1879 à 1888

Mariages extraits de la "La Vie Rémoise" d'Eugène Dupont

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1879

À nous maintenant, les revivificateurs de la cité, sangs chauds, cœurs généreux, esprits alertes, chairs faibles, muscles agiles !

En tête, l’aimable et souriant Albert Vermonet, un de nos meilleurs artistes peintres, verriers, élève et successeur de Marquant-Vogel, taille moyenne, svelte, figure fine, un peu chafouine, aura les cheveux gris, puis verts, puis blancs, de bonne heure. Il a 25 ans, habite en meublé rue Sainte-Catherine, 13, mais a son domicile légal chez son père, Vermonet-Legros, cordonnier-bottier, rue du Bourg-Saint-Denis, 96. Sa fiancée est Aline Louise Pommery, 19 ans, rue de Contrai, 34 (maison Truchon), fille de Charles Hippolyte Pommery, décédé à Oger en 1863, et de Irma Désautels, décédée elle-même, après son remariage avec le vannier Alexandre Truchon, le 3 août 1878.

L’aïeul Désautels-Durbec vivait encore. Par la même occasion, l’aîné d’Albert, Émile, peintre en bâtiments, ex-conditionnel en 1870 pour la durée de la guerre, épousera Marie Françoise Thiébaux, fille de l’épicier Thiébaux-Féron, établi rue Brûlée, 34, dans une construction basse à rez-de-chaussée en contrebas, avec étage mansardé, à l’angle de l’ancienne rue des Treize-Maisons (Boulard).

Frédéric Jules Haouy, 19 ans, rue du Cimetière-de-la-Madeleine, originaire de Rethel, fils de Haouy-Henrotte, chaudronnier de cuivre, et Marie Antoinette Félicie Fouriaux, 17 ans, né à Savigny-lès-Vouziers, fille du vannier Édouard Augustin Fouriaux-Boutillot, rue de Vesle, 82.

Elle est la cadette de la femme de haute valeur, institutrice à Reims, qui sera la célèbre Mlle Fouriaux, chevalière de la Légion d’honneur, celle qu’on peut appeler la cardinale laïque de la Grande Guerre. On retrouvera Haouy établi fabricant de lames et rots rue de Contrai, 8 ; le couple encore vert est retourné habiter à Rethel, en 1920.

L’un des fils de feu Lurquin-Pinot, perruquier rue Neuve, 37, Louis, frère de Désiré, établi coiffeur à Paris, rue d’Angoulême, épouse Alzire Leclerc, native de Cernay, fille de Leclerc-Pérard, comptable, rue des Augustins, 14.

Qui n’a connu le serviable et actif Chéruy, brigadier des appariteurs à l’Hôtel de Ville dont il était concierge ? Louis Eustache était de Lavannes, où il naquit en 1829 de Jean-Baptiste, décédé en 1846, et de Marie Joséphine Toussaint, habitant dans le Jard, au 54. Veuf de Eugénie Bouché, il prend pour seconde femme Elisa Pierrard, repasseuse-lingère, rue Henri-IV, à peu près de son âge.

Le comptable à l’usine Walbaum & Desmarest, Léon Thiaffey, d’Ay, demeurant rue de Thillois, 15, et Augustine Richard, de Monthois (Ardennes).

René Parizy, 22 ans, ex-élève de l’école rue Perdue et du Jard, devient le beau-frère de son camarade de classe et de quartier, Féry le bouclé, en épousant Clara, née à Paris en 1860, de Cyrus Stanislas, et de Marie Perpétue Thiéry.

D’autres noms encore : Lange Séguy, 42 ans, d’Annelles, employé aux Crayères, maison Pommery, et Virginie Léontine Marie Grandval, des Grandval-Pellieux, sœur du chimiste Louis Alexandre, rue Féry, 14. Sont notamment témoins à l’état civil : le concierge de l’immeuble Pommery, rue Vauthier-le-Noir, Benjamin Fleury, et le populaire chef de caves Victor Lambert.

L’avocat Claude Augustin Palle, qui fera parler de lui plus tard, a 36 ans, et habite rue de Vesle. Madame a noms Fanny Amélie Cécile Noblet, a 25 ans et vient de Signy-l’Abbaye.

Henri Guerlet, 25 ans, lieutenant au 3e hussards, à Lyon, fils de feu Victor, fabricant, décédé en 1860, et de Louise Émélie Auger († 1862), domicilié chez sa tante Guerlet de la rue du Bourg-Saint-Denis, et Louise Élise Dauphinot, 20 ans, des Simon Dauphinot-Legrand, rue du Cloître, 15, nièce d’Adolphe, sœur de Georges.

Louis Grandremy, 28 ans, employé dans les laines, rue Saint-Symphorien, 26, fils de feu Grandremy-Gaillot, et Marie Adèle Léa Parruitte, de Saint-Erme, caissière chez le mercier Gamahut, rue Trudaine, 3. Témoins : Martin Xavier Grandremy, ancien fabricant, rue des Murs, 15 ; Félix Bouron, des tissus, rue du Barbâtre, 24, et l’ébéniste Chalamel, rue de la Justice.

Émile Dubois, le peintre en bâtiments de la rue Saint-Julien, 22 ans, fils de Dubois-Humain, et Virginie Houppé, 18 ans, fille de Houppé-Lefèvre, cordonnier, place Saint-Timothée. Parmi les invités, le cousin Louis Sureau, trieur de laines à l’usine Lelarge et le grand-père Alexis Lefèvre, de la rue des Martyrs. On ne sort pas du 3ème canton, où ces familles rémoises ont fait de toute éternité élection de sépulture.

Le notaire Mandron épouse une enfant des Batignolles, Louise Camus.

Notre ami, si modeste mais si méritant, dont la vie a été consacrée, ce dernier demi-siècle, à la création et aux succès de l’Harmonie du 3ème canton, Georges Jantzy, en ces temps-là simple tisseur en peigné à l’usine du Mont-Dieu, et depuis scribe aux Contributions directes, à la Mairie, puis retraité communal, épouse Joséphine Augustine Naegelen, 19 ans, née à Reims de Naegelen-Bentz, rue du Champ-de-Mars, 52. Jantzy, qui a 28 ans, est originaire de Sainte-Marie-aux-Mines, près Colmar, et habite rue du Barbâtre, 76. Son frère Charles, du Barbâtre, 55, était contremaître de tissage au Mont-Dieu, sous la direction de Blanpain, et la haute autorité du père Cochinard, soumise à celle des patrons, Benoist-Fréminet et ses fils, Albert et Paul Benoist.

Une figure de passage, mais qui devait faire souche à Reims, celle de Marcellin Gazeau, professeur de rhétorique au Collège d’Épernay, au Lycée de Reims ensuite, et originaire d’Asprières (Aveyron) ; il épouse Eugénie Godart, dont les parents habitent au Moulin-d’Huon, écart de Dieu-Lumière.

Un beau militaire, taille et allure imposantes, assez replet et rouge de visage, les traits communs mais réjouis sous une chevelure qui friserait, si l’ordonnance ne s’y opposait, Charles Alexandre Bléger, 28 ans, lieutenant au 132e de ligne, et demeurant en meublé, au rez-de-chaussée sur voie publique de la vétuste maison, à plusieurs corps de bâtiments, rue Chanzy, 70, où Victor Rademacher exerçait sa profession de corroyeur. Au premier étage, une rentrayeuse du temps passé, la grosse et mûre Pauline, plus souvent à la fenêtre qu’à l’écran.

La bicoque n’avait plus longtemps à attendre la pioche des démolisseurs pour qu’on élevât, sur son emplacement assaini, le superbe hôtel du docteur Arthur Decès et d’Anne Lochet.

Bléger entre dans une famille de lainiers originaire de Sommepy, les frères Collin : Collin-Millet, édificateur de la Folie-Collin, à Cernay, et Julien, – en épousant Marie Blanche, fille de ce dernier, rue de l’Avant-Garde, 2.

Bléger était le benjamin de ces deux artistes musiciens : Michel Bléger, compositeur renommé d’airs de danses, qui enrichit de façon souveraine le répertoire de l’éditeur Margueritat, et habitait à Bourg-de-Péage (Isère) ; Adolphe Bléger, chef de musique au 109e de ligne à Chaumont, – tous trois étant fils d’un Bléger de Saint-Brieuc, décédé en 1853.

La famille de l’épousée délègue à la cérémonie Hubert Collin-Millet, l’oncle de la rue de l’Écu, et Henri Martin, de la ligne maternelle, menuisier à la Croix-aux-Bois.

Tout l’état-major du 132e est là, rutilant de croix et décorations, jetant sa note gaie dans le sombre défilé des fracs et des gibus, – ces derniers encore à la mode.

Le curé de Saint-André, ce bon abbé Delahaye, multiplie les bénédictions pendant que Léon Belleville s’exténue à éperonner l’orgue et que le suisse en mollets blancs s’évertue à refouler le flot de commères accourues à l’heure de la soupe pour voir défiler le cortège.

Certain cercle de courtiers en laines prolongera les échos de la cérémonie en fêtant le beau-père et son gendre par une semaine bachique où les huîtres de Barbelet furent à l’honneur, sous des rivières de tisane.

Il y avait là tous les marchands de chicorée de la place : Strohl, Cramphaut, Hédin, Clausse, Colmart, J. Thomas et F. Pilton, Meurant, Dessailly, le grand Dupont, qui, à quelques jours de là, allait se remarier avec une boulangère de la rue Neuve ; le vieux Muno, que ses collègues accueillaient amicalement et généreusement, en dépit de sa garde-robe mal soignée, et quelques autres fervents de la chopine et de la gaule.

Une union moins bruyante mais qui n’en remuait pas moins des souvenirs d’un âge héroïque fut celle d’un trieur de laines du nom de Pierre Lucien Gérard, âgé de 44 ans et demeurant rue Savoye, 8, fils de Charles Victor Gérard, décédé à Elbeuf en 1867, et Caroline Marie Considérant, nièce de Victor Considérant, phalanstérien et philosophe quarante-huitard, âgée de 33 ans et blanchisseuse de gros et fin à Paris, non loin du Palais-Bourbon, dont elle eut la clientèle, rue de Bourgogne, 36. La mariée était fille d’Augustin Considérant-Delamarre, ex-relieur et combattant des barricades en 1851, pensionné de décembre recueilli à l’Hospice des Incurables, à Ivry. Le marié était frère de Jules Gérard, dit le Borgne, ou Rintintin, trieur également, dont les récits ou affirmations se terminaient régulièrement par cette conclusion qui valait un « point à la ligne « : Si j’te l’dis, c’est parce que je l’sais ! Jules Gérard qui n’avait rien de commun avec le tueur de lions, décéda en exil, à Paris, pendant la guerre, à l’âge respectable sinon respecté de 82 ans.

La génération de 36 était faite de chaux et sable : le temps seul, devait en venir à bout. S’il en reste, qu’ils se montrent et n’aient pas peur !

Remariage de Émile Albeau, le constructeur de casernes, de forts et d’écoles, veuf de Jeanne Flavy Héry, avec Pauline Olympe Lamoitié, modiste en la rue des Tapissiers. Albeau-Darcq, le père, était décédé en 1873.

Le monde des cabots lyriques est en rumeur et en fête : l’administrateur-gérant de notre charmante salle du Casino rémois, Alexandre de Laforgue, prend chaussure à son pied parmi le menu peuple féminin des étoiles de café-concert. Marie Naudin, native d’Auxerre, a ses 24 ans bien sonnés. Lui, il est Marseillais bon teint, et les camarades de la troupe seront de la noce, notamment Émile Auffray, logé rue du Clou-dans-le-Fer, 6, meublé spécial pour le monde des théâtres, et Georges Ogereau. Abel Bordéria, le photographe à la mode d’alors, place d’Erlon, nº 60, qui expose souvent des portraits d’artistes, avec l’ex-huissier Judas, habitant au n° 1 de la vieille et sordide rue Saint-Crépin, empuantie des relents du marché de poisson et aux fromages, si proche ! est de la cérémonie.

La famille sans-culottide des Beugé s’embourgeoise. Louis Beugé et son épouse Virginie Godart, rue Neuve, 93, marient leur fille Julie Adélaïde, âgée de 23 ans, au gros garçon, court de jambes mais alerte comme un poisson dans une baignoire d’eau fraîche, Paul Georges Huré, employé à la banque volante Tuconi, rue de Vesle, 54. Situation sociale bien précaire que le subtil Huré remplacera au plus tôt par l’emploi autrement sûr et moins sédentaire de voyageur en ornements d’église.

Huré était né à Paris, et habitait à Reims, rue de la Tannerie, future rue Irénée-Lelièvre. Son père Huré-Bordas était percepteur à Bourgogne. On le retrouvait, après guerre, ce gendre du Louis Beugé dont Gustave Laurent a préfacé la réédition du Pilier tremblant de Saint-Nicaise, dans LE PROGRÈS DE L’EST, en 1913, – retiré des affaires au n° 25 de la rue des Volontaires, à Paris (mort depuis peu).

L’aîné des enfants Dazy-Caffé, dont le père est employé au Bureau central de Mesurage des tissus, dirigé rue Sainte-Marguerite par Cabanis père, – Albert, né à Reims en 1849, – comme G. de Bohan, Henri Dallier, Thiérart-Lartilleux, Albert Paroissien, Félix Pilton, – épouse une demoiselle Dombry-Lamort, apparentée aux Leclerc de la laine.

Mlle Dombry était née à Reims le 11 juillet 1850, de Martin Dombry, apprêteur rue Fléchambault, 51, et de Thérèse Lamort. Ce Dombry, démocrate pur sang, avait été impliqué dans les troubles de 1848 et sa vie familiale en fut quelque peu troublée, les Leclerc et les Lamort étant d’idées éminemment conservatrices, d’un ordre social ou la paix des rues fait partie du Credo politique.

Mme veuve Dombry habite en 1879 chez un neveu, Alexandre Leclerc, négociant en laines, rue Saint-André, 5.

Un oncle paternel de Albert Dazy, Jean-Baptiste Edme Caffé, âgé de 60 ans, est imprimeur à Troyes : grand et solide gaillard d’une compétence et d’une probité professionnelles réputées dans la capitale champenoise.

En cette année 1879, le jeune frère du marié, Paul Dazy, sera le 1er octobre, promu par décision du Chapitre métropolitain, à l’emploi d’organiste au chœur de N.-D. de Reims.

Cet artiste précoce, nourri dans le Temple, devait occuper ce poste artistique si bien dans ses cordes et ses goûts, pendant neuf années consécutives, à la suite desquelles, sur les avis du compositeur Gounod, le cardinal Langénieux le désignait pour être maître de chapelle de la Cathédrale. Il conserva ces fonctions jusqu’au 1er avril 1906.

Albert Dazy, en 1879, est comptable à la maison J. Poullot, sous les ordres de Anatole Chardonnet, premier vendeur aux tissus. Ses après-midi dominicaux sont remplis par son service administratif à la Caisse d’Épargne (décédé à Reims en août 1928).

Citons encore quelques noms, connus en certains milieux professionnels : Félicien Gouvernal, dit Félix, de la maison de laines Ernest Clignet, fils de Clovis Gouvernal-Henrot, lequel habitait rue de Cernay, 50, une maison qui fut bâtie par lui, et la première, dans ce quartier destiné à prendre une réelle extension. La mariée est Marie Adèle Couvart, d’Isles-sur-Suippe, fille de Couvart-Lemaître, marchand de bonneterie, rue de Berru, 12.

L’un des futurs grands maîtres de l’Alimentation de notre ville affamée, Victor Georget, représentant de commerce à Paris, âgé de 27 ans, et Constance Bécret, d’Asfeld.

Charles Hannikenne, 25 ans, chez sa mère, Mme Lambert, Vve Hannikenne, débitante, rue du Barbâtre, 25, et Élise Petit, rue du Jard, nº 56.

Élève à l’école du Jard, Hannikenne donna un jour une sérénade aux habitants du quartier et à ses camarades de classe, ayant parié, et tenant son pari, de se noyer dans le bassin du Port.

Kiss ! kiss ! lui avait-on fait, entre gosses inconscients et cruels. Ah ! Kiss ! kiss ! vous allez bien voir, si c’est pour de rire ! Et en effet, sous l’œil gouailleur d’un peloton de sales gamins, il entre dans l’eau jusqu’au genou. La trouve-t-il trop froide ? assurément, la peur le prend, il pleurniche, mais les kiss-kiss et les rires redoublent, l’éperonnent. Allons ! il faut payer ! Il en a maintenant jusqu’à mi-cuisses ! Et l’on rigole, il faut voir ! Ah ! ce que ta mère va t’en mettre ! Rires, on se tape la cuisse, on se tord. Hannikenne sauvera-t-il l’honneur ?

On ne sait ce qui serait advenu de cette farce menaçant de tourner en drame, sans l’arrivée fortuite d’un flâneur, el senor Herbé, jardinier et arbitre au parterre du théâtre, lequel met les gosses en chasse, et repêche le capon de l’immense tasse où il avait parié de s’embourber.

Et voilà à quoi certaines après-midi du jeudi étaient occupées par les abécédaires du Jard aux temps passés !

Saluons ce nom dont Reims se glorifie : Melchior Guy de Polignac, 26 ans, né au château de Kerbastic, à Guidel, près Lorient, sous-lieutenant au 5e hussards à Milianah, et fils de Étienne Georges, comte de Polignac et de Caroline Joséphine Le Normand de Morando.

Cette kyrielle de longs substantifs s’en adjoint des moindres : Louise Pommery, la fiancée, la blonde, blanche et fine fiancée, un sèvres bien français, supérieur aux saxes germaniques, 22 ans, fille de Louis Alexandre Pommery, décédé le 15 février 1858, et de la vénérée philanthrope Jeanne Alexandrine Mélin, rue Vauthier-le-Noir, 7.

Les assistent à l’Hôtel de Ville et à la Cathédrale : Louis Pommery, frère de la mariée ; le fabricant Jules Hourlier ; d’autres notabilités, enrichies de titres nobiliaires et à panonceaux héraldiques : Antoine Agénor de Gramont, duc de Guiche, sous-lieutenant aux hussards de Melun, et ce quinquagénaire Charles Marie de Faucigny, prince de Lucinge.

Geoffroy Hersant de La Villemarqué, né à Paris des La Villemarqué-Tarbé des Sablons et ingénieur à Quimperlé. Ce rejeton de vieille noblesse s’allie au tiers-état en la personne de Élise Marie Givelet, fille de l’industriel rémois Edmond Givelet, patriarche considérable et considéré. L’oncle Tarbé des Sablons, ex-préfet de l’Yonne ; le capitaine du génie Caruel, rue du Barbâtre, 33, à Reims, beau-frère de la mariée, et un capitaine au 7e dragons de Lunéville, Edmond de La Baulinière, contribuent à l’éclat de cette union par leur fortune, leur éducation, leur costume et la curiosité des foules.

Enfin, nous associerons à nouveau la Fabrique rémoise à toutes ces cérémonies par le remariage de Charles Roland, fils de Roland-Reimbeau, avec sa belle-sœur Marie Céline Poulain , fille de César.

1880

L’année nouvelle verra se conclure, avec ou sans contrat, par devant MM. les Tabellions engoncés dans leur dignité ou simplement devant le buffet, maintes et tendres unions entre Rémois et Rémoises d’origine autochtone ou, par alluvions, ayant acquis droit de cité, ou pouvoir de l’acquérir.

En tête de ces cortèges familiaux, pompeux et dépourvus du moindre faste, mais ayant droit à l’égale distribution de souhaits et sourires engageants, participants ou rassurants, plaçons, au hasard de nos souvenirs, ces hardis champions du conjungo : Michel Bouchez, d’Heutrégiville, fabricant de tissus au faubourg Cérès, et Pauline Braine, fille de l’ex-boulanger Braine-Thomas et nièce de l’imprimeur Matot.

Vont suivre : cet as du tir au fusil Lebel, œil d’aigle, sang-froid de serpent, calme d’eau croupissante, Ernest Foisy, ex-sergent d’infanterie de marine à Cherbourg, charcutier de profession, originaire de Villers-Allerand où son père était marchand de chevaux, et Maria Dupont, fille unique d’un ficeleur émérite d’andouilles et de boudins en cette séculaire officine du Jard, vis-à-vis l’école des Frères, et à l’angle de la rue Brûlée, où un paterne parrain réservait à son filleul les extrémités de la queue et des oreilles de ses cochons, retour de l’abattoir, après la flambée de leurs soies.

Ce commis du maréchal-ferrant Halewaters, Alcide Lefèvre, natif d’Hauviné (Ardennes), fils de Casimir, décédé à Mourmelon-le-Grand, et Adolphine Berry, fille de feu Élie, dont la veuve, Augustine Papegaye, continuait le commerce de toiles d’emballage, qu’elle céda par la suite à son gendre, établi rue de Belfort.

Jean Gentgès, notre aimable Jean du Café de Paris, né à Merscheid (Luxembourg), garçon de café à la Brasserie de Strasbourg, et Maria Gavet, des Gavet-Moreau, bouchers à Witry-lès-Reims.

Désiré Douillet, de La Neuville-en-Tourne-à-Fuy, comptable, rue de Monsieur (aujourd’hui Courmeaux), chez les Benoist frères des Capucins, et Félicité Navelot, de Bétheny.

Charles Janin, de Bar-le-Duc, des Janin-Bannerot, marchands de bois rue Folle-Peine, et Marie Barroteaux, rue du Bourg-Saint-Denis, 38, dont le père, Barroteaux-Demain, fut charcutier, place du Parvis, en ce vétuste immeuble à l’angle des Fuseliers, dont l’un des versants en craie conserva jusqu’à nos jours l’obus russe qui s’y était incrusté en 1814.

Louis Routhier, architecte, et Marie-Thérèse Perseval, fille de l’huissier Perseval-Beuvart : c’est lui qui construisit le Kursaal de la rue de Vesle, exploité par Classen la jambe de bois, barnum musical, lequel avait fait de la Brasserie Poterlet un café-concert où des générations de Rémois se divertirent aux farces des clodoches de leur époque.

L’un des émules et successeur de ce même Classen, et le premier en date des gérants du Palais-Rémois, Auguste Caussandier, plombier de son état et fils de Caussandier-Bourguignon, épouse Célina Monpert, couturière réputée, rue Nanteuil, 8, une vraie femme de tête.

Le futur créateur des Madeleines-Rousseaux, un garçon boulanger, issu des Rousseaux-Philippot, de Cuiry-lès-Chaudardes, et Marie Laplanche, de Neufchâtel-sur-Aisne, fille de Laplanche-Caurette, menuisier, rue de la Grue et sœur de deux Rémois des plus connus, Gustave et Georges.

John Crossley, insulaire britannique du Yorkshire, employé au peignage Isaac Holden, et Julia Brown, de Marxton, comté d’Oxford-Buckingham, fille d’un peintre-décorateur, rue Houzeau-Muiron, 14.

La Cité anglaise, qui étale ses cottages au pied de la cheminée d’usine dite de « la Potasse «, où fonctionna de 1914 à 1918 un observatoire à l’usage des défenseurs de Reims, est en fête, car les cérémonies de ce mariage se couronnent d’un festin pantagruélique en la salle de lecture voisine, ordonnancé par Thomas Crossley et ses contremaîtres : Samuel Lucas, Joseph Hollings et Harry Bolton. Hurrah for prince of Wales and the great Victoria, aux lueurs bleuâtres du rhum enflammé de l’immense polun-pudding nécheunol.

Et si le Consistoire est de service, la Synagogue aura son tour proche et ses champions conjugaux en Salomon Hildenfinger, de Grüssenheim (Alsace), confectionneur rue de l’Étape, 13, et Adèle Bloch, de Grandvilliers-lès-Belfort. Près des époux, devant l’écharpe du maire Diancourt comme sous le voile du rabbin Séligmann, s’alignent, le front serein au-dessus de l’emblème virtuel, charnu et indéfectible de la race : Salomon Bloch, professeur à l’École normale supérieure ; Epmann-Hildenfinger, de la Grosse-Botte, rue du Cadran-Saint-Pierre ; Gédéon Lazard, articles de voyage, rue Colbert, et Jacques Geismar, parapluies, rue des Tapissiers.

Voici l’ami Hupin (Émile Benoît), Sedanais de 1847, fils de Hupin-Gosset, de Pont-Maugis, et Marie Félicie, 23 ans, née à Reims d’Abel Kalas, retordeur, et de Marthe Félicité Van Damme, rue des Murs, 5. Témoins : ces jumeaux du tissu, Arthur Pierson et Désiré Génin, du côté Hupin et du côté Kalas : le grand-oncle Nicolas Bahuet, vigneron à Sillery.

Hupin reprendra le fonds de fumisterie-lampisterie à l’enseigne : À la Fontaine Godinot, rue de l’Université, exploité jusque-là par l’aquarelliste Eugène Auger.

Le haut et noble et imposant huissier à la Chambre de commerce, Me Noblesse, accorde sa nièce Marie-Louise, native de Rorhbach, près Sarreguemines, à Jules Émile Baudrillart : apparaissent aux épousailles deux voisins de Noblesse, au 20, rue du Bourg-Saint-Denis, les frères Ronsin, Émile l’architecte, et Victor, déjà âgé de 75 ans et qui atteindra la centaine, ex-entrepreneur de chemins vicinaux.

Gustave Dupont, de Champfleury, comptable, fils de Adolphe, paveur, rue de la Fleur-de-Lys, et Julie Faupin, née occasionnellement à Saint-Denis de Faupin-Merlin, trieur de laines, rue David, 18 ; son oncle Louis Oscar Dupont, dirige le tissage Lelarge à Boult-sur-Suippe.

Tout discrètement s’annonce à la barre devant l’adjoint Albert Jolly, un petit, tout petit voyageur en tissus de feutre marque Haas, Alfred Pépin, Normand d’origine, dont une tante a épousé le pharmacien Croisier qui vient de céder son officine de la rue Neuve, 5, à Bonhomme, de Liry, pour aller exercer ses talents de médicastre rue d’Alsace-Lorraine, 57, non loin du buraliste Camille Lenoir, aux destins mystérieux alors et si prospères depuis ; sa modeste fiancée, Marie Lucie Pierlot, est de Saint-Étienne-à-Arnes.

Le coutelier Charles Lescot, enfant de la rue de Contrai, et l’eugénique et callypige Julie Léonard, une des premières sportwomen rémoises de la bicyclette, à une époque où il ne fallait pas manquer d’un certain culot pour braver les répugnances de l’opinion à l’égard de cette participation du sexe féminin à ces sortes d’exercices. Sa sœur Marie épouse, elle, un professeur de gymnastique, Demaire, rue Henri-IV, 22.

Et voici encore d’autres marieux du comogoun : Chaussart, de Tagnon, et Isabelle Hézette, des boulangers Hézette-Richon, rue Tronsson-Ducoudray, 24 ; on les retrouvera mitronnant rue des Poissonniers.

Charles Ternois, de Saint-Pol (Pas-de-Calais), et Marie Gobe, tisseuse dans le Rousselet.

Mon Dieu ! qu’ils sont menus, menus ! mais vigoureux quand même, enclins à faire souche de bons citadins, comme les autres ! Ces autres, eux, représentent ce que la bourgeoisie industrielle et commerçante offre de mieux en fait de rejetons appelés à des destinées pharamineuses. Les noms propres ayant leur éloquence, laissons-les parler :

Louis Paul Henriot, ingénieur des mines, issu des Henriot-Lucet, et Thérèse, fille de l’ancien notaire Marguet-Lucas. À leurs côtés, Edmond Lucas, ex-fabricant, président du Tribunal de commerce, et l’oncle Edmond Forest, des champagnes. Que de bouchons de liège frémissent à l’avance, prêts à bombarder lustres et plafonds !

Robert Anatole Paroissien, de la laine, né à Reims, le 13 mars 1848, de Florimond Guillaume Paroissien-Hachez : il épouse à Metz, Claire, fille de Mathias Saur-Durutte et nièce du compositeur de musique Camille Durutte, dont les œuvres n’éclipsèrent point celles de Berlioz, voire celles de Paul Burani.

De la laine également, ce grand garçon au teint mat et à la barbe noire, quelque peu délicat de tempérament mais tout entrain et initiative : Charles Blanchin, fils de Blanchin-Niclot, lequel, en épousant Eugénie Lucie Brunette, fille de Narcisse, architecte de la Ville, devient le beau-frère de Charles Brunette, son associé par la suite. Cueillons cette grappe de notabilités de la mousse et du peigné : Paul Stéphane Blanchin, un cousin septuagénaire, rue Caqué, 6 ; Jean-Baptiste Thuillier, patron de l’impétrant, place Godinot et Adolphe Jacquemart.

Émile Demorgny, 33 ans, de Wignehies (Nord), marchand de laines rue de Bétheny, 6, et Lydie Marguerite Gilbert, née à Malicorne (Sarthe), 24 ans, fille d’un receveur d’enregistrement à Reims. L’aïeul de l’épouse est J. Gérard Lambert, ex-fabricant, place d’Erlon, 87 ; Émile Gosset, pharmacien, est oncle par alliance ; le notaire Mandron ; Augustin Demorgny, 30 ans, clerc de notaire à Avesnes, frère de l’époux.

Les tissus nous présentent Adolphe Warnier, 29 ans, rue Andrieux, 16, fils de Warnier-David, et Berthe Alice Guéry, 19 ans, fille de Pierre Guéry-Michel, courtier en vins de Champagne, rue de Charleville, 5, et sœur du peintre régional Armand Guéry, 27 ans.

Défilent à la parade devant M. le Maire : l’oncle Paul David, 41 ans, châtelain en ce bourgeois hôtel, si vivant et si animé en tous temps, de la place d’Erlon, 93, – où trônent actuellement et s’agitent avec fracas les soucoupes du Continental, – et l’autre oncle maternel de l’époux et beau-frère de Camille Michel, mère de la mariée, Eugène Jamot, 57 ans, des tissus, de la rue des Anglais ; le bel Armand, amant de la nature rémoise et de cette rivière d’Aisne qu’on accuse injustement de n’être peuplée que de hotus, pinceau agile et finement monté, pétrisseur de vert et photographe attitré du mouton champenois. – Guéry est au zénith de ses 27 ans, qu’auréolent déjà les rayons d’une renommée justement acquise.

Enfin, parmi ces aimables festoyeurs, le marchand de vins en gros Charles Émile Spéry, 45 ans, indigène de cette rue Petit-Roland, illégalement débaptisée depuis.

La banque est représentée par Marie Camuset, fille d’Isidore Camuset-Mennesson, gérant de la Caisse Commerciale, rue de Talleyrand, 12, et nièce de Henri Launois, courtier en vins, rue Linguet, lequel porte allègrement les 60 ans de son visage enflammé dominant un plastron éblouissant de blancheur : la jeune fille épouse Ernest Carlet, associé d’Émile Demorgny, et fils des Carlet-Assy, de Paris.

Le défilé continue, entre les haies tumultueuses d’une théorie de curieuses sans cesse renouvelée et qui ne ménage aux victimes de l’holocauste ni ses brocards ni ses compliments, sans la moindre discrétion et dans un langage qui n’a rien d’académique, mais n’en reste pas moins savoureux aux oreilles de l’observateur bénévole.

Trottins et mitrons, commères en rupture de casserole et qui vont laisser brûler le rôti, coursiers flâneurs et télégraphistes jamais pressés, badauds oisifs et frotteurs de pavé en quête des moindres incidents susceptibles d’alimenter la chaudière affamée de leur curiosité, écoutez leur rumeur jacassante, et surtout méfiez-vous des escarbilles qui vont sauter de ce foyer incandescent, où les flammes de l’envie, de la naïveté, de la sottise, parfois ce bon sens qui traîne les rues, lèchent, consument, achèvent de dévorer le mâchefer dont les cerveaux de ce populaire est généralement encrassé !

Voyez-vous, madame, ce grand gaillard en redingote, aux favoris grisonnants, avec ses yeux rieurs qui ont l’air de se ficher du monde ! c’est Payer le commissaire-priseur et c’est son fils qui épouse mam’zelle Leconte, de la rue Saint-Pierre-les-Dames. Est-elle assez jolie sous son voile blanc ?

Oh ! celui-là, c’est le comique Squelin, le chanteur de gaudrioles, qui reprend la veuve Guerlet. Ah ! Il n’a pas peur vraiment, malgré ses 47 ans !

Tiens ! la belle Blanche Rochet... vous savez ! son père le charcutier de la Haubette. Son futur, on dit qu’il est comme qui dirait un homme d’affaires, du nom de Hanol. S’il ne fait pas celles des autres, il fera toujours bien les siennes, espérons-le ! Il faut croire que la petite en a assez de servir sur les balances de la crépinette et du petit-salé...

Oh ! regardez donc ce gros rougeaud-là, avec ses yeux à fleur de tête, ses moustaches de gendarme : il a l’air bigrement fier de sa fiancée. C’est réel qu’elle a une vraie figure de madone ! Les connaissez-vous ? – Oui ! dame, c’est un trieur de laines... un bon métier, allez ! On dit que ces gens-là se font des 20 francs par jour en un rien de temps. – Comment vous l’appelez ? – Désiré Dupont... le cadet du père Dupont, au 79 du Bourg-Saint-Denis. Sa femme, Marie, elle est une des filles du tôlier-fumiste Thibaut-Lanser.

Ces deux gros là... c’est rien rigolo ! il va leur en falloir une largeur de lit ! y ressemblent aux Puce de la rue de Contrai... Et leurs noms ! pas possible on les a choisis !! Lui s’appelle Vilain, et elle, la grosse blonde, Fléau ! Paraît qu’y vont reprendre le bureau de tabac de la Fleur-de-Lys : y z’auront du monde...

Ah ! Léon Tourneux, piston au Bal-Français avec Alexandre Boulogne, des Bains ! Il emballe au peigné, chez les Anglais, mais on assure qu’y va avoir de l’avancement à cause qu’y se marie... Elle est vraiment gironde, sa Céline, la couturière de la rue Dérodé...

Drôle tout de même, cette année ! On n’en voit point de laids ni de laides : c’est-y qu’on les refuserait présentement à l’état civil ? En v’la encore une, qu’est-ce qui ne la connaît pas dans le Barbâtre : la belle Anna, la sœur du ferronnier Taillia. Elle est rentrayeuse chez Lelarge. Chic brune ! hein ? Lui, qu’est si blond, qu’a l’air si timide, Dieu sait ! c’est Jacques Gander, tailleur d’habits sur la place d’Erlon. S’il travaille dans la « transformation «, elle pourra faire les rentraites.

Le gros Minard leur vendra des meubles, et, comme il va épouser Mam’zelle Jactat de Puisieulx, il reprendra sûrement l’atelier et le magasin de son père, rue Neuve...

Ah ! mon Dieu ! v’là midi qui sonne à l’horloge de l’Hôtel de Ville... Qu’est-ce qu’on va prendre ! Le père et les gosses, tout ça qui va râler ! – Bah ! On leur rissolera une omelette !

Et comme un vol de mouettes sur les rivages méditerranéens, la rangée de commères si diseuses se disloque ; tout ce monde s’égaille, disparaît par les rues avoisinantes, en courant, riant, amusé, enchanté, pourvu pour un bon bout de temps de matière à papotages et à médisances sans fin ou à racontars puérils que balaiera le souffle de la vie courante et dont les piqûres ou le venin n’empoisonneront personne !

Pourtant combien encore il y aurait à discourir ! car le maire n’a pas remisé son écharpe ! Sont appelés à comparaître ces derniers chevaliers de l’hyménée, avant que l’année 1880 passe la consigne à sa fille. Groupons, groupons !

À Saint-Eustache des Halles, le déjà célèbre Henri Dallier, né à Reims en 1849, épouse Amélie Biart fille de cet écrivain plein d’imagination dont les récits exotiques, sur le mode des Verne, des Cooper, des Mayne-Reid et des Wells, ont charmé tant de jeunes lecteurs de cette génération.

Édouard Walbaum le rouquin, fabricant au Petit-Saint-Pierre, et une demoiselle Goëppe, de Versailles.

Hourlier, de Saint-Germainmont, et la fille de Dunelle le confiseur.

Jean Zanerlé, magasinier chez Isaac Holden, et Anna Rach, Alsacienne comme il est Alsacien.

Henri Maucurier, agent d’assurances rue du Jard, 106, neveu de feu le chanoine Quéant, et Mlle de Guerne, dont le père est boucher à Beine.

Arthur Henri Pierlot, 26 ans, boulanger à Dieu-Lumière, fils de Pierlot-Jobart († 1874), marchand de pâtisseries à Bazancourt, successeur du boulanger Compagne, rue Dieu-Lumière, fabricant de darioles à deux sous qui lui en coûtent trois, pour faire échec à Colmart et Jacquemin, du temps de foire à Saint-Remi, et la soubrette Eugénie Béguin, fille de Béguin-Thibault, pâtissier, rue du Faubourg-Cérès, 67.

Paul Hazart, d’Épernay, et Louise Aline, fille du peintre Devraine-Godart, rue du Bourg-Saint-Denis, 84.

Celui qui sera le père Gallas, parrain de la cité d’après-guerre dite la Maison-Blanche, Nicolas François, verrier au chemin de la Bonne-Femme, recrute femme en Ardennes, une Varlot, de Condé-lès-Vouziers.

