine une image unique ; le cadrage ne peut être maîtrisé totalement puisque il dépend de la pose de la boîte ; le photographe ne peut pas viser, donc il ne peut qu’estimer ce qui entre dans l’angle de vue ; enfin tous les éléments en mouvements dans le champ photographié deviennent flous voire disparaissent vu le temps de pose nécessaire.
C’est ainsi que l’image nous renvoie une autre perception du réel.
Photographiés frontalement, les lieux sont assez communs ; les gens rencontrés généralement au hasard, sur les lieux de la prise de vue, sont mis à contribution pour quelques minutes et souvent nous regardent. Peu de lignes de fuite ou d’horizon, une impression de force et de simplicité. Quand le photographe utilise une boîte cylindrique toutes les lignes droites se courbent et la contre-plongée transforme une pelouse en forêt vierge. L’épreuve donne à voir ses accidents, éraflures provoqués par on ne sait quel mystère de la boîte, les hasards du processus. Les photographies, très belles, déploient toute une gamme de gris ; celles prises dans un halo intemporel évoquent les débuts de cet art - d’autant que les bords sont d’un noir profond, aux endroits que la lumière n’a pas atteints.
En résulte un effet d’anachronisme. L’image n’est pas seulement la représentation de ce qui a été, de ce qui n’est plus ; par la sensation d’évanescence qu’elle inspire, elle concrétise le lien entre présent et passé, au croisement de notre mémoire individuelle et de la mémoire collective, à la rencontre d’un imaginaire qui en dit beaucoup plus que ce qui a été strictement photographié. Ainsi, cet homme qui sort du supermarché dont l’enseigne entoure la tête, avec on ne sait quel pack dans la main droite, le coude appuyé sur un caddie : est-il de notre siècle ou du précédent ? est-il d’ici ou d’ailleurs ? à quelle mémoire ouvrière ou même migrante nous renvoie-t-il ? On ne sait de quel lointain il provient mais il impose ici et maintenant sa présence, dans l’existence d’un moment qui ne lui est pas volé.
Avec cette conception de l’acte photographique, il n’y a pas de « bons » sujets, tout est matière à œuvre, car chaque fragment de la réalité porte intrinsèquement ses multiples métamorphoses. Et ce n’est pas le moindre mérite de Vincent Costarella : il nous permet de repenser le réel le plus quotidien, de l’examiner à nouveau : c’est exactement la définition étymologique du verbe respecter."
J. L. Desmazières, avril 2016
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