Le cours noyau de Manon Guerente

Une adaptation du cours-noyau en lycée : concilier cours “inversé” et parcours différencié

Travaillant en pédagogies actives et sous forme de « cours inversé » depuis des années, plusieurs éléments ne me satisfaisaient toujours pas pleinement : l’impression de trop « perdre » la partie cours en classe, le travail non-fait à la maison, les traces écrites personnelles bien trop lacunaires pour être efficaces et utiles aux apprentissages… Et si les élèves avaient le choix entre plusieurs activités dans leur plan de travail, j’avais des difficultés à leur proposer des temps de remédiation et encore plus à trouver du temps pour consolider leurs connaissances. 

 

La proposition de cours-noyau faite par l’académie de Rennes dans sa revue Cabotage n°5 m’a permis de faire le point et de repenser mon approche, sans pour autant appliquer de manière stricte cette pratique. Après tout, construire sa pédagogie, c’est réussir à s’inspirer de plusieurs approches et à les concilier pour les adapter à ses élèves et à son contexte local. 

 

Toujours en phase d’expérimentation, j’ai le sentiment que donner aux élèves des informations brutes (dates clés, notions, biographies, repères, …) sans faire d’entrée du lien entre elles et demander ensuite aux élèves de « remonter le cours dans le bon sens » en classe peut être fastidieux, d’autant plus avec le public de mon établissement qui reste plutôt fragile. Si j’ai repris les lignes directrices du cours noyau, j’en ai donc adapté la pratique.

Repenser la forme du cours 

  Tout d’abord, j’ai souhaité conserver l’utilisation de cours en vidéo et de questionnaires de compréhension associés. C’est une première approche qui fonctionne bien et me permet d’avoir de vrais retours en termes de compréhension du cours de manière individualisée et collective. Mais comment conserver mes vidéos et questionnaires de cours tout en le repensant sous la forme de cours noyau ? Deux solutions s’offraient à moi : 

-        Faire de nouvelles vidéos pour chaque cours

-        Adapter le cours noyau à mes supports existants.


J’ai opté pour la seconde solution, qui a aussi pour bénéfice de me permettre de conserver en partie le travail engagé depuis plusieurs années. Sur leur plan de travail, les élèves peuvent trouver une section « découvrir ». 

Celle-ci est organisée en deux parties : 

-    1. Le « Flashtest » pour réactiver leurs connaissances du collège : un petit questionnaire rapide qu’ils font à la maison en amont de la séquence. 

-  2. Une partie « Apprendre » où ils accèdent à des questionnaires de compréhension dans lesquels sont incluses les capsules vidéo de cours et des éléments de repères (cartes, frises chronologiques, biographies).

 

Une fois qu’ils ont vu une première fois le cours et répondu au(x) questionnaire(x), ils doivent écrire leur « cours noyau », compris ici comme la trame essentielle du cours. 

 

Dans le livret associé à leur plan de travail, les élèves disposent ainsi de deux séries de questions : 

-        Les questions « cours noyau »

-        Les questions « approfondissement ».

Seule la première série de questions est obligatoire. Ce sont les connaissances minimales à avoir pour pouvoir réussir les évaluations de la séquence. S’ils ont la curiosité d’aller plus loin, ils peuvent répondre à la deuxième série de questions. Pour répondre, ils disposent bien évidemment de la capsule vidéo de cours mais aussi sur mon site web de la trace écrite intégralement rédigée et téléchargeable, ne dissociant pas les parties « cours noyau » et d’ « approfondissement ». Ainsi, s’ils voient l’intégralité du cours, les questions du “cours noyau” leur permettent de centrer leur attention sur les points essentiels, dont la compréhension a déjà été testée dans les questionnaires auto-correctifs de découverte des capsules vidéos.

