Couillet

Une terre d'accueil en Principauté de Liège

Ces informations historiques ont été relevées dans une "Notice historique de Couillet" écrite en 1968 par Alfred BOLLE, un cousin de nos parents, à l'occasion du centenaire des Sociétés royales des "Décorés" et des "Amis du Progrès".

« Culiaco », graphie du Xe siècle, dériverait du gallo-romain : « Cûliacum» qui veut dire «appartenant à Cûlius». On peut également traduire « Culiacum» par « terre à l'écart». L'on a aussi affirmé que Couillet voudrait dire «petite colline », étymologie douteuse qui s'appuie sur la tradition qui veut que cette très ancienne localité se serait élevée initialement sur une hauteur dominant la Sambre, appelée à bon droit « fastigium altum », c'est-à-dire Fiestaux, le «haut faîte », colline sur laquelle les Prémontrés bâtirent, en 1161. une église dédiée à Sainte-Catherine.

Bien que n'étant pas mentionné dans le polyptyque de l'abbaye de Lobbes de 868, Couillet devait tailles et collations à ce monastère, ce qui s'explique par le fait que «Culiacum ad Sabiam» n'était à cette époque qu'une dépendance de Marcianis, l'actuelle commune de Marcinelle.

Jusqu'à la fin de l'ancien régime d'ailleurs, Couillet a fait partie intégrante de la seigneurie de Marcinelle et a formé avec celle-ci une même recette dans l'administration financière de la principauté de Liège.

La seigneurie de Marcinelle fut donnée, en 889, aux princes évêques de Liège par Arnould de Carinthie, petit-fils et héritier de Louis le Germanique, empereur d'Allemagne, et elle continua, jusqu'en 1794, à faire partie du huitième quartier de la principauté liégeoise.

Le chapitre de Saint-Lambert confia, dès le XIIIe siècle, l'avouerie de Marcinelle aux sires de Loverval. Wauthier, sire de Loverval et avoué de Marcinelle, était le fils de Godescalc III de Morialmé, qui prit la croix en 1189 et entra dans l'ordre des Hospitaliers de Jérusalem, appelés plus tard chevaliers de Malte.

Les seigneurs de Morialmé descendaient d'un lignage qui semble issu d'un nommé Godescalc, prévôt de la cathédrale de Liège vers l'an 1000 sous l'épiscopat de Notger. C'est seulement en 1086 que des documents révèlent le nom d'un seigneur se titrant de Morialmé et descendant vraisemblablement de la maison de Rumigny-Florennes.

Wauthier de Morialmé, sire de Loverval. eut, dès 1211. des contestations au sujet des droits respectifs du chapitre de Saint-Lambert et de lui-même, en sa qualité d'avoué de Marcinelle.

Othon, frère de Wauthier, sire de Montigny et de Loverval. devint à son tour avoué de Marcinelle et il conclut, en 1244, un accord avec Robert de Thorote, évêque de Liège, sur leurs droits respectifs à Marcinelle. Le sceau d'Othon, appendu à une charte de 1243, porte un écu à la bande fuselée de quatre pièces, accompagnée en chef et à senestre d'une merlette.

Othon mourut en 1245, laissant pour héritier son fils Godescalc qui conclut, l'année suivante, un accord avec l'évêque de Liège au sujet de l'incarcération, sans doute abusive, du mayeur de Marcinelle.

Isabelle de Morialmé, fille de Arnould IV, épousa Nicolas de Condé et lui donna un fils, Jacques, qui hérita des biens maternels sis dans le Hainaut et le Namurois. Vint ensuite Nicolas II de Condé, seigneur de Bailleul et de Morialmé, à qui, le 5 mai 1283, Jean IV de Flandre, évêque de Liège, fit verser les revenus de la mense épiscopale de Marcinelle et d'une vingtaine d'autres lieux. en remboursement d'un emprunt de 2.000 marcs liégeois.

A notre connaissance, il n'a pas été trouvé de traces d'engagère dans la seigneurie de Marcinelle-Couillet avant 1567, année au début de laquelle l'évêque de Liège fit transport de cette terre, avec juridiction haute, moyenne et basse à Arnold de Bocholtz. Ce seigneur appartenait à une famille d'ancienne noblesse, originaire d'un village du pays de Rolduc et dont l'écu était de sinople à trois têtes de léopard d'argent.

En 1579, Couillet fut érigée en paroisse et son église fut détachée de celle de Marcinelle. Les droits seigneuriaux de haute, moyenne et basse justice de Couillet furent engagés le 11 juin 1782 en même temps que ceux de Marcinelle à François-Joseph de Thibault, pour lui et ses successeurs.Le nouveau seigneur de Couillet descendait de Joseph Thibault, Liégeois, bailli de la ville basse de Charleroi, maître de forge, qui avait été anobli par l'empereur Léopold le 21 mars 1701.François-Joseph de Thibault, arrière-petit-fils de Joseph, était né en 1722. II avait épousé Louise Larbalétrier qui, devenue veuve, précisa dans une requête du 11 mai 1789 que Couillet ne faisait avec Marcinelle qu'une seule terre, seigneurie et juridiction, les deux communautés ayant même bailli, mayeur, greffier, même cour et même loi.