Certain clarinettiste aux Pompiers, Edmond Mathieu, aimable Adonis dans les 24 ans, ex-indigène de la rue de Contrai transplanté rue des Moulins, 5, et peintre de son métier, veut aussi une Ardennaise, Mlle Laute, qu’il enlève du hameau de Charonné près Cléron.

Le fabricant Charles Roland, veuf, épouse sa belle-sœur, Lucie Julie Poulain, seconde fille de César.

Adressons nos vœux de bonheur à Désiré Delouvin, chef de caves à Damery, et Mlle Prudhomme, rue Linguet, 7.

Le maître de chapelle à Saint-Jacques, court, rosé et joufflu, jovial et bon enfant, Jules Edmond Brié qui, à 40 ans, épouse l’éminente Adélaïde Cécile Niverd, des Niverd d’Attigny, famille de musiciens.

Le vendeur aux tissus de la maison Aug. Walbaum & Ch. Desmarest, rue des Marmouzets, Désiré Delacour, âgé de 25 ans et habitant rue Buirette, 31, prend femme à Épernay : Blanche Delaoutre.

Émile Allart, grand et fort gaillard à lunettes, comptable à la maison Thuillier, épouse une Tarte, féconde génératrice d’une lignée nombreuse d’honnêtes gens, et, de rue de Contrai, 38, va habiter rue Neuve, 54, en ce vaste immeuble à porte cochère qui devint la propriété de Guerbette-Lamiraux, épicier aux Loges-Coquault, où il avait repris le fonds de Moreau-Bertèche.

Armand Reimbeau, employé au Val-des-Bois, chez le Bon Père, Jacques Harmel, alors âgé de 84 ans. Il était le fils de Louis Auguste Reimbeau-Harmel, décédé à Mézières 1865. Marie-Louise, son épouse, est fille du Suippat Oury-Dufayt, et nièce de Jean-Baptiste Oury, filateur à Suippes.

Auguste Arthur Labassée, 26 ans, employé d’apprêts chez les Neuville, fils du menuisier Labassée-Jacotin, rue du Ruisselet, 46, et Jeanne Aline Boulogne, de Villers-aux-Nœuds, nièce du teinturier Étienne Alfred Boulogne-Barbier, rue du Jard, 44. Sont témoins, ces professionnels du bleu-marengo ; François-Joseph Paille, Ernest Houpin et Gilbert Alphonse de Bistière de Boron-Desjoint de Tilly.

Jules Houlon, fils de Houlon-Pasquier, quincaillier et marchand de fers, rue des Tapissiers et ancien adjoint au maire, et Caroline Bourgeois, née en 1862 à Roseau (Dominique), fille d’Alexandre Bourgeois-Gérard, rue des Chapelains, 2. Sont témoins : Félix Houlon, rue Bertin ; Constant Bourgeois, rentier, rue Jeanne-d’Arc, 21 ; Victor Gérard, marchand de fers à Épernay et Louis Pasquier, ex-mercier à Soissons.

Georges Guerlin, 25 ans, né à Amiens et habitant chez son père, receveur municipal à Tours, et Jeanne Hélène Valentine Martin, née à Montbrehain (Aisne) des époux Martin-Vatin, libraires-papetiers rue de Tambour.

Jean-Marie Lebâtard, 35 ans, de Saffré (Loire-Inférieure), cocher à la Maison Werlé, rue du Marc, 18, et Joséphine, couturière, rue de Mars, 49, fille de Félix Saint-Denis-Roffidal, décédé en 1859.

Arthur Roederer, fils de Théodule, cabaretier, place Kléber, à Strasbourg, et Mathilde Kürz, née à Ludes, en 1853, des époux Kürz-Hahn.

Venu du pays de François-Joseph II qu’on appela l’Increvable, Robert Bücholz, courtier en laines rue Clovis, 5, et Camille Agathe Freyden, de Luxembourg. Représentant à Reims de la firme Hecht & Lefort, de Sedan, puis associé dans les champagnes avec Albert Dazy, Robert Bücholz, de retour à Reims après-guerre, a deux fils, dont l’un est docteur-médecin, l’autre, intéressé dans une firme rémoise du champagne.

Jules Charles, de Niederbronn, 24 ans, contrôleur des Contributions directes à Vitry-le-François, fils de J. F. Charles-Thomas, directeur des Contributions directes à Château-Thierry, – et Mathilde Clignet, fille de Ernest Clignet-Gonel, rue des Augustins, 6. Tout ces fonctionnaires grassement prébendés s’épaulent, et Charles sera bientôt receveur municipal à Reims. Cumul et privilège bourgeois !

Ernest Minard, 23 ans, menuisier-ébéniste rue Neuve, 27, et Marie-Antoinette Jactat, de La Pompelle.

Léon Lantein, filateur, rue du Petit-Arsenal, 4, et Marthe Dély, de Nanteuil-le-Haudoin (Oise).

Paul Faupin, de la maison de laines Adolphe Prévost, rue Gerbert, 4, et Louise Palloteau .

Paul Cléophas Saussier, 22 ans, de Vassy (Calvados), vétérinaire, rue Coquebert, 30, fils de feu Denis Simon, commissaire de police à Reims († 1879) et Marthe Bouton, 17 ans, fille du grévier Louis Bouton-Gérard, Faubourg-de-Paris, 48. Un Jules Bouton est cultivateur à la Maison-Blanche. Témoins : l’oncle Félix Colloin, rue David, 26 ; Ernest Goubaux, pharmacien, et Alphonse Harant, 45 ans, ex-cabaretier, rue de Mars, 20.

Paul Valaster, 24 ans, né à Théding, près Sarreguemines, charpentier, rue de Champigny, fils de Nicolas Valaster-Schimmel, et Madeleine Dossissard, de Forbach, 25 ans.

Fabien Augustin Raillard, de Hourges (Marne), 28 ans, cordonnier rue Cérès, 49, et Pauline Lacroix, de Condé-lès-Autry (Ardennes), 21 ans, fille de Lacroix-Bailly, chez sa mère, rue Coquebert, 14. Cyrille Xavier Raillard est maçon à La Haubette.

Georges Lalle, de Sainte-Ménehould, 32 ans, fils de Th. Lalle-Simon, marchand de cuirs et peaux, épouse, étant notaire à Vitry-le-François, Henriette d’Anglemont de Tassigny, 22 ans, fille d’Adolphe de Tassigny-Delbeck. Émile Lalle est à Paris. Gustave Lalle, conservateur des Hypothèques à Péronne. L’oncle Alfred de Tassigny a 48 ans, rue Saint-Guillaume, 21, et Charles de Tassigny, 58 ans, est receveur des Contributions directes à Donchery (Ardennes).

Jules Pouillard, de Fourmies, 30 ans, trieur, fils de Alphonse Pouillard-Magnier, chef trieur et acheteur de laines (région Vouziers, Sainte-Ménehould, dite rivière d’Aisne), as de la Laine de France au service de la Grande Maison (firme André Grandjean & Cie, boulevard Cérès), – et L. Émélie Francotte, 21 ans, rentrayeuse, rue Fléchambault, 24, propriété de sa mère, veuve Francotte, là même où réside actuellement le chef de la dynastie, modeste serviteur du champagne et de sa ville natale. Témoins : Laurent Émile Thiérard, 38 ans, dégraisseur, chaussée des Bains-Froids, beau-frère de la mariée, et son frère Eugène Francotte, 27 ans, apprêteur, même maison. Joseph Lamort, cultivateur à Marly (Aisne) et Jules Létrilliart, 52 ans, charron, rue des Moissons, 2, ami du père Pouillard et client fidèle, comme lui, de la mère Truchon, au Point-du-Jour.

Hubert Lépargneur, de La Neuville-en-Tourne-à-Fuy (Ardennes), 26 ans, librairie religieuse, rue Saint-Étienne, et Agathe de Vertus, de Brécy (Aisne), 25 ans, fils de feu de Vertus- Lemoine († 1877). Jean de Vertus est cultivateur à Brécy.

Georges Pierre Esteva, d’Épernay, 26 ans, rue Simon, 39, fils de Pierre Thomas Esteva, bouchonnier à Palafrugelle, près Gérone (Espagne), et de défunte Agnus († Épernay, 1877), et Anne L. Élise Esteva, d’Épernay, 26 ans, rue du Barbâtre, 93, fille de Martin et de Madeleine Joséphine Mauret. Pierre Esteva, bouchonnier, 29 ans, frère et cousin. Charles Agnus, 50 ans, meunier à Condé-en-Brie.

Albert Bonhomme, de Monthois (Ardennes), 24 ans, comptable aux écritures ou trieur de laine, suivant les circonstances, rue Neuve, 129, fils du tailleur et ex-suisse à Saint-Maurice Bonhomme-Lalbaltry, et Julie Bourquin, 27 ans, couturière, fille de Bourquin-Six, menuisier rue du Cimetière-de-la-Madeleine. Un oncle Bonhomme est tailleur à Monthois. Gaspard Alvin et son fils Prosper, oncle et cousin du marié.

Jules Jaspart, de Rethel, 25 ans, trieur, rue Chabaud, 11, fils du trieur Jaspart-Billet ; et sa maîtresse Anne Florence Massin, de Souilly (Meuse), 22 ans, femme de chambre, rue Gerbert, 4. Gaillarde à qui il ne fallait pas en faire accroire, et qu’il fallut conduire devant M. le Maire ! Témoins : Théophile Colin, 29 ans, chef trieur chez Walbaum & Desmarest ; Abel Pollion, trieur, rue de Cernay, 42 ; Nicolas Jaspart, 66 ans, marchand de nouveautés à Braine, et le cousin Jules Jaspart à Soissons.

Pierre Alcide Lefèvre, de Hauviné (Ardennes), 28 ans, maréchal-ferrant ouvrier, chez Halewaeters, rue Clicquot-Blervache, Faubourg-Cérès, 19 ; et Marie Adolphine Berry, de Neuflize, 27 ans, fille du marchand de toiles et bâches, mort peu après. Alfred Victor Lefèvre, meulier à Saint-Martin d’Ablois ; Pierre Aimable Chapdoix, marchand de bestiaux à Hauviné, François Arnould, cultivateur à Acy-Romance.

D’autres encore, tant d’autres qu’on aurait plaisir et profit à évoquer parmi les souvenirs de ces temps déjà périmés. Hélas ! séparons-nous à regret de ces vivants pour rejoindre les trépassés, pénétrer avec eux dans les régions mornes et silencieuses de la Mort, et arracher aux serres de l’Oubli, ce vautour impitoyable, les morceaux pantelants de la proie qui leur fut promise de toute éternité.

Nos fronts vont s’assombrir et nos yeux se voiler !

1881

Dès l’abord, évoquons les noms et silhouettes de ces vaillants champions de la renaissance gauloise par le conjungo légal, à toutes fins utiles et agréables :

En tête, un soldat de métier, Jean Bonnetton, visage rosé, moustache et barbiche à l’impériale, de toutes les fêtes, de toutes les réunions sportives ou patriotiques, qui, à l’âge de la retraite, passa commandant au 46e Territorial, où il eut pour capitaines Saint-Aubin et Ernest Arlot. Capitaine au 132e, la 2e du 4, il habitait rue des Augustins, 7. Originaire de Chonas (Isère) et concitoyen du docteur Chevrier, il épouse, à 45 ans, Louise Grand’Barbe, 35 ans, fille de Louis, décédé à Metz en 1860, et de Marie-Anne Burtaine. Cette dernière devait s’éteindre à 90 ans chez son fils aîné Lucien, alors directeur des Coupons commerciaux, 9, rue de l’Arbalète, dans un immeuble contigu à l’Hôtel de la Cloche, où il gèrerait plus tard, avec son frère Édouard, un magasin de chaussures. À la mort de son mari, Louise devint pensionnaire à l’Asile Saint-Joseph d’Avenay, où elle vécut jusqu’à fin 1932, au voisinage de Mme veuve Minard et de Henri Matot.

Jules Buirette, 27 ans, né à Auve (Marne), fils cadet de Éloi, ex-brigadier de gendarmerie, décédé chef-piqueur des balayeurs de Reims, en 1873. L’aîné des Buirette fut curé à Aussonce. Le 3ème, Charles, d’abord encaisseur à l’usine de Tilly, rue des Moulins, s’établit ensuite marchand de charbons même rue. Le benjamin, sous-officier de cuirassiers à Versailles, devint attaché à l’État-major de la Guerre. Jules fit partie de cette lignée de courtiers en tissus qui tinrent haut et ferme le drapeau de la Fabrique de Reims. Tiré à quatre épingles, portant haut-de-forme lustré, il fréquentait, à l’heure de la manille, les lieux de rendez-vous du monde lainier, notamment les Cafés Cérès, Louis XV et de Reims. En 1914, il habitait rue Petit-Roland, 32. En 1881, il épouse Amélie, fille de Bouchez-Vasson, ex-fabricant, rue Ruinart de Brimont, 17. Ses témoins sont : J. Amigues, des Tissus, et Labey, premier directeur laïque à l’École du Jard.

Paul Louis, fils du banquier Isidore Camuset-Mennesson, et Marie Becker-Chemin.

Émile Chevanne, 31 ans, originaire du Gué-d’Hossus, ex-élève de l’annexe Saint-Charles du Petit-Séminaire, receveur des droits de place à Charleville, basculeur à la sucrerie d’Écly ; puis, en 1920, scribe au Recrutement de Reims, il y meurt l’an d’après. Son père était lieutenant de douane. Émile épouse sa cousine Eugénie, de Thin-le-Moutier, veuve de Pierre Tassigny, de Charleville. Poète rural et forestier, l’Almanach Matot-Braine 1927 publia plusieurs de ses œuvres les meilleures.

Mathias Clésen, 37 ans, comptable chez le lainier Edmond Pérot, rue de la Clef, maison Lépagnol de Bezannes, et fils de Clésen-Rollinger, ex-conducteur aux Messagerie Kellermann, de la place du Parvis ; et Marie-Claire Bart, veuve Belleville, marchande de chaussures, rue Saint-Étienne, 13. Clésen fut un temps attaché au roulage Luzzani, pour se livrer ensuite au courtage des laines. Sa femme et lui finirent leurs jours à la Maison de Retraite, entre 1925 et 1927.

Jules Duchénoy, 23 ans, originaire de Haudrecy (Ardennes) comme son cousin le sous-bibliothécaire à la Ville. Trieur de laines, il épouse Félicie Vuibert, 21 ans, rue du Cerf, 47. Réfugié à Paris en 1914, il périt en Seine par suite de collisions entre un vapeur et un bac transportant les ouvriers de l’État à Courbevoie, de l’autre côté du fleuve. Son beau-frère Armand Dallier, ex-bouquiniste et trieur, devait mourir aussi tragiquement, peu après l’Armistice, à Soissons, – d’où il se préparait au retour à Reims, – écrasé par une auto !

Georges Durant, fils de Durant-Desaulnois, décédé à Gap, et Louise, fille de l’ex-notaire Goda-Lambert, boulevard des Promenades.

Gouvion-Saint-Cyr, 25 ans, au château de Reverseaux, à Rouvray (Eure-et-Loir) fils de Marie Adélaïde Bachasson de Montalivet, épouse du marquis, ancien pair de France et membre de l’Assemblée nationale, prend pour femme Marie Boisseau, fille de Félix Boisseau-Jullien, rue Andrieux, 14. Les témoins sont : Masson de Montalivet ; l’ex-préfet Guyot de Villeneuve ; J. Olry-Roederer et Ernest Jullien, juge à Reims.

Henri Loriquet, né à Reims le 9 février 1857, archiviste à Arras, fils de Charles et de Louis Pauline Lefèvre, rue de Châtivesle, 45, épouse Louise, 24 ans, fille de Alexandre Demaison-Gardet, ex-marchand de laines, place d’Erlon, 75. Témoins : le grand-oncle maternel H. Malotet aîné, 80 ans ; J. Demaison, rue Rogier ; le cousin Léon Devivaise, rue des Moissons, 8, et Auguste Antoine Biémont, ex-tanneur à Braine.

H. Bulteau, sculpteur-monumentiste, faubourg de Laon, 190, et Élisabeth Durand-Béchignac, de Paris.

Eugène Ninet, 25 ans, rue du Jard, 23, fils du directeur de la Société des Déchets, et Émilie, fille de Pertenne-Alard, fourrures et nouveautés, place Royale.

Édouard Nocton, 24 ans, voyageur en quincaillerie, fils de Pierre, rue Colbert, 20. Il habite rue de Vesle, 206, et épouse une Guénot, de Juvincourt. Mort en 1932 ; faisait partie, en 1928, du clan dit des Culs-Collés qui a choisi comme perchoir un banc du square Colbert, d’où l’on passe en revue, sans indulgence, et avec ironie, les déambulants de ce beau jardin, orgueil de la Cité et bourreau de Pieds-Sensibles.

Léon Ponsin, 23 ans, harpiste, flûtiste, violoniste, ex-élève du père Cazé, fils de Ponsin-Simonar, professeur de musique et de dessin, rue du Temple, 17, et Louise Druart, fille du libraire, rue de la Peirière, à l’enseigne : À Jeanne-d’Arc. Son oncle Émile Druart, père de René et Henri, habite chaussée du Port, 37.

Théophile Roederer, 38 ans, né à Strasbourg, où son père était débitant de boissons, épouse, rue des Capucins, 61, (anciennement H. Picard) Anna Victoria Grassière, d’Hermonville, 36 ans, rue Petit-Roland, 21, fille d’un tourneur en bois.

Remi Roch de Vertus, 21 ans, de Brécy (Aisne) et domicilié à Oulchy-le-Château, fils de Armand et de Laurence Lemoine, épouse Marie, fille de Lhoste-Hannesse, et nièce du fabricant Lhoste-Pérard dit le père Bon-Dieu. Associé à Léon Hécart, ils seront les successeurs de ce dernier à son usine de la rue Jacquart (bureaux rue des Cordeliers, où les Benoist du Mont-Dieu les remplaceront).

Thomas Crampton Waterhouse, 30 ans, de Bolton-the-Moors (Lancastre) fils de T. Waterhouse-Mary, et Sarah, fille de Jonathan Holden, maître-peigneur de laines, et de Tamar Gill, boulevard Cérès, 17. Témoins : Samuel Bardsley, pasteur à Londres ; Isaac, frère de Sarah ; et Charles Auguste Baudesson, roulage.

Alcide Hautem, de Beine, et Marie Céline Lefeuvre, d’Amiens, habitant rue de Contrai 20, fille d’un manouvrier, Charles Lefeuvre, et de Adèle Houpin.

Léon Hanol, de Beine, huissier à Ay, et Lucie dite Blanche, fille de Rochet-Vogin, charcutier à la Haubette. Blanche avait un oncle, Alexandre Vogin, compositeur d’imprimerie à Reims.

C’est sur le souvenir de cette charmante Rémoise, si jolie sous le voile blanc des mariées, que se clôt cette nomenclature, destinée, dans les milieux où se garde la trace des êtres et des choses du Passé, à l’envol de visions agréables et réjouissantes. Puissions longtemps encore corder avec ces ombres contemporaines de nos jeunes ans, en des heures trop vite écoulées et que l’oubli viendra fatalement écraser sous un voile épais de cendres noires !

1882

Abordons maintenant d’autres rivages, ensoleillés ceux-là ! Mettons le pied sur le sol enchanté de l’Île aux Mariages, où ne résonnent qu’accords harmonieux et rumeur joyeuse des festins !

À nous, la jeunesse ! à nous, les plaisirs ! honneur à Cérès, ses prêtres, ses vestales ! et c’est un cultivateur qui conduit la farandole :

Édouard Brébant, 27 ans, fils du médecin humanitaire et philosophe à la Rousseau, qui, enfant du peuple, le demeura toute sa vie. Ses fils fut envoyés à l’École primaire du Jard. Leur mère s’appelait Marie Apolline Leroy. Cultivateur à Voncq (Ardennes) il épouse Marie Amélie Dégret, d’Époye, fille du chef de culture aux Eaux-Vannes, ferme de Bas-Lieu, au pied de la côte qui grimpe à Saint-Thierry, ex-propriété du chevalier de Maison-Rouge.

Dosithée Buiron, commis des Tissus à la Grande-Maison, rue Ponsardin, natif de Saint-Souplet, et une Gérard de la rue Neuve.

Le magasinier du lainier A. Gosme, rue du Levant, 5, Léon Modaine, 27 ans, dont la tribu est originaire du Jard par les Modaine-Mathieu, épouse Clémentine Maquaire, 34 ans, fille d’un cocher aux Petites-Voitures.

Demerlé, de Dalem, près Thionville, 46 ans, rue Lesage, 29, et la veuve Fanny Vallette, de Villeneuve-sur-Yonne.

Le futur ordonnateur des pompes funèbres, en complicité avec Simon-Concé, cet ironiste féroce qui prêchait à tous le Retour à la terre, – celui enfin qui, sous le claque et en sifflet de drap noir, souliers vernis et gants blancs, représentera si dignement les familles rémoises, Auguste Louis Védie, 23 ans, fils de Védie-Hutin, pain-d’épicier place du Palais de Justice, et Marie-Caroline, des Jacquart-Strapart, menuisier rue du Temple, 24, – ceux-ci désormais assurés de la commande des quatre planches qui nous sont promises à tous. Se méfier, en dépit de ses abords sociables, de ce semi-fonctionnaire à l’œil fascinateur, et murmurer entre les dents, chaque fois qu’on le rencontre en lui serrant la main, cette incantation : Non ! tu ne m'auras pas ! (bis).

Léon Eugène Grevin, de Soissons, veuf de Hortense du Boys et fils des Grevin-Pottier, et Hélène Adèle Rohart, 37 ans, fit de Rohart-Galopin, employé de commerce, rue Hincmar, 22. Il est frère de Casimir, fabricant, rue de Monsieur, et beau-frère de Lucien Guénet, ex-minotier, agent général aux Assurances Rémoises, rue Clovis, 15. Témoins de la mariée : son frère Gaston et Jean-Pierre Rohart, 78 ans, à Paris.

Victor Eugène Louis Hubert, 30 ans, issu de Hubert-Regnault, cloutier à Charleville, et Pauline, fille de Gérard-Billet, ex-notaire, rue Saint-Étienne, 17.

Ferdinand Émile Rodolphe Joseph de Bailliencourt dit Courcol, 25 ans, de Douai, où son père est filateur de lin, et Gabrielle Émélie Heidsieck, des Heidsieck-Henriot.

Jules Hayon, de Villiers, près Sedan, fabricant de plateaux pour auneurs de tissus, rue des Moissons, 15, et Louise, fille de Védie-Gossart, ex-séminariste, ex-épicier rue du Jard, 47, habitant à Monchy-Saint-Éloi (Oise). Védie père, devenu veuf, épousera Mlle Niverd, pianiste, veuve de Brié le violoncelliste, rue du Couchant, 3. Jules Hayon sera quincaillier rue Neuve, 8, et mourra sous les bombes allemandes à Reims, en 1917.

Auguste Seymour Michel, 43 ans, de Meung-sur-Loire, capitaine au long cours, rue Hincmar, 1, et Marie Léonie Chandon, de Reilhac (Cantal) chez son beau-frère Sarret, rue de Berru, 22.

Georges Rollin, Aveyronnais et confiseur place du Palais de Justice, et Victorine, fille de l’huissier Fossez-Védie.

André Lazarus, 29 ans, de Lixhausen, près Saverne, tailleur d’habits, rue Libergier, 26, et Blanche Aline Hébing. Ce couple à quitté Reims en 1927, pour habiter à Paris.

Émile Ernst, de Signy-l’Abbaye, rue de Vesle, 147, et Philomène Fox. Longtemps représentant pour la firme Lançon, vins en gros, de Blanquefort (Gironde). Ernst a pris sa retraite en ce pays, en 1929, âgé de 75 ans.

Edmond Goffart, 37 ans, ex-épicier, place d’Erlon, 69, et Nicolle Regrény, 46 ans, rue de Monsieur, 9, fille d’un marchand de fromages.

Un fils de Jacques Caillet, trieur de laines qui traça, pour l’Imprimerie Matot, la Carte de la Toison du Mouton, a pour témoins à ses noces, deux vétérans de la corporation : Clovis Gouvernal et Denis Lantenoy.

Paul Leseur, 26 ans, agrégé à la Faculté de droit de Lyon, fils de l’avocat, rue de Talleyrand, 8, et Louise Léonie Ohl, des Ohl-Desmarest, rue de Bétheny, 32. Témoins : l’avocat Piéton ; le carabin Eugène Félix Leseur ; Charles Léon Benoit, des Tissus, rue Petit-Roland, 31.

Le serrurier Berthelot, originaire de Neuilly-Saint-Front, où son père fut bonnetier et organiste, et Marie Angélique, fille de Lemoine-Langrené, peintre en bâtiments, boulevard Victor Hugo, 16.

Léon Armand Debaye, de Trépail, voyageur de commerce, fils de Debaye-Hourlier, instituteur à Saint-Hilaire-le-Petit ; et Marie Désirée, dont le père, Philippot-Perseval était boulanger sous les Loges de la Couture, et renommé pour ses darioles.

Ferdinand Justinart, 27 ans, rue Sainte-Marguerite, futur imprimeur de l’Indépendant Rémois, fils de Justinart-Gobin, dégraisseur de laines habitant rue de Venise, 23, et mourut à l’hospice Noël-Caqué ; et Louise Amélie, fille de Duplessis, troquet rue de Cernay, 28.

Henri Alphonse Lebœuf, de Compiègne, fils du tailleur Lebœuf-Cochemé, rue de Vesle, 65, et Rosalie Félicie, née à Clichy des époux P. Vignau-Manigot, teinturiers rue Folle-Peine, 26. Témoins : l’horloger Lalouette, rue des Deux-Anges, 23 ; Jean Pierre Amouroux, des Tissus, et le marquis de Tilly, apprêteur rue des Moulins.

Alfred Gosme, – celui qui se dénommera le Père de la Laine de France, – 39 ans, originaire de Guigneville, près de Pithiviers, fils d’Adrien, décédé à Étampes en 1876, et de Mlle Morin (1870) ; et Berthe Canart, 28 ans, de Wasigny, fille du docteur Canart-Routhier, mort en 1867. Témoins : Adrien Gosme, cultivateur à Guigneville ; docteur Rasin, d’Étampes ; Paul Canart, notaire à Rethel, frère de la mariée, et Louis Eugène Routhier, filateur à Saint-Brice. Alfred Gosme est décédé à Paris en 1916.

Ernest Laignier, 25 ans, rue Neuve, 42, fils de Laignier-Saguet, ex-fabricant à Poilcourt, et Anne-Marie, des époux Deck-Althoffer, 29 ans. Témoins : Jean-Baptiste J. Coutier, ex-huissier, directeur d’Octroi ; Jean-François Laignier, ex-adjoint au maire, le mercier Jean-Baptiste Deck, rue de Vesle, 71 ; Henry Althoffer, fondeur à Remiremont.

Marie-Claire Portevin, dont le père fut adjoint au maire et avoué, rue de la Belle-Image, et Louis Scelzer, de Sarrebourg, capitaine d’État-major, rue Petit-Roland, 7.

Mariage mondain, faisant du bruit dans Landerneau : Paul Benoist et Hélène de Bary, enfants gâtés de la société rémoise par leur plastique, leur élégance, la considération dont ces noms étaient entourés ! Ils étaient de toutes les fêtes publiques et réunions mondaines, de toutes les manifestations organisées par le Grand-Bâilla et les sociétés hippiques, sportives, musicales ou artistiques. Quel beau couple ! et, – disait-on si assorti ! Véritables Noces de Gamache ! où tout le Gotha rémois fut convié.

Le marié était fils des époux Benoist-Fréminet, et né à Reims le 20 octobre 1854. Aussitôt son service militaire accompli aux Chasseurs à cheval, il fut associé à la firme industrielle du Mont-Dieu.

Elle, la Déesse ! Luce Eugénie Hélène, procédait des Albert de Bary-Fassin, rue des Templiers, 18. Il n’y eut qu’un cri d’admiration quand elle apparut sous son long voile de mariée, et les Pythonisses de l’endroit déclarèrent à l’envi qu’un sort heureux accompagnerait éternellement les époux !

Le Destin, hélas ! en décida autrement : après une cruelle séparation, après l’abandon de tous ses devoirs par la mère indigne et volage, celle-ci mourut de façon tragique, à la suite d’un accident d’auto. Lui, dont la douleur maritale et paternelle avait été profonde, résista un temps à ce coup du sort, et jusqu’à la limite des forces humaines. Vaincu, épuisé, il tomba à son tour, dignement, ayant à peine dépassé la cinquantaine.

Un Parisien comme il en pullule dans la Capitale, venu là de sa province à la poursuite d’une prébende quelconque, Étienne Urbain, ex-cordonnier à Metz, et habitant rue des Murs, 10, à Reims, épouse sa payse Nathalie Wibrotte, rue des Moulins, 82, fille d’Armand et nièce de Jules Wibrotte, directeur d’école, rue du Jard, 11.

D’autres oncles, Paul et Albin de Devant-les-Ponts, à Metz, sont des notables personnalités à Châlons ; le capitaine Charles Ferdinand Wibrotte est au 104e régiment d’infanterie à Paris.

Entendez et appréciez ce timbre sonore qui surgit d’un gosier qu’on croirait issu de Gascogne, mais tout bonnement de Grandpré (Ardennes) ce qui d’ailleurs ne le diminue pas ! le coiffeur rémois Médard Auguste Martincourt, neveu d’un curé de Saint-Maurice et baryton à l’Union chorale.

Il décédera à Reims en 1922, à 66 ans. Son salon de coiffure, des plus élégants pour l’époque et achalandé par la Basoche et la Musique, s’ouvrait rue Saint-Étienne, 3, où son épouse, une Mentgen, dont le père est cordonnier rue de Mars, tenait le comptoir et la tirelire aux pourboires.

Jovial s’il en fût, vantard comme il convient à un artiste capillaire doublé d’un chanteur fort goûté, Figaro corpulent et barbu, qui sait tout, voit tout, entend tout et conte tout aux oreilles affamées de potins et cancans, Martincourt ne connut ni ennemis ni jaloux ni rivaux, et, à ce titre, mérita d’être enregistré dans nos annales contemporaines.

Ce bon gros blond aux yeux cerclés d’or, Albert Marteau, benjamin de cette lignée, épouse à Londres une insulaire, Louise Schaffers, de Willesdon. Ils habiteront à Hampstead.

Le père Savart, qui exploite le Bal de ce nom au faubourg Cérès, et, retiré des affaires chorégraphiques, habitera rue de Berru, 6, veuf de Donatienne Bourdaire, décédée à Boult-sur-Suippe, en 1877, se remarie à 49 ans avec une couturière d’âge mûre Amélie Déquet, fille du charpentier Déquet-Coutier, rue du Jard, 23. Témoins : Alfred Déquet, de joyeuse réputation parmi les barbouilleurs de coffres-forts chez Bauche, sous la paternelle férule d’Arthur Dagot ; Louis Ferlin, paveur, et l’épicier Max Savart, de Mourmelon-le-Grand.

On se rappellera peut-être que, parmi les types de mendiants rencontrés dans nos rues, certains d’entre eux des plus intéressants, – l’un de ces derniers, un aveugle joueur de violon à tête de Christ, dont le siège se tenait aux abords de la Poste, Joseph Adrian, aîné d’une famille de travailleurs issue des Adrian-Stévenot, sabotiers à Sedan ; son plus jeune frère, Étienne Adrian, épouse, étant sans doute poussé dans les reins par quelque Vénus aguichante, – il n’a que 19 ans ! une vierge de 28 ans, Ernestine, fille d’un manœuvrier vouzinois, Laurent Dénoyelle-Broyer, rue de Monsieur, 9.

Et c’est vraiment pour faire honneur à l’infortuné violoniste que nous piquons les noms de ces très humbles sur le carton de notre herbier humain, à côté des plus riches et multicolores papillons rémois !

Charles Adolphe Plattner, de la Colonie suisse, interprète aux champagnes Saint-Marceaux et originaire de Bâle, épouse Andrée Dombry, de Paris, fille des Dombry-Perseval. Plattner qui décédera en 1929, faisait partie du groupe fraternel où on rencontrait Eugster, Lutta, Otto Suter, Suffert, un Otto tout court, et d’autres.

L’un des doges de l’Épicerie régionale, Édouard Clot, fils d’un cultivateur à Villard d’Arènes, près Briançon, et commis-voyageur à Charleville, épouse Augustine Goujon, de Crouy (Aisne). Octave (et non Édouard) est quadragénaire, et s’installera à Reims, rue Thiers, 22.

Un échalas en chair et en os, Léon Taillia, 33 ans, à la peau en limaille de fer comme il sied à un ferblantier, as de la chorégraphie au Bal-Français, à Fléchambault, première étoile de la nébuleuse des Titis de Par-en-Haut, et fils de Eugène Taillia-Lavarge, rue du Barbâtre, 139, près les Cercle catholique, épouse une Messine immigrée Eugénie Dosse, couturière rue Neuve, 93. Son beau-frère l’ébéniste d’art, devait recevoir, après guerre, un diplôme de Premier ouvrier de sa profession.

Autre binette sympathique : Achille Aimé, un blondin à moustache fine, garçon chez nos principaux limonadiers, au Strasbourg, à la Banque, chez Jean Gentgès, du Café de Paris, au Courtois avec les Richard, etc. puis buffetier à Amagne. Né au hameau de Talma, près Grandpré, il a 28 ans quand il épouse une Troyenne du nom de Pénard.

Et ce bon drille, Arthur Moyen, beau brin de jeune homme qui touche à ses 24 ans, dont le père, Moyen Michel, place du Parvis-Notre-Dame est cocher d’omnibus, va être le joli mari de la non moins jolie Marie-Christine Simonnot, née au Puy (Haute-Loire) de Simonnot, machiniste au Théâtre, et de Lucrèce Debat, receveuse à la location, rue des Fusiliers, 12. Arthur est placier à la firme de laines Wenz. Sont témoins à ces noces joyeuses où parada tout ce que la Place de Reims compte de marchands de chicorée : Le chef du Lion d’Or, H. Gavroy, avec Arthur Person et Émile Grandremy, des Tissus.

Le fabricotiau Jacques Edmond Nyssen, qui décédera à Paris, avenue Junot, 38, en 1929, et Victorine Charlotte Joye, Marseillaise de 18 ans, fille des Joye-Sautès, rentiers à Bouillon. Le marié est fils de Jean-Baptiste, fabricant rue de l’Université, 12, dont les ateliers de teinture ont leur débouché rue du Cloître, 11, là même où seront installés plus tard les linotypes de l’Éclaireur de l’Est, – et de Julie Collas, dite Bandeville, décédée à Paris, et nièce de feu le chanoine Bandeville, d’érudite mémoire, dont elle avait hérité la riche bibliothèque. L’oncle de la mariée est Edmond Colas, sculpteur-décorateur à Paris, rue de Douai, 61, associé avec cet autre oncle, François Bourdon, boulevard Pereire, 178. Achille Renard, procureur de la République, est témoin.

Le rival de Martincourt, Alfred Havart dit Gaspard (prénom de son père), qui est aubergiste place Saint-Remi, et une Saint-Martin, de cette famille d’apprêteurs de la rue des Moulins, 5, dont un rameau abandonnera le peu rémunérateur métier de ses pères, pour, en épousant une Houdinet, devenir un des rois de nos Halles, au rayon : Fruits et légumes où l’on sait ce qu’est faire la double et la triple culbute.

Havart avait une voix de baryton bien timbrée, chaude, et artistement conduite. S’en souviendront ceux qui l’ont entendu dans le fameux duo des Pêcheurs de Perles avec Louis Lefèvre, un échappé des chiffons Renaissance et des peaux de lapins, lequel avait une voix de ténor ravissante.

Arthur Génin, un Apollon aux cheveux noirs bouclés, un Rembrandt mort jeune, hélas ! fils de Louis Génin-Pillier, retordeur d’échées, rue des Murs, 20, et Christine Sophie Rieger, d’Altwiller, près Saverne. Ex-élève des Frères des Écoles chrétiennes du Jard, il avait alors 22 ans.

Palmyre Neumarck, fille du marchand d’habits à l’angle des rues de Vesle et de Talleyrand, et Pierre Henri Denis Dupont, d’Arcueil (Seine), fils de Me Guillaume Benoît Dupont, rue Colbert, ex-notaire à Alger. Les témoins de la belle Palmyre, rivale en esthétique plastique de sa voisine Sarah Weymann, sont Adolphe Henrot et le tonnelier Grouselle.

Un brave type, à l’aspect minable des tuberculeux, du nom de Ducrot, qui vient de s’établir cabaretier sur la place Godinot, à l’angle des rues Saint-Etienne (Cours Anatole France) et des Anglais (Saint-Just), en remplacement de Leleu, natif de Froidmont-Cohartille, près Laon, se choisit une collaboratrice discrète et active en la bonne de la petite mère Rondu, du Bourg-Saint-Denis, 85, Marie-Camille Maucourt, de Braux-Sainte-Cohière.

Au décès de Ducrot, Curien, dont la très jeune femme travaillait le violon, occupa la place pour la céder à Mme Franc, tenancière à Cormontreuil du restaurant Lapie.