 

Lors de la première séquence de l’année, le travail est intégralement réalisé en classe mais ensuite, cette partie est à faire à la maison. Le travail est donné au moins une semaine à l’avance, voire plusieurs semaines auparavant pour qu’ils puissent s’organiser, des dates butoirs pour faire le travail leur étant annoncées.

 

C’est ici que ma pratique diverge le plus du « cours noyau » tel que présenté dans Cabotage. L’utilisation de questions sur le cours pour accompagner la rédaction autonome de la trace écrite a lavantage principal de laisser le plan du cours apparent et la réflexion globale de la séquence dès la première approche du cours, et donc de conserver une réflexion problématisée qui me semble essentielle en lycée. Vrai changement par rapport à mes anciennes pratiques en revanche, la nécessité de dissocier dans ma trace écrite personnelle les éléments essentiels de ceux qui sont plus secondaires pour pouvoir créer ces deux questions sur deux niveaux. 


Pour construire leurs notes, je leur demande d’utiliser la méthode Cornell : 

Leur trace écrite se trouve ainsi aérée, ce qui leur permet d’enrichir leur « cours noyau » avec la deuxième série de questions mais aussi avec tous les éléments intéressants glanés dans les différents exercices. Surtout, cette manière de rédiger leurs notes est importante pour ce que nous faisons à leur retour en classe. Un temps d’échange entre membres de chaque îlot est organisé pour qu’ils puissent compléter mutuellement leurs notes dans le cas où certains auraient eu des ratés dans la construction de leur cours noyau. C’est aussi à ce moment-là qu’ils peuvent répondre aux questions « approfondissement » pour les élèves ayant le plus de facilités.

 

Enfin, une reprise collective est faite par un temps de cours dialogué qui permet de bien fixer les éléments cadres du cours et les notions essentielles avant de passer à la phase d’exercices. Selon le temps restant dans la séance, un Kahoot par équipe est proposé pour vérifier si ces connaissances ont été véritablement fixées. 

Un nouveau plan de travail pour mieux permettre la différenciation 

Mes plans de travail ont ainsi dû évoluer pour rendre plus visible les temps forts : la partie d’appropriation du cours, le temps d’exercices, et le temps de révisions.

Les séances d’exercices s’organisent en 2 à 3 temps : 

1. Un parcours « obligatoire » qui permet de lancer la séquence mais aussi et surtout de réaliser un premier diagnostic dans la maîtrise des compétences qui seront évaluées en fin de séquence. 

2. Un parcours différencié, entre « consolider » et « approfondir ». Les élèves qui ont échoué au premier exercice diagnostic se voient proposer un exercice plus simple pour reprendre les bases méthodologiques, tandis que les élèves déjà plus en maîtrise peuvent élargir leurs connaissances et/ou travailler avec d’autres approches.

3. Selon les séquences, une activité bilan et/ou une tâche complexe est proposée pour prendre de la hauteur sur le sujet et confronter les idées et représentations des élèves.

Intégrer des temps de consolidation 

On dit souvent aux élèves qu’ils n’ont pas appris leurs cours ou qu’ils doivent changer leurs méthodes de travail. Mais quand prenons-nous le temps de le faire avec eux ? C’est essentiel et, pourtant, c’est souvent un travail que l’on externalise et qu’on leur demande de réaliser seuls à la maison. 

 

Pour y remédier, cette année j’ai décidé au moins avec mes classes de seconde de prendre un temps dédié en classe pour réviser. En plus de Kahoot bilan que l’on réalisait quand cela était possible l’année précédente, cette fois-ci, il s’agit de leur demander de réaliser des fiches de révision, des cartes mentales, de construire des flashcards et de refaire les questionnaires en classe.

Le but ? Leur donner du temps dont ils manquent à la maison et leur apprendre à apprendre. Cela permet également de leur montrer que si on apprend toujours seul, ce n'est jamais sans les autres, qui sont une richesse en leur permettant de construire ou de déconstruire des représentations faussées du cours.  


Manon Guerente, Lycée Polyvalent Henri Laurens (26)