Les actes émanant de l'échevinage de Couillet-Marcinelle furent, jusqu'à la fin du XVIIe siècle, munis de sceaux personnels du maire et de certains échevins. A partir de cette époque, les expéditions d'actes furent ordinairement scellées par deux membres de la cour échevinale ou même uniquement par le greffier. C'est ainsi qu'une attestation du 29 mai 1787 émanant de la cour de Justice porte le sceau personnel de J.B. de Limborgh, greffier, dont les armoiries étaient, à senestre, en chef. une couronne, en pointe un étrier, au franc quartier chargé d'un lion issant.

Les derniers seigneurs de Couillet, les Thibault, portaient de gueules à trois étoiles à six rais d'or, au chef de même chargé d'une aigle issante de sable, couronnée d'or, becquée et languée de gueules, l'écu surmonté d'un heaume d'argent, couronné, grillé, colleté et liseré d'or, doublé et attaché de gueules, aux lambrequins d'or et de gueules et ayant pour cimier l'aigle issante de l'écu. C'est l'usage de ces armoiries qui a été concédé à la commune de Couillet par l'arrêté royal du 12 mai 1965.Après avoir fait partie pendant neuf siècles de la principauté de Liège, Couillet fut rattaché au département de « Jemmape », 86ème département de la jeune République française, par décret du 12 ventôse an 1. (2 mars 1793) de la Convention nationale.

Toutefois, ce ne fut qu'après la victoire de Fleurus, le 26 juin 1794, que ce département fut effectivement constitué. Le décret du 14 fructidor An III créa le canton de Châtelet, dont Couillet fit partie avec 14 autres communes. Le 23 ventôse An V, le pays fut annexé définitivement (?) à la France et cet état de fait fut reconnu par les nations européennes au traité de Campo Formio du 17 octobre 1797. Le nouveau régime apporta des changements profonds dans plusieurs domaines.de l'organisation administrative du pays : certains furent temporaires et disparurent à la chute de Napoléon, d'autres subsistèrent.

Par exemple, les « tailles» furent supprimées mais remplacées par l'impôt foncier, dont l'instrument d'application, le cadastre, est encore la base actuelle. Le 23 novembre 1790, la République institua le cadastre des biens fonciers; son organisation fit l'objet du décret du 12 brumaire An XI (1802) et son application fut étendue aux anciennes provinces belges par décret du 27 vendémiaire An XII (1803). Le travail commencé en 1808, confirmé par arrêté royal hollandais du 30 septembre 1814 fut long et difficile. Il fut terminé en 1833 pour la province du Hainaut.

De 1797 à 1814, Couillet subit l'application de la conscription imposant à ses jeunes gens l'incorporation dans les armées de la République, puis de l'empire de Napoléon et les vit se battre dans la plupart des pays d’Europe.

« Couyet, pierdu dins l’fumeye… »

C'est au début du 19ème siècle que plusieurs activités industrielles déjà présentes à Couillet connurent un véritable essor engendrant un appel important de main-d'oeuvre. Citons, pour l'exemple, la nouvelle industrie du fer qui profita de l'excellente qualité du sable trouvé sur place et à toute la sidérurgie. En 1824 on vit s'élever les premiers fours à puddler et c'est à Couillet (Hauchies) que l'on fit en 1827 les premiers essais en Belgique de la fusion du minerai de fer au moyen de coke dans un haut-fourneau de 12 mètres de haut. Ces essais permirent de produire de six à dix tonnes de fonte par 24 heures. 

Comment ne pas évoquer la chimie avec Ernest Solvay qui fonda à Couillet en 1863 la société Solvay & Cie spécialisée dans la fabrication de la soude par le procédé à l'ammoniaque.

En maints endroits de la commune des veines de charbon étaient très proches du sol et étaient exploitées depuis au moins 1251. Un premier puits de 127 mètres de profondeur permettant une exploitation industrielle était creusé en 1830 et l'activité charbonnière ne cessa véritablement qu'après le drame de Marcinelle en 1956.

Toujours dans la première moitié du 19ème siècle on vit se développer à Couillet une verrerie, une brasserie (construite par Basile PARENT), des industries de constructions métalliques, d'autres liées à l'arrivée du chemin de fer. Une cimenterie fut même en activité de 1897 à 1914. 

Les industriels locaux avaient besoin de bras et un grand nombre de Brabançons leur offrirent les leurs.

Vue du bas de Couillet en 1885