Et la guerre survint qui... On connut là des tablées de joueurs épiques à la manille, dont plusieurs sont encore bien vivants quoique chenus ! de nos jours décolorés : le commissaire de police Speneux, le boucher Jules Blanche, dit Barnum ; Alfred Couvreur, épicier ; le peintre Camille Venain ; spirituel animateur de ces beuveries où l’on jouait la chopine à 7 sous ! Le buraliste Poirson, Camarade à Poincaré, Monsieur ! ex-adjudant aux Tirailleurs algériens ; Berlin et son successeur Jamart, maître d’armes au 132e ; des lainiers à gogo et d’autres à n’en plus finir, qui regrettent ces temps adorables !

Léon Duchange, fils de Jules Duchange-Goubaux, des Assurances Rémoises ; et Marie Hortense, fille d’Adrien Lanson-Contet.

Alexandrine Boulogne, 19 ans, fille de Narcisse Boulogne-Boutard, des Bains, rue Neuve, 80, coiffée de l’adjudant Cabasse, de Strasbourg, l’épouse sans plus tarder. Témoins : le coiffeur Tourtebatte, au 101 ; qui rase la famille ; le père Lagache, directeur d’école à Carteret, après l’avoir été au Jard ; Alexandre Boulogne, piston, avec ses frères Édouard et Alfred, à la Municipale.

On retrouvera les Bains Boulogne au 59 rue Neuve quand ils eurent cédé la place aux Folies-Bergère, où le futur conseiller municipal Alexandre Legras fera sa pelote. Auparavant le terrain des Folies dites Bois-Debout avait reçu le tissage mécanique Simon Dauphinot.

À l’heure pénible de la déconfiture de cette firme honorée, les métiers furent fracassés et vendus à la ferraille par un boucher transformé en homme d’affaires, Joseph Fontaine. En attendant mieux le vaste atelier servit de salle de réunions, voire politiques.

Un soir, on y convoquant le ban et l’arrière-ban des électeurs du 3e canton, farouches héritiers de leur pères sans-culottes pour y entendre les tonitruantes fanfares au mirliton de l’épique Renaudel, dit la Panse, de Camille Pelletan à la barbe foisonnante, et les fines ironies de Marcel Sembat, dont la mince silhouette faisait petite mine au regard du corpus de Nosseigneurs ses collègues.

Les programmes d’aujourd’hui n’étant guère plus corsés que ceux d’hier, les nouvelles couches entendent les refrains dont nos jeunes et candides années furent bercées ! Bon courage, petits amis ! il reste encore de quoi faire... et de quoi rire… ou pleurer !

Accrochons au passage Émile Allart, de Cormicy, autre piston aux Pompiers, ex-ténorino de concert à la voix fluette et agréable, qui fut enfant de chœur à la Maîtrise, sous Étienne Robert.

Tout-petit, à l’école des Frères, il était la vedette des réunions de patronage, où il interprétait la chansonnette enfantine du Chapeau de la Marguerite et cette autre, au refrain sautillant et narquois : Et ne vous este-nis-te-neste, et ne vous estimez pas tant !

Coqueluche des auditeurs et champion du Frère Ansbertus, sous-directeur, grand dadais bon comme du bon pain, tendre comme gazon d’avril, qui aveuglait son entourage en dépliant son vaste mouchoir à carreaux, pigmenté du tabac en poudre dont son noble blair aux narines engouffrantes avait rejeté la cuisson souvent renouvelée, ce charmant vieillard étant priseur à la mode napoléonienne.

Or, Allart épouse sa bonne amie Eugénie, fille d’un cabaretier à Saint-Brice, Soullier. L’un des témoins fut Victor Regnault, typographe, mutualiste et publiciste apprécié, gérant de l’Indépendant rémois.

Le Café Janin, sous les Loges, prend l’enseigne : Adnet-Bar au mariage de son serveur Adnet, des Petites-Loges, avec la veuve Janin, Émélie Bar, de Loisy-sur-Marne.

Rue Neuve, 36, il y avait jadis un cabaret à l’enseigne : Au Soleil d’Or, qui luit pour tout le monde. Tout contre, sur un terri en contrebas du trottoir, peinait le cordonnier Soreille, dont les formes et le fil à poix gisaient, en un désordre presque savant, sur un établi de bois.

Ce Soreille habite, quand il prend femme, rue de Venise, 4. Il était Rethélois, et son patois avec accent se distinguait fort bien des accents circonvoisins, dont les usagers ont autant de peine à se défaire que les Alsaciens du leur !

Le peintre-vitrier Gaspard Melchior Brocco, qui se lie avec une Grangé, est un Suisse de Mesacco.

Apprêtons-nous à rire aux saillies de ces deux beaux-frères nouvellement consacrés par le mariage de l’un d’eux avec la sœur de l’autre : Léon Choisy, 22 ans, horloger rue du Bourg-Saint-Denis, 32, épouse sa voisine, Berthe Victoire Venain, 19 ans, originaire de Ville-en-Tardenois.

Les Rémois devaient à Choisy l’horloge dite Hincmar, désaffectée depuis par Dauzet.

Venain-Cornet, père de la mariée, avait succédé à Merlin le peintre, au 34. Choisy père, lui, était cordonnier. Camille et Raphaël Venain furent témoins à l’holocauste, en compagnie de ce sacré Martincourt, accouru de Haybes, et un horloger de Saint-Dié, Chomer.

En 1914, certains réfugiés rémois purent aller reprendre du souffle chez les Choisy-Venain, rue de la Gaîté, 30, à Paris, où ceux-ci échappaient à la loupe et au pendule, dès le décès de Choisy père.

Sportifs, saluez cet aîné, Louis Rouyer, parisien de Paris, qui, trieur de laines à Reims, se muera en aubergiste à Anizy-le-Château. Il fut un acrobate de la bicyclette, et sa prouesse la plus remarquable consistait à franchir, d’un bond de sa légère machine, le fossé (remplacé depuis par le boulevard Dauphinot), qui séparait des terrains vagues, en avant du peignage Jonathan Holden. Louis, fils des Rouyer-Grandis, épouse Georgette Eugénie Hénot, de Coucy-le-Château. L’oncle Grandis est biscuitier à Vic-sur-Aisne, et le patron du marié, Alfred Gosme, est de la noce, bien entendu !

Un noirpiau de poil et de teint, Émile Daux, 23 ans, ex-bugle à la Musique de Petits Frères, et soliste à la Municipale, demeurant rue de l’Arquebuse, 8, fils de feu Daux-Pierrard, teinturier chaussée Saint-Louis, épouse Marie Clémence, 26 ans, fille du charcutier Bataille-Choquet, rue de Venise, 42.

Le chimiste Gaston Rohart, 30 ans, fils des Rohart-Galopin, et Marie Augustine, 23 ans, fille de Varin-Maire, des Tissus. Figure spécifiquement et fièrement rémoise, placée à la tête d’une importante firme de charbonnages. Témoins, par devant le Maire Diancourt : son beau-frère Grevin, marié d’hier ; le cousin François Aubert ; Stéphane Ducancel le droguiste ; le bel Olivier Zhendre, de la Laine, doré comme l’escourgeon.

Entre cousin et cousine Varlet, des Tuiles et Ardoises, promesse de mariage sous les ailes paternelles des Varlet-Bouheau et Varlet-Plet.

Louis Gaudefroy, de Paris, papetier, et Marie-Louise Paillet, de Montmirail, une créature fraîche, rouge-pivoine, et réjouie, fille de Paillet-Pertois, imprimeur, rue de la Peirière, 14 bis. Ces nouveaux Paillet tinrent longtemps boutique de papeterie rue du Bourg-Saint-Denis, 75.

Le fils du commissaire-priseur Debar-Jaunet, Léon, 34 ans, de Sainte-Menehould, s’unit à la fille de Sausse-Gadret, ex-chaudronnier en cuivre, place d’Erlon.

Pour clore ce palmarès où les prix distribués sont dorés sur tranche, mais dont les ornements resteront plus ou moins frais et vivaces suivant qu’on en aura pris soin, évoquons deux noms presque nobiliaires de la petite bourgeoisie rémoise.

En premier, Gabriel Laignier, avoué impasse Pluche, 2, fils de Eugène Laignier-Gendarme, et Aline, d’Ay, fille des Robinet-Brésol.

Et, pour la bonne bouche : Émile Henry Mennesson, courtier en laines, 40 ans, né à Neufchâtel (Aisne) où son père était marchand de fers, et Clémence Pénard, de Rumilly-les-Vaudes (Aube). Cette souche n’a que le nom de commun avec ces travailleurs de la laine, aussi, de la lutherie, des assurances, de la Basoche, mais résonne avec autant de sonorité aux oreilles du Tout-Reims du négoce. Témoins : Louis Tinet, placier chez les lainiers Labruyère et Tinet, rue de Bétheny, 17 ; Pénard, négociant en vins, faubourg de Laon, 25 ; Édouard Dubois, fumiste, rue de la Prison, 43.

1883

Quand, à 24 ans, on possède une santé morale et physique à faire envie, qu’au point de vue esthétique, on n'est point une horreur ; que la Vie, jusque-là, ne vous a pas été trop revêche et qu’on nage à pleines brasses dans les remous clapotants et tièdes du célibat provisoire pourvu de ses agréments, il est amusant, aux heures de loisirs, d’éplucher, sous les nefs gothiques de Notre-Dame de Reims ou dans le chœur des églises de quartier, le défilé des cortèges nuptiaux allant, en émoi, au devant du destin, – le marié en cisaille et la mariée en robe blanche à traîne et dentelles !

Chacun des curieux présents en prend pour son argent, et la leçon de maintien ne sera pas perdue pour celui qui à son tour, aura à accomplir les rites et faire le geste décisif destiné à aiguiller l’existence vers ces bonnes ou mauvaises heures qui sont le secret des lendemains !...

Or, 1883 fut une année féconde en cérémonies de ce genre, et le maire Diancourt, en l’occurrence son adjoint Desteuque, eut fort à faire, en communion avec les restaurateurs, tailleurs et couturières, loueurs de voitures, et tous ces menus artisans du luxe qui vivent de la joie des autres.

Riches et pauvres, bourgeois de première cuvée ou nouveaux-promus après affaires faites ; artisans, commis et employés, petits et grands boutiquiers, ouvriers de toutes professions, – chacun à l’envi s’empresse au tourniquet, fier comme Artaban, confiant en soi dans la certitude aussi bien que les aînés !

Cueillons çà et là parmi la houle de ceux dont le nom est susceptible d’éveiller en nos esprits quelques-uns de ces tendres souvenirs que nos mémoires prendront en garde jusqu’aux limites de la connaissance.

Fouillons d’abord à pleines mains dans l’amas grouillant de cette plèbe pathétique, joyeuse et sans soucis apparents, qui ne reculera jamais devant la perspective d’un foyer à fonder et d’une progéniture à nourrir et éduquer. Il faut, à beaucoup d’entre ceux-là, un sacré courage doublé d’une philosophie à toute épreuve !

Et voici l’un d’eux, cet Edmond Détraigne, au visage pâle et osseux sous une tignasse noire, dessinateur sur tissus, rue Anquetil, fils de fille ! Claire, ourdisseuse ; il associe à son modeste sort la fille d’un brocanteur, Marie Lefèvre, dénichée à Sauville (Ardennes).

On le vit, en morte saison, comptable en extra au Magasin des ventes publiques de laines installé, en 1891, dans les ateliers désertés des fabricants Walbaum & Desmarest, dits le Petit-Saint-Pierre, – par les courtiers Charles Loilier, Georges Bonjean et Albert Bouchez. En 1934, le premier est toujours vert et alezan ; Bonjean est mort, avant-guerre à Paris, rue Paul-Lelong, après avoir créé les ventes publiques de Dijon, et failli l’emporter, à 300 voix près, aux élections législatives, sur le 363 Muteau ! Bouchez, ce bon vivant, est décédé en juin 1914.

L’oncle du marié, Constantin Zéphyrin Détraigne, politicien de quartier fort zélé, illuminé à cheveux noirs bouclés et flottants à la Gonzalle, fut l’un des plus actifs propagandistes de la République radicale, en tenant le crachoir plus souvent qu’à son tour dans les Comités électoraux qui ont pour mission d’élaborer les mixtures de candidats à sapients et universels que nos docteurs politiques nous font avaler, de gré ou de force, à chaque élection !

Un Waltener, d’Arlon, conjugue sous les auspices de son frère Pierre, ébéniste et chef-locataire rue Neuve, 19, où devait s’éteindre, pleine de rides et d’ans, la fine et discrète Joséphine, gouvernante d’un Rémois des plus originaux, Hédouin de Pons-Ludon, dont elle avait été la légataire universelle comme le furent Raymond Aubert, marchand de bois chaussée du Port, et Lhermitte, épicier et comptable, rue du Jard, 19.

Émile Colson, peintre, fils des Colson-Chéruy, ex-élève aux Frères du Jard, et Louise Cleiren, ex-élève des Sœurs, fille d’un marchand de paillassons, rue de l’Université.

Eugène Chevanne, de Thin-le-Moutier, cheminot à la Compagnie de l’Est, faubourg de Laon, 236, fils de feu Clovis Chevanne-Hubert, et Florence Doyen. Son frère Émile alors basculeur à la sucrerie d’Écly, fut connu comme chansonnier populaire ardennais, sous le pseudonyme : Mélie Vannèche, et décéda à Reims en 1921, attaché au Recrutement, après avoir servi à l’Office de Reconstruction.

Léopold Leclerc, de Douai, clerc d’huissier, rue Gerbert, 14, et Marie Bailliot, lingère, rue Rainssant, 9, fille de feu le charcutier Bailliot-Braîllon, de Bezannes, et nièce des Lalucq, du même village.

Auguste Pradet, 31 ans, de Lévignac, près Toulouse, chapelier chez son père, rue Chanzy, 100, fils de Marcel Pradet et de Véronique Pié, épouse Antoinette Durand, marchande de chaussures à Signy-l’Abbaye .

Auguste était un superbe brun à l’assent timbré, cheveux noirs frisés, bouche sensuelle ombrée d’une épaisse moustache. Ses père et mère retapaient adroitement les vieux chapeaux, en fabriquaient de neufs vendus pas trop cher aux aborigènes du Bourg-Saint-Denis et lieux circonvoisins. L’atelier ressemblait assez à l’antre de la sorcière Fréa (personnage diabolique du Cousin du Diable, roman passionnant de Eugène Berthoud) et la boutique n’était pas d’une propreté exemplaire, leurs personnes s’en ressentant fortement –, mais ils étaient de braves et honnêtes créatures, accueillants et serviables, n’ayant rien du mercanti qui nous gruge impoliment tous les jours.

Cette équipe si bien assortie de travailleurs du feutre se targuait à bon droit de l’amitié d’un compatriote, l’avocat Lasserre, qui leur aurait rendu des points en matière gasconnades et hâbleries. Auguste était fort épris de la Fée verte et des petits madères, ainsi qu’il baptisait la rasade d’eau-de-vie jaune qu’il se faisait verser sur le zinc. On le connut trombone aux Pompiers et à ces Régates rémoises dont la vareuse bleu-marengo et la casquette galonnée flattaient ses goûts du clinquant.

De chauds amis l’assistèrent en ces noces qui, sans être de Gamache, ne manquèrent ni de piccolo ni de gaîté, dans le vaste cabaret du Théâtre des Variétés, rue du Barbâtre, 225. Louis Leroy, l’hippophage, rue Neuve, 99, préside la cérémonie, ayant à ses côtés Eugène Devraine, mercier, rue des Tapissiers, et Lefèvre-Viéville, des Variétés. De fréquents rinçages de gosier alternèrent avec les chansons, – car, en ces milieux, on honore ce précepte : Pour manger proprement, il importe de se laver souvent la ...bouche, afin de l’avoir toujours nette !

Ajoutons que les gens des Loges-Coquault avaient été enchantés de voir un silencieux chapelier remplacer le chaudronnier Wuillème, lieutenant de Pompiers.

Armand Foisy, de Villers-Allerand, commis-boucher rue Clovis, 62, et la jolie, fraîche et brune fleuriste de la rue du Jard, Marie-Louise, fille des jardiniers Delahaye-Roger. On vit un temps Mme Foisy tenir l’éventaire fleuri sous le péristyle du Théâtre. Pendant la guerre, le mari géra, sous les bombes, la boucherie Gaston Taillet, rue Chanzy, 61. Après l’armistice, le couple ouvrit boutique dans une des ruelles boueuses ou poussiéreuses des baraques en planches installées dans les Hautes-Promenades. Par la suite, après avoir bien casé leurs rejetons, ils vécurent à la Maison de Retraite. Tous deux y sont morts entre 1930 et 1932.

Alphonse Chemin, marchand de laines, rue Cérès, fils du Chemin de l’Embarco, marie son employé, Charles Albert Hesne, 25 ans, de Saint-Quentin-le-Petit (Ardennes) rue du Jard, 47, avec Laure Liége, 23 ans, de Château-Thierry, fille de Liége-Collard, cordonnier, rue du Préau.

Hesne fut de la troupe d’amateurs des Variétés ; ses collègues de la Laine l’appelèrent le Muet, par antithèse avec son péché mignon. Il fut longtemps le fidèle et actif collaborateur d’Émile Demorgny, rue Werlé. Habite depuis la guerre Rosny-sous-Bois.

Le brave père Launois, musicien, altiste à cordes au Théâtre et à la Philharmonique, ex-chef d’orchestre, né à Orléans, veuf de Hélène Carteret, décédée à Épernay, se remarie à 63 ans avec J. M. Simon, épicière faubourg Cérès.

Avec la sœur de sa femme, il ouvre un cabaret épicerie rue des Telliers, où, de guingois et à force de miracles d’économie, ils réussissaient à faire une bonne maison !

Launois porta longtemps redingote et haut-de-forme noirs, un peu crasseux, à vrai dire ! Les professeurs de l’époque s’en tinrent des années à cette tenue officielle, eu égard à leur clientèle renchérie, nommément le petit Chauvry, Kéfer, raide comme Sadi-Carnot, et le grand Gautier. Ces deux derniers sont témoins à ses modestes noces où, à défaut de cristaux, fleurs, lampions et fruits de choix, comme de grands vins, ne manquèrent ni gaieté, ni affabilité, ni sincérité. François Gautier, son chef à l’orchestre chez Besnard, était garçon d’honneur, à 48 ans ! Il s’ensuivit une Semaine de flûtes et chopines, et le nez de Launois, qui, déjà, n’aurait pas dérogé sur une plantation de caprons, en pâtit à nouveau, à l’admiration de tous. On était vraiment de bons-enfants dans ce milieu un peu bohème de notre art musical rémois !

Charles Émile Dubois, de Nouzon, fondeur en fer à Rimogne, fils de Dubois-Hénon, ex-directeur d’usine à Laval-Dieu, et Cécile, fille de l’imprimeur Dubois-Poplimont, rue Coquebert, 1. Témoins : Louis Poplimont, sculpteur sur bois, rue du Jard, 24 ; et le trieur de laines, Victor Féré, rue Notre-Dame-de-l’Épine, 1.

Félix Édouard Sohet, 25 ans, rue Cérès, 34, fils de Léon Sohet-Régnié et Malvina Housset, fille des Housset-Mahut, marchands de volaille, rue des Deux-Anges.

Un vendeur ambulant de la Dépêche de l’Est, basse chantante aux Enfants de Saint-Remi, Joseph Lechein, 24 ans, cordonnier boulevard Cérès, 158, et demoiselle Chaumouillé, rue Montoison. En 1919, après l’exil, il réfectionne les peintures à la Maison de Retraite ; il pose et mastique les vitres à l’usine des Capucins.

Émile Rebeyrolle, 26 ans, maçon, rue du Barbâtre, 110, et Berthe Amélie Perrotin, 16 ans, papetière à l’usine de Courlandon. Ils eurent deux fils, Albert et Fernand, morts tous deux pour la France. En 1914, Albert était au service du bonnetier Sordet, rue de l’Arbalète ; Fernand, sergent au 91e d’infanterie à Mézières, fut frappé mortellement à la tête de sa section, devant Reims, à la sortie des tranchées creusées aux approchent de Cernay, occupé par l’ennemi, et d’où arrivaient à ses oreilles les clameurs innocentes des écoliers en récréation !

Auguste Ducrot, trieur de laines, fils de Clovis, trieur et débitant place Saint-Maurice, et Dlle Pocquérus. Son oncle Charles trieur aussi et célibataire, était un ami de la table qui, parfois, se laissait aller, en présence d’un menu confortable, à faire le trou normand, puis, après allégement au dehors, se réattablait, frais et dispos.

Quand Clovis mourut, un de ces anciens planquets, – camarade de claie, – Andrieu, de l’atelier Lemoine-Brabant, et sous la chefferie de Baptiste Lhoste, frère du fabricant Lhoste-Pérard, dit père Bont-Dieu, – protesta contre les enterrements civils, dont Clovis était partisan.

Un peu éméché, il marmotta entre ses dents une oraison funèbre d’une cocasserie sans pareille, qui se terminait par cet avertissement au défunt : Clovis, te voilà dans le trou ! Si tu t’y trouves bien, restes-y !... Mais n’oublies pas... et il se répéta, en jetant ses regards à la ronde, l’œil inspiré et la voix assourdie : n’oublies pas qu’il y a un Être Suprême, et... Un gargotement dans le gosier et des sanglots étouffés, pendant que les copains attroupés devant la fosse se tenaient les côtes pour ne pas éclater de rire ! Il ne sut en dire davantage.

Clovis, lui, avait l’Éternité pour s’assurer de la véracité d’une telle affirmation entre deux hoquets vineux.

Claude Lardy, 26 ans, de Charlieu, près Roanne (Loire) cocher du Cardinal Langénieux, place du Parvis-Notre-Dame, fils du cultivateur Lardy-Brossette, et Marie-Mathilde, 20 ans, fille de Langer-Carré, tailleur pour ecclésiastiques vis-à-vis l’Archevêché (décédé en 1926, rue d’Anjou, 14). Leur fils Clovis, de la maison Rohart, charbons, est mort en 1928. Témoins : les serviteurs de l’Archevêché, Guillaume Maury, valet de chambre, et J.-B. Oudet, concierge ; le sacristain Plateaux et l’abbé Chevallier, curé de Cuisles.

Louis Schnetzler, 27 ans, fils Schnetzler-Seybel, drapier à Bischwiller, frère de Guillaume, courtier en laines à Reims, et Louise Pauline Scherdling, 23 ans fille de feu Théodore Scherdling, tanneur puis receveur d’octroi, mort en 1882. Témoins : Charles Hickel, marchand de laines, leur beau-frère, 30 ans, rue Gerbert, 22 ; le mutualiste Guillaume Schnetzler, déjà nommé, poète peu lyrique et abondant à ses heures, 29 ans, rue de Tambour, 27 ; Georges Varlot, rue Libergier, petit de taille, brun, râblé, légèrement voûté, qui fut parmi les créateurs, à l’époque, de l’Université populaire, à Reims, et dont la sœur était couturière réputée.

Guillaume et Louis supportèrent vaillamment mais sans opportunité réelle, comme tant d’autres Rémois impuissants à s’arracher du sol natal, le supplice à petites et fortes doses de notre ville, de 1914 à 1917. Louis mourut en 1921. Quant à son frère, sujet à suspicion de la part des combattants défenseurs de la ville, et arrêté bien à tort, puis relâché sur les instances du maire, J.-B. Langlet, après une nuit d’incarcération au poste de l’Hôtel de Ville, par un froid intense, il ne put se relever de cette sotte aventure, et, en fuyant vers la Côte d’Azur pour y reprendre vie et santé, il mourut à Marseille.

Charles Hickel est mort en 1929 à Saint-Amarin, son pays natal : on l’inhuma au Cimetière de l’Est, en ce Reims où il s’était promis de finir ses jours. Venu, en 1872, exercer dans le commerce des laines, il habita d’abord en mansarde meublée, rue de Venise, au Cadran Solaire, puis entra au service de Ernest Gadiot, rue Legendre, avec Félix Pilton et le comptable Pothé. Ensuite, commandité par le fabricant Rose-Croix Godbert, il eut bureaux et magasins rue du Levant, 6, en 1888, en succession de Émile Petit.

Pierre Jules Loche, 22 ans, fils des Loche-Massé, et Pauline J. M. Lanson, des Adrien Lanson-Contet, rue des Moissons, 21. L’oncle Jules Massé est agriculteur à Chuffilly (Ardennes).

Henri Delavallée, fils de Delavallée-Vaquez, ex-mercier Au Grand N° 14, rue de l’Arbalète, et Marie Estelle Blanche Poullot, fille de J. Poullot-Gillet. L’oncle Vaquez est marchand de soiries à Paris et adjoint au maire du 16e arrondissement.

Henri Thuillier, 25 ans, fils de J.-B. Thuillier, laines, place Godinot, et Alexandrine Laure Bourgeois, 18 ans, fille de feu Bourgeois-Boutard, décédé à Clermont (Oise). Témoins : Narcisse Brunette, architecte municipal, 75 ans ; Adolphe Jacquemart-Ponsin, 60 ans ; Charles Legrand, filateur à Fourmies, et Henri Gargan, à Amiens.

Paul Élambert, 31 ans, notaire à Beaumont-sur-Vesle, fils de Élambert-Colombier, notaire à Reims, et Marie Clémentine Herbé, 24 ans, fille de l’ex-filateur Herbé-Person, rue Saint-André.

Gabriel Mauduit, 29 ans, de Marteville, près Vermand (Aisne), fils du châtelain de Marteville et de Marie Adèle Élise de Faÿ, et Marie-Louise Frémyn, au château de Sapicourt, fille de l’ex-capitaine de la Garde mobile (1870-71) et de Valentine Camu, rue de la Prison, 7. Témoins : le cousin Mauduit, de Martigny, près Ham ; le comte Louis de Luppé, à Paris ; Ernest Jullien, du Tribunal civil de Reims ; l’oncle Césaire de Faÿ, à Missy-lès-Pierrepont.

Le Docteur Ernest Verdun, 37 ans, et Marie-Louise Neuville, d’Avize, fille de Gabriel Armand Neuville-Minelle, rue de Vesle, 125, Laure Athénaïs Minelle décéda à Reims en 1880. Un des frères Neuville, G. René est pharmacien à Paris. Le cadet, Maurice 28 ans, dirige l’usine de teinture et apprêts, et le plus jeune, Dominique, est conditionnel au 91e, à Mézières, en 1879-80. Autres témoins : Louis Edmond, marchand épicier à Verdun, et Louis Théophile Philippe-Verdun, de même, à Reims, rue de Vesle, 200.

Paul Thiénot, de Montmirail, 31 ans, notaire rue de la Clef, 1, et Clémence Jeanne Marie Pinon, fille de Paul Pinon-Duplessis, rue Saint-Symphorien, 14.

Charles Brunette, de la laine, 33 ans, place Royale, 2, neveu, par sa mère, Mme N. Brunette-Ponsin, de J.-B. Thuillier ; et Marie Virginie Goërg, 24 ans, du Havre, fille des Goërg-Sergent. Témoins : Thuillier, magistrat consulaire (!) et l’oncle Ernest Irroy, des champagnes ; Firmin Charbonneaux, maître verrier, 53 ans, rue du Bourg-Saint-Denis, 98 ; Adolphe Jacquemart-Ponsin, place Godinot, 6.

Charles Auguste Budin, 26 ans, de Bailleul-le-Sec, près Clermont (Oise), licencié en droit, boulevard du Temple, 4, et Marie-Louise Lelarge, 20 ans, fils de Frédéric Lelarge, rue des Trois-Raisinets.

Louis Henri Lochet, 26 ans, rue du Cardinal de Lorraine, fils de Lochet-Riéval, et Isabelle d’Anglemont, 19 ans, fille d’Alfred de Tassigny-Delbeck, ex-brasseur, capitaine des Pompiers. Le marié est petit-fils de Lochet-Godinot.

Léon Cailliau, 28 ans, fils de Édouard Cailliau-Bruncler, rue Neuve, 91. Henri Noirot, maire, consacre son mariage avec Blanche Jeanne Valérie Godet, 22 ans, fille de André Godet-Goulet, ex-fabricant, rue de Pouilly, 7, un lundi, jour de pont, à 4 heures du soir – la cérémonie religieuse remise au lendemain, premier de l’an 1884. Il y eut, le soir de cette veillée, les petits pâtés traditionnels.

Théophile Lallement, du Gros Raisin, 26 ans, rue des Deux-Anges, 4, et Marie-Louise Prévoteau, 19 ans, fille de l’épicier Prévoteau-Lemerle, angle rue des Anglais et de l’Université, que les passants admiraient dans l’exercice somnolent de ses fonctions, tournant mollement le four sur charbon de bois flambant comme braise, sous l’auvent de sa grand’porte, en attendant que son fils l’y remplaçât, aussi gnian-gnian que son père.

Lui, du moins, abandonna le tablier bleu pour s’adonner, à Cormontreuil, à la fabrication des madeleines.

Veuf, Lallement reprit femme, dans le Tardenois, une Danton, très jolie personne, brune piquante aux yeux lumineux, lorsqu’à son tour, vers ses 72 ans, a pris sa retraite rue de l’Arbalète, au-dessus des Mille corsets.

Ils ont eu deux enfants, le frère et la sœur, qui, en 1934, exploite l’Hôtel de France, à Aix-en-Provence.

Après-guerre, Lallement ouvrit une annexe à son hôtel de la place Subé, où, en 1914, un musicien des Pompiers tenait un bar achalandé.

Ce Nicolaï habitait, en 1930, à Nantes, chez un fils qui fut assassiné sur la Côte d’Azur, au cours d’une randonnée en auto.

Autre musicien et pompier, Léon Visé, rue du Faubourg-Cérès, 63, épouse une jeunesse de la rue Belin, Olympe Bénard.

Un charbonnier du même faubourg, vis-à-vis Saint-André, mitoyen du photographe Courleux, Joseph Stévenin, 22 ans, et Agathe Séraphine (le parrain devait être fin saoul ce jour-là !) Balardelle, 24 ans, en service rue de l’Écrevisse, 12. Leur fils unique exploite le fonds paternel, en 1934, à l’extrémité du faubourg dit avenue Jean Jaurès.

Le berrichon Aristide Louis René Bidaut, courtier en laines, rue Ponsardin, 17, et sa payse Marthe Pierre, à Bourges, où ils achèvent leurs jours, après avoir lâché Reims, ses pompes et ses œuvres.

Charles Bettinger, médecin, haut de taille, large de ceinture, fort en couleur, bedaine assortie, cheveux roussissant bouclés serrés, rue de Vesle, 31, et Mlle Hourié, de Bazancourt.

Marie Estelle, la brune Estelle à l’œil fripon, toute joliette et frisotante, aux yeux mutins, commerçante avisée et futée, ayant suivi les cours de son frère Jacquemin-Froment, va abandonner à Reims et le négoce des métaux et chiffons, pour épouser, à 19 ans, Eugène Ernest Jolain, de château Thierry.

Delphine Caron, fille des Caron-Châteauminois, – le père, décédé, était quartier-maître dans la Marine –, nièce d’Anatole de la Forge, sénateur, et un jeune Rémois d’adoption apprécié et aimé des milieux artistiques, sportifs et lainiers : Abel Esteulle, du peignage J. Holden. Mlle Caron, institutrice à Paris, sous l’égide du pasteur Dide, ami des Esteulle, était de l’intimité de Jeanne Hugo.

Depuis 1910, ce couple assorti habite rue Gravel, 38, à Levallois-Perret, où Abel fut comptable à l’usine Audineau. Abel, officier d’administration, a fait, à 50 ans passés, la campagne de guerre 1914-18 : il revint capitaine et chevalier de la Légion d’honneur.

Un de ses copains au 91e régiment d’infanterie en 1879-80, Dominique Neuville, associé-apprêteur, rue de Vesle, 215, (mort en exil, en 1916, à Neuilly-sur-Seine) épouse à Étoges Julia Élisa Uriel, dont il aura une lignée remarquable et nombreuse, qu’il eût désiré prolonger jusqu’à la douzaine, par esprit évangélique et patriarcal.

Et voici ceux qui montent ! Un pâtissier venu de Rethel, et originaire de Lonny, près Mézières, Ernest Martin, 24 ans, et une charmante blondinette frisant naturellement, Blanche, 18 ans, né à Givonne, de Louis Joseph Parys et Marie Lasthénie-Orphée, pâtissiers rue du Bourg-Saint-Denis, 40. Ayant repris le fonds des beaux-parents, il le céda, avant-guerre, à un brave type, Dubois, qui, en 1914, se réfugia à Troyes.

Ernest Denoncin, 27 ans, employé aux Déchets fils de Jean-Baptiste de Denoncin-Gaillard, directeur de filature, et Élisa Augustine, fille de Chambry-Fayet, imprimeur. Les Denoncin habitent rue du Barbâtre, 8, et ont deux autres fils, Albert, séminariste regibé et attaché aux bureaux d’un ingénieur de la Compagnie de l’Est, et Paul, élève de l’École des Arts et Métiers, au sortir des Frères du Jard, et directeur de l’usine Poullot. Témoins : Jacques Lhuire-Houbart, rouennerie et toiles, rue du Faubourg Cérès, et père du délicat poète Jacques Lhuire, mort jeune ; Hippolyte Marquant, ex-apprêteur, boulevard Gerbert, 12.

Ernest, quittant les Déchets, fut l’associé des fils Ninet pour le commerce des déchets de laine, boulevard Cérès, là même où se trouvait l’usine Lemoine-Girardot. Avant-guerre, on le trouve installé à Elbeuf, où il mourut et fut inhumé.

Henri Sévère Hoël, 29 ans, né à Saint-Pétersbourg, d’un Hoël-Beck, maître d’hôtel à Londres, et une Rémoise qui n’a pas su trouver chaussure à son pied ici, Henriette Rosalie Marthe, 20 ans, fille du Dr Strapart-Delavallée, professeur de pathologie à l’Hôtel-Dieu.

Jules Prudhon, 37 ans, de Courcelles-lès-Citeaux, près Dijon, maître charpentier, rue David, 49, et Augustine Françoise Revardeaux, 35 ans, de Isles-lès-Villenoy, près Meaux, fille d’un fabricant de chaux au Pré-aux-Moines, en succession de Résibois. Un frère du marié, Louis, habite à Romilly (Aube). Témoins : Osistre Éron Brouette, 56 ans, couvreur, rue du Faubourg Cérès, 108, et Charles Revardeaux, marchand de bois, rue de Vesle, 196.

Étienne Tixier, 55 ans, né à Larvian-lès-Saint-Dizier, près Bourganeuf (Creuse) rue Chabaud, 11, et, en secondes noces, Jeanne Marie Demitra, 56 ans, née à Courcy, fille de Louis Demitra-Coty, manouvrier, pensionnaire à la Charité. Le fouilleur de la ville, René Élie Demitra, rue Saint-Albert (Grandval) est témoin.

Léon Leclerc, 24 ans, rue Saint-André, de la Laine, fils de Paul Isidore Leclerc-Lamort, et Claire Marie Eugénie, 22 ans, fille de Hubert Collin-Millet, marchand de blousses et déchets, rue de l’Écu, 16, propriétaire de la Folie-Collin à Cernay-lès-Reims. Témoins : les deux frères Leclerc, Charles et Alexandre, l’oncle Alexandre Leclerc, 55 ans, rue de l’Avant-Garde, 2. Plus un bouchonnier, allié aux Collin, René Joseph Esteva, 33 ans, rue du Barbâtre, 93.

Le Dr Louis Robin, 24 ans, rue Sainte-Catherine, 2 (angle Tronsson-Ducoudray, avec, au rez-de-chaussée, la pharmacie Saint-Aubin), et Marie Nicole Aline Bardin, 22 ans, fille de V. Bardin-Delaby, fabricant de meubles, rue de Talleyrand, 19. Louis était fils de Hippolyte Robin, marchand de vins en gros à Mourmelon-le-Grand dont il avait été maire sous l’Empire, et de Thérèse Adélaïde Julie Saint-Remy, fille d’un ancien scribe public à Reims, rue de l’Esplanade. Témoins : Nicolas Delaby, 73 ans, marchand de cuirs, rue Jeanne-d’Arc ; Charles Preinsler, cafetier-restaurateur à Mourmelon, et le pharmacien Saint-Aubin.

Louis Robin fut, avec A. Panis, l’un des plus réputés accoucheurs en notre ville. Il était chirurgien-major aux Pompiers, et son gendre Payer, de la Marine française, mourut pour la France. Qui ne se rappelle cette aimable silhouette fumant sa pipe en buvant une mousseline au Café Louis XV aux côtés de son ami le capitaine Maurice Salaire, des mêmes Pompiers ? Tous deux devaient disparaître au cours de la terrible tempête qui dévasta notre ville. Maurice Salaire fut décapité à son poste par un obus boche !

Le pharmacien Auguste Laby, 26 ans, Faubourg Cérès, 24, fils de Vincent Laby-Beaupoil, et Alice Gandon, 21 ans, de Laon.

Un Sedanais, Gaston Deschamps, 26 ans, marchand de tissus, place du Rivage, vient épouser, au grand-autel de Notre-Dame de Reims, Eugénie Louise Victoire Petit, fille de Auguste Petit, bâtisseur de la rue Petit-Roland, et de Joséphine Rousseau, rue du Bourg-Saint-Denis, 86 (L. Robin vint plus tard habiter en cet immeuble). Fils et des Deschamps-Langlois, de Sedan, Deschamps a un oncle, côté paternel, ex-typographe. Témoins : Charles Poncelet, marchand de grains à Sedan, et V. Jules Dupont, cousin de la mariée, 33 ans, rue Hincmar, 13, à Reims comme Marchand-Limoge, 61 ans, épicier, rue de Cernay, 20.

Louis Landragin, de Omont (Ardennes), huissier rue des Tapissiers, 27, et Eugénie, fille de feu Louis Védie-Heuréville, pain d’épicier, place du Palais-de-Justice.

Un libraire de la rue Saint-Étienne, 4, Hubert Baudet, successeur de Rêve, et une demoiselle Fréminet, de Sivry-lès-Byzancy.

Édouard Masson, 28 ans, fils d’un inspecteur de la Sûreté décédé, et épicier rue de Contrai, 8, et Marie Céline Béligne, de Givet. Mariage presque in extremis, la mort de l’époux étant survenue peu de mois après.

Le petit papa Rosset, 67 ans, instituteur en retraite et conseiller municipal, rue des Capucins, se marie, pour une troisième fois ! avec Rose Élisa Peltier, de Rethel, 45 ans, rue Clovis, 75, fille d’un vannier de Warmeriville, Peltier-Ponsart. La mariée est cousine de Édouard Peltier, marchand de laines, rue de Monsieur.

L’artiste peintre Eugène Pujo, 25 ans, de Toulouse, et Eugénie Gosset, 22 ans, fille du maître-paveur rue du Barbâtre, 21 ; Gosset-Baudoin. Un oncle Baudoin est tailleur de pierres rue de l’Isle, 14. Témoins pour le marié : Rougé, baryton au théâtre, rue des Tapissiers 12 ; et le photographe François Rothier. Pujo mourut jeune et sa veuve épousa le maître-paveur Dabancourt.

Et pour clôturer cette liste d’heureux citoyens rémois, arrêtons-nous sur ce nom estimé : Bernard Homps, de Limoux (Aude), 39 ans, capitaine-trésorier au 45e R.I. de Laon, et Anaïs Marie Chemin, 35 ans, fils de Jean-Baptiste Chemin-Defauwes, ex-jardinier et limonadier à l’Embarcadère boulevard du Chemin-de-fer (Roederer), 40. Témoins : l’oncle Paul Homps, de Bordeaux ; Victor Hubert Chemin, boulanger ; le frère de la mariée, Anatole Chemin, marchand de laines, rue Cérès, 33 ans.

Le capitaine Homps mourut avant-guerre ; sa veuve, verte et intelligente, eut la vie d’une intellectuelle à l’âme d’une artiste, et s’éteignit, en vieillesse, juin 1931, dans sa vaste propriété de la rue de Courlancy, 147, qu’elle habitait avec ces enfants, M. et Mme Enguerrand Homps.

Son fils Enguerrand est le délicat poète des Guirlandes et d’une remarquable traduction en vers français de l’Iphigénie en Tauride de Goëthe. Les Rémois de nos jours retiendront ce nom et feront chorus louangeur autour de ces œuvres, qui en présagent d’autres, pour la dilection des lettrés !

1884

Épelons avec plaisir ces noms qu’entendit bruire l’oreille du Peuple.

Songeons aux festins, aux joies, à l’union des cœurs en de tels instants ; au luxe de certaines de ces cérémonies et au mouvement d’affaire qui s'ensuivra ! Que de groupes familiaux ragaillardis au spectacle de vies nouvelles qui vont s'ouvrir comme des fleurs au printemps, et féconder le monde !

Et les voici qui répondent de partout à l’appel de M. l’appariteur en redingote à larges boutons dorés, en ample pantalon à bande verte, assistant M. le maire, où M. l’adjoint délégué, en frac, cravaté de blanc et ceinturé de tricolore, les voici par ordre d’inscription.

Eugène Gourmeaux, avocat à Paris, fils des Gourmeaux-Nanquette, carolopolitains ; et Émélie Noël, fille d’un laïque versé dans les ordres, l’abbé Paul Antoine Noël, décédé curé de Pargny en 1877, et de Adèle Gros, morte en 1864. Témoins : Charles Félix Gillet, notaire à Viel-Saint-Remi, et le maître verrier Pol Charbonneaux, 38 ans, cousin des Noël, rue Saint-Symphorien, 33.

Hubert Davenne, des tissus, rue des Élus, fils du peintre Davenne-Fournier. Ce marieux eut un jeune frère qui fit sa petite classe chez les Frères des Écoles chrétiennes du Jard, vers 1865. Joli et gracieux blondin, beau comme les Petit-Jésus de Raphaël, haut comme une bonne, rieur, grassouillet comme une caille, boitillant à l’instar d’un canard naissant, il était, ce gosse, le chou-chou de son jeune maître en robe de bure, son gaga, ainsi que disaient les jaloux.

Hubert, qu’on verra fidèle à la firme Berney & Gérard jusqu’à la liquidation, épouse l’une des filles du peintre Thiérot-Rouy, Marie-Antoinette, rue Neuve, 35, en cette maison basse démolie en 1923, pour reconstruction ; et où, de longues années, la Mère Perron dirigera une bergerie de mioches. Thiérot avait réintégré sa maisonnette en 1920, dans ses ruines ; il y mourut octogénaire en 1922. Deux de ses filles, l’une célibataire ; l’autre, divorcée Lefils ; occupent en 1934 cet immeuble rouillé de souvenirs centenaires.

Charles Louis Antoine Diot, 25 ans, chef du portefeuille d’assurances titularisé par son père, Arsène Diot-Bourquin, rue Ruinart, 28. En sa prime jeunesse, ses parents habitant rue du Bourg-Saint-Denis, 86, – il fut enfant de chœur à Notre-Dame et porte-queue de l’archevêque J. F. Landriot. Cette maison avait été achetée en 1871 par Auguste Petit-Rousseau, constructeur de la rue Petit-Roland, qu’il habita jusqu’en 1885, date à laquelle y vint demeurer le Dr Louis Robin-Bardin, futurs médecin-major aux Pompiers.

Les deux sœurs Racine, rentrayeuses à la firme F. Lelarge, faisaient alors partie de la joyeuse et vivante cohorte dont Reims se glorifia en tous temps, filles de beauté et d’esprit ! Brunes toutes deux, d’un noir d’ébonite ! l’une brachycéphale à front têtu, tête ronde, nez mutin ; l’autre, dolichocéphale non moins somptueusement casquée : elles furent les étoiles de nos Bullier et Mabille de faubourgs. Leur père Hippolyte Racine-Rousselle, fondeur en fonte, rue de l’Équerre, 4, venait de fiancer son aînée, Blanche-Séverine, juste à l’heure funeste où elle eût pu coiffer Sainte-Catherine. O joie ! car ce n'est pas une mince responsabilité de veiller à la vertu d’aussi belles et ardentes Vénus !

Un bon parmi les bons, à tous les titres : Louis Mailfait (Hubert), musicien de talent et dévoué aux œuvres locales, de Beaumont (Ardennes), 28 ans, rue Petit-Roland, 37. Il est organiste à Saint-Remi, et sera sous peu chef de la Musique municipale des Sapeurs-pompiers, en succession de Ernest Lefèvre. En 1930, on le retrouve encore organiste à Saint-Louis-en-l’Île, à Paris. Mort peu après.

Mailfait épouse une aimable représentante de la tribu épicière des Ledoux, indigènes de Par-en-Haut, confinés entre Dieu-Lumière et le bas de la côte raide de Fléchambault. Marie Ernestine, issue des époux Ledoux-Lefèvre, rue des Créneaux, 4. Son beau-frère Auguste Guilbeaux est à Vouziers. L’oncle Pierre Joseph Mailfait était jadis libraire sur la place Ducale, à Charleville. D’autres Ledoux sont dans l’épicerie, carrière sans aléas et nullement exténuante. Entre le métier à filer-renvideur et la balance avec ses petits poids, pas d’hésitation pour ses braves ! – que voici d’ailleurs : Hubert, déjà au repos rue Hincmar, 33, et Adrien, en exercice rue Saint-Bernard.

Louis Mailfait, chef à la Fanfare des Tonneliers et compositeur inspiré des muses élégiaques, voire folichonnes, à preuve sa pétillante Polka des Grelots rémois, était de haute taille, légèrement voûté, le visage oblong adorné d’une barbe à la Camille Pelletan, son sosie, de longs cheveux rejetés sur le crâne, à l’artiste, grisonnant déjà, doux et bon, parfait et galant homme, d’un caractère condescendant auquel il dut nombre d’amis, génie moyen et sans prétentions, ne portant ombrage à aucun de ses pairs et confrères, rien d’extravagant dans les conceptions ; de plus riche de cette modestie si rare dans la profession. Un bâton de chef plutôt mou, ondulant, sans nervosité, à entrain modéré, mesure alanguie, plutôt au ralenti qu’à l’accéléré, comme certains mouvements de réveille-matin ! – beaucoup moins exigeant à l’égard des exécutants que son prédécesseur aux Pompiers Ernest Lefèvre, et à 100 lieues de la fougue entraînante d’un Gustave Bazin ! lequel accrochait ses musiciens au bout de son bâton pour les lancer dans l’arène.

On doit à ces dévoués serviteurs de la musique à Reims ces remarquables sérénades au kiosque de la Patte-d’Oie qui firent, aux années supportables d’avant-guerre, nos délices à tous.

Sous ces maîtres, la Musique municipale fut longtemps la première harmonie de France. Entre Lefèvre et Mailfait, cette phalange fut sous le bâton noueux rugueux, d’un Sanglier des Ardennes, Poursain, originaire de Liry (Ardennes) qui, par un manque de touche et des habitudes autoritaires, contractées en caserne au temps où il était chef de musique militaire, réussit en peu de mois à s’aliéner le cœur et la sympathie de ses subordonnés volontaires. Poursain avait gardé des zouaves sous ses ordres l’allure raide et cassante, avec des appels brusques du pied, comme il sied à un répétiteur pour allegros et pas redoublés plutôt que d’ouvertures ou de symphonies : il devient bien le type du soldat de carrière, à tête rase, moustache épaisse et rébarbative. On contait de ce musicien au pas accéléré que, enfant, il s'exerçait à tirer des sons harmoniques d’une paire de pincettes à charbon ! Prédestination ? !

Une famille de Garnier, de La Chalade, vint, vers 1870, habiter à Reims où ses environs. L’un d’eux, Eugène, est, en 1884, verrier chez les Grandrut de Courcy, et a son pied-à-terre dans notre ville, pour son week-end, rue Simon, 34. Il est fils de Jacques, verrier à Graville-Sainte-Honorine, près Le Hâvre, et d’une demoiselle Bernier, morte à La Neuvillette, en 1871. Son frère Nicolas est également verrier à Courcy, et son oncle, Nicolas Auguste Guillemin, médaillé militaire, est chauffeur au calorifère de notre Hôtel-de-Ville.

Le mariage d’Eugène rassemble la tribu dans une salle du restaurateur Sellier, faubourg de Laon, où chacun y va de sa goualante à l’heure de la digestion. Un Garnier de La Harazée et un autre, batteur d’or à Paris, rue Aumaire, sont de la noce.

Charles Edmond Doyen, 40 ans, médecin à Hermonville, fils du Doyen-Quénet, boulevards Gerbert, 14, épouse en secondes noces Eugénie Pilon, 45 ans, de Verdun, demeurant rue Chabaud, 25.

Bernard Martial Saint-Avit Delpit, 32 ans, natif de Castang (Dordogne) fils de l’ex-député Martial Delpit et capitaine d’artillerie à La Fère, épouse Caroline Pauline, 21 ans, fille du général de division baron Berge-Andrès, rue du Marc, 9. Témoins : baron Pron, ex-préfet du Bas-Rhin, conseiller général d’Eure-et-Loir ; comte de Faubournet de Montferrand, lieutenant de vaisseau, beau-frère de l’époux ; général Février, commandant du VIe Corps, à Châlons ; vicomte Dijeon, ancien pair de France.

L’ébéniste Jules Howald, 21 ans, déjà veuf, rue Brûlée, 54, et Louise Boden.

Jean-Baptiste Villain, des tissus chez Edmond Rachel, rue Pluche, 8, fils de Villain-Censier, et Louise Brouardelle, des Brouardelle-Drot, rue des Capucins, 114. Un frère du mariée, Gustave, est chemisier rue Pluche, 1.

Le trieur de laines Victor Dubois, 23 ans, de Rethel, fils de Dubois-Connaissant, rue de Cormicy, 35, et Ernestine Gérard, de Charny-lès-Verdun ; divorcé depuis, et ayant perdu la vue, il a trouvé une compagne dévouée, vrai sœur de Charité, attachée de 1924 au guichet du Palais rémois jusqu’en 1929, il achève des jours assombris dans une bicoque à la Cerisaie, près Fléchambault.

Louis Alexandre Gaury, dessinateur industriel, rue des Filles-Dieu, 16, et Eugénie Démonflin.

Jean Craig, 22 ans, fils de Craig-Carré, contremaître au peignage Isaac Holden, rue des Moissons, et Marie Hanstrate, 18 ans, de Croix (Nord), boulevard Carteret, 84.

Jean Craig est un aimable garçon, brun et svelte, ingénieur, et, à ce titre, fut chargé de l’édification des nouveaux bâtiments où les peigneurs rassemblèrent leurs triages et magasins à laines brutes, angle Moissons et Houzeau-Muiron, en 1883.

Le premier de ces ateliers fut inauguré en 1884 par le chantier des trieurs de la firme H. Picard-Goulet fils, sous les contremaîtres Désiré et Eugène Dupont.

Ces ateliers furent au début chauffés au moyen de larges poêles en fonte qui offraient le grand inconvénient de fournir une chaleur étouffante, occasionnant des congestions mortelles. On y remédia par le montage d’une tuyauterie à vapeur.

Ces magasins ont été détruits de 1914 à 1918, et recouverts depuis de maisons de rapport. Les ateliers de peignage ont eux-mêmes disparus, et, sur une partie de leur emplacement, a été ouverte une rue, dédicacée à la mémoire de l’avocat Fernand Labori, enfant de Reims.

Edme Henri Bondoux, 31 ans, de Saint-Saulge, près Nevers, ingénieur à Decize, et Marie Agnès, 19 ans, fille de Auguste Lhoste-Blin, nièce de Lhoste-Pérard, rue de la Peirière, 2.

Émile Jurion, trieur de laine, de Sault-lès-Rethel, 33 ans, veuf de Catherine Guerbé, rue de Belfort, 13, et Catherine Delaître, veuve de Louis Dubois, peintre, 41 ans, débitante rue des Romains, 170, angle route de Saint-Brice (rue Ernest-Renan).

Venaient se restaurer à cette gargotte familiale les trieurs de l’usine Marteau frères, voisine de là. On y mangeait souvent la soupe au lard et aux choux, aromatique et bourrative, arrosée de bon vin rouge de pays.

Le quartier avait l’avantage d’un ravitaillement en boisson fortifiante et réjouissant le cœur par une bistroquette de rien du tout, la mère Michel et son chat angora, dont le destin fut de finir en gibelotte (le chat, non la patronne !) – la bonne femme ayant des relations familiales dans le vignoble de la vallée de la Marne.

Bien fols eussent été ceux qui n'auraient point voulut en profiter ! Son ginglet sortait de cuves à raisin blanc pour rouge comme seuls nos coteaux rémois en produisent.

En ces temps, la filature des frères Charles et Victor Marteau, était en pleine prospérité. Son acheteur de laines était Benjamin David, violoncelliste réputé, propre neveu du bloussier Samuel Moch, de Strasbourg.

Les trieurs de laine qui y travaillaient à façon ou aux pièces, à raison de 2 fr. 75 aux cent kilos pour toisons en suint de La Plata, arrivaient, en courts jours de février, à réaliser un salaire de 11 francs par journée de huit heures environ. Fructueuse période pour la corporation, qui, soumise depuis à l’emprise immorale des marchandeurs ou entrepreneurs eut à déchanter, – une part léonine revenant à ces mercantis déshonorants sur les prix de façon.

Jean Bentley, contremaître aux Vieux Anglais, après avoir été garçon d’honneur aux noces de J. Craig, se marie à son tour. Grand et bien découplé, portant barbe pleine, en dépit de ses 23 ans, excellent mécanicien, il est fils des Bentley-Warey. Sa promise, Élise Cornélie, née à Anzin, est fille de Sohier père, chef magasinier à la même usine, chargé de la manutention, à la Cave, des peignés, blousses et déchets.

La Cave était une annexe en sous-sol, servant de remise, et où l’on introduisait les produits manufacturés par wagonnets sur rails, le long d’un couloir en tunnel sous la rue des Moissons.

Le mariage eut lieu à la chapelle Wesleyenne qu’avait fait édifier, pour son usage personnel, le peigneur Jonathan Holden. Les noces se firent somptueusement à la grande salle servant de Cercle à cette sorte de colonie anglaise logée dans une série de maisons identiques, qui constituait, avant-guerre, comme un hameau dépendant des bâtiments du peignage, entre la rue Houzeau-Muiron et le boulevard Saint-Marceaux, au pied de la haute cheminée de 82 mètres, dite de la Potasse.

Ce long et large tube en briques, datant de 1883, point de mire des artilleurs allemands des forts de Berru et Nogent, servit d’observatoire indestructible aux défenseurs de Reims ; elle fut abattue en 1923, quand on eut à déblayer le terrain pour la construction d’immeubles de rapport.

Les coquettes maisons de ce hameau étaient réservées au personnel de direction du peignage, en majorité de nationalité anglaise. Y habitaient notamment, en 1884 : en outre des Bentley, Thomas Gledhill, les Foster, Hiram Hartley, Samuel Lucas, les Smith-Rayner, Witaker, Sohier, Craig, Samuel Delacroix, etc.

La salle du Cercle formait, pendant la semaine, lieu de classe enfantine. C’est là qu’on fêtait Christmas, après avoir, en novembre, renouvelé l’anniversaire de Guy Fawkes, cet illuminé qui tenta d’incendier le Parlement de Westminster ; on brûlait l’effigie du criminel, sous forme de mannequin en paille, dans la cour de la Cité anglaise, à l’ombre de la cheminée de la Potasse, avec force manifestations de loyalisme anglo-saxon et luthérien.

Chacune des villas possédait son jardinet ; il y avait une buanderie commune.

Un pasteur appointé par J. Holden, – le vicar, – officiait pour la colonie dans la chapelle de la rue des Moissons.

En 1930, certains de ces immeubles restaurés demeurèrent la propriété de leurs occupants, l’Administration du peignage détruit et non rétabli, les leur ayant cédé à bon marché. Les frères Édouard et Henri Smith-Rayner, morts en ces derniers temps, y habitent.

Sur le boulevard Carteret habitait, en 1914, le musicien Charles Stenger, professeur de violon, la veille encore, chef à la Philharmonique.

Louis Édouard Poirrier, 28 ans, apprêteur, rue Gambetta, 102, et Élise Amélie Fusy, 17 ans, fille de ce cordonnier de la rue du Jard qui mourut volontairement, accablé sous le faix et conjungo partagé avec une épouse, digne mère de famille, mais acariâtre au suprême degré.

Edmond Croutelle, 31 ans, rue Ponsardin, 6, fils des époux Croutelle-Blanchet, marchands de nouveautés à Fismes, et M. L. Félicie Jouette, 22 ans, fille des Jouette-Blocteur, qui, d’épicier à l’angle des rues du Barbâtre et de Contrai, est passé au service de la Compagnie du Gaz, et habite rue de la Clef, 7.

Un as de l’école des Frères du Jard, Paul Denoncin, 30 ans, ingénieur à Saint-Souplet, et, par la suite, à l’usine J. Poullot, rue Saint-Thierry, à Reims, et Marie Mathilde, 20 ans, fille de Léonard Varin-Grandsire, rue des Capucins, 33.

Ex-boursier à l’École des Arts et Métiers de Châlons, avec Léon Simon, que les Frères du Jard, firent entrer au service des champagnes Louis Roederer, Denoncin était l’orgueil de la classe dite d’Honneur.

Léon Simon gravit tous les échelons de l’échelle sociale au temps ou le champagne gagnait gros. Ses serviteurs étaient richement dotés. Il n’en était pas de même pour les déshérités de la laine et des tissus !

L’industrie rémoise ne donnait pas de gros salaires à ses employés, tout en exigeant d’eux un maximum de labeur. Matin et tard dans la soirée, surtout aux époques d’inventaire, il fallait faire acte de présence. En véritables esclaves, toutes les heures de leur existence apparaissaient, sauf exceptions, dues au patron.

Ces boss du tissu avaient, eux aussi, à leurs débuts, été menés dur ; ces chemineaux de la flanelle et du bolivar, avaient usé leur jeunesse à courir d’une ville à l’autre porteurs de leur besace d’échantillons. Durement traités, ils devenaient aisément durs aux autres, par entraînement.

Après le repas du soir, combien de ces commis de nouveautés ne furent-ils astreints à revenir au bureau ou au magasin pour y consacrer des heures ennuyées à des inventaires de détail qui n'en finissaient pas !

Et cette semi servitude pour un salaire qui, en général, permettait à peine à ces chefs de famille de joindre les deux bouts. Des appointements de début à 25 fr. par mois n’étaient pas rares ; quant aux favorisés qui se flattaient d’annuités de 5.000 fr. on les eût comptés par unités !

Compensation : si peu rémunérée qu’elle fût, cette position sociale présentait une surface de bon aloi, reluisante, permettant de se distinguer de la classe purement ouvrière. Elle favorisait les mariages moyens, à dot insignifiante peut-être, mais d’une grande utilité ; nos demoiselles de la petite et moyenne bourgeoisie commerçante ou artisane appréciaient cette satisfaction de vanité de se dire l’épouse de tel ou tel employé de telle ou telle haute firme des tissus de la laine !

Ainsi se former à Reims un noyau de familles se situant entre le magma ouvrier et une bourgeoisie plus ou moins nobiliaire de naissance ou d’aventure, qui détenait le pouvoir et les emplois à la fin du XIXe siècle.

Cette classe médiane prit conscience de sa force, et en tira parti de son mieux, jusqu’à l’heure ou le flot montant des électeurs-ouvriers ait mis la main sur les rouages de la vie publique. La démocratie s'efforçait de la sorte à démontrer qu’elle n'est pas un vain mot sur une vaine chose, sans toutefois avoir établi la preuve qu’elle est le dernier mot du progrès social !

Henri Arthur Walfard, 25 ans, rue de l’Arquebuse, 3, fils de H. Walfard-Galien, et Virginie Blanche Truchon, 19 ans, fille d’Alexandre Truchon-Desautels, vannier, rue de Contrai, 34. Henri sera fondé de pouvoirs à la firme de champagnes George Goulet. Son frère Armand Walfard-Binet, rue Coquebert, 45, reprendra cette marque. Les autres enfants Walfard-Galien, sont Gustave, Georges et Marie. Gustave a épousé une fille du peintre Détré, et sera l’associé d’Armand. Georges épouse Madeleine Pierre , fille d’un fonctionnaire retraité de la Compagnie de l’Est. Marie sera l’épouse du médecin-major Lardennois. Un beau-frère par les Truchon, Vermonet, est artiste vitrailleur, successeur de Marquant-Vogel ; l’oncle Eugène Truchon, tonnelier rue du Cardinal-Gousset, est le père de Mme Ernest Kalas. Virginie est décédée en 1922.

Louis Bertozzi, sculpteur figuriste, rue de Vesle, 33, fils d’Eugène Bertozzi-Moulineau, et Françoise Adélaïde Mathieu, fille de Xavier Mathieu-Merlin, sculpteur chez Wendling rue Hincmar, 14. Témoins : Louis Merlin, ex-restaurateur place d’Erlon ; Julien Coutant, surveillant à la Maison de Retraite, cousin des Mathieu, le maire, Octave Doyen, et l’aïeul Moulineau, ferblantier à Paris.

Louis Eugène Bourgeois, de Castries (île Saint-Louis, aux Antilles anglaises), fils de Constant Bourgeois-Niochet, consul des États-Unis et de France, rue Jeanne-d’Arc, 21, et Blanche Marquant, fille de l’apprêteur Marquant-Collet, boulevard Gerbert, 12. Le Dr Collet, médecin, réside à Saint-Thierry ; Félix Marquant est rentier rue de la Renfermerie, 17, et Alexandre Bourgeois, de même, rue des Chapelains, 2.

Octave Guelliot, de Vouziers, 30 ans, rue de la Prison, 1, fils du Dr Guelliot-Périnet, et Marie Joséphine Claire Renard, fille de Renard-Gamahut. La magistrature sera représentée par le procureur Duboin, rue Sainte-Catherine, 2, la faculté de médecine, par le Dr Luton, rue du Levant, 4 ; la cité, par le sénateur S. Dauphinot, 63 ans. Un frère de la mariée, Maurice, est encore d’âge à biberonner, si toutefois il est déjà né ?

Philippe Prenat, 23 ans, de Husseron, près Saint-Amarin (Alsace), fils de Prenat-Peter, facteur au Chemin de fer de l’Est, rue Saint-Thomas, 26, et Marie Jeanne Delbrut, de Limoges, 25 ans, professeur de piano, fille de Delbrut-Jaudoin, chef cuisinier au Lycée.

Prenat sera au service de Hécart & de Vertus, fabricants de tissus, rue des Cordeliers, successeurs du père Lhoste dit Bon Dieu, dont De Vertus est directeur de l’usine, rue Jacquart, 75. En 1887, il entrera à la firme de laines H. Picard-Goulet fils, rue du Levant, 9. Témoins : Léon Flobert, sous-lieutenant au 128e R.I. à Sedan ; le sculpteur marbrier Alexandre Lefebvre-Klein, rue de Mars, 63 ; Valentin Martin, mercier, rue du Faubourg-Cérès, 11.

Prenat avait été élève des Frères du faubourg de Laon, où se distinguaient avec lui, par la précocité de savoir, les Debossu, Prudent Queutelot, Michel, Méon, etc. tous disparus depuis, lui-même en 1934, à Reims, chez ses enfants, rue Lamouche.

Charles Platelle, coiffeur et marchand d’amorces pour pécheurs à la ligne, asticots, vers de vase, pâte à l’absinthe, vairons et pain de chènevis, rue de Vesle, 62, fils de Platelle-Harbonville, perruquier à Écordal (Ardennes) et Alexandrine Mathieu, fille de Mathieu-Hémart, marbrier rue du Barbâtre, 66 ; leur fille a épousé Tourte, charcutier à Vouziers, lequel s’est retiré à Avize, où leur fils Roger est négociant en vins. Tourte père avait succédé à Vouziers au charcutier Malval, dont la maison avait acquis une célébrité sanglante lors de l’assassinat d’un père par son propre fils : le magistrat Bouchardon en a ressuscité les péripéties dans un livre émotionnant.

Jean-de-Dieu Henri Goulin, de l’école des Frères rue Perdue, 25 ans, fils du cordonnier Goulin-Cochet, rue Ruinart, 29, et employé aux tissus à la maison Henry Mennesson ; et Félicie Griffon, 24 ans, fille de Griffon-Loth, cultivateur à Thillois. En 1872, Goulin avait obtenu un prix cantonal à un concours institué entre écoles primaires de la Marne. En 1919, il fut candidat catholique aux élections municipales de Reims. Actuellement, il est président de la Fédération des Écoles chrétiennes de notre ville.

Charles Loth, 27 ans, rue Libergier, 67, fils de Loth-Bonet, décédé à Cormontreuil, et Emma L. Joséphine Mauroy, fille de Arthur Mauroy-Lescaille, rue Landouzy, 57. Témoins : Paulin Loth, matériaux de construction, rue Chabaud, 30 ; Jean-Pierre Hubert, fabricant de tissus, rue des Cordeliers, 9 ; Joseph Salaire, idem et président des Prudhommes, rue Saint-Étienne, 11 ; et J. F. Mauroy, entrepreneur de travaux publics, rue Savoye, 32.

Jules Amédée Frumence Dumont, de Rhû-Cys, près Braine, garçon de restaurant chez Fauchat, cour Chapitre, et demoiselle Thierry, de Sainte-Preuve (Aisne). Ce restaurant de la cour du Chapitre fut en vogue assez longtemps : sa clientèle se recrutait parmi les commis de champagne, des tissus et de la laine. Le lutrin de Notre-Dame y déléguait ses as : Aurélien Lefèvre, dit le p’tit Lefèvre et son alter ego Remy, tous deux ténors à la cathédrale ; Josué, Dehec, et parfois le gros et grand Thuillard.

Pierre Brosius, de Wasserbillig (Luxembourg), menuisier rue Pluche, 4, fils de Mathias Wilhelm Brosius-Lieser, ouvrier de fabrique, et Anna Koenig, de Brouck (Luxembourg) fille de Koenig-Grethen, maçon. Un Brosius, instituteur adjoint, prêta son concours d’artiste dramatique aux conférences de l’Université populaire et de la Ligue de l’Enseignement. On l’a entendu dans le Gringoire de Théodore de Banville, où il remplissait excellemment le rôle de Louis XI. Une Brosius fut la Jeanne-d’Arc de la cavalcade historique de 1929, à Reims.

Just Doublemart, trieur de laines, de Ribemont (Aisne), 29 ans, et Élise Bliard, 36 ans, rue de Mâcon, fille de Albert Bliard-Jourdain, décédé en 1862. En 1914, on le vit des premiers parmi ceux qui quittèrent Reims avant l’arrivée des Boches, dont on révélait de partout les sauvageries et la haine des Français. Il emmena avec lui et son berloquin son épouse en détresse, pour ne revenir, de Toulouse à son foyer dévasté en partie, qu’en 1923, et reprendre sa place à la claie qu’à l’heure propice où le peignage du boulevard Dauphinot réouvrait ses portes et ateliers.

Alphonse Droux, 26 ans, courtier en laines, impasse de Cormicy, et Élisa Christine Dorcas (?) Picart, repasseuse lingère, de Sillery. Droux mourut peu de mois avant-guerre, rue Houzeau Muiron, 24, par suite de chute dans un escalier, provoquant une congestion cérébrale. Fut successivement au service des lainiers Strohl, H. Mennesson, Glatigny, Lartilleux frères, après avoir été l’associé de Émile Lécuyer.

Celui-ci était en 1884 maréchal-des-logis au 25e R.A. à Châlons, et secrétaire de l’officier d’habillement. Aux premières heures de l’invasion, il habitait rue de Trianon, ayant son bureau rue Saint-Symphorien. Ici et là, tout fut incendié.

Lécuyer voulut tenir contre toute espérance, à l’exemple de milliers de braves, mais, devant l’aggravation de la situation, il fallut, pour sauver son existence, menacée à toute heure de jour et de nuit, abandonner tout ce qui donne du prix à la vie : des milliers d’autres l’avaient déjà fait, l’amertume au cœur ! il quitta Reims en octobre pour Paris, avec son ami Charles Lecomte.

Lecomte mourut en exil à Aix-en-Provence, dès 1915, chez la fille de son ami Maupinot, institutrice là-bas, qui l’avait recueilli, avec son épouse, Eugénie Lerzy.

Lécuyer survécut jusqu’en 1930, exerçant son métier de courtier en laines, rue Paul Saunière, 16.

La veuve du peintre Émile Vermonet, Mlle Thiébeaux, se remarie avec le clerc d’huissier Roland, de Juniville.

Alexis Ernest Pérard, de Saint-Masmes, rue de Venise, 96, veuf de Dlle Vigreux, et la sœur du musicien Mailfait, Cécile, sa voisine du nº 53.

Eugène Bagnéris, de Hagueneau, 31 ans, professeur à la Faculté de Nancy et fils du directeur de l’École forestière au même endroit, et Marie Marguerite Givelet, 24 ans, fille de Edmond Givelet, fabricant place Belle-Tour. Il s'établit oculiste à Reims, où une demoiselle Bagnéris tient pensionnat de jeunes filles.

Georges Willième, 28 ans, ingénieur des Arts et Manufactures, fabricant de papier à Outrebois (Somme), fils de Willième-Braine, rue Brûlée, 38, et sa cousine Sophie Émélie, fille de l’imprimeur Matot-Braine.

Clovis Houppé, régleur papetier, rue Gambetta, 106, fils du cordonnier Houppé-Godfrin, et Victorine, fille de son voisin du 104, Favréaux-Tombois, dit l’Homme à la loupe, brocanteur horloger. Houppé est mort en 1923, au service de l’Indépendant rémois.

Paul Émile de Salivet de Fouchécour, d’Auvers (Oise), capitaine du Génie, rue de Pouilly, 8, et Marie Madeleine, fille du gros Casimir Érard, rue de la Peirière, 18. L’oncle de la mariée, Auguste Érard, avait été notaire à Belfort, et habitait rue de Venise, 60.

Baruch Haguenaüer, ministre officiant à la Synagogue rue Clovis, demeurant rue Hincmar, 65, fils de Haguenaüer-David, tissus à Nancy, et Brunette Fribourg.

Un ex-conditionnel au 91e R.I. à Mézières, en 1878-79, Émile Mauroy, rue des Grands-Murs-Saint-Remi, 9, fils de Mauroy-Loiseaux, octroyeur, rue Buirette, 32, et Marie Pasquier, de Mourmelon-le-Grand, dont le père est agent d’assurances rue de Fléchambault, 3.

Gérasime Louis Aubry, né à Châlons en 1856, de Hubert, berger devenu trieur de laines, et de Rose Hattat ; et Marie-Rose Pigeon, dont le père était ouvrier fileur rue du Jard, 84. Un frère utérin du marié, Isidore Philéas Hattat, cultivateur à Soudron (Marne), avait été reconnu par Hubert Aubry, dont il porte le nom.

Leur mère, qui portait des lunettes à grosses branches et à fortes dioptries, avait été, de ce fait, affublée du surnom de mère Lunette par les trieurs, des moqueux de bêtes !En son âge mûr, Rose Hattat conservait des vestiges d’une beauté qui avait dû être remarquable.

Un frère de la mariée, à l’époque soldat au 67e R.I. à Soissons, faisait partie de la clique de cet altier corps de troupes : il devait être plus tard le tambour-major Pigeon, des Sapeurs-pompiers de Reims, d’allure martiale et habile en ses évolutions de canne à pomme d’argent. Sa longue et souple barbiche brune et flottante lui conquit le cœur des belles.

Louis Aubry, trieur comme son père, habitait avec ses parents chez le boucher Henry, rue Trudaine. Il avait fréquenté l’école des Frères du Jard au temps où les Aubry demeuraient au n° 7 de la rue : il fut de l’équipe des troupes de Joseph Fontaine, combattant les insulaires du IIIe canton, à coups de fronde et de cailloux des rues . Louis Aubry décéda en 1906, faisant alors partie du chantier Collet frères, boulevard Saint-Marceaux, sous la férule douce et silencieuse d’un vieux chef-trieur, le père Leloup, originaire de Sommepy.

Il avait là comme camarades de profession, des as du métier : Léon Templie, Chéry l’ex-zouave, Lesieur le bouffeur de viande de cheval, fort comme un turc ; Hobert père, dont un fils est, de nos jours, conseiller municipal, après avoir remisé le tablier de bistrot au Faubourg-Cérès ; le père Louis Baudart et son contemporain, le vieux ronchon Antoine ; Dudault, d’Aulnay-l’Aître (Marne), Jules Duchénoy, beau-frère de Henri Dallier, trieur antiquaire, et cousin de Duchénoy, sous-bibliothécaire de la Ville ; un Belloy ; Jules Sacré, aux muscles d’acier, et un barbouilleur de grimoires en temps de chômage et par les longues soirées d’hiver, auprès d’un bon feu : le nommé Eugène Dupont, qui perdit là 45 livres de graisse, tant le travail y était pénible, en raison d’un mauvais agencement des lieux et par l’égoïsme inhumain de patrons indifférents au sort de leurs ouvriers et pour qui : tout ce qui coûte dégoûte !

Revenons à nos ex-tondeurs de moutons. Hubert Aubry était Vosgien de naissance, un petit bout d’homme tout en nerfs, rusé matois, d’esprit gasconneur, et menteur comme un arracheur de dents : il mourut à la tâche, usé par le travail et frappé de paralysie.

Son fils Louis, lui, ayant abusé du tabac et du schnick, périt de tuberculose, laissant un fils, Raoul, qui, en 1910, était commis chez Auguste Français & fils, fabricants de tissus, rue Cérès, 32.

De ce même atelier, disparurent avant-guerre : Templie, le petit Dudault ; Belloy, à l’Hôtel-Dieu, Antoine et Baudart, les ancêtres Chéry, Lesieur, etc. Quelle hécatombe ! et, tout bien compté, lequel resta d’eux tous, sinon celui qui tape ces souvenirs !

Duchénoy était mort noyé en Seine, à Paris, pendant l’exil ! Brrrrooouuu ! On en a froid aux épaules !

On ne saurait trop insister sur les conditions déplorables dans lesquelles le Triage a été maintenu, de 1880 à 1910, par le Négoce des laines, à Reims.

En 1880, le marchandage été pratiqué sur une grande échelle. Et, en dehors du marchandeur, certains chefs trieurs avaient été recrutés parmi d’honorables citoyens, évidemment, mais d’une éducation et d’une intellectualité vraiment rudimentaires.

Là surtout, on vit que l’ouvrier sobre, économe et considéré, était sous-estimé et tenu à l’écart par les embaucheurs au bénéfice d’ivrognes et de dépensiers qui : à la fin de la semaine, pendaient la langue vers l’acompte hebdomadaire pour régler la note du bistrot et apporter à la ménagère l’écot de la semaine à venir.

En réalité, les employeurs préféraient avoir sous leur coupe ces déclassés toujours à court d’argent que les hommes économes qui n’attendent point le salaire du jour pour satisfaire aux besoins du lendemain. Avec les uns, on était tranquille : point de revendications, point de refus de concours pour une besogne insuffisamment payée, la nécessité obligeant les imprévoyants à accepter les minima qu’on leur offrait. Avec les autres, il eût été nécessaire de discuter des tarifs et passer par des exigences peu en rapport avec la théorie du travail à taux le plus réduit.

De sorte qu’on établissait cette situation paradoxale du mauvais ouvrier embauché de préférence au bon ! On vit des saboteurs, des goujats, des alcooliques, faire la loi dans les ateliers à l’encontre d’excellents trieurs et parfaits citoyens ! D’où abaissement du niveau moral professionnel et dépréciation du travail accompli.

En ce qui concerne le personnel des bureaux, même système : largement ou suffisamment appointé, l’employé eût réalisé des économies et, de ce fait, libéré de l’esclavage des besoins immédiats, il aurait pu tenir tête à des prétentions et à des menaces de renvoi injustifiables ; voire, si les appointements eussent été d’un calibre supérieur, le serviteur précieux, possesseur d’un capital suffisant, aurait parfois la volonté d’échapper au salariat pour s'élever au patronat.

Et alors !!! un monde renversé !..

Cette thèse rétrograde, des patrons cyniques ne craignaient pas de la soutenir publiquement, et, de longues années, elle fut la règle pour nos industriels et commerçants de haute lignée.

En 1908, la librairie publia : Souvenirs d’un maçon. On y trouve des remarques identiques, en un style châtié et avec plus de clarté.

« Un ouvrier sobre, appliqué, intelligent, est considéré par le contremaître comme un rival possible ; il est rare que le patron lui-même ne prenne par ombrage de qualités qui risquent, tôt ou tard, de conduire l’ouvrier à souhaiter un salaire plus élevé ou peut-être, à rêver une situation indépendante. L’ouvrier qui aime à s’enivrer sans que cela l’empêche de travailler aura chance d’être le plus en faveur, auprès de tous. Le patron envisagera que ce vice lui ôtera à jamais l’idée de se mettre à son compte. Et les hommes sobres manqueront d’ouvrages alors que le poivrot en trouve à son gré ! » Vérité incontestable !

De nos jours, on abrutit l’ouvrier de toutes les manières, dont les principales sont le ciné américain, certains sports où la force brutale et encensée, et le pullulement des cabarets, par quoi l’homme du peuple dissipe son salaire en le livrant à toutes les contraintes de la pauvreté et de la misère. On gouverne et exploite plus aisément une multitude d’ivrognes et d’ignorants qu’un peuple conscient de ses vertus et de ses mérites !...

Et, puisque nous en sommes à ce chapitre du travail de la laine, empruntons à un cahier de notes rédigées en vue de fournir des documents aux Études économiques ouvrières au XIXe siècle, certains détails concernant la situation du trieur de laines, obligé, comme tous les fils du peuple, de gagner son pain à la sueur de son front.

À propos du décès de l’épouse d’un trieur, on lit ceci dans la Tablette Rémoise, n° 39 : Mme Lesieur décède au pays de son mari, Mazerny (Ardennes) le 2 avril 1899, à 61 ans. Fille d’un trieur, Geoffroy. Gendre et beau-père travaillèrent longtemps à l’usine Collet-Delarsille, anciennement Wagner & Marsan, boulevard Saint-Marceaux.

Lesieur était un Ardennais de forte musculature, de charpente osseuse, travailleur infatigable, de peu d’intelligence, illettré, se nourrissant presque exclusivement de viande de cheval, par esprit d’économie et pour entretenir ses forces. En été, on commençait le travail à six heures du matin ; il en gémissait prétendant qu’on perdait le plus beau du jour ! Vrai cul-terreux, aimant peiner tard et matin !

Chez les Collet, les trieur était astreints à des travaux exténuants. Sans exagération, on aurait pu affirmer que les bagnards devaient, au soir de la journée, être moins fatigués qu’eux !

L’usine Collet a toujours été considérée comme un bagne par ceux qui y sont passés. En revanche, on y gagnait plus qu’ailleurs et on y était moins sujet à chômage... Mais, avec quelle dépense de courage et de résignation ! Cette épreuve provenait de l’incompréhension patronale des devoirs les plus simples et les plus évangéliques : rien n'avait été prévu pour faciliter la manœuvre des poids lourds ni pour épargner au travailleur les rigueurs de la chaleur et du froid. Il en eût trop coûté à la bourse de ces véritables pingres ! Et toujours cette hantise du prix de revient et de la concurrence !

Le trieur travaille aux pièces, du jour au jour : il est salarié d’après sa production, à tant aux 100 kilos de laine brute. Pour gagner sa journée, étant donné les incessantes manutentions qui entraient en partie dans l’établissement du prix aux 100 kilos, il fallait à ce trieur chez les Collet, passer sur la claie 3 à 350 kilos de laine en suint, au taux de 3 fr.75 les 100 kilos. Cette besogne réclamait 10 heures de travail consécutives. Sur ces 10 heures la manœuvre en exigeait 3 pour sa part : d’où nécessité de secouer ces 300 kilos en 7 heures ! Il ne pouvait être question, dans ces conditions, de prendre le moindre repos entre ces manœuvres.

Ces servitudes étaient nombreuses et impossibles à supprimer, à moins que les patrons eussent consenti à faire les frais d’une équipe de manouvriers. Réception et mise en tas, à bout de bras et à hauteur de plafond, des balles de laine (150 à 200 kilos chaque), en provenance du marché de Londres, laines d’Australie, achetées aux enchères par un courtier, en l’occurrence, le marchand de laines Louis Ponsart.

Tous les jours, livraison à l’atelier de dégraissage, la quantité de laine triée pour les besoins du peignage, avec brouettage, mise en tas avec mélange. Parfois, on recevait ainsi 1000 balles de laine, qu’on m'était au sous-sol ou qu’on empilait dans le magasin du rez-de-chaussée, voire sur un couloir pavé en pente, conduisant à ce sous-sol. Ces colis devaient être remontés à l’atelier de triage, situé à l’étage, au moyen d’une calandre à laquelle six hommes devaient s'atteler. Rien de plus exténuant et époumonant que cette bricole de forçat !

Pour y remédier, il eût fallu faire la dépense d’un moteur à vapeur !! La laine ayant été, en Australie, pressée serrée en balles, formait un tas compact et dur comme une pierre de taille. Pour détacher les toisons et les étaler sur la claie, afin qu’on pût en distinguer les parties, il fallait passer ces balles à la chauffe sèche : à cet effet, la balle été partagée, non sans efforts, en plusieurs pains que le trieur portait à dos sur les dalles de la chaudière à vapeur de l’usine.

La salle de chauffe, au 1er étage, été sillonnée de tuyaux brûlants et soupapes à enjamber, en veillant à ne pas choir soi-même ou laisser choir le dur colis ! Redoutable imprudence, que les règlements interdisent formellement. Mais il est avec les lois, comme avec le ciel, des accommodements ! et le garde-mines fermait l’œil, sans toutefois omettre de passer à la caisse à l’heure des étrennes !

Par bonheur, aucun accident ne survint : la providence dut y être pour beaucoup !

On aurait pu parer à cette pénible nécessité en installant, au long de l’atelier et à portée de l’ouvrier, un tuyau à vapeur, avec couvercle à claire-voie pour étaler les toisons... mais, avons-nous déjà dit : tout ce qui coûte dégoûte ! (On y fut obligé vers 1910).

En outre de ses travaux préliminaires, les laines triées, entassées entre des casiers et pilées sottement par un chef inintelligent ou, – que le ciel lui pardonne ! – indifférent à la peine de ses semblables, étaient mises en serpillières pour mise en magasin : ces emballages duraient parfois deux jours de suite. On s’y arrachait les ongles, tellement la matière avait été serrée aux pieds ! en un mot, un réel hard-labour infligé inconsciemment à ces innocents travailleurs !

En 1910, on se résolut, à la direction, à l’emballage immédiat, dès triage, ainsi que cela se pratiquait ailleurs : on expliquait cette besogne par la nécessité d’assurer un mélange parfait. Au surplus, ajoutait-on, cela s’est toujours fait de la sorte !

Et puis, ne faut-il pas justement que le gagne-pain fût accompagné de quelque peine ? La loi biblique n’a-t-elle pas précisé : à la sueur de ton front ! Hélas ! trop d’esprits racornis se sont accrochés à ce précepte pour justifier leur sécheresse de cœur et leur dédain de toute solidarité humaine ! Ils se croient absous en accomplissant les rites cultuels. Non ! ce ne seront pas les gestes qui compteront, mais les actes !

Pour le triage des laines dites de France, amenées par charrette à l’usine, on était astreint à l’emballage, la pesée et la mise en tas, par serpillières contenant 30 toisons.

Pour clore cet inventaire douloureux, disons qu’en hiver on n'était pas protégé du froid, et les mouchoirs se congelaient dans la poche du sarrau bleu. Quelles piquettes ! à en pleurer ! et l’été, sous ce toit pesant de tuiles, quelles poussées de chaleur : les mouchoirs se transformaient en éponges, surtout quand il fallait porter de la laine sur les chaudières !

Ah ! on l’eut dure à traverser, cette période, et nos successeurs n’apprécieront jamais trop les améliorations sociales apportées dans l’industrie textile par des patrons plus conscients de leurs devoirs.

À ce tableau en pâte hollandaise, un cadre en bois de rose : d’abord, ce salaire supérieur à la moyenne ; et ces petits déjeuners du frais matin des étés !

À 8 heures, après déjà 2 heures de travail, les plus fructueuses de la journée, – on s'installait sur des bancs, ou à même le gazon, sous les tilleuls d’une grande cour, pour y déballer le contenu du repas, quelque plat de charcuterie ou un restant du souper de la veille, et le déguster en se rafraîchissant d’une chopine du vin de nos coteaux. Ah ! les bonnes minutes compensatrices ! Souvent, il y avait des extras ! On allait en bande et dans le costume de toile bleue, sarrau et salopette, en savates solides ou vieux souliers usagés, casser la croûte chez les bistrots favoris : la mère Truchon, au Point-du-Jour, rue de Cernay ; la mère Aubert rue Houzeau-Muiron ; Delcroix, rue des Moissons ; Longatte, boulevard Saint-Marceaux ; Tardieu, rue de Bétheniville. Que ce soit sous l’œil divin du firmament ou sous le plafond nu de ces Mères, on appréciait là le bonheur de vivre, de sentir qu’en réalité ont était des humains, et non des bêtes de somme ! Ah ! combien bénies, ces heures !!

Retournons maintenant à la noce.

Camille Découleur, de Saint-Masmes, donneur de trames au Mont-Dieu, et Eugénie Trousset, fille de Trousset-Étienne, trieur de laine, puis bouchonnier chez Foucher, rue Gambetta, 5.

Donner des trames, c’est distribuer aux tisseurs les bobines de fil à intégrer dans les tubes ou canettes et qui constituent la trame du tissu. Il importe de ne pas donner à l’ouvrier de la canette de 100 pour de la canette de 120. Ce chiffre signifie que le fil est au taux de 120.000 multiplié par 700 et divisé par 1000, soit net : 84.000 mètres au kilo. On file couramment jusqu’à 160.000 mètres, obtenus avec les laines les plus fine d’Australie.

Georges Abinal, de Mascara (Algérie), capitaine au 10e R.A. à Nancy, fils de ce commandant d’état-major à l’armée d’Orient qui mourut en mer, le 26 juillet 1855, à bord du vaisseau le Gange, et de Victorine Crapez, alliée aux Henrot. Il épouse Louise Alberte Dutemple, de Pierry (Marne), fille de Gustave Dutemple-Oudin. L’un des témoins, Alfred Bonnaire, ex-brasseur à Bavay (Nord), habite chez H. Henrot.

Victor Jacta, le beau Jacta, au teint d’albâtre, yeux noirs en amandes, visage ovale, cheveux bouclés noir-de-jais, 22 ans, de la banque Maucroix, et fils du menuisier Jacta-Décoré, épouse Victoire Monjean, fille du tisseur Monjean-Adam, rue Favart-d’Herbigny. Témoins : le peintre Puisieux (Arthur), 23 ans, rue des Romains, 2 ; l’aïeul Nicolas Jacta, rentier au pain de seigle à Fresne, près Bourgogne ; le menuisier Simon-Gardan, rue du Barbâtre, 75.

Léon d’Anglemont de Tassigny, 22 ans, courtier en champagnes, fils d’Alfred de Tassigny-Delbeck, rue Saint-Guillaume, 21. Tout le portrait de son père, il habite l’hiver, boulevard Gerbert, 21, et en été, le château de Maison-Rouge, près Les Alleux (Ardennes) où, après guerre, en 1929, on dénombre 150 chambres. Dans les communs : une bergerie abritant 900 moutons ; une étable à bœufs, vaches, porcs et tous animaux comestibles susceptibles de conquérir des diplômes aux concours agricoles. En outre, un poulailler abritant les meilleures espèces ; un aquarium, une serre jardinière et fruitière, tout en somme ce que comporte un domaine seigneurial bien agencé. Son épouse sera la cadette des Renard-Gamahut, dont l’aînée est Mme Guelliot.

Alexandrine Hélène, née en 1864 à Rambouillet, patrie du mérinos. Artiste et érudite, passionnée d’antiquités et de meubles de vieux styles, Mme d’Anglemont hospitalisait, en 1920, boulevard Gerbert, et dans une sorte de musée provisoire installé sous une baraque en minces cloisons – où retentissaient sans répit, que le temps d’en griller une ! les coups de marteau de l’ébéniste Émile Gautier, rétameur d’armoires vétustes, – le fameux coq de Saint-André, descendu à coups d’obus, de son clocher par les aimables Borusses mettant Reims à feu et à sang. Depuis, ce volatile en zinc a regagné son perchoir.

À ces noces de Gamache, que de personnalités rémoises bien connues ! Entre toutes, l’oncle Adolphe de Tassigny, ex-garde des Eaux-et-Forêts ; le vice-président du Tribunal civil, second du procureur Renard, Joseph Le Maout, austère figure de magistrat à la Omer Talon, dont il semblait avoir hérité la droiture et les aptitudes ; le sénateur Victor Diancourt, habitant le Mont-Vernon de la place Godinot ; l’autre oncle, vénérable patriarche à la tête chenue, au visage rond et bonasse, Arthur de La Morinerie, en son hôtel rue Libergier, 25 , qui devait, après-guerre, servir de Sous-Préfecture provisoire jusqu’en 1934. Tout le Gotha rémois d’alors, autrement reluisant que le Sinet actuel !

Antoine Charles Ambroise Marteau, de Laverdines (Cher), professeur de sciences naturelles à l’École professionnelle, rue Libergier ; et Renée Véron, fille de Louis Véron-Gravel, comptable liquidateur, rue Hincmar, 39. L’un des témoins pour la mariée est le petit-papa Claude Defrançois, père de la gymnastique, rue du Barbâtre, 4.

Maurice Justin Scailquin, de Villiers-sur-Marne, près Corbeil, dessinateur mécanicien, rue de Vesle, 60, et une Moreaux, d’Ormes, couturière, fille d’un scieur de long.

Paul Morlot, de Colmar, et sa cousine Félicie Lamy, de Delle, fille de M. Lamy-Morlot, receveur des contributions à Obernaï. Couple éminemment falot, le mari exsangue, l’épouse sans souffle, sédentaires en leur boutique d’épicerie, rue Chanzy, angle Hincmar, exploité jusque-là par Mary.

Le Dr Lardennois (Édouard) de Monthois, 41 ans, médecin-major au 132e R.I., rue du Barbâtre, 33, fils de Lardenois-Thuly, juge de paix, et Marie-Madeleine Irène Walfard, 20 ans, fille des Walfard-Galien, rue de l’Arquebuse.

Henri Matot, né à Reims le 20 janvier 1857, et Marie Louise Lemoine, 25 ans, habitant avec sa mère, Mme Vve Lemoine-Canart, rue de l’Échauderie. C'est l’union de deux firmes réputées de libraire et de deux familles très estimées. Henri Matot, devenu veuf, se remariera, et, après avoir relevé, après guerre, sa maison du Cadran-Saint-Pierre, veuf une seconde fois, prit retraite, d’abord à l’Asile Saint-Joseph d’Avenay, puis à la Maison de la rue Simon, 26, où il mourut en 1933. L’imprimerie est installée rue de l’Écu, 7, avec ses destinées placées en les mains expertes et sûres du prote Pailot.

Qu’il nous soit donné de pouvoir confier ces lignes aux bons soins d’un tel maître en l’art de Gutemberg et des Bacquenois ! (le destin a prononcé : c'est la dactylo qui est chargée du fardeau).

Cet humble parmi les simples, compagnon de nos études au Jard chez ces éducateurs en robe de bure, dégustateurs de lentilles et de pois secs, que sont les Petits Frères des Écoles chrétiennes, ces ignorantins, pis encore ! ces corbeaux, ainsi que les traitaient les gosses des Mutuelles ! – ce fileur en gras Jean-Baptiste Molisse, de La Ferté, près Carignan, et Mélanie Hardy, d’Auménancourt-le-Grand, où elle était servante de ferme. Les pauvres diables ! confiants, naïfs, ne redoutant point les responsabilités, les labeurs, les tourments auxquels exposent le conjungo environné de tant d’embûches ! Poussière d’humanité dont on n’évaluera jamais la valeur sociale !

Jacques Alphonse Hannesse, 26 ans, des Hannesse-Gaillot, confiseur rue du Barbâtre, 44, et Victorine Marie Bertrand, 18 ans, fille de Bertrand-Rosé, ex-filateur rue du Jard, sous-directeur à la Caisse d’Épargne. Témoins : Aristide Bertrand, d’Asfeld ; Léon Rosé, marchand de meubles à Paris ; Henri Nicaise Grandremy, Lhoste-Hannesse, tous catholiques pratiquants, marguilliers de leur paroisse, droits et honnêtes avant tout.

Edmond Ries, des tissus, moniteur de gymnastique à l’Ancienne, 29 ans, rue du Carrouge, 22, fils de Gaspard, chauffeur aux Anglais, et Eugénie Louise Gigot, 31 ans, fille de Gigot-Lambottin, sœur du lainier Albert Gigot, qui, de placier à la maison Marteau, vient de s'établir à son compte, en association avec Georges Dupuy, dans les bureaux et magasins de l’ex-firme Renard & Garnier, rue du Levant, 9. Témoins : Michel Ries, son frère, et son collègue à l’Ancienne, Ernest Triouleyre.

Remariage de l’Homme d’Osier, Louis Ansarisse (?) Trentelivres, de Rothois (Oise), rue de Vesle, avec Augustine Trousset, d’Hermonville. Il a 50 ans, mais reste vert comme poireau, sec, vibrant, pétillant, actif, avec une tête à la Henri IV, l’œil ardent d’un coq en plein sultanat. Longues amours à ce vaillant !

Robert Lewthwaite, codirecteur aux Vieux-Anglais, et Céline Henry, rue Washington à Paris. Grand et robuste, au poil blond, plein de santé et de jovialité, fines moustaches, tête ronde aux yeux bleus, gueulard et bon garçon, Robert prendra une représentation à Paris des Heidsieck-Monopole. Les époux eurent un fils tué sur le front de France.

Cet enfant et écolier du Jard – par ainsi doublement favoriser de nos grâces ! – Victor Troyon, d’une famille de tailleurs de pierre venue de la Creuse, et Joséphine Demissy, de Fléville (Ardennes).

Du même Jard et de la même école, Éloi Vergniolle, 25 ans, doreur sur bois, rue Gambetta, 23, se remarie avec Marie-Louise Titeux, de Seilles (Belgique).

Émile Achart, qui était charcutier rue Chanzy, 37, en 1914, et Henriette Lajoye, 20 ans, place d’Erlon, 42. Il avait 23 ans et habitait alors rue du Barbâtre, 96. De retour à Reims en 1923, après exil à Paris, rue Tholozé, ils ont restauré leur immeuble pour y habiter en partie et louer le reste. Achart, devenu aveugle, est mort en 1933.

Pendant la guerre, lui et son confrère Bernier se mirent au service d’un restaurateur de Boulogne-sur-Seine pour alimenter la capitale d’un boudin noir ou blanc exclusivement fabriqué par eux. Incalculable le nombre de kilomètres de cet indigeste mais affriolant comestible qu’ils confectionnèrent ! Le sang de leurs innombrables victimes crie vengeance ! contre ces criminels. Bernier, rentré à Reims aussitôt trouve logement habitable rue de Venise, 9, dans un immeuble reconstruit par l’architecte André Salaire, neveu des propriétaires : Mme Vve Picard-Latève et son gendre Numa Aubert, tous deux réfugiés à Cannes, en 1917, et persistant à y vivre, à l’écart de la boue, de la poussière et des embruns. Aubert est mort en 1931 et Mme Picard en 1934.

Rozée d’Infreville, 36 ans, capitaine adjoint major au 132e R.I. rue Chanzy, 50, et Agathe Marie Colin, de Boishanon, près Saint-Malo, sa belle-sœur en veuvage, au château de La Bordelais à Saint-Méloir-des-Ondes. Haut de taille, forte corpulence, plein de rondeur et de bonhomie à l’égard des troupiers, d’Infreville fut très gobé à la caserne Colbert, comme dans tout Reims.

Édouard Frey, rue de l’Isle, 27, âgé de 26 ans, comptable à la firme Wenz et grand timbrophile devant l’Éternel, et Marie Louise Gabrielle Devraine, 21 ans, mercière rue Gambetta, 21, maison Guérard-Devraine.

Émile Arthur Bondon, 28 ans, rue Buirette, 48, ex-élève des Frères de la rue Large, fils d’un plombier, et Olive Deschamps, 27 ans, rue du Barbâtre, 137, rentrayeuse chez Edmond Givelet, place Belle-Tour. Elle, petite mais boulotte, d’une blondeur de moissons, gracieuse à point. Lui, grand garçon au teint clair et rosé, cheveux noirs, comme ses yeux. Joli couple !

Thomas Becquet de Cantorbéry, associé dans le commerce des blousses de laine avec Paul Barbe, rue du Levant, 3, et habitant rue Ponsardin, 60, et Mlle Regnault, de Charleville.

Henri Lajoux, professeur à l’École de médecine, rue Saint-Julien, 8 (maison des Haueur), et Mlle Wallot, de Paris.

Son confrère, le Dr Jules Bienfait, une des personnalités rémoises des plus en vue, épouse en secondes noces Cécile Ragot, Vve Didier, boulevard du Temple.

Enfin pour clore dignement ce palmarès des épousailles au destin varié, Émile Druart, 31 ans, marchand de matériaux de construction, chaussée du Port, 37, et Adèle Léonie Philippe, 22 ans, rue de Vesle, 200. Ils donneront à notre ville deux fils, René et Henri, dont le talent et les mérites artistiques font honneur à eux et à la cité.

1885

Pour dérider nos fronts assombris par ces évocations funèbres, prenons rendez-vous avec cette belle jeunesse rémoise qui va échanger, en toute sincérité et bonne foi, pleine d’espoir en l’avenir, l’anneau d’or qui engage pour toute une vie !

De tous temps, le mémorialiste de ces lignes fut un mélomanes à toutes cordes, et se doit de placer en première ligne nos artistes rémois.

En tête, Paul Latarget, 24 ans, clarinettiste et cantinier au 132e R.I. et Émélie Bertrand, soigneuse à l’usine Lelarge, à Bazancourt.

Nicolas Stoffel, 28 ans, ex-musicien au 104e R.I., premier piston à la Municipale, treillageur, fils de se Stoffel-Mandernach, rue des Trois-Piliers, 18, et Marie Lebègue, 20 ans, de Châlons, rue de Neufchâtel, 76. Mme Vve Stoffel profite de l’occasion pour se remarier avec son beau-frère Michel Kohl, manouvrier. On dansera à bon compte, le marié ayant recruté son orchestre parmi ses invités ; mais les rafraîchissements restant à sa charge, il verra combien il peut en coûter pour satisfaire une telle audience !

Frédéric Strohm, de Strasbourg, 27 ans, de l’Union chorale, et Émélie Marie Constance Péria, professeur de piano, sœur du luthier ex-hôtelier à la salle Besnard. Témoins : Aloïse Antony, 72 ans, place d’Erlon, 33, directeur de la fanfare des Régates ; le tailleur Samuel Hirtz, rue des Tapissiers.

Henri Legendre, syndic de faillites, deuxième violon à la Philharmonique, fils d’un président de tribunal à Amiens et M. Georgette L. Meurisse, de Guise, rue Libergier, 74, dont le père avait été négociant en vins à Laon.

Alphonse Dornbirrer, de Strasbourg, 31 ans, rue du Barbâtre, 33, organiste à Saint-Maurice, fils de feu Henri, sellier, décédé à Mulhouse, et de Élisabeth Henrentzberger ; et Marie Désirée Machu, 22 ans, rue des Carmes, 17, fille de Machu-Morel, place Saint-Maurice. – Émile, frère du marié, est carrossier à Mulhouse tandis que son oncle maternel, J. B. Wiernsberger, 51 ans, rue Chabaud, professe le violon. Les Machu ont un cousin, l’architecte Amand Bègue, rue de l’Échauderie, 7.

Augustin Brisset, 33 ans, facteur d’orgues, rue de l’Écrevisse, 15, et Émilie Pauline Courtois, de Donchery, 26 ans. Devenu aveugle, il exercera à Sedan.

Eugène Pirsch, altiste aux pompiers, noir comme un Abyssin, ex-élève de dessin, au Jard, du frère Hector, et employé d’architecte, rue de Thillois, 6, et Marie, fille de Gérard-Beli, coloriste chez le teinturier Daux fils, à la porte Paris, qui, lui aussi, est d’un noir de jais, bugle aux pompiers, et camarade d’école, à la rue Large, du marié. D’autres copains sont de la noce : le menuisier Léon Lecreux, dit Bouillon-de-veau, de la rue Hincmar ; Dosithée Buiron, ex-écoliers des Frères de la rue des Telliers, aux tissus chez Aimé Grandjean, rue Ponsardin ; et Édouard Legaye, du Mont-Dieu.

Alfred Gouturon, ténor à la Philharmonique et comptable en fabrique, rue Henri IV, 20, et Annette Léonie Connois, 20 ans, fleuriste à Guignicourt. Pêcheur de brochet dans l’Aisne, il ne sait pas contenter de ce plaisir bucolique ; mais, au bout de sa ligne, il a ramené les amours et les roses de ses rêves !

Ernest Chauvry, 32 ans, des tissus, rue des Deux-Anges, violoniste et chef de pupitre à la Philharmonique ; et Julie Elvire Ponce, de Bezannes, 27 ans. En 1914, il suivit les services de la firme Fourmon frères, à Paris, rue Hérold, 13, où il vécut avec sa fille Hélène jusqu'en 1933 ; il est inhumé au Cimetière du Nord auprès de sa femme. morte en 1931.

Si nous abandonnons les sphères artistiques pour aborder le milieu prosaïque du commerce de l’industrie, nous n’aurons que l’embarras du choix. Allons-y donc gaiement !

Eugène Lina, 30 ans, de Paris, cuisinier rue Mouffetard, 150, mais ayant fait élection de domicile chez sa mère, cour Morceau, et fils de Célestin Constant Lina-Thalen, qui fut restaurateur rue de Vesle, sur l’emplacement même où l’on construisit le Grand-Bazar, et Angèle Élise Marcelle Letartre, d’Épernay, 21 ans, fille du limonadier, au Café de la Douane, place Royale. Témoins : Marie Payer, courtier en laines, rue Saint-André, 3 ; le commandant de recrutement Eugène Dumoulin, 58 ans, rue de Venise, 8. Un grand gaillard légèrement voûté, aux cheveux rares et grisotants, les cils et le globe oculaire bistrés et sanguinolents, le nez émerillonné, – Louis Trézain Labey, 55 ans, prédécesseur de Jules Wibrotte, à la direction de l’École primaire du Jard, et le premier en date en remplacement des Frères des Écoles chrétiennes ; Charles Van Brunner, officier de santé à Gueux.

Charles Buffet, 42 ans, négociant en tissus, rue Saint-Symphorien, fils d’Augustin, décédé à Rilly-la-Montagne en 1867 ; et Jeanne Delapierre, à la ferme de L’Écaille, dans les Ardennes .

David Pimienta, d’Oran, marchand de denrées coloniales, et Eugénie Sarah Ulmo, d’Alger, fille de Jacques, instituteur en retraite, et de Gudula Lévy, née à Alger en 1861 et habitant rue Clovis, 63. Témoins : Alfred Israël, 44 ans, et Isaac Israël, 73 ans ; ce dernier est père d’Alexandre Israël, futur sénateur de l’Aube, après une carrière de journaliste à l’Éclaireur de l’Est, à Reims et au Petit-Troyen, à Troyes. Ces Juifs faisaient le négoce de grains à Alger, où Alexandre Jéroboam naquit, et, après de mauvaises affaires, émigrèrent à Reims, où le pimpant adolescent fut élève au Lycée. Ils habitent rue Saint-Pierre-les-Dames, 7 bis. Témoins en complément : Jules Jacob et Léon Bloch. La TRIBU !

Léon Léopold Damourette, de Sermaize, lieutenant aux 104e R.I., fils du Dr Damourette, inspecteur des Eaux-et-Forêts ; et Élisabeth Marie Claire, fille des Alloënd-Bessand-Chevillion. Témoins : Alphonse Lemaire, de la Cour de cassation, et Félix Amel, inspecteur d’enregistrement à Troyes.

Le délicat poète Camille Schwingrouber, de New-Jersey (Amérique) où il naquit à West-Hoboken le 22 mai 1855, de Louis et de Julie Defontaine. Veuf de Ernestine Moisy, décédée à Saint-Quentin en 1880.

Son père était mort en 1859 à Dorado, État de Porto-Rico (Antilles espagnoles). La mère s'était remariée avec un rentier, Louis Antoine Dupont. Camille épouse Élisabeth Roth, de Cernay (Alsace), 27 ans, fille de Sébastien et de Thérèse Hentz, rue David, 35. Témoin principal : Louis Hemmerlé, conducteur du Génie au Fort de la Marre, du Bois-Bourru (Meuse).

En outre de poésies charmantes éditées en plaquettes rarissimes de nos jours, et dont plusieurs furent mises en musique par nos concitoyens, entre autres Paul Dazy, Schwingrouber a publié des monographies de rues rémoises : Andrieux, Mont-d’Arène, Barbâtre, etc. Après-guerre, revenu à Reims, il y décédera, ainsi que sa veuve, morte en février 1930.

Le 1er février, mariage du peintre décorateur Camille Venain, de Ville-en-Tardenois, 24 ans, fils de Venain-Cornet, rue Chanzy, 34, et Marie Pothier, de Reims, fille de Etienne Pothier-Lecomte, de la firme Lelarge. La cadette de Marie, Émilie, elle, va épouser Paul Dazy (morte à Saint-Germain-en-Laye le 17 décembre 1934, à l’hôpital, à 72 ans).

La benjamine des Pothier épousera le dentiste Vignot, de Saint-Brieuc. Sauf Étienne, ces Pothier furent musiciens professionnels. Adolphe fut un excellent joueur d’ophicléide ; Henri et Hubert usèrent de leur contrebasse à cordes, et, de même que leur père, étaient au lutrin de Notre-Dame de Reims, sous Étienne Robert et Paul Dazy.

Divorce du violoniste Mathiot, époux de la pianiste Arnoux (trop beau, Puijoly !).

Un barbon de 80 ans, connu des Rémois au temps où il exploitait ses Bains froids sur la Vesle, à Fléchambault, – les Bains Guinot, – se marie pour la 3e fois avec Marie Lampson, 65 ans, fille des Lampson, d’Ardeuil, et tous deux profitent de l’occasion pour reconnaître une fille qu'ils ont eue, en 1850, à Poix.

Pierre Napoléon était originaire de Liry (Ardennes) et fils de Jean Nicolas et de Marguerite Lemot, – celle-ci grand’tante du dessinateur Achille Lemot, – et décédés, l’un en 1814, l’autre en 1836. Veuf en premières noces de Félicité Baudson, sœur de cadet Baudson-Dupont, maréchal-ferrant à Liry, épouse alors Jeanne Lampson, en 1848. Il a 3 fils, comme Cadet-Roussel avait 3 parapluies : Eugène, rue de Neufchâtel, 14, 54 ans ; – celui-ci a trois enfants : Adolphe, Fernand, Pierre, tous deux dans la laine, et Mélina, épouse Pérotin, institutrice ; – Eugène tout court, faubourg de Laon ; Auguste Guinot-Villemet, rue de Cernay, 3. Il sont trieurs de laine. Dieudonné Villemet, beau-père d’Auguste, est pensionnaire à la Maison de retraite.

Le maître jardinier Georges Barbaras, d’Ostheim (Alsace), rue du Jard, 63, et Marie Anne Barth, sage-femme rue du Cadran-Saint-Pierre, 13. Barbaras fils est, en 1934 propriétaire de la Roseraie de Fléchambault, anciennement aux Laviarde et à Jules Machuel.

Jules Léon Aubry, de Bar-le-Duc, 25 ans, employé au Crédit Lyonnais, fils de Aubry-Mauchauffé, ex-fabricant de casquettes, puis chauffeur d’usine, et Jeanne Lucie, fille naturelle d’Elisa Pierrard, épouse de Louis Chéruy, 55 ans, brigadier des appariteurs à la Mairie.

Divorce de Adolphe Haudecœur, peintre verrier à Lille, et de Adèle Labori, né en 1858 des Labori-Roy.

Épidémie : divorce entre Noël Émile Tortrat, domicilié à Vincennes, fils des Tortrat-Chalamel, et Suzanne Clara Lefébure, veuve Delaby. Ce sacré bossu Naquet a engendré bien des ruines en nos foyers rémois !

Alexandre Rouyer, de Gizaucourt, blanchisseur sur le bateau-pilotis de Vesle, et Camille Félicie Beauvois, fille de l’industrieux et ingénieux Charles Beauvois-Coutant, magasinier chez Jean-Baptiste Thuillier, – inventeur à loisir de menus engins ménagers, tel cet allumoir à cigarettes dont un ressort fait jaillir l’étincelle qui enflammera l’amadou, ou encore, l’allumette toute flambante de la Régie.

Théophile Ernst, de Clavy-Warby (Ardennes), rue Libergier, prolongée, 2, contremaître à l’usine Walbaum, des Coutures, et la rentrayeuse Aurore Cernay, rue Gambetta, 60. Ses frères Émile et Léon sont, le premier, représentant de la maison Lançon, de Blanquefort (Gironde) pour les bordeaux ; le second, courtier en laines à Reims, rue Montoison, et âgé de 22 ans. L’oncle Cernay est teinturier dégraisseur, place d’Erlon, 15.

William de Salivet de Fouchécour, d’Auvers, inspecteur à la Compagnie du Nord, à Saint-Just-en-Chaussée (Oise) fils de Pauline de Ridder, veuve de Fouchécour ; et Julie Caroline Poulain, fille de César Poulain-Benoist, des Capucins.

Paul Blanchin, receveur des contributions à Kerrata (Algérie) fils de Blanchin-Jacob, marchand de vins à Dormans, et Éléonore Célestine Anne, de Strasbourg, fille de Louis Charles Roederer, décédé à Brumath, et d’origine allemande.

Émile Frédéric Testulat, de Dizy, fils des Testulat-Monmarthe, et Marie Louise Corneille, rue du Clou-dans-le-Fer, 1, fille de Corneille-Brion, mort à Châlons en 1876.

L’adjoint au maire Jules Bienfait , 65 ans, boulevard des Promenades, 37, veuf d’Amélie Tassin, et fils de Bienfait-Canart, serrurier ; et sa belle-sœur Cécile Ragot, de Paris, 47 ans, veuve en 1865 de Me Didier, avocat à Reims, et fille des Ragot-David. Jean-Baptiste Ragot, était mort en 1884, et sa femme, Elisa, Vve Tassin de Montaigu, habite à Trigny. Jules Victor Ragot est directeur de la sucrerie de Villenoix (Seine-et-Marne), près Meaux, jadis propriété de Ernest Baroche, et dirigée par le comte de Loynes, qui épousa Jeanne Détourbay, en 1871 .

Louis Dasnoy, des tissus, firme Sichard, rue Henri IV, 22, fils des époux Dasnoy-Willaume, lui, garçon de magasin ; elle, lingère ; et Justine, aînée des DllesThibaut-Lanser, rue Chanzy, 58. Le fumiste Thibaut, dont l’épouse est d’Arlon (Belgique) a une belle et nombreuse famille : Nicolas dit Ferdinand et Michel ; Justine, Marie, qui a épousé Désiré Dupont ; Pauline, épousera Thibault, rue Jouffroy, à Paris ; Zélie, la benjamine, future femme de Baudet, caviste (leur fils Pierre, trieur de laines, sera tué sur le front de Champagne en 1915, d’une balle en plein front, alors qu'il escaladait, avec sa section, le parapet ! Sa mère était morte peu avant-guerre).

Arthur Péchenart, de Monthermé (Ardennes), frère du futur évêque de Soissons , dégustateur en champagnes, place de Hôtel-Dieu, 9, fils de Louis Péchenart-Houpilliart, ex-boulanger, et Henriette Derungs, de Châlons, fille des Derungs-Lalire, biscuitiers rue Dieu-Lumière. Témoins : J. N. Léonce Péchenart, 30 ans, vicaire à Saint-Remi ; l’oncle Jules Péchenart, fabricant de boulons à Château-Regnault (Ardennes) ; J. L. Lalire, 76 ans, ex-bouchonnier et emballeur, rue des Romains, 38 ; Bernard Beer, courtier à Paris.

Le Dr Colleville, 30 ans, boulevard Magenta, 144, à Paris, fils d’Alphonse et de Clotilde Lesieur, décédée en 1871, épouse le 9 février Anne-Marie Decès, 23 ans, fille du Dr Arthur de Anna Lochet, rue Chanzy, 70.

Adolphe Grévisseaux, 30 ans, tapissier et baryton à l’Union chorale, rue de Venise, 2, et demoiselle Bailly. Leur fils est, en 1934, rédacteur au Nord-Est.

Le relieur Demiremont, de Vouziers, rue des Moulins, 1, et Pauline Gallot, giletière, de la même rue.

Paul Jonoux, de Pierrepont (Meurthe-et-Moselle), 27 ans, magasinier au peignage Jonathan Holden, rue du Barbâtre, 21, fils de Jonoux-Rousselle, contremaître de carderie au Mont-Dieu, et Marthe, fille du receveur des contributions audit Pierrepont. Témoins : l’oncle Hippolyte Jonoux, directeur à l’usine des Capucins, le cousin Jules Poterlot, aux nombreux avatars, qui, de garçon boulanger, devint clerc d’huissier en attendant titularisation, et grand éleveur de volailles rue Favart d’Herbigny, 2 (en 1919, Poterlot est super agent administratif auprès des commissions cantonales pour dommages de guerre). Autres témoins : Jean Cornet, charcutier rue Chanzy, 89, successeur du beau Comot, émigré à Saint-Dizier.

Félix Albert Copin, de Paris, fils de Copin-Martin, fabricant rue des Murs, 11, et Marie Françoise Thiérot, fille de l’architecte diocésain Édouard Thiérot-Clouet. Un cousin des Copin, Édouard Cousinard-Noullet, ex-marchand de laines rue des Cordeliers, puis retraité rue des Capucins, 121. Eugène Copin, frère aîné de l’époux, est comptable chez Auguste Français, fabricant, rue Cérès, 32.

Le peintre sur verre Édouard Maujean, né au Ban-Saint-Martin-lès-Metz, et sa cousine germaine Marie Clermonté, de Devant-les-Ponts, où son père est cordonnier.

Rogé, restaurateur à l’Étoile d’Or, place d’Erlon, 65, natif de Cormicy, est en séparation de biens et de corps avec son épouse Adèle Liégeois, fille des époux Liégeois-Fichelet, rue des Capucins. Elle continue d’ailleurs à exploiter cet hôtel pour banquistes de foires. On trouve familier de cet asile, vers 1927, le rédacteur du Reims-Magazine, Gabriel Clément, ex-employé des Hachette à Alger.

Auguste Gaillot, garçon de magasin, fils de Gaillot-Buart, sacristain à Saint-Remi, rue Saint-Julien, 19, et Léonie Bâton, fille du relieur Bâton-Gaillot, rue de l’Université, 33.

Émile Léon Hodez, de Vigy-lès-Metz, attaché à la Banque de France, rue des Templiers, 1, dont le père Hodez-Dauphin est inspecteur des domaines à Longuyon, et Blanche Édith Rivart, fille de Charles Rivart, consul de Belgique, rue des Templiers. Elle est sœur de l’excellent violoniste Marcel Rivart et cousine de Charles Bureau, des Galeries Rémoises.

Lucien Grand’Barbe, de Sablon-lès-Metz, 36 ans, marchand de chaussures rue de l’Arbalète, 4, fils de feu Grand’Barbe-Bartaire, décédé en 1860, et Marie Juliette Hannier, née le 8 février 1859, à Reims, des époux Hannier-Colomb, marchand de charbons, rue de Vesle, 111. Témoins : Édouard Grand’Barbe, 31 ans, son frère cadet et associé ; le capitaine Jean Bonnetton, de Voiron (Isère) époux de leur sœur Louise ; il est aux 132e R.I. et habite rue de Sillery (sa veuve est, en 1914, pensionnaire à l’Asile Saint-Joseph d’Avenay, en compagnie de Mme Vve V. Besnard, et y décède en décembre 1932). Julien Gosset-Hannier, rue Thiers, et l’ex-comptable Jean Joseph Mengès, 69 ans, rue Clovis, 43.

Amédée Pothé, joyeux compère des Revues du Cercle rémois de la Taverne Alsacienne, fils du comptable Alfred Pothé-Ponsin, de la firme lainière Gadiot, et Eugénie Bischoff, de Mulhouse, dont le père est camionneur au Chemin de fer de l’Est.

Amédée était enfant du Jard où il naquit en 1859, et suivit les classes des Frères. Assez léger de caractère, un tantinet tête de linotte, coquet et dépensier, de tempérament enjoué, il possédait d’aimables talents de sociétés. On le vit sombrer dans un remous de la conscience publique, à la suite de frasques frisant l’innocence, mais ne pouvant passer inaperçues à travers le réseau d’amitiés qui l’avaient trop gâté ! Son frère Charles fut un des artistes de la reliure d’art des plus appréciés. Une sorte de mauvais sort s’abattit sur ces trois hommes : le père, Alfred, prison et hôpital ; l’aîné des fils, obligé de fuir ; le cadet, Charles, noyé volontairement à Trigny !

Divorce des époux Gabreau-Lecamp. Edmond Gabreau, de Saint-Quentin, était fils de Gabreau-Bourgoin, fabricant rue des Trois-Raisinets, 13. Le père de son épouse divorcée était le banquier Lecamp.

À côté de ce déplâtrage, un recollage au ciment : Alfred Lefebvre, de Trépail, rue de l’Arquebuse, 2, et Constance Pécheux, de Trois-Puits, veuve de Arnold Défaux, de Saint-Brice.

Arthur Louis Moniot, agent de change rue de la Prison, fils du tailleur Moniot-Lardenois, et Clémence Paille, fille de l’ex-boucher Paille-Bougy, avenue de Laon, 4.

Léon Eugène Bondon, 26 ans, fils de Bondon-Dehaut, charron, rue Buirette, 48, et Juliette, dite Olive Michel, de Rethel, où elle était ourdisseuse à l’usine Edmond Givelet, surnommée Cayenne et dirigée par un sévère factotum Eugène Cocâtre, – avant de venir à Reims, ourdir même firme, place Belle-Tour : jolie blondinette, fort avenante, déjà veuve de Clovis Henri Vatier, décédé en 1880, rue des Romains, 42.

Émile Bartholomé, de Pauvres, 26 ans, moniteur de gymnastique, à l’Ancienne, maigre, velu, noir et agile comme un ouistiti, presqu’aussi décharné qu'un Christ villageois, assidu, le dimanche, à la partie de cartes dont les partenaires sont une équipe des plus assidues au Café Courtois : Albert et Paul Dazy, – Albert plutôt fervent des échecs ! – Auguste Muller, Maurice Guénet, – pour échecs principalement, avec les Laplanche, Gustave et Georges, – Bretaudeaux et Albert Dubois, de la firme Auguste Walbaum, Eugène Dupont, Achille Mignot, Louis Aubry le trieur, Léon Divoir, Numa Robert, Nancy, Ernest Chauvry, Jules Savy, Jules Léon Aubry, et quelques autres mercenaires du Bureau, de la Laine, des Tissus ou du champagne.

Le Gymnaste épouse Marie Dufourny, des Mazures, près Renwez (Ardennes), 24 ans, belle brune élancée, au teint lilial, grands yeux doux et candides, coiffée en bandeaux à la Vierge, souriante et grave à la fois, – un pur modèle pour l’Urbino ou le Peruggino ; son père est inspecteur de la Sûreté, et habite rue Chanzy, 65, dans l’immeuble où trône, vissée à la fenêtre sur un fauteuil douillet, à peine assez large pour les rondeurs apoplectiques de son vaste séant, la bonne maman Strapart, ex-boulangère, vouée à l’examen critique des passants de cette rue Chanzy si vivante et peuplée !

Gazette de quartier en concurrence avec Mme Andrieux-Appert, du n° 24, enfant de ce vieux Bourg-Saint-Denis, dont elle était alors l’une des six veuves flamboyantes ; portant lunettes rondes cerclées d’or sur une face lunaire et miroitante, et qu'on eût pu, par moments, comparer à une Tritonne ayant soudain prit feu au contact du soleil qui irradie les bois de l’Estérel.

Pour le mémorialiste de cette Vie Rémoise, l’heure fatidique du conjungo approchait, prêt à la défaite sous les assauts conjugués d’une farandole de nymphes mûrissantes et anti-catherinettes, intéressées par ses allures bon-enfant et sa réputation de travailleur sérieux, gagnant bien sa vie, et aussi par la fraîcheur persistante de son teint et la fine pointe de sa moustache châtain !

Ces déesses furent au nombre respectable de six, mais leurs noms resteront à la pointe de la plume, pourtant bien indiscrète de leur flirt d’il y a 50 ans ! Entre-temps, certaine Colette Baudoche, de Metz, attendait paisiblement sous l’orme, sûre de son fait, que son heure sonnât ! Elle obtenait enfin la victoire le 20 décembre 1886 ! – Ses rivales essaimèrent leurs ardeurs en des champs de meilleur rapport : elles le méritaient par leurs grâces et leurs qualités domestiques ! – Ceci conté un peu longuement, revenons aux pavés de Reims, plus ou moins farcis de cerises et de prunes glacées, ou encore d’angélique verte.

Joseph Touny, de Bourganeuf en Limousin, élève architecte chez Lamy, 31 ans, rue Brûlée, 14, à demeure chez son père, Jean Touny-Dizier, et la rose enjouée et fraîche Julie Jeanne Delarbre, 24 ans fille du jardinier maraîcher Delarbre-Hérisson, rue du Jard, 88, et nièce de Jean-Baptiste Roland, rue de Venise, 26, dont le nom est accolé à celui de Auguste Petit-Rousseau sur une plaque de fonte de la rue qui mène du Jard à Venise : ils en étaient les constructeurs .

Un élève des Frères de la rue Perdue, Edmond Parizy, 25 ans, fils d’un regrattier de Dieu-Lumière, et la fille du tonnelier Hurlain, avenue de Bouzy.

Occasion de rappeler le souvenir d’un Frère des Écoles chrétiennes, Josaphat, qui fit la classe à la Charité, puis un intérim à l’École d’honneur du Jard, et qui était le plus doux, le plus aimant et patient des magisters de l’enfance !

Visage rond et charnu, bonhomie, finesse, prisant comme le Petit Caporal, rarement rasé de frais, et noir alors comme une taupe, marmonnant sans répit oraisons et dizaines de chapelet circulaire et sans fin !

Que de braves gens sur les chemins de nos adolescences, disparus à jamais et qu’un grain de poussière de souvenirs peut ainsi ressusciter à la vie mémorielle, pour le temps d’un éclair, d’une vision, d’un court émoi !

Joseph Romain Roth, d’Ensisheim (Alsace) et Louise Carbonnet, de Cormontreuil, professeur de musique à Charleville. Le père des Roth est chef d’équipe à la gare de Reims, tandis que leur mère, Thérèse Brüder, vend fromages, beurre et œufs, avec tous jambons et saucisses d’Alsace, rue des Marmouzets, 4.

Ce vieil immeuble ne leur disant rien qui vaille, au point de vue hygiène, un beau matin ils déguerpirent, sans tambour ni trompette, quittance de loyer en mains, pour aller embaumer de leurs relents fromagers la rue des Élus, proche le Grand-Marché. Non point que cette demeure offrît grand avantage sur la précédente, mais elle pourrait servir d’échelon vers un stade supérieur. Vains efforts réduits à néant par la catastrophe de 1914, et ces spécimens d’habitations malsaines ne devaient point survivre à la débâcle !

Des Messins, encore des Messins, toujours des Messins, et la Patrie rémoise est sauvée ! Louis Weber, 25 ans, rue des Cordeliers, 9, fils de feu Dominique Weber et de damoiselle Hugueny, et Eugénie Godaillier, ex-élève des Sœurs de la rue des Orphelins, fille du libraire papetier Prosper Godaillier-Huiblet, décédé en 1876.

Pierre Alfred Moret, 26 ans, électricien, rue des Boucheries, 3, fils de Louis Moret-Pousset, serrurier, qui fut indubitablement le premier à poser dans Reims les sonneries électriques, et Juliette Émilie Roppé, de Nouvion (Aisne) fille de Roppé-Landouzy, tailleur d’habits, rue des Capucins, 27. Le frère cadet Léon Moret, devait, 20 ans plus tard, prendre la succession du caissier-comptable Fritsch, à la maison de laines Dreyfus & Moch, rue du Levant, 13.

Le mitron pâtissier Morosani, de Brusio, village des Grisons tyroliens, et futur successeur de Stefani, rue Cérès, 8, épouse une compatriote nommée Semadeni.

Jules Fontaine, enfant du Jard, 31 ans, fumiste rue Chanzy, 104, fils aîné du maître ramoneur Claude Fontaine-Naviaux, et ramonat lui-même d’occasion, en temps de presse, ayant appris, en bas âge, à manier la raclette et le balai de fer ; et Eugénie Roland, 24 ans, fille du jardinier Roland-Hérisson, du Grand-Jard, rue Brûlée, 48.

Ils eurent un fils, qui, sous son nom de Dr Louis Fontaine, est l’un des meilleures parmi ceux de nos Esculapes qui ne s'en font point !

Jules Fontaine décéda à Paris, en 1920, des suites d’une opération de prostate chez les Frères de Saint-Jean-de-Dieu. Louis avait opéré lui-même, à la vessie, et non à la prostate.

Au temps jadis, Mme Roland et sa fille, conduisant elles-mêmes la carriole à deux roues attelée d’un bon ardennais, servaient leurs clientes tous les matins, de maison en maison, dans le quartier, revêtues chacune d’un tablier bleu, la demoiselle nue-tête, la mère coiffée d’un bonnet de tulle à tuyaux.

Ah ! les braves gens d’alors, tout simplicité, tout honnêteté ! et n’écorchant pas le pauvre monde !

Témoins : Claude Fontaine ; l’oncle Cérac-Naviaux, épicier-débitant-gargotier, rue Chanzy, 101 ; ex-camionneur la Compagnie de l’Est, bonhomme aimable, fort, tout rond et jovial ; puis cet excellent homme (mort en 1928), frère de la mariée, Henri Roland-Bréart, boulanger rue Brûlée, 72 ; et le jardinier Pierre François Roland, à Fléchambault.

Le 31 août, mariage de Léon Numa Aubert, né à Neuville-sur-Orne (Meuse) la nuit de Noël 1856, à l’heure même où le ténor Renard, alors vedette à l’Opéra, chantait au buffet des Grandes-Orgues de Notre-Dame de Reims, le NOËL d’Adam : Minuit ! chrétiens, c’est l’heure solennelle...

Numa, du haut de la falaise du Cannet, où il habite en 1930 (un an avant sa mort), il essaierait en vain de rassembler les échos de l’hymne dont les Rémois raffolaient jadis. Ou, s'il les entend, ce ne sera qu’ersatz, par l’organe nasillard la T.S.F., appareil Ducretet !

Donc Numa, frère de Raymond, Ephrem, Alfred, oncle de Georges, épouse une Rémoise fort aimable et recherchée de la gent cotillonneuse, Jeanne Picard, fille de Louis Eugène, décédé le 23 décembre 1883, et de Palmyre Latève, qui mourra en 1884 , à Cannes, et sera inhumée à Reims, Cimetière du Nord, dans le tombeau de famille.

Palmyre était fille d’un vigneron de Verzy, Latève-Jennesseaux, qu’on connut comme commandant des Pompiers de sa commune et ayant eu mission de présenter sa compagnie à S.M. l’Emprereur et à Eugénie de Montijo, quand ces grandesses vinrent au camp de Mourmelon passer en revue une armée de zouaves, en 1855.

Témoins : deux huissiers, qui sont de la parenté, Émile Oudart, de Verzy, et Eugène Guillaume, rue Thiers, 39, à Reims.

La mère de Numa est une Guillaume. Tous ces Aubert habitèrent, du vivant de leur père, chaussée du Port, où se trouvaient les chantiers de bois de Raymond, futur adjoint au maire.

Numa avait été un des plus remarquables élèves des Frères du Jard, qui le casèrent à la maison de tissus Fourmon, où il fit une fructueuse carrière.

Les Aubert-Picard ont eu un fils, Henri, fondé de pouvoirs à la Savonnerie Verminck, de Marseille ; une fille, Andrée, mariée à un médecin, Jules Laurent, de Saint-Laurent d’Aigouze (Gard), tué par un soldat malade en 1916, près Verdun. La veuve en a deux filles : Marie-Hélène et Mireille, et un fils, Guy, élève pilote d’aviation en 1934, École Caudron, près Istres.

L’architecte Louis Schneider, élève du Frère Hector, au Jard, fils de Pierre Schneider-Hansen, tailleur d’habits rue des Poissonniers, 12, et Louise Fauvelet, de Bièvres, près Versailles, fille de Fauvelet-Bertholet, maître-maçon à Paris.

Le capitaine Wilhelmy, de Brommersbach, près Sarrebruck, ex-officier au 132e R.I. après avoir été adjudant-major à Rocroi et Compiègne, – et Julie Victoire Manceaux, fille de Émile Manceaux-Merlin, chef de caves à la maison Théophile Roederer ; avant-guerre, ce dernier rédigeait la chronique viticole à l’Indépendant Rémois.

Julien Tangre, ex-élève du Frère Alode, à Saint-Thomas, avec les Debossu, Prudent Queutelot, Prenat, Méon, etc. et connu seulement sous le nom marital de sa mère Lucie Tangre, veuve d’un Michel ; et Élisabeth Émilie Belen, fille de Michel, menuisier rue Nanteuil. Un Belen, frère de la mariée, complétait jadis ses études primaires au Cours complémentaire du Jard pour entrer à l’École normale d’instituteurs.

Édouard Grand’Barbe, né à Metz en 1853, épouse Marie Julie Augustine Halewaeters, fille du charron de la rue Clicquot-Blervache. Ayant repris du service en 1914, comme capitaine de territoriale, Édouard se consacra à la défense de Reims, et fut l’un des premiers à réoccuper sa maison à demi détruite, rue Saint-André, 1.

Associé d’abord à son frère Lucien pour un commerce de chaussures rue de l’Arbalète, il entra dans les affaires d’alimentation, et exerce encore ce 1er janvier 1935. Les époux ont perdu leur fille unique, Hélène, en 1934, par suite d’erreur de diagnostic d’un Diafoirus opiumanisé !

Théodore Brunet, de Mareuil-sur-Ay, 24 ans, ferblantier chez Hupin-Kalas, fils de feu Brunet et d’une Rebout, bûcheronne à Germaine, et Marie-Amélie Lécossois, de Froides, près Clermont-en-Argonne, 21 ans, fille de Lécossois-Tinet, maréchal-ferrant, et nièce de la Vve Chopin gargotière rue du Jard, 26, chez laquelle prenaient pension les jeunes Suisses interprètes en allemand de maisons de champagne : Suffert, Eugster, Otto Suter, Stünzy, et autres.

En novembre 1918, cette vieille bicoque paternelle des Dupont-Aumont, tenait debout, à peine effleurée par les obus boches. La boucherie qui occupe l’angle de la rue Brûlée, fut réouverte par un commis du boucher Bombart, de la rue Chanzy, dont la femme avec tenu bon pendant le bombardement pour alimenter les civelots têtus qui ne pouvaient s'arracher à la terre natale.

Joseph Rode, un bon gros méridional attaché à l’Agence Havas à Paris, et qui avait été élève du Frère Narsès, à l’école de la rue Large (Buirette), et Joséphine Louise Liébart, de Troissy, vendeuse chez Dajeans, marchand de parapluies rue de l’Étape, 22. Rode était de Saint-Julien-Lampson (Dordogne), fils de Rode-Grisart, mécanicien à la Compagnie de l’Est.

Jean-Louis Weber, de Metz, 26 ans, bijoutier rue de l’Arbalète, 7, fils de François, décédé en 1885, et de Joséphine Brellmann, débitante à Metz, rue de la Basse-Seille ; et Denise Arnould, fille de Arnould-Lemoine, tourneur sur métaux, rue des Élus, 18. Réfugié à Paris en 1914, Weber exerçait sa profession, rue Custine, à Montmartre.

Louis Edmond Vany, fabricant de brosses à Charleville, et Louise Irma Valentine Matot, fille de l’imprimeur.

Émile Berger, né en 1860 à Lutzelbourg (Moselle), gérant de la Brasserie de Strasbourg, et Ursule Stévenaux, de la Neuville-aux-Joûtes, près Rocroi. Témoins : ces fort au billard, Fernand Berger, carabin de pharmacie, Alcide Fauchat, restaurateur ; Charles Berger, garçon de café à Nancy ; le confiseur Blanpain, place Royale, 8.

Prosper Soüel, des tissus, firme Warnier, 29 ans, rue Saint-Symphorien, 26, et Marguerite Déroche, 17 ans, fille de Déroche-Roze, père et mère Angot à nos halles. Témoins : deux oncles, Adrien Soüel, forgeron à Eurville (Haute-Marne), et Auguste, menuisier à Clermont-en-Argonne. Charles Roze est mandataire aux halles de Paris, et Paul Déroche, cabaretier au square des Innocents.

Edmond Charles Ernest Givelet, 30 ans, capitaine au 9e artillerie de forteresse à Belfort, fils de Henri Givelet-Marguet, rue de Vesle, 17, et Jeanne Hélène de La Morinerie, rue Libergier, 25. L’oncle Michel de La Morinerie habite à Aulnay (Seine), et Jules Conrad Burchard, de la firme Delbeck, boulevard du Temple, 32.

Eugène Hennegrave, de Bétheniville, ingénieur à Saint-Souplet, fils des Hennegrave-Rogelet, et beau-frère de Maurice Noirot, fabricant ; et Aline Jeanne Duhalde.

Hennegrave fit partie de la firme de tissus Aimé Grandjean, dite Grande-Maison, boulevard Cérès. Succéda plus tard à Petitjean des Biscuits, et mourut à Paris pendant la guerre. Il appartenait à l’équipe de manilleurs du Café Louis XV, où exercèrent leurs talents, sous les regards du jeune patron Tayot ; Eugène Barré, banquier ; Jean-Baptiste Cavarrot ; Lempereur, du bâtiment ; Hacard-Laurendeau, de l’Épicerie ; Charles Lecomte, Émile Lécuyer, le petit Grosjean ; Émile Herlicq, courtiers en laines ; le docteur Robin et son chef, Maurice Salaire, capitaine des Pompiers ; Buirette et Willemet ; le gros Duval, à la face cramoisie ; Georges Leclerc, maire de Saint-Léonard ; Adolphe Feller ; Louis Leloup, et vingt autres, amateurs de la fine et mousseuse bière Veith, servie en bocks à 15 centimes et en mousseline à 25 centimes, dont le brasseur lui-même faisait parfois et généreusement les frais, par tournées générales.

Témoins au mariage Hennegrave-Duhalde : Narcisse Franquet et Auguste Gruny, des tissus ; Noirot déjà nommé, 36 ans, rue Coquebert, 14 ; Aimé Grandjean.

Joseph Landau, de Crenstochau, près Varsovie, dentiste à Paris, et Lucile, fille de Ernest Mayer Chailly-Salomon, tailleur rue du Cadran Saint-Pierre.

Lucien Monce, de Houdilcourt-Poilcourt, 25 ans, typo chez son frère Nestor, à la Coopérative, rue Pluche, 24. Fils de Jean-Baptiste Monce, instituteur décédé à Nouzon, et de Marie Gaillot, il épouse une nièce au chanoine Cerf, Aimée Caroline Wieszeniewska, fille de Pierre et de Louise Cerf, rue du Cardinal de Lorraine, 19. Le beau-frère Langrenne, sculpteur à Bétheniville et Charles Wieszeniewski, chef de caves, boulevard Gerbert.

Clément Henri Foureur, de Cormontreuil, rue Saint-Jacques, 25, fils des Foureur-Somméria, meuniers, et Henriette Laversin, place d’Erlon.

Un fils de jardiniers du Jard, ex-angelot joufflu en terre-de-Sienne, yeux noirs à fleur de tête, chevelure touffue plaquée aux tempes, lèvres épaisses et de purpurines, Gaston Deneux, cousin du successeur de Jean d’Orbais et de Robert de Coucy, fils et des Deneux-Lemoine. Dessinateur aux bureaux de la Compagnie de l’Est, il épouse Marie Virginie Mauvy, rue Cérès, 18, fille d’un brasseur mort à Paris en 1882.

Un marchand de laines d’intronisation récente, Émile Petit, rue du Levant, 8, habitant chez son père, Auguste Petit-Rousseau, rue Petit-Roland, 3 ; et Camille Albeau, née à Reims le 18 juillet 1867 des époux Albeau-Héry.

Émile était né rue du Jard, 37, le 7 octobre 1860 : il décéda en 1908. Sa mère, Joséphine Rousseau, vient de mourir chez sa fille Eugénie Deschamps, à Sedan, où son gendre était drapier place du Rivage.

Le ménage eut un fils, Émile, en 1887, lequel mourut, de la grippe espagnole, le 6 novembre 1918 à Lomé (Togoland), après avoir colonisé pendant treize ans en Sierra-Leone et Afrique Occidentale française. Ce colonial a laissé deux fils et une fille, confiés aux soins des Pères et Sœurs de l’Assomption ; à Freetown.

Le mariage Petit-Albeau eut lieu à Saint-André, les Albeau habitant rue David.

Émile Albeau, entrepreneur de bâtiments, veuf de Flavie Héry, avait épousé Mlle Lamoitié, couturière rue des Tapissiers. Une des filles issues de ce second mariage, Berthe, perdit, en 1929, son mari (deuxième après divorce), Émile Devaux, architecte, rue Guillaume de Machault : en 1934, elle est à Gênes.

Témoins : un lainier, Jules Toussaint, de Romain, ex-moblot en 1870, avec son cousin Jules Petit ; Henry Jules Bruncler, 58 ans, rue Caqué, 15, grand-oncle de la mariée. Une sœur de Bruncler ayant épousé un Remy, d’Amiens, y eut un fils notaire, chez lequel elle décède fin décembre 1934. Elle avait précédemment vécu à Avize. Darcq, Albert Valentin, oncle du côté Albeau, est fabricant de pressoirs à Cumières. Il y eut, vers 1904, une fille, Yvonne, qui épousa, en 1920, un Rémois, Fernand Colmart, établi, au retour de captivité, cultivateur à Gratreuil (Marne) et tous deux y ont de nombreux enfants.

Le frère Émile, le colon de Lomé, laissa une succession dont ils furent, pour leur part, bénéficiaires. Camille Albeau, réfugiée à Boulogne-sur-Mer avec Yvonne, y vécut grâce à subsides reçus d’Afrique, et depuis 1921, habite à Montaigu (Aisne).

Le colonial a laissé un Journal quotidien de sa vie en Afrique ; il en a tiré un livre manuscrit, avec préface et notes de Eugène Dupont ; en deux exemplaires, dont l’un est en possession du R.P. Fabert, supérieur des Missions à Lyon ; l’autre est destiné à la Bibliothèque municipale de Reims.

Edmond Bertrand, né à Saint-Quentin de Henri Bertrand, conducteur des Ponts-et-Chaussées, et de Élise Caillaux, et Marie Maufroy, fille du directeur du tissage Dauphinot, rue des Moulins, 20. Depuis avant-guerre, les Bertrand sont à Antibes, Villa du Tertre : volontaire d’un an au 91e R.I. à Mézières, en 1879-80, il fut dans les champagnes à Épernay.

Le 24 octobre. Denis Félix Pitollet, de Ozières (Haute-Marne) lieutenant au 132e R.I., rue Andrieux, 13, et Givry-en-Argonne, et une toute mignonne Tanagra en sucre de la rue Petit-Roland, 5, Aline Victorine Carrière, fille des Carrière-Gilles, rentiers au pain de seigle (par mesure d’économie, le papa vidait le pot de chambre dans le ruisseau de la rue).

Henri Lajoux, pharmacien en chef à l’Hôtel-Dieu, et Antoinette Richard de Chicourt, à Toulon.

Jacques Principe Mestrude, 61 ans, comptable, rue de Clairmarais, 16, et Marie Jeanne Hazard, aubergiste à Saint-Étienne-sur-Suippe.

Hilaire Hayon, layetier-emballeur, rue des Moissons, 15, et Amélie Curot, de Fismes. Hayon agrandit ses ateliers rue de Cernay, et établit un dépôt de bois rue Ernest-Renan, proche le pont de Saint-Brice.

L’archiviste Louis Demaison, rue Rogier, 9, et Marie Poultier, de Paris.

Eugène Becker, fils de l’agent de change rue de Talleyrand, 76, et Marie Caroline Payard, fille des Payard-Poterlot, à Vouziers.

Lazare Fould, de Metz, boucher rue de la Peirière, 13, et Élisabeth David, rue des Capucins, 125. Le frère de la mariée, Léon David, boucher d’abord à l’angle des rues Sainte-Catherine et Tronsson-Ducoudray, s’était fixé rue Chanzy, 61, où devait lui succéder Gaston Tailliet.

Après mobilisation et guerre, Tailliet fut boucher à Paris, rue Caulaincourt, 50. Quant à Fould, immigré de Metz, en 1871, réfugié à Paris, il y mourut rue Claude-Decaen, 112, en 1920. Il avait eu étal rue Chanzy, 11, puis rue Clovis, tout près rue du Jard, d’où les obus boches le débusquèrent à jamais ! Homme de devoir, cœur d’or, patriote.

Jean Becker, chef magasinier à l’usine Marteau, rue des Romains, 142, et Vve Buquet-Rainneville, débitante même rue, 136.

Longtemps à Warmeriville chez les Harmel, il était le père de Eugène Becker-Bertrand, l’un des propagandistes du Marché à terme des laines peignées, en filières de 5000 kilos. Becker et Mathieu eurent leur bureau rue Chanzy, 14 ; l’affaire ayant périclité et valu à ses dirigeants un apprentissage gratis de fabrication des chaussons de lisière, place du Parvis. Eugène Becker exploita ensuite une invention de Gérard de Recondo, dite paragrêle, rue de Cernay.

On trouve notre gaillard, dès 1915, à Paris, rue de Maubeuge et de Rocroi, à la tête d’une entreprise de charroi d’État, qu'il avait obtenu par les soins de son ami le député Camille Lenoir.

Becker avait une villa à La Varenne-Saint-Hilaire, où nos Mirguet et compagnie, habitués de la Brasserie Heidt, boulevard de Strasbourg, se délassaient et divertissaient de leurs pénibles angoisses, devant une table généreusement garnie, servie par la Vve Poterlot, tenancière, en 1934, d’un kiosque à journaux, près la gare de Reims.

Aloÿse Hubscher, 38 ans, sous-directeur à la Pension Saint-Charles, rue Sainte-Catherine, et Marie Labbé, rue de Talleyrand, 21, fille du chef de l’Institution.

Le docteur Edmond Seuvre, rue Chanzy, 9, épouse en deuxièmes noces Pauline Malinet, de Charleville. Après-guerre, Seuvre se résigne, tout foyer détruit, à vivre à Neuilly-sur-Seine, où il se distrait aux œuvres de l’esprit.

Alexandre Debossu, des tissus, rue Saint-Thomas, 70, et Constance Marie Dauphinot, de Boult-sur-Suippe.

Clément Rinn, boulanger place d’Erlon, 21, où ses petits pains au beurre faisaient florès en 1914, et la cuisinière Bell.

Étienne Tourais, rue Gambetta, 51, avec ses yeux de pie et ses 69 ans, repique en épousant la Vve Roby, plantureuse et gueularde revendeuse et marchande des quatre-saisons, roulant dans nos rues, et par tous les temps, sa roulotte à fruits et légumes.

Georges Varlot, courtaud légèrement voûté, qui collaborait, en 1882, à La Revue rémoise, rue de Talleyrand, 14, chez sa sœur couturière en vogue, et une jeune indigène de Dormans.

Le droguiste rue de Tambour, à la Maison des Musiciens, Émile Pilla, et une Messine.

Enfin, pour clore cette vivante énumération, Alfred Aubertin, 23 ans, rue Favart-d’Herbigny, et Augustine Hortense Leroy, de Montcornet, rue du Champ-de-Mars. Aubertin fut comptable chez les Benoist, du Mont-Dieu.

1886

Pour ne pas trop allonger cette revue des troupes rémoises qui combattaient alors en l’honneur de ce Reims magnifique, illustre entre toutes les cités dont le blason colore et illumine le drapeau de la France, nous n’évoqueront que les noms de ceux qui nous furent les plus proches ou dont notre rémoisisme est le plus fier !

Choisissons, pour commencer, ces rémois adoptifs : Jules Honoré Poincenet, de Louvercy, 36 ans, constructeur d'appareils de chauffage, place d'Erlon, 15, et Berthe Mestrud, de Sommevoire (Haute-Marne), 24 ans, fille de Mestrud-Tabellion, restaurateur à Paris, rue Myrrha, 42.

Jules Mellinette, des tissus, 35 ans, rue de l’Université, 25, fils de Mellinette-Thirion, et Julie Lucie Moreau, 22 ans, fille de Moreau-Lefèvre, employé de commerce rue Ruinart.

Alfred Allion, de Condé (Nord), 26 ans, rue Chanzy, 33, et Jeanne Aline Pilton, 25 ans, fille de Pilton-Foureur, place Royale, 10. Le frère Henri Allion est teinturier apprêteur rue Gerbert, 8.

Charles Victor Secondé, des Petites-Loges, des tissus, rue Favart-d'Herbigny, 64, et Léontine Doizelet, de Damery, 19 ans ; cette délicieuse enfant est fille d’un mastroquet de la rue de Cernay, angle David.

Tout contre ce cabaret se situaient les magasins aux laines brutes Hippolyte Mennesson, avec un triage, aux ordres de l’acheteur Jules Toussaint, et conduit par un toqué bon-enfant, Jules Barrois, ténor aux Bilots.

Parmi les trieurs de ce chantier, il y avait un norvingien, violoniste de talent, Deboudringhin, qui, en temps de chômage et pour faire bouillir la marmite conjugale, exerçait son archet dans les cafés, où sa fillette, aussi rousse que lui, tendait la sébile.

Cette équipe, assez portée sur le vin de pays, fréquentait assidûment chez Doizelet : on buvait là, aux heures chaudes, une excellente bière Tassigny, fraîche et mousseuse, en cruches de grès à goulot étroit. Barrois, qui avait été lui-même bistrot à Warmeriville, sous l’égide du Bon Père, et fort éclectique en toutes matières, frayait aussi bien dans les sacristies que dans les clubs républicains, ménageant la chèvre et le chou, pour les minutes indécises, et, philosophe avant tout, convaincu qu’on peut avoir besoin de tout le monde.

Il devait terminer sa vie en saint homme. Au fond, bon type, aimant chopine et rigolade, serviable avec de grands cris et de grands gestes voulant être menaçants, un de ces gueulards dont on dit : Ce sont les meilleurs !

Ses trieurs étaient d'une trempe rapprochée et joyeuse : citons le gros Montargot, dit Bidaut, nom du Joseph de sa mère ; Bernard, dit Rat-d'Égout, en raison de ses cheveux soyeux, blonds et courts ; Henry Dreux, de Vire, dit l’Andouille, doué d'un faciès chauffé à blanc mûr pour les mouches et moustiques ; Blanchard, marchand de volaille et gibier au Faubourg-Cérès ; Pierre Guinot, de Liry (Ardennes), un Vieux de la vieille de la laine et du peigne à main ; d'autres moins reluisants, dont cet Aimé Landragin, beau-frère de Toussaint et fils d'un trieur ardennais surnommé Sans-Viande, à cause de sa maigreur d'anachorète ; Aimé fut, en 1914, victime d’une bombe allemande en sortant de son domicile, rue David.

Ce que l’on s'amusait, à 4 heures, moment du goûter ! !

Avons-nous conté ailleurs cette farce au père Doizelet ? Landragin glissant dans un cruchon vide une cuillerée de moutarde ! Et ce jugement rendu un matin contre Bernard, accusé d'avoir la veille, à la suite d'une poloche ou beuverie chez Doizelet, satisfait un gros besoin sur un tas de laines ? Bidaut en casquette de soie noire retournée, et le cou cerné d’un ruban de peigné blanc, président à l’interrogatoire du prévenu ? La condamnation à une amende de six litres de vin rouge, à consommer sur place. Condamnation imméritée, car l’objet du délit avait été déposé par un collègue rabelaisien, en accord avec la majorité des accusateurs ! Abaissons le voile !

Charles Lucien de Massary, de Chéry-lès-Pouilly (Aisne), fils d'un percepteur, et Marie Marguerite Folliart, fille de Folliart-Delafraye.

Édouard Picart, des tissus, 39 ans, place Godinot ; fils de Henri Picart-Meunier, dit Poly, – tissus de Roubaix, – et Irma Augustine Baudet, fille de Théodore Lucien Baudet-Legrand, rue Hincmar, 48.

Charles Auguste Ouizille, 32 ans, banquier à Lorient, et Sophie Charlotte Ruinart, de Dammarie-les-Lys, 21 ans, fille du vicomte Ruinart-Hennessy, rue Salin, 4.

Clovis Chézel, – qui sera adjoint au Maire en 1923, – 23 ans, caviste, fille du tisseur Philippe Chézel-Bonhomme, et Marie Lemart, couturière, dont le père était marchand de chiffons, rue du Réservoir, 3.

Paul Gilbert, 23 ans, commis chez l’architecte Lamy, fils de Gilbert-Godin, antiquaire, rue du Barbâtre, 43, et Marie Élisabeth Lutta, 23 ans, même rue, 75, fille de feu Lutta-Descombaz, menuisier, et sœur de Paul Lutta, des champagnes H. Goulet.

Henri Pérardel, 29 ans, fils des Péradel-Débonnaire, de Suippes, ex-élève du Frère Arétas, esplanade Cérès, futur associé de Poincenet-Delanerie, fabricant rue du Faubourg-Cérès, et Marie Angèle Jacquier, 24 ans, fille de Jacquier-Jayet, rue Nanteuil, 2.

Albert Brion, 30 ans, rue de la Belle-Image, 16, fils de Brion-Lebrun, et Appoline, 20 ans, fille de Eugène Gosset, laines, place Godinot.

Élie Armand Haumont, de Nogent-l’Abbesse, bourrelier place des Marchés, 32, et Berthe Eugénie Phez, de Châlons, fille de Phez-Clérin, corroyeur, rue de Vesle, 30.

Henri Lévy, de Montigny-lès-Metz, 28 ans, maquignon, avenue de Laon, 34, et Clara Rachel Netter, 17 ans, fille du distillateur de la rue des Élus, Félix Netter-May, et en parenté avec Jonas Lévy, rue de Vesle, 38, et de Salomon Schnerb, horloger, place du Parvis-Notre-Dame, 27.

Charles Henri Désiré Launois, de Sedan, directeur à Paris des Forges de Vulcain, fils de Launois-Bourgerie, et neveu des Bourgerie de Balan (Maison des Dernières Cartouches). C’est là que s'illustra, en 1870, le sergent d'infanterie de marine Poittevin, de Cumières, dont un fils, 60 ans plus tard, se ferait connaître d’une façon moins héroïque, dans la familiarité d'un escroc, Oustric, et d'un sujet peu reluisant, Bonny. Launois épouse Marie Victoire Bourquin, fille de Félix Bourquin-Cellier, comptable, rue Haute-Saint-André.

Léon Lecreux, dit Bouillon-de-Veau , 32 ans, menuisier accrédité pour la confection de cercueils administratifs destinés aux locataires de Bernard à la Prison, rue Hincmar, 4, et Zélie Baudry, de Boult-sur-Suippe, rentrayeuse chez Salaire. Bouillon-de-Veau était le propre neveu des Larousse du Dictionnaire, tout comme le Cheval blanc à Poix (Ardennes) était l’oncle de Jonval le trieur.

Jules Grandmaison, 22 ans, plombier rue des Créneaux, dont le père, Grandmaison-Simonar, habite rue Gambetta, 51, et Théodorine, 19 ans, fille des Langlet-Debœuf.

Ernest Magny, chef de caves, 57 ans, divorcé, et Léonie Cavarrot, couturière, rue Saint-Thierry, 21. La mariée est de Souillac (Lot) comme son frère Jean-Baptiste contremaître de peignage chez Collet & Meunier. Elle a une sœur institutrice à Reims, et un autre frère, officier supérieur.

Hippolyte Théophile Boigeol, de Nîmes, voyageur en pinard du Midi, et Anna Pauline Zopf, des Zopf-Chaurey, rue des Moulins, 33. Les Zopf sont Bavarois ; leur cousin Eugène Barbier, chef de caves chez J. Mumm, a été pourtraicturé en mosaïque par Ernest Kalas, et habite rue des Augustins, 16 : il aura sa propre marque de champagne, dont bénéficieront les œuvres post-scolaires.

Prosper Edmond Gervaise, de Monthermé, de la Compagnie de l’Est, à Paris, et Isabelle Brié, professeur de piano, fille de Edmond, décédé à Vouziers en 1880, et de Cécile Niverd, épouse Védie, rue du Couchant, 3, professeur de piano et de chant. Ces derniers finirent leurs jours à la Maison de Retraite, avant-guerre. Le père Niverd, rue des Augustins, 16, professe le solfège dans les écoles municipales ; un oncle Émile Brié est tailleur d’habits, rue des Carmélites, et a un fils qui sera entrepreneur de bâtiments et capitaine des Pompiers.

La Trame !... que joue-t-on ce soir au Théâtre ! – La Trame ! autrement dit, du patois et de l’accent alsacien : le drame. Ainsi parlait Eugène Huhardeaux, timbalier à l’orchestre du Théâtre et aux Pompiers, et bistrot à l’angle des rues Chanzy et de Vesle.

De Bischwiller, il y était tisseur avant l’exode à Reims. À 28 ans, il épouse une blonde plantureuse et forte en verbe, Marie Céline Thierry, de Boult-sur-Suippe.

Le bar fut repris vers 1900 par le Messin Jacquemin : on y débitait une bière brune de la Brasserie du XIXe siècle, à base de chicorée, régal des becs-salés du Théâtre et d'autres, dont le photographe Gros-Pottelet, de Metz, admirateur de ces splendides et vastes demis à 0.20 c. devenus épaves de nos souvenirs !

En mars 1930, il est signalé que le houblon, récolté en masse en Tchécoslovaquie est tombé de 6000 fr. le quintal à 380 fr. Les cours de la bière n’en sont point influencés, sauf les recettes de nos cabaretier ou leurs puissants fournisseurs, car, au Café Saint-Denis, angle Talleyrand et Condorcet, le demi Pilsen réclame ses 3 fr. tout comme certains mousseux de nos coteaux !

Charles Haussaire, peintre sur verre, rue Lesage, 22, du Petit-Failly, près Longuyon, fils du meunier retraité à la Maison de rue Simon, 26, Haussaire-Génin, – et Marie Morin fille de Achille Morin-Daire, conseiller à la cour d'appel de Paris, décédé en 1874, rue Clovis, 77. Un cousin, Gaston Daire, est juge à Sedan.

Paul Marcel Farre, des champagnes, 25 ans, rue Coquebert, 12, fils de Narcisse Farre-Boussod, et Valentine Pauline Savoye, 22 ans, fille de Savoye-Leseur, négociant en vins à Hautvillers.

Le relieur Édouard Bâton, 35 ans, rue de l’Université, 33, et Aglaé Trousset, 33 ans.

Pol Clignet, 25 ans, rue des Augustins, 6, fils du filateur Ernest Clignet-Gonel, et Marie Marthe Pinon, 22 ans, des Pinon-Duplessis.

Georges Randoulet, de Fismes, 24 ans, trieur de laines, fils de feu Honoré Randoulet-Potier, et Marie Léonie Romagny, 20 ans, couturière. La veuve Randoulet habite rue de Metz avec Denis Lantenoy, doyen de la corporation des trieurs. Georges a une sœur, Berthe, à la peau d’albâtre, qui épousera un clerc d'huissier, Robin. Charnue, volage et gaie, de beaux gros yeux, naïfs à la Normande, digne des modeleurs de Sèvres !

L’avoué Charles Brémont, de Vitry-le-François, 33 ans, place Royale, 11, fils de Brémont-Rouillot, et Marie Remiette Desingly, 24 ans, fille de Clovis, marchand de laines, rue du Jard, 49, et de Francine Pérette Delarbre, sœur du commissaire-priseur. Les époux eurent deux fils : l’aîné, ancien combattant, vicaire à Notre-Dame en 1930 ; et Louis, de la laine, tué sur le front de Champagne, en 1917, à la tête de sa section, qu’il entraînait à l’assaut en gants blancs et une fleur à la boutonnière !

Paul Chéruy, de Sedan, fils du chef appariteur à la Mairie, et Blanche Merlin, rue Gambetta, 29.

Mariage d’une célébrité vinicole : Gustave Fagot, de Rilly-la-Montagne, fils du glorieux Fagot-Essillard, mort en 1882. La souche Fagotienne monte d’un pouce en terre française par cette union avec Clémence Juliette d'Hespel, d'Amiens, fille de feu d'Hespel-Godfrin, rue de Fléchambault, 102 (maison J. Machuel).

Charles Edmond Bertrand, 28 ans, filateur, rue du Jard, 81, fils de Bertrand-Jacout et neveu de Bertrand-Rosé, et Marie Blanche Liance, 23 ans, même rue, 68, fille de Liance-Latierce, boulanger.

Charles Blaise, dit Destable, 25 ans, fils du cabaretier : À Saint-Roch, cour Lépagnol, rue du Barbâtre, 103, et Eugénie Grandpierre, 23 ans, fille du tisseur Grandpierre-Depommier, rue Saint-Bernard, 26. Charles est dans les champagnes et habitera Épernay.

C’est un séduisant et aimable garçon, de taille moyenne, aux cheveux noirs frisés, râblé. Il avait appris le violoncelle par Abel Lajoye, maître de chapelle à Saint-André, et fit partie du groupe d'amateurs rassemblé par cet animateur en son musée-salon rue Ruinart, 13, où firent leur partie les professeurs Belleville et Paul Dazy pour le piano ; les violoncellistes Ponce Bonneterre et Abel lui-même ; l’altiste Eugène Dupont ; les violonistes Marcel Rivart, Allart, Guillaume, Ronsin, Dufay, Pétel, etc.

L’auditoire se composait souvent d’unique personnage, tout sacrifice et abnégation, l’abbé Crucem, qui en avait vu de plus cruelles en Algérie, étant dans les zouaves, et alors vicaire à Saint-André, lequel, accablé par instants sous le fardeau du devoir accepté, et tombant de somnolence, se laissait aller à oublier la consigne : Ne pas ronfler pendant l’exécution des morceaux, en devenait confus !

Nestor Monce, de Saint-Clément-à-Arnes (Ardennes), 33 ans, directeur de la coopérative-imprimerie rue Pluche, 24, fondée en 1867, par Pierre Dubois, – fils de Wenceslas Jean-Baptiste Monce-Gaillot, instituteur, mort à Nouzon, où il était né, en 1870, et Marie Gabrielle Labbé, 24 ans, institutrice à la pension fondée par son père, Charles Labbé-Chardenal, mort en cette même année 1886, et remplacé par son gendre Aloÿs Hubscher. Un oncle Labbé est capitaine d'artillerie à Versailles.

Charles Edmond Daux, 36 ans, artiste peintre, né à Reims le 26 janvier 1850, et habitant à Paris, rue de Laval, 5, fils du teinturier Daux-Desban, et Aline Chemin (Virginie), 24 ans, fille des Chemin de l’Embarcadère. Une des sœurs Chemin a épousé le capitaine du 45e R.I. Homps et sera la mère du poète rémois et écrivain remarquable Enguerrand Homps, membre de l’Académie nationale de Reims (Enguerrand Homps s’est généreusement proposé de faire pour le signataire de ces Éphémérides rémoises ce que celui-ci fit pour Pierre Dubois et Nicolas David. Que les circonstances lui soient propices et qu’il en soit chaleureusement remercié à l’avance).

Henri Lefèvre, 25 ans, électricien, fils de Gustave Lefèvre-Munaut, menuisier rue des Élus, et Blanche Marson, 24 ans, dont le père est magasinier chez Ponsart-Rigot, laines, rue de l’Écu.

Marson fut gérant d'un immeuble vétuste et branlant, des moins hygiéniques, rue du Carrouge, 21, où, en 1871, vinrent se réfugier les Messins Gautier-Schüller. Le droguiste Victor Ducancel, surnommé Duc-à-cheval, 52 ans, rue de Thillois, 45, est témoin.

Alfred Chemin, 32 ans, trieur de laines, né à Saint-Brice de Jacques, cultivateur, – et Mlle Sarazin, chemisière. Ex-chasseur à pied et gymnaste à l’Ancienne.

Guillaume Greten, ex-basse en UT à l’Harmonie des Frères du Jard et aux Pompiers, fils du cocher de fiacre Greten-Ihry, rue de Clairmarais, 36 ; et Héloïse Jubé, de Verneuil-sous-Coucy.

Théophile Debossu, 27 ans, comptable, fils de Étienne Léonide Debossu-Beaujet, manouvrier rue Saint-Thomas, 70, et Adolphine Ernestine Doyen, 31 ans, vendeuse chez Pertenne-Alard, nouveautés place Royale. L’oncle Achille Debossu est boulanger à Dizy. Le frère, Alexandre Debossu, avenue de Laon, 5, est voyageur en tissus. On les verra tous deux associés négociants et, alors, le Roi ne sera plus leur cousin !

Charles Louis Boësch, 25 ans, architecte rue Pluche, fils des Boësch-Munsch, et Lucie Louise Roederer, 21 ans, fille de Théophile Roederer-Grassière, des champagnes Cristal-Roederer. Témoins : le statuaire Rémois Joseph Chavalliaud 28 ans, rue de la Tombe-Issoire, 82, à Paris, près rue Campagne-Première où Émile Devaux, commis chez Boësch, terminera ses études pour l’École des beaux-arts. L’oncle André Boësch est gargotier avenue de Laon, 60. Le musicien versificateur Gustave Bley, des champagnes, à Paris : ses condisciples au Lycée de Reims, dont la mémoire est restée bonne se souviendront toujours d’un poème abracadabrant sur LE PET, en 350 vers libres dus au talent de ce joyeux émule de Villon. Ajoutons à ce cortège de témoins marquants le marchand de blousses de laine Ernest Piret, rue Jeanne-d'Arc, 19, avec bureaux esplanade Cérès.

Valentin Reboulé, des tissus, de Villeneuve-sur-Yonne, ex-élève des Frères de la rue Large, habitant place d'Erlon, 42 ; et Jeanne Antoinette Cruchandeau, de Marseille, mon bon ! fille de Étienne Cruchandeau-Amouroux, rue Hincmar, 42.

Reboulé, Gascon lorrain, type exemplaire du Gaudissart, voyageait dans le MIDI pour la firme Amouroux & Miltat, rue d'Anjou, 1. Ah ! de ce père Amouroux, si dur pour son personnel ! que le Purgatoire lui soit abrégé ! Un oncle maternel de l’impétrant, Nicolas Dumont, habite à Chambley (Meurthe-et-Moselle) près Gorze, aux eaux réputées. Dans la houle des copains, distinguons le courtier Ferdinand Destombes, rue de la Tirelire, 22, et l’octogénaire Amouroux, accouplé de son fils Pierre, 49 ans. Gens et immeubles disparus sous 1914 !

Valentin Picard, 26 ans, faubourg Cérès, 48, dont le père Picard-Cailly est garçon de magasin, et Marie Blavat, 25 ans, fille de l’antiquaire Blavat-Deleulle, rue de Talleyrand, 36, gérant, à cette adresse, d'un bureau de placement.

Eugène Becker, de Warmeriville, 25 ans, courtier en laines, fils de Jean Becker-Rêve, rue des Romains, 136, et une aimable blond-vénitien du Val-des-Bois, Mathilde Bertrand, 22 ans, couturière, rue des Filles-Dieu, 6, fille des Bertrand-Gény, des tissus.

Les Becker-Bertrand habitaient, en 1914, rue de Talleyrand, d’où ils se réfugièrent à Paris. On en a parlé précédemment.

Qui ne se souvient, parmi nous autres exilés, de ces conciliabules réconfortants à la Brasserie Heidt, boulevard de Strasbourg, centre de réunion des affairistes et aussi du trottoir boulevard du Temple, devant l’Hôtel Bonvallet, ersatz de nos loges de l’Étape !

Ah ! ces assemblées, tantôt tumultueuses, tantôt recueillies, où les Représentants du Peuple marnais, Léon Bourgeois, Camille Lenoir, diffusaient à voix émue ou passionnée, versaient à pleine rasades, dans nos oreilles avides de réconfort et d'espérances, le baume bienfaisant des certitudes de délivrance proche ou leurs consolations !

On sortait de la salle du restaurant le cœur raffermi, le crâne bourré de visions affolantes d'un retour proche en la ville meurtrie, toujours adorée de ses fils, délivrée de l’engeance boche, si malfaisante et cruelle !

D’aucuns faisaient les sceptiques, qui ne voulaient pas paraître faibles de caractère, en murmurant cette moqueuse appréciation : Bourrage de crânes ! Soit ! mais, disait Sganarelle, s’il me plaît à moi d'être battu !

Nous en étions réduits à cette ratatouille de poncifs, à défaut, pour nos cœurs souffrant, de bulletins de délivrance réelle !

Enfin, Clemenceau vint, et la fin de la guerre, avec la victoire. Ce fut une sainte joie ! Et nous y remîmes les pieds, dans nos foyers, tous dévastés qu’ils fussent ! Dès lors, ce fut une autre sorte de bourrage ! À cela près !

Et nos prophètes purent clamer : N’avions nous pas raison ? Cette heure divine, vous en jouissez ! et quel avenir devant vous !!!

Oui ! pour certains. Mais ceci est une autre histoire !

Becker et son épouse, après des heures splendides, finissent, paraît-il, leurs jours, chacun dans un hospice, séparés avant la mort ! Le ciel ait pitié d’eux !

Firmin Anthime, carillonneur et croque-morts à Notre-Dame, qui sera, après guerre, le piteux gardien de la Merveille, au pied de laquelle il tendra la sébile aux offrandes des touristes mondiaux, Anthime, enfant de l’Amour, issu des œuvres d'une Vénus en vendanges et Sacristain à Saint-Maurice, habite en veuf déconfit rue du Barbâtre, 149 : c’est là qu’il épouse une Carolopolitaine de 32 ans, Augustine Schümacher, couturière, rue de Contrai, 12.

Sa mère l’avait, à sa naissance, déposé au Tour de Hôtel-Dieu, le 26 septembre 1850.

Jean Auguste Poulain, conservateur au Cimetière du Sud, en rapport quotidien avec Anthime, prête son concours à la cérémonie, en compagnie de Charles Albert Picart, serrurier ; Paul Mailliet, vannier chez Truchon, et cet hydropique en gésine, Adolphe Charbonneaux, 43 ans, bureaucrate intermittent, aux pieds fumants, voisin de Catherine.

Est-il nécessaire de dire que la mariée avait, sans être Chinoise, des pieds mignons, si mignons ! qu’un jour, à Paris, pendant l’exil, son chausseur, Pauly, cordonnier rémois de la rue des Fusiliers, travaillant à façon, en son morne logis de la rue des Trois-Bornes, prenant leur mesure, en resta tout baba !

Charles Virgile Humbert, de Jussécourt-Mitrécourt (Marne), employé aux contributions, rue de la Belle-Image, 12, fils de Humbert-Berget, receveur à Maurupt-lès-Montoy, et Émilie Tuba, 19 ans, rue Linguet, 10, fille de Tuba-Gontier, laveur de laines, décédé à Châlons, en 1872. Témoin principal : Charles Rogelet, rue Ponsardin, 9 (actuellement, couvent des Dames réparatrices).

Et voici qu’apparaissent des figures particulièrement chères au mémorialiste de ces lignes, dont il va se servir pour orner à sa guise le temple dressé par lui aux souvenirs les plus heureux de sa vie !

À vos rangs ! fixe ! chères plumes d’acier, et petite Underwood !

En tête du peloton de cette vieille Garde rémoise qui, aux sommations de se rendre, répond par le mot de Cambronne ! Ernest Kalas, 25 ans, commis architecte chez Bègue, fils d'Abel Kalas, retordeur rue des Murs, 5, et de Marie Van Damme. Il épouse Blanche Truchon, 20 ans, fille de Auguste Truchon-Simonar, marchand de vins et tonnelier, rue du Cardinal Gousset, 13. Témoins : Émile Hupin-Kalas, ferblantier-lampiste, rue de l’Université, successeur de A. E. Auger, artiste enlumineur et illustrateur, au pinceau duquel est due l’enseigne : À la Fontaine Godinot, disparue depuis aux regards du passant. Eugène Auger est décédé à Trigny en 1922. L’ancien porte-queue de Mgr Landriot, Charles Diot, chez son père, assureur, rue Ruinart, 28. Jules Breton, de Saint-Martin-du-Tertre (Oise), cousin par les Simonar ; Charles Chagnet, 28 ans, voyageur de commerce, à Paris.

Repos ! minute de silence ! en hommage à l’un des plus fiers Rémois que nous ayons connus, figure locale des plus nobles parmi les nobles !

Puis, non moins digne de tous les hommages : Marie Eugène Paul Dazy, organiste à Notre-Dame de Reims, avant d'en être le maître de chapelle, né à Reims le 22 janvier 1864, de Joseph et de Eugénie Caffé, rue des Tournelles, 1 bis. Le service religieux a lieu à la Cathédrale, berceau de l’artiste, et les noces à la Salle-Besnard.

Paul épouse la cadette des demoiselles Pothier, Émélie, 23 ans, dont le père, Étienne, est vendeur aux tissus chez Frédéric Lelarge, et habite rue de Belfort, 12.

Paul Dazy fut placé à la tête de la Maîtrise et du lutrin de Notre-Dame en remplacement du violoncelliste François et de Dormoy : il y tint le bâton avec une autorité et une valeur héritées de son maître Étienne Robert. Garçon d'honneur : Eugène Dupont. Demoiselle d’honneur : Anna Faugère, qui sera Mme Guillaume et mourra à la Maison de Retraite, veuve, en 1930.

Répétons – chassés de Reims par les bombes allemandes en 1914, nos tourtereaux, – car ils s’aimèrent, soyons-en assurés ! – durent s’exiler ! à Paris, d'abord. On le vit gagner leur pain, – ils avaient une fille adorée, Marie Marceline ! – aux Folies-Bergère comme accompagnateur, – Colette en parla dans Le Matin, – ils émigrèrent, définitivement, – après un passage rue de Sèvres, – à Saint-Germain-en-Laye.

Émélie y meurt, à l’hôpital, en 1934. La crise professorale les met à deux doigts de la misère.

Que va-t-il advenir du père et de la fille, si on ne les secoure à temps. Le chapitre de Notre-Dame de Reims se souviendra-t-il de son maître de chapelle ! Hélas ! Nul plus qu’eux ne fut victime de l’affreuse catastrophe !

Marie Henriette Deck, 21 ans, rue David, 10, fille des Deck-Althoffer, qui, après avoir été demoiselle d’honneur au mariage de son amie et voisine Camille Albeau avec Émile Petit, en 1885, – son garçon d'honneur : Eugène Dupont, voué à ces fonctions, – épouse Charles Litty, de Guebwiller, 28 ans, de Paris, fils d'un contremaître d'usine textile.

Marie Deck, veuve prématurée, devint dame de comptoir chez les Petitjean, des biscuits.

En 1920, à l’hôpital Broca, meurt, à 60 ans, Édouard Poursain, des laines. Fils de Poursain-Huet, et demeurant rue Coquebert, 55, en 1886, il épouse Marie Octavie Petit, de Magneux-lès-Fismes, repasseuse lingère rue des Anglais, 4 (tronçon entre Fusiliers et Anjou), fille de Jean-Marie Petit-Prévoteau, morts au Ventelay, en 1879.

Poursain fut l’un des as de gymnastique à l’Ancienne et à la Gauloise. Petit commis chez Houbart frères, toiles d'emballages, il entre dans la laine au service de Milard, puis de Renard & Garnier, rue de l’Université.

Plus tard, acheteur à Londres pour les frères Lartilleux, esplanade Cérès, il entre, en septembre 1914, chez Fernand Baumann, dit Moch, rue du Levant, 13, pour y assurer l’enlèvement de centaines de milliers de kilos de laine empilés dans les magasins du peignage, rue des Moissons, qu’il dirige sur Elbeuf. Salaire dérisoire : 200 fr. par mois, sous les bombes. Il mourut sans que ceux qui lui devaient tant allassent lui donner un dernier adieux !

Les époux avaient une propriété à La Neuvillette, que la veuve occupa pas jusqu’au jour où elle alla habiter l’immeuble des Irma Locart (ex-coiffeurs rue Chanzy) rue Clovis, 43 : elle y vit en 1935.

En exil à Paris, de 1914 à 1920, ils furent voisins de Pacini fils, rue des Moines, 110 bis.

Et, pour terminer l’œuvre, rendons sans vergogne les honneurs à une figure éminemment rémoise, laquelle se recommande, de nos jours parfois bien tristes, à la bienveillance de la postérité locale : le septuagénaire Eugène Dupont, pour l’heure expert au Syndicat des producteurs de laines et mémorialiste rémois par goût et amour tumultueux de sa ville natale, et aussi des concitoyens défunts ou vivants qui furent avec lui au coude-à-coude pendant 50 ans et davantage, en un temps où, prétend-t-il à juste raison, on connut certaine douceur de vivre !

N’eurent-ils point, les uns et les autres, cette fortune sans égale, ni rivale qu’est la jeunesse et la liberté, la santé en plus ! Grâces soient rendues à l’Auteur de toutes choses pour ces faveurs à l’égard des moucherons qu’on était !

Or, ce contremaître de triage chez H. Picard-Goulet fils, rue du Barbâtre, 36, violoniste, au service, depuis 1868, – début de son apprentissage, de tous ceux qui, lorsqu’il fut suffisamment aguerri, eurent besoin de son archet bénévole, écrivain d'aventure pourvu d'une syntaxe primitive, due à l’enseignement des Petits Frères du Jard, dont il avait été l’honneur sinon l’agrément, (Léon) Eugène Dupont convole, le 20 décembre 1886, en justes noces, avec (Francine) Eugénie Gautier, née à Metz le 6 février 1863, repasseuse lingère, rue des Fusiliers, 23.

Lui, fils de Louis Joseph, de Liry (Ardennes), trieur de laines rue Chanzy, 79 ; Elle, de François, professeur de danse et maintien, et de Marie Schuller, de Forbach. Mme Dupont mère se nommait Victoire Aumont, du 138 de la rue du Barbâtre, née en mai 1829.

Marne, Ardennes, Moselle, vont croiser leurs rameaux en vue de propager une race de France, issue de la Gaule-Belgique, qui n'a pas froid aux yeux, a bon cœur, bon estomac, avec quelque peu de bon sens.

L’avenir dira que cette combinaison resta infructueuse : le ménage n’eut point d’enfants ! Pourtant, les peseurs de pour et contre avaient auguré abondance de fruits !

Les Dupont-Aumont eurent 5 fils ; les Gautier, 2 filles et 5 garçons, tous bien solides et vivants !

Des premiers, la branche s'est bornée à donner l’air à une fille, Marthe, épouse Martin, de Rethel, et un fils, Maurice, qui s’est voué, après guerre, au célibat : c’est l’arbre mort !

Les deuxièmes, un seul fils, Arthur, a donné au pays un défenseur : Lucien. Ainsi disparaissent les races. Place aux géants !... de fer et d'acier, de muscles et mâchefer pilé, courageux aux jeux des cirques et des stades, plutôt mous et rebelles aux efforts productifs. À Dieu vat !!!

Le mariage eut lieu à l’Hôtel de ville, et, si rapide que fût la cérémonie, elle n'en laissa pas que d'avoir son côté amusant et figaresque !

Organisée par quelque scribe d'état civil expéditif, salarié au mois et enclin à porter souvent le regard sur l’aiguille de l’horloge, elle fut agrémentée de rires et d’exclamations.

M. le Maire, – en l’espèce le gros Desteuque, adjoint, – avait à couronner plusieurs flammes, dont celle d'un jeune boulanger du Barbâtre, 43, dénommé Cochon, qui épousait une gente damoiselle nommée Courty. Remi Cochon, de Boult-sur-Suippe, avait 23 ans, fils de Cochon-Legrelle, boulanger en ce village. Sa femme, Stéphanie Sidonie, 20 ans, d’Isles-sur-Suippe, fille de Pierre Benoît et de Alzina Marie Concé. Les oncles du marié sont : Auguste Cochon, rentier, rue Saint-Thierry, 26 ; Jean-Baptiste Legrelle, tisseur à Isles ; ceux de la mariée, Pierre Valentin Courty, camionneur chez les Wenz, laines, boulevard Cérès, demeurant rue des Filles-Dieu ; Albert Concé, marchand de charbons à Boult. Ces jeunes gens prennent le n° 758 à l’état civil ; le 759 est appliqué aux Dupont-Gautier. Le 760 à Ernest Herbin, 26 ans, de Bourcq-et-Mars, près Vouziers, agent de police, rue Gambetta, 23, et Adèle Bicheron, de Caurel, 20 ans. Enfin, le 761 à Charles Thubé, de Concevreux, 25 ans, fruitier au lieudit Petite Pologne faubourg de Laon, et Louise Lefèvre, 19 ans, rentrayeuse.

On le voit, ces marieux n'étaient point du grand monde, mais, ventrebleu ! tous honnêtes et braves Français !

Adoncques, le fonctionnaire municipal lisait, plutôt bredouillait, le texte légal sur les obligations réciproques des époux. Or, à chaque alinéa et reprise de souffle, le trop pressé candidat lâchait un « oui » ! vigoureux. Desteuque sourit dans son épaisse barbe grise, bien ratissée, mais agite son menton et son index, et, d'un ton qui veut paraître rabroueur, s'exclame, à la folle joie des présents : Eh ! eh ! mon garçon, vous êtes bien pressé de donner votre assentiment ! Attendez au moins la fin de cette lecture ! La jeune fiancée elle-même éclate de rire, d’un rire enfantin qui secoue ses épaules sous leurs voiles virginalement soyeux, froufroutants et blancs, à gorge déployée, sous les regards confus et la mine apitoyée de son futur conjoint ! Là se termine, de court, l’histoire, à moins de vouloir faire l’Asmodée !

Ce couple plein de jeune ardeur, bouillant, candide et bonhomme, rendit un hommage éloquent au précepte évangélique croissez et multipliez ! Les Cochon de cette alliance furent nombreux et l’un d’eux, Augustin, qui avait obtenu de modifier son nom en transformant l’un de ces O en I, le rendant ainsi moins sujet a railleries équivoques, mourut en héros sur le front de France, pendant la guerre de délivrance, capitaine du Génie : il était condisciple et ami du géologue Pierre Termier, spiritualiste sincère et secourable ami de Léon Bloy.

Les noces Dupont-Gautier se firent à la Salle Besnard, exploitée alors par les Jény.

Les parrains de la joyeuse cérémonie étaient : les frères Eugène et Émile Graffe, de Metz, ce dernier, inventeur du procédé Graffe & Jougla, pour plaques photographiques, brevet racheté et amélioré depuis par Louis Lumière. ; l’incomparable pianiste rémois Ernest Duval, entraîneur inimitable de cotillons, avec le violoniste François Gautier, son partenaire.

À la cathédrale, les grandes-orgues intervinrent, sous la pâte nerveuse du talentueux organiste de Saint-Jacques, et les échos du vaste édifice gothique retentir des redondances polyphoniques du Juif sonore Mendelsohn : la Marche nuptiale du Songe d'une Nuit d'Été, obligatoire en telles circonstances.

Ah ! avouons ici que ce matin-là, le Roi ne fut pas notre cousin !

Après avoir été le garçon d'honneur de quelques bons amis, plus hâtifs en essais conjugaux : Émile Petit, son cousin ; Charles Robin, de Mourmelon-le-Grand, son copain au 91e R.I. à Mézières, en 1879-80 ; Paul Dazy, frère en harmonies et fugues musicales, Eugène Dupont avait été forcé ce lundi-là, sous le décor d'une ville aux rues éblouissantes d'une neige polaire, de remplacer au pied-levé des commissaires de fête que des cochers écervelés avaient laissé se morfondre, en jaquette impeccable et le col cravaté de blanc, dans l’attente d'un landau indolent et oublieux de ses devoirs.

Ah ! la fichue affaire ! On se remit de cette aventure une fois les pieds sous table, serviette au collet, en présence de gueulardises réconfortantes et de vins capiteux, prédécesseurs d'un Henri Goulet pétillant et miroitant dans ses flûtes traditionnelles.

Il y avait là une tablée de parents et amis bien décidés et non moins alezans les uns que les autres : tous ont mérité en ce beau jour une inscription à notre tableau d'honneur.

Alignons leurs noms par ordre de préséance : L.J. Dupont et Victoire Aumont ; F. Gautier et Marie Schuller ; deux des frères du marié : Désiré et Ernest ; les frères Gautier : Gabriel, Lucien, violoniste de talent qu’une mort affreuse attendait, en 1889, à l’incendie de l’hôtel de Bary ; Arthur, Émile, Gaston, et la petite sœur Marguerite, qui, elle aussi, aurait voulu se mariner ! les Graffe, Eugène étant le parrain de l’épouse ; Ernest Duval, requis pour les danses et son Express-galop, d'une élasticité émouvante dans sa vélocité ; Marie Thibaut, épouse Désiré Dupont ; la tante Sophie Dupont ; l’oncle Désiré Dupont, chef de table à la Maison de Retraite ; Ernest Foisy et sa femme, cousine Maria Dupont ; Albert Dubois, ami depuis 1874 ; sa valentine Thérèse Roby, camarade d'enfance de l’épouse ; Achille Mignot, des champagnes ; Émile Deveaux, commis architecte ; Marie Glad, de Metz, valentine de Gabriel ; Victor Paul, contremaître de plomberie chez Amédée Houlon, et les demoiselles Jény : Julia, Odile, Clotilde. Point de masses, mais de la quintessence de cœurs fidèles et aimants !

À l’issue de la bombe, un coup de froid : brise glaciale fouettée en neige.

Le lendemain 21 décembre, aux premières lueurs du jour, sur les vitres de la chambrette des mariés en leur petit logement rue Brûlée, 9, au rez-de-chaussée de l’immeuble Casimir Grévin, où habitent ses beau-frère et neveux, les Guenet, 1/2 centimètre de glace, et l’haleine en buée. La voisine y a songé, Thérèse Roby, du 42 de la rue. Pendant que les concierges Gary, bonnes gens s'il en fût, déglacent leur ruisseau, Thérèse a allumé le feu du Godin petit-format de la grande-pièce qui vaut les 4/5 de l’appartement, non sans avoir, au préalable, servi au lit les champions de la veille, faisant la grasse, un chocolat brûlant, vraiment le bienvenu. Que ce beau geste vaille à notre chère amie, éternellement, les grâces célestes !

Mais, à vrai dire, ne fallait-il pas avoir le diable au corps pour se marier sous une telle température ? Excuse : les 20 ans !

Ce qu’il en est disparu, de ces joyeux convives d'alors ! Leurs traits restent à jamais empreints dans nos cœurs, et l’élan de notre reconnaissance et de notre amour toujours aussi vif, en dépit du poids des ans, et de l’usure par un labeur ininterrompu de 60 ans, sous le signe du devoir et de la fraternité !

Que le ciel nous ait tous en sa digne garde et protection, et que le mystérieux au-delà réunisse cette communauté humaine en une euthanasie éternelle, rêve et aspiration de nos esprits inquiets, mais débordants d'espoir !

1887

Soyons tout aux allégresse des hyménées !

Si les décès furent nombreux, les mariages ne le furent pas moins et vinrent apporter leurs espoirs consolateurs.

Ici aussi, nous ne citerons que les conjoints qui, par leur originalité ou leur valeur, peuvent intéresser nos concitoyens.

Edmond Durieux, d’Aulnoye (Nord), notaire à Roucy (Aisne) et Louise Sarazin, rue de la Peirière, 17, fille de Auguste Sarazin. Celui-ci avait les allures d’un loup, une barbe drue, grisonnante, mal ratissée ; des yeux verts surmontés de sourcils épais et rugueux ; un buste allongé, maigre, voûté ; toujours en redingote, pantalon flottant ; larges souliers Molière ; bourru, mais bonhomme au fond, voulant s’en faire accroire et en imposer aux autres.

Son fils était presque aussi vilain que lui, avec un nez camard, la peau du visage en écumoire, un croûton au Lycée, mais gai et gentil camarade, au cœur d’or. L'associé Galichet était à côté d’eux, un bel homme à moustache impériale, mode Empire et colonel de cuirassiers !

Alexis Louis Belloy, 24 ans, et Joséphine Baret, de Villers-Allerand. Alexis Louis était l'un des fils du trieur Philogène Belloy, de Liry, surnommé la Bécane, et de Pauline Rennesson. Ce dernier sifflait du matin jusqu'au soir.

C'était un musicien d'oreille et de goût et un chanteur délicat. Vif comme un poisson, on le vit un jour tomber par une trappe d'un deuxième étage, se relever prestement comme un chat, en secouant les oreilles, et grimper quatre à quatre l’escalier pour rejoindre son tremplin d’occasion, sans maux ni mal ! Acrobate musical sur pincettes en acier, comme d'autres le sont sur harmonica ou xylophone, il était l'auteur d'une chanson de route au refrain entraînant, comme suit : Piss.piss.piss. de la pistonna ; vi.vi.vi. de la viola ; tron.tron.tron. de la trombonna ; flut.flut.flut. de la flûte à mouchta, etc… toute la gamme des instruments de musique.

Ovide Collard, 44 ans, rue du Corbeau, 8, se remarie avec une dame Constance Bertaut, en troisièmes noces. Doué d'une imagination exubérante, qui amenait les gens à la considérer comme légèrement loufoque, il prétendait qu'on pourrait inventer un obus percutant, farci de lames de rasoir. L'obus, en éclatant, projetterait en tous sens les lames qui couperaient la tête des boches ou autres saloperies du même tonneau ! C'est le même qui, après avoir affirmé qu'on allait avoir la guerre, répond à cette demande : Avec qui ? par cette lapalissade : Aveu l’ennemi, pardi !

Ce trieur de laines était originaire de Sommepy, endroit célèbre où les mâles viennent au monde avec une mèche de laine en un endroit caché du corps. Un jour, las du travail à la claie, il imagina de se faire des rentes en s'affublant d'un tablier bleu pour vendre de la légume dans une boutique tôt ouverte, mais tard achalandée, rue Chanzy, 63. La déconfiture fut rapide, – et qui le croirait, eu égard au peu d'importance du commerce ? – une banqueroute, presque !

Léon Templie, trieur également, sacrifie aux coutumes légales en épousant Zéna Étienne, dite Papillot, rentrayeuse à la maison Lelarge, et, à ses loisirs, utilité au théâtre des Variétés, dans la troupe des Amis des Arts lyriques et dramatiques. Il avait fait son service militaire aux 104e de ligne, d'où il revint sergent-major. Beau comme Appolon, il fut une sorte de Don Juan dangereux pour la tranquillité de certains ménages et son propre foyer en pâtit : le ménage était souvent sur le toit.

Bon musicien, Templie fut un excellent et dévoué flûtiste, à la musique des Sapeurs-pompiers, sous Bazin, Poursain, Mailfait et Lefèvre. Il fut à la tête de la conjuration qui décida le remplacement du vieux soldat Poursain par le doux et compatissant Mailfait.

Entiché de son opinion politique, il fut un de ceux qui criblèrent d'épigrammes et conspuèrent, à la salle Flamand, rue de Normandie, l'infortuné Charles Richard, concurrent de Léon Mirman. Ce malheureux candidat ne put ouvrir la bouche et certains fous furieux le précipitèrent au bas de l'estrade, après lui avoir arraché la perruque qui voilait sa calvitie.

De ce même chahut électoral fut Alfred Proisy, 21 ans, trieur, fils de Jules Proisy-Sinet, rue du Barbâtre, 91, qui épouse Adélaïde Flament, rue Dieu-Lumière, 11, fille de Flament-Cauchy, décédé à Châlons en 1886. Alfred, comme Templie, faisait partie du Comité électoral radical-socialiste du IIIe canton, qui patronnait Léon Mirman. Il décéda au Port-Sec en 1922.

Eugène dit Amédée Godefroy, de Saint-Just (Ardennes) 30 ans, comptable chez Véron, liquidateur, rue Buirette, 40, – et Azélie Doyen, 22 ans, rentrayeuse, faubourg de Laon, 262.

Il avait été employé à l'usine Nonnon, rue de Courcelles, avec Numa Aubert, Albert Dubois, Alexis Baudet-Poissinger et le père Nocton. Soldat aux 120e R.I. à Sedan, il en sortit sergent-major. Nature d’élite, mais concentrée : il eut une fin malheureuse. Perte sèche pour le monde restreint des honnêtes gens !

Charles Audry, de Rethel, rue des Murs, 20, trieur de laines. Son frère Léon fut chef trieur à l'usine J. Poullot, et, acheteur occasionnel de toisons en laine française, avec Pouillart père, dans la région rémo-ardennaise. Léon Audry a 28 ans : de haute taille, édenté, maigre et de santé médiocre, pince-sans-rire, ex élève des Frères du faubourg de Laon. Il mourut à Elbeuf, après la guerre.

Louis Baudart, de Manre (Ardennes), 61 ans, rue Clovis, 86, trieur de laines à l'usine Collet frères et L. Meunier, et veuf consolable, il prend en charge une femme presque aussi mûre que lui, veuve, épicière d’adresse, –Louise Dodement, de Châtillon-sur-Seine.

À eux deux, ils comptaient 125 ans ! Ces visages ridés, moustachus, avec la goutte au nez, firent-ils reculer la clientèle ? Toujours est-il que, rapidement, les 4 sous de leurs économies furent vite dilapidés, et il fallut renoncer au tablier de coton et retomber Gros-Jean comme devant ! Trois fois hélas !!!

Charles Peter, de Lutzelhausen (Alsace), veuf à 25 ans, trieur de laines, frère de Michel Peter, Émile et Jean-Baptiste Peter, il se remarie avec de Dlle Thomas, de Combles, près Bar-le-Duc. Il mourra phtisique vers 1902.

Georges Bauche, commandant d'infanterie de Marine, et la vicomtesse Bouët-Willaumez, sœur de Mme de Lesseps. Né à Reims en 1859, il s'engage dans l'armée en 1875, deux ans après, sous-lieutenant.

Edmond Gaignière, 25 ans, de la Compagnie de l'Est, rue de Contrai, 8, fils de Gustave Eugène, immense et maigre plafonneur de la rue du Jard, 60. Un autre Gaignière est, en 1906, conducteur typographe à l’imprimeries Aula, de Lille, installée rue de l'Arbalète, dans l'ancien Hôtel de la Cloche, où naquit Jean-Baptiste de La Salle, et gérée par Henri Leroy, frère des Écoles chrétiennes sécularisé.

Ovide Bassin, de Courcy, 25 ans, rue Libergier, 63, employé à la maison Werlé, où ses parents avaient été jardiniers ; il est fils de Stanislas Auguste et de Ursule Philasie Pascal, et épouse Marie Aline Philbert, de Pontfaverger, 21 ans, fille de Pierre Philbert-Dubois, concierge à l'usine J. Poullot.

En hiver 1879-80, il faisait son volontariat au 26e R.I. à Nancy, avec d'autres Rémois, dont Paul Millet, E. Jaunet, Émile Petit, Paul Givelet, et les Meusiens R. Poincaré et H. Robineau.

Henri Gaudefroy, de Bapaume, 27 ans, rue de Monsieur, 27, et J. Constance Sichard, 22 ans, fille de Sichard-Dervin, des tissus, rue Cérès, 19, nièce de Virgile Girardot, quincaillier place des Marchés.

Paul Émile Berlin, d’Hannogne (Ardennes), 26 ans, camionneur, place Ruinart, 11, et sa voisine Adèle, fille d'Alfred Pothé, comptable chez le lainier Gadiot (Ernest), ce dernier étant lui-même en parenté avec Victor Besnard, qui, après avoir cédé sa Salle, est agent d’assurances, rue Thiers, 37.

Paul Legrelle, 25 ans, d'Épernay, tonnelier, et Joséphine Marceline Anna, 21 ans, fille de Paul Esteva, ex-bouchonnier rue Dieu-Lumière (boulevard) et de Joséphine Meuret ; le marié a deux frères bouchonniers : Pierre, rue du Barbâtre, 93, et Frédéric Marcel.

Léon Boudin, 25 ans, de Warmeriville, rue Saint-Symphorien, 23, ténor à la Cathédrale et commis chez le luthier Émile Mennesson ; et Gabrielle Hélène Lecroix, de Soissons, 26 ans, impasse des Tapissiers, fille d'un gendarme. Le père de Boudin, Boudin-Ladame, est perruquier. Témoins : Irma Locquart, coiffeur, rue Chanzy, 22 ; Edmond Louis Noël, agent d’assurances, rue du Cloître, 17 ; et le gros et jovial rouquin Jules Souris, mercier rue de Vesle, 107, 30 ans, piston à la Municipale.

Émile Eugène Brugait, de Mesnil-Martuisart, près Péronne, 25 ans, épicier rue Dieu-Lumière, 4, et Louise Marie Colmart, 20 ans, fille du boulanger Colmart-Floquet, place Saint-Timothée. Depuis la guerre, les Brugait sont à Nice, avenue Carnot, à l'entrée de la Corniche. En 1914, ils habitaient rue Coulvier-Gravier.

Le Dr Léon Eugène Chevy, de Chabris (Indre), rue du Faubourg-Cérès, 42, et M. Caroline, 26 ans, fille d'Albert Jolly-Wateau, rue Chabaud, 54. Témoins : Dr Charles Strapart, rue des Telliers, 6 ; le cousin Ken-Franck (Paul), bourgeois campagnard aux molletières cirées et à la badine frétillante, agriculteur à Gueux, homme de cheval et de chien, avec un nez à la Cyrano.

Philippe Édouard Noël, de Paris, auditeur au Conseil d'État, fils d'un receveur aux finances, et Cécile Burchard, 21 ans, fille des Burchard-Delbeck, boulevard du Temple, 44.

Alexandre Charles Duménil, de Dreux, 32 ans, notaire à Quincy-Ségy (Seine-et-Marne) et Berthe Folliart, 20 ans, fille d'Arthur Folliart-Delafraye, rue Thiers, 8. Témoins pour la mariée : Victor Diancourt et François Goulet.

Eugène Tanret, flûtiste aux Pompiers et à la Philharmonique, bijoutier rue Chanzy, 32, successeur de Léon Choisy, à la Grosse-Horloge, marie à Reims son frère Victor, de Douzy.

Mirtyl Roch Éloi Léon Brouette, du Verguier (Aisne), 39 ans, couvreur rue Croix-Saint-Marc, 60, veuf de Blanche Dranowski, et Louise Cressiot, giletière rue des Gobelins. Témoins : d'autres Brouette, Achille Zéphir, rue Ferrand ; Numa Gaëtan, 31 ans, rue des Gobelins, 8 ; Henri Leclercq, trieur de laines, rue Charlier, 48 ; Henri Journé, fileur, chemin de Courcy, au faubourg de Laon.

Léon Lefert, 45 ans, fils de Léon Lefert-Wirbel, et beau-frère de Joseph Gory, rue Jacquart, 26, – et Juliette Forest, fille de Forest-Laurent, ex-médecin à Vireux-Vallerand, rue de la Prison, violoniste à la Philharmonique. Témoins : Hubert, commissaire-priseur rue de l'Arbalète, 8 ; l'oncle J.-B. Corneille, rue des Consuls, 7, et Albert Forest, inspecteur à la Compagnie de l'Est.

Félix Rousselet, de Corbeny, 43 ans, menuisier rue Lecointre, 19, et Anne Justine Raunet, de Sainte-Marie-à-Py, fille de Raunet-Ourblin, décédé à Reims en 1869, nièce du curé Raunet, chapelain au Cimetière du Nord, rue Dorigny, 24. Les Raunet sont en parenté avec les Dupont-Aumont ; leur cousin commun Émile Liégeois, 38 ans, est menuisier boulevard Jamin.

Ernest Hermonville, 26 ans, caviste, fils de Hermonville-Gaudron, tisseur, rue du Grand-Cerf, 60, sera assisté en ses noces avec une insulaires de Par-en-Haut, par son frère Louis, 41 ans, gérant d'épicerie, rue de Cernay, 84, contrebassiste à la Municipale et ex-contrebassiste à cordes à l'orchestre du Bal-Français, à Fléchambault. Ses fils et petit-fils sont mécaniciens-dentistes, en 1934, rue Houzeau-Muiron, 18.

Paul Appert-Jojot, 29 ans, garçon de salle chez Collette, Hôtel Colbert, place d'Erlon, 70, fils d'Antoine Appert, ex-marchand de laines retiré au Mans, et Élisa Gobert, 22 ans, rue de Bétheny, 123.

Alfred Henrot, 25 ans, de Cernay-en-Dormois, journalier, rue de Venise, 75, et sa cousine Marie Constance, de Manre (Ardennes), fille de Henrot-Clogne, messager.

Théophile Leclerc, 26 ans, de Château-Thierry, coiffeur, rue Cérès, 16, et, en 2èmes noces, Anne Duchazeaubereix, 19 ans, de Saint-Junien (Haute-Vienne), pays de mégissiers et ganterie de peaux d'agneaux.

En 1914, les Leclerc été réfugiés à Neuilly-sur-Seine dans le vaste immeuble du Restaurant Gillet, au 3e étage, tandis qu'au rez-de-chaussée, dans une pièce unique, voisinaient les époux Albert Dubois-Roby, avec leur fille Thérèse. Heures pénibles pour tous !

En 1920, Leclerc, rentré à Reims, exerçait dans un baraquement en planches, auquel on accédait, pour éviter la boue, par 3 marches qui n'étaient pas de marbre rose ! à l'angle des rues Cérès et de Luxembourg.

Ernest Alloënd, né à Reims le 4 octobre 1860 de Alloënd-Chevillion, rue de la Belle-Image, 2, et Berthe Eugénie Quignard, 19 ans, rue de Thillois, 22. Veuf en 1914, Alloënd entra à la Maison de Retraite, où il décéda subitement en septembre 1925. Témoins : François André Goulet, 78 ans ; Louis Dervin, teinturier rue du Barbâtre, 53, 47 ans.

Étienne Maurice Poulain d’Andecy, de Paris, au Crédit Foncier, 33 ans, et Marguerite Henriette, 24 ans, fille de Florens Walbaum-Kock, rue du Marc, 11. Témoins : Dr Dupuy, de Saint-Denis, beau-frère de la mariée, et Jules Norberg, gérant de l'Imprimerie Berger-Levrault.

Henri Harant, de Paris, tissus, fils et du pharmacien Harant-Grévin, et Alice Valser, de Châlons, 29 ans, fille de Alfred Valser-Brisset, rue Libergier, 75.

Charles Albert Suffert, de Bâle, 26 ans, rue Ruinart, fils de Gustave, et de Marie Salomé Deck, et interprète à la firme Saint-Marceaux, épouse Marie Eugénie Cavrot, modiste, avenue de Laon, 79. Témoins : Paul Wideman, rue de Sedan, 7 ; Émile Ita, rue du Petit-Four ; Charles Cochet, de la firme Pommery, rue Ponsardin, 50.

Albert Cox, du peignage J. Holden, 26 ans, né à Reims de Samuel et de Marguerite Holden, sœur de Jonathan, rue Croix- Saint-Marc, 104 ; et Anne-Marie, sa cousine, fille de Jérémie Baistow-Holden. Témoins : Robert Cox, directeur des plantations et du vignoble J. Holden à Bouffarick (Algérie) ; Isaac et Thomas Baistow, à la Ferme des Anglais, route de Cernay ; Arthur Southérus, pasteur protestant à Wednesbourg (Angleterre), beau-père de la mariée et cousin des Cox.

Émile Bertinet, de Nancy, professeur de physique au Lycée de Reims, rue Jeanne-d'Arc, 57, et M. Joséphine Pérard, de Thoiry (Haute-Savoie), fils de Bertinet-Petitmangin, instituteur ; fille de Pérard-Duret, ex-instituteur et débitant de boissons, rue du Ponceau, 27.

Edmond Gustave Leroy, peintre faubourg d'Épernay, 35, fils de Eugène Émile Leroy-Chareaux, ingénieur civil, et Célina Aurélie Charbonneaux, journalière, faubourg de Paris, 25 ans, originaire de Cerny-Machereménil, près Novion-Porcien.

Ces Leroy sont en parenté avec le notaire Baudet et le marchand de laines Henri Picard.

Jacques Lang, de Ribeauvillé, 34 ans, cotonnier à Rouen, et Esther Verte, de Toul, fille de Alfred et Nathan, marchand de biens, à Reims, rue des Consuls, 3.

Louis Émile Vignau, de Puteaux, 29 ans, contremaître de teinture chez M. de Tilly, rue Folle-Peine, 28, et Éléonore Lucie Cornu, 18 ans, rue des Moulins, 24, dont le père est employé de banque. Témoins : Amouroux père, des tissus et Henri Bouvry, banquier à Fismes.

En 1930, les Vignau, sont teinturiers rue Chabaud.

Charles Noblet, de Rethel, filateur à Signy-l'Abbaye, 36 ans, et Angèle Panis de Reims, fille du docteur de ce nom.

Paul Mangon, 27 ans, marchand de bouchons, rue Henri-IV, 38, fils de Mangon-Dupont, tailleur à Saint-Brice, et Céline Louise Georgin, 24 ans, fille de Georgin-Aubert, rue de Cernay, 24.

Léon Félix Ladague, 42 ans, impasse Saint-Jacques, fils de feu Honoré Alexis Ladague-Derivry, carrossier rue Large, où lui succédèrent Mathieu et Charles Couvreur (autos de Dion-Bouton) ; et M. Henriette Gentilhomme, fille de Alix Joséphine, rue du Mont-d’Arène, 49.

Edmond Napoléon Carré, enfant du Jard, où sa mère était repasseuse lingère. Napoléon a 25 ans, toutes ses dents, un visage rond et plaisant, une chevelure noire luxuriante, un teint au brou-de-noix, plutôt clair ! Il habite rue du Barbâtre, 83, est dans les tissus, fils de Carré-Lepage. Il épouse M. Éléonore, née à Warmeriville en 1866 de Jules Gény-Gouverneur, contremaître au Val-des-Bois. Louis Carré, son grand-père, était auneur de tissus ; il a 73 ans. Témoins : Charles Alfred Davenne, directeur de filature, rue de Châtivesle, 1, enfant du Jard lui aussi ; Louis Gouverneur, du Val-des-Bois ; Louis Auguste Bertrand, de la même usine, dont la fille épousera le courtier en laines Eugène Becker.

Louis Onésime Châtelain, 60 ans, ancien fabricant, ex-comptable à la maison de laine Alfred Gosme, rue Savoye, 26 bis, se remet en ménage, las d’un veuvage trop prolongé, diverti à peine par les plaisirs de la musique et des arts scéniques ; car, conseiller municipal, la ville lui confia un rôle important dans le recrutement des artistes et des musiciens de l'orchestre du théâtre. Mélomane compétant, type vraiment rémois, de petite taille, replet, visage moustachu, plein, rosé et souriant, les yeux cerclés d’un binocle aux branches d'or, et une tête ronde nimbée de boucles blond-chatain tombant sur la nuque .

Charles Edmond le Dieu de Ville, courtier en laines, rue du Carrouge, 20, épouse Marie Adolphine Dessailly, sœur de son associé Julien Léonard Dessailly. Julien a 26 ans, c’est un beau et sympathique garçon, au visage encadré d'un fin collier de barbe noire ; il fait partie de la corporation bruyante, curieuse et si vivante des courtiers en laine, tous enfants de Bacchus et amis de Vénus, dont les boute-en-train sont : Julien Collin, Jules Dupont, Van Cramphaut, Munaut, Strohl, Christian, Clausse et d'autres égrillards compagnons, fidèles clients du cabaretier Rolin, rue Rogier.

Claude Dessort, originaire de Lyon, ex-maître d’armes au 132e R.I., professeur d'escrime et cabaretier, rue Chanzy, 100, épouse Elvire Célestine Gaudefroy. Courtaud et râblé, rouge et suant, Dessort avait le défaut contraire à l'exercice de sa profession, d'être poussif en diable. Il eut une salle d'armes rue des Capucins, au lieu même où son gendre Gantier exploite, depuis la guerre, un restaurant pour midinettes.

Charles Cornet, de Besançon, sous-lieutenant au 132e de ligne, mélomane compositeur plusieurs fois joué au théâtre de Reims, violoniste distingué, exécutant à la Philharmonique, fils d'Alfred Cornet, inspecteur d'Académie à Châlons-sur-Marne, se marie avec la plus jeune des deux jolies filles d’Arsène Bourgeois.

Auguste Aloyse Biébuyck, voyageur de commerce à Saint-Josse-ten-Noode (Belgique), se présente devant M. le maire conjointement avec Lucie Barbelet, fille de Charles Barbelet-Lefèvre, marchand de champagne, rue de l'Avant-Garde, 7. Avant d'installer son cellier de vins dans cette rue, Charles Barbelet tenait un cabaret restaurant à l'enseigne de Café Charles, place Royale, où les gourmets dégustaient en saison les meilleures huîtres et les escargots les mieux préparés, le tout arrosé d'une tisane de champagne à 2 fr. la bouteille, au bouquet de revenez-y.

Ah ! pour nous, les temps paradisiaques ! Les témoins étaient de notables clients de l'établissement : le brasseur À la Grosse-Enclume, dans Dieu-Lumière, au carrefour des Créneaux : Alfred Gouverneur, face enluminée sous abondante chevelure pas toujours peignée ou lissée soigneusement ; Philbert Henri Chalamel, marchand de meubles, rue de la Justice, 52, et un des fils Bauche des coffres-forts, Gustave, rue Boulard, 17.

Et, enfin, pour clore cette liste déjà longue, notons le mariage de Isidore Auguste de Grandsaigne, représentant de commerce, rue de Venise, 70, fils de feu le colonel de Grandsaigne. Sa fiancée est Berthe Irma Polonceaux, fille de Jules Polonceaux, ancien boucher sur la place des Marchés, jouxte les Halles. La boucherie Polonceaux était la plus achalandée de Reims et toutes les bonnes ménagères ne manquaient pas de s'y approvisionner, lorsqu'elles faisaient leur marché.

Adrien Polonceaux dirigeait en 1914 l'Hôtel Métropole-et-Commerce, rue Robert de Coucy, dont il a depuis relevé les ruines. En 1930, il fait abattre pierre à pierre, les vestiges du vétuste immeuble où le notaire Paul Douce faisait grossoyer ses actes. Les caves de cette maison étaient recouvertes d'une voûte reposant sur d’énormes madriers de chêne.

Sa sœur, Berthe Irma, est une grande et forte femme, de beauté virile. Pour elle signent à l'état civil : son cousin André Rose Bouchard, maréchal-ferrant, rue Buirette, 17, et Alphonse Mari, ex-lainier, 51 ans, place Drouet d'Erlon, 75.

Adrien Polonceaux est un sportif réputé pour la finesse de ses attelages. Sa figure est des plus joviales et sympathiques, agrémentée d'une longue et soyeuse barbiche aux poils flottants.

Commerçant actif et averti, possédant la boule du commerce, il déploya tout son cran dans les circonstances d'après-guerre : il n’hésita point à ouvrir rue du Cloître, sous un auvent qui le protégeait à peine des vents coulis et des averses fouaillantes, un étal de comestible qui contribua, par ses saucissons et jambons fumés, au ravitaillement de la Pompéi rémoise, encore haletante sous ses blessures. En attendant mieux, il habitait, avec sa sœur, une maison munie d’écuries à chevaux, rue de Venise, 24, vendue, par la suite, à Gaston Gautier, tapissier rue du Jard, 39.

Avant-guerre, Polonceaux exploita, à la suite du cabaretier Rix, un établissement chorégraphique, – sorte de Pré-Catelan rémois, dit Bal du Pont-de-Muire, à La Haubette-Tinqueux.

Tout ce monde éteint dont nous avons essayé d'esquisser les silhouettes diverses et toutes pathétiques avait contribué à faire de notre Reims bien-aimé l’une des cités les plus sociables et confraternelles de notre grande France.

Certes, nombre de nos successeurs pourraient estimer fastidieuse, la longue énumération de leurs noms, demeure, profession, etc. Admettons ensemble que ces pages ne sont qu'une sorte de nécropole. Et, ainsi qu'on le fait lorsque l’on se promène et recueille dans nos cimetières, arrêtons-nous pour cette minute de silence et de rétrospection dont nos défunts nous sauront gré : ce geste sera la justification des mémorialistes, et il suffira à leurs désirs.

1888

Maintenant à nous les reconstituants, les forgerons de ce matériel humain qui servira, sous un quart de siècle, de rempart à Reims et la France contre les flots massifs de la barbarie !

Auguste Rouquette, maître d’hôtel à Saint-Geniez-d’Aveyron, et Veuve Renaudin-Flostroy, rue de Belfort, 6. Rouquette fut le premier exploitant de l’Hôtel Continental, place d’Erlon.

Une sœur de Delavallée-Poullot épouse le docteur Imbert, de Vendôme.

Nicolas Ferdinand Thibaut, fumiste tôlier rue Chanzy, 58, épouse Catherine Mergen , dont une sœur, originaire comme elle du Luxembourg, est gouvernante chez l’érudit bibliophile et journaliste Henri Menu, conservateur adjoint à la Bibliothèque municipale. Les nouveaux mariés donneront le jour au futur curé de Cormontreuil, l’abbé Jean Thibaut, d’abord vicaire à Saint-Benoît, puis professeur au petit Séminaire. Ferdinand Thibault, âgé de 39 ans, était né le 20 avril 1849 à Habay-la-Neuve, près Étalle, dans le canton d’Arlon (Belgique), Catherine, 30 ans, de Kayl, près Esh-sur-l’Algette (Luxembourg) était fille de Jean Mergen, charpentier et d’Élisabeth Schmidler, ménagère, venue à Reims étant veuve, fut cuisinière chez le notaire Élambert. Témoins à leurs noces : Désiré Dupont-Thibaut, Louis Dasnoy-Thibaut, Émile Fourrier, chaudronnier rue de l’Université, 71, et Léon Fontaine, fumiste, rue de Vesle, 165.

Léon était le 3e fils des Fontaine-Naviaux, et, après avoir installé et exploité une boucherie rue du Cadran-Saint-Pierre, finit ses jours dans cette profession, à Dijon, vers 1925.

Julien Jennesseaux, architecte, boulevard de la République, 77, et Noémi Lambinet, de Marseille. Les époux viennent habiter au n° 60, rue Ponsardin, et eurent deux fils, dont le survivant est en 1930 représentant du consortium des Constructeurs rémois. Leur aîné fut tué sur le front, en 1916.

Abel Gérard, viticulteur rue de Neufchâtel, 31, et Jeanne de Recondo, de Bordeaux. Gérard de Recondo eut sa marque de champagne et, en 1906, exposa sur un terrain propice, rue de Cernay, les paragrêles dont Eugène Becker fut l’ardent propagateur dans le vignoble champenois. En 1914-18, Eugène Becker fut au service de l’État pour les transports, à Paris, rues de Rocroi et de Maubeuge, avec dépendance-villa à la Varenne-Saint-Hilaire, où il eut un salon et une sorte de ce table d’hôte pour des personnalités rémoises habitant Paris, le député Lenoir, le commerçant Mirguet e tutti quanti.

Gustave Félix Houlon, 23 ans, marchand de fers et métaux, rue Bertin, 4, et Louise, 18 ans, des Bonnefoy-Oudry, directeur d’assurances, rue du Cloître, 7.

Auguste Bonnefoy, oncle de la mariée, habite rue Brûlée, 62. Un autre Houlon, Ernest Georges, 23 ans, marchand de fers, rue de Vesle, 154, fils lui, de Jules Houlon-Pasquier tandis que son cousin Gustave l’était de Félix Houlon-Véron, épouse, 14 avril, et le même jour que Gustave, Marie Émélie Léonie, 22 ans, fille des Bourgeois-Gérard, rue des Chapelains. Le père de cette dernière, Eugène Bourgeois, est négociant en vins, rue Nicolas-Perseval, 2.

Alfred Colmart, né à Reims en 1863, boulanger-pâtissier sur la place Saint-Timothée, 11, fils de Colmart-Floquet, décédé en 1887, et Marie Eugénie Bastogne, 19 ans, fille de Eugène Bastogne-Philippot, maréchal-ferrant aux 30, rue Dieu-Lumière. Colmart sut attirer une clientèle fidèle qui, aux foires de Saint-Remi, avait pris l’habitude de s’approvisionner, dans sa boutique et celle de son collègue et voisin Jacquemin, de ces affriolantes darioles et de ces croustillantes couronnes dorées sortant de leur four, et qu’on allait dévorer à belles dents dans les cabarets et guinguettes du voisinage, en dégustant la tisane champenoise à 25 sous la bouteille, parfois transmuée, aux années de vin cher, en poiré doux et mousseux. En ces temps, la place Dieu-Lumière s’adornait de loges comme la rue de l’Étape, et de baraques foraines qui, au premier dimanche octobre, à la fête patronale du quartier, donnait à ce coin de Reims une allure de kermesse flamande des plus pittoresques. La guerre a supprimé tant de vieilles petites choses à nos âmes sentimentales qu’il ne faut pas s’étonner de ne plus revoir la place Saint-Timothée avec ses loges. Il faut s’habituer à ces privations que les nouvelles générations ne connaîtront pas, n’ayant point joui de ce qui fit alors nos délices.

Charles Loilier, de Recouvrance, 33 ans, courtier en laines à la maison Picard-Goulet & fils, veuf de Mlle Bréart la couturière, épouse en secondes noces Octavie Catherine Delpoux, 34 ans, de Pont-de-Salars (Aveyron). Loilier qui habite rue Buirette, 28, est fils d’Agricol, cultivateur à Brienne-lès-Asfeld, et cousin de Charles Loilier, de Variscourt. Son coiffeur Dumont, du 6 rue Cérès, est témoin du marié.

Raoul de Bary, 28 ans, rue des Consuls, fils d’Albert de Mlle Fassin, morte à Hautvillers en 1880, et Berthe Caroline Olympe, 18 ans, fille de Georges Goulet-Martinet, rue Buirette, 21.

La maison de champagne Raoul de Bary se dresse à l’angle du boulevard Lundy et de la rue des Écoles, vis-à-vis l’auberge de la Providence. Son cousin germain, Hermann Alexandre de Bary, a son hôtel particulier sur le même boulevard, au n° 17, lequel sera dévasté par deux incendies, dont l’un en février 1889, l’autre au cours du bombardement de Reims. Celui de Raoul, détruite pendant la guerre, est restauré. En septembre 1930, on procède à la démolition de l’autre, resté jusque-là abandonné aux ronces et à la moisissure. Témoins aux noces de Bary-Goulet : l’aïeul François Goulet, l’ex-capitaine Jules Fassin, de Bétheniville, et l’oncle Isaac Philippe Crozes, sous-directeur aux Finances.

Guillaume de Salivet de Fouchécour, d’Auvers, 29 ans, ingénieur civil à Saint-Just-en-Chaussée (Oise), et Julie Lucie Poulain, sa belle-sœur, veuve de Charles Roland, décédé en 1884, à Amélie-les-Bains. Elle habitait rue Chanzy, 117, immeuble qui disparut en 1930, sous la pioche des démolisseurs, en même temps que le numéro 119, après le bel immeuble Louis XVe propriété de Alexandre Henrot-Grandval, et où il eut de longues années un bureau de tabac et le café Français.

Charles Delaître, 29 ans, un grand blond au teint pâle et aux cheveux plats, comme tel célèbre Corse, fils du lainier Jules Delaître-Guérin, rue Linguet, 11 et Germaine, fille de François Remi Lhotelain-Borderie, de Bétheny. Courtier en laines très estimé sur place, comme son père d’ailleurs, il était de gestes onctueux et insinuants, tenace en affaires, d’une politesse exquise et parfait connaisseur en la matière. Il mourut jeune encore.

Victor Herbé, 29 ans, inspecteur à la salubrité publique, rue Ruinart de Brimont, 41, fils de feu l’architecte rémois Auguste Herbé-Lurette, décédé en 1885, et frère d’Edmond Herbé, architecte également.

Un cabaretier à la Porte-Mars, dans les écuries et les cours duquel les messagers remisent chevaux et voitures aux jours de grand marché, Julien Théodore D’Hesse, 27 ans, peintre-décorateur par goût et profession, fils de feu Édouard D’Hesse-Bécret († 1881), et Anne-Marie Chevalier, 22 ans, à la Folie-lès-Bienville (Haute-Marne).

Marie Paul André Ruinart de Brimont, 26 ans, au château de Bellombre, près Dammarie-les-Lys (Seine-et-Marne) et demeurant rue Salin, 4, fils des Brimont-Hennessy, et Marie Riboldi, de Londres, 21 ans, chez son tuteur l’avocat rémois Henri Paris, rue de Talleyrand, 47, fille de John Anthony Riboldi-Welch, préposé aux douanes. Un parent, Hériot de Vroïl, est propriétaire au château de Rocquincourt, près Courcy-Brimont.

Jules Ernest Triouleyre, de Soissons, 40 ans, un bel homme, de haute taille, aux cheveux noirs frisés et ébouriffés, un peu faiseur, veuf de Mathilde Génin, divorcé ensuite de Marie Boyaux, et demeurant impasse des Carmélites, épouse Victorine Gœbel, de Mareuil-sur-Ay, de la parenté d’Eugène Courmeaux, qui d’ailleurs est témoin aux noces, avec Charles Richard, comptable et homme de lettres – amateur, poète, conférencier, politicien local, mutualiste. D’autres témoins : Gustave Gœbel, sculpteur sur pierres, rue de Courcelles, 13 ; Charles Debra, pâtissier, rue des Capucins, 20, et le chef de caves Gabriel Béranger, rue Colbert, 25.

Paul Martinet, de Châlons, 28 ans, fils de Basilide Zacharie, loueur de voitures, et Eugénie Devraine, 16 ans, fille de Devraine-Brûlé, lingerie et rouennerie, rue des Tapissiers, 19. Martinet, établi bonnetier en gros rue de Talleyrand, fut tué par un éclat d’obus pendant le bombardement de Reims. La firme veuve Martinet-Devraine a réouvert son magasin rue de l’Étape, aux abords du passage Subé qui ouvre une voie entre cette rue et la rue de Vesle.

Léon Simonnet, fabricant de tubes en carton pour canettes de tissage, rue Montoison, 8, veuf de Louise Adolphine Souris († 1886) et Ismérie Julienne Philbert, veuve de Charles Nocton.

Eugène Pigneux, de Paris, 23 ans, rue des Orphelins, 7, et Pauline Lucie Louise, fille de Michel-Dufour, qui fut marchand de parapluies rue Sainte-Catherine, 8. Pigneux fut le premier à construire à Reims une maison avec terrasse et jardin suspendu, rue Gambetta, 19, qui fut une des rares rescapées du bombardement. Il la réoccupa en 1920, mais eut le malheur, au cours d’un voyage à Paris, de gagner une bronchite provoquée par les fenêtres ouvertes du wagon qu’il occupait, en novembre, et dont il mourut huit jours après.

Alfred Godefroy, frère d’Amédée et originaire de Saint-Juvin, surveillant au chemin de fer de l’Est, rue de Neufchâtel, 61, divorcé d’Irma Adèle Estiez, épouse une blondinette de 30 ans, Louise, fille de Deligny-Voitté, jardinier rue de l’Isle, 10. Son frère Valentin était palefrenier au garage des Petites-Voitures de place. À l’heure de la retraite, Alfred Godefroy alla élever sa nombreuse marmaille à Heutrégiville, où il est mort avant-guerre.

Eugène Beugé, né à Reims le 15 janvier 1859, fils de feu Nicolas Toussaint Beugé-Thilloy († 1876). Employé dans les tissus, chez Balourdet & Radière, et demeurant rue Coquillard, 17, il épouse Constance Léonide Henriette Petitdomange, 28 ans, frangère, place des Marchés, 8, fille de Constantin Petitdomange-Triboulois, hôtelier à Lourdes. Beugé a résisté à la grande tourmente et fait partie de la cohorte déjà fort réduite des Rémois de l’ancien temps qui s’efforcent, avec tant de peine, à s’assimiler au magma nouveau d’une population aux mœurs et habitudes qui s’avèrent différentes des précédentes.

Un aïeul vénéré, Victor Paroissien, témoigne avec une joie sans mélange aux noces londoniennes de son aîné, Victor Dominique, qui épouse dans Westbourne-Park-Road, une blonde Anglaise du nom de Louise Baker, 27 ans. Ce Paroissien fils est intéressé à la maison de laines Eugène Gosset et son acheteur aux ventes de laines coloniales, à Londres.

Le Luxembourgeois André Pauly, 24 ans, de Wiltz, près Dieckirch, cordonnier en neuf rue de Tambour, 18, et Catherine Spedener, 24 ans, domestique chez le banquier Pestre, rue des Élus, 19. Ils eurent un fils mobilisé en 1914, alors qu’il était employé chez les Benoist du Mont-Dieu, ex-élève à l’école des Frères de la rue du Jard et de rue de Contrai, mort pour la France en 1916. Son père, devenu veuf, s’était réfugié à Paris rue des Trois-Bornes, pendant la guerre.

Barthélemy Fougère, né à Metz en 1859, employé à l’usine des Fontaines, fils de Fougère-Linden, rue de la Tête-d’Or, 4, en cette ville lorraine, et Adèle Dangléant, repasseuse de 17 ans, rue Jacquart, 56.

Léon Ernst, de Clavy-Warby (Ardennes), 25 ans, comptable, rue Polonceau, 2 (ancienne chaussée Hannier), fils de Samuel Ernst-Valentin, garde-magasin, et Augustine Gossard, couturière, rue des Romains, 140, fille de Gossard-Cousin, chef d’équipe à l’Est. Il a deux frères bien connus à Reims : Émile, placier pour la maison de vins Lançon à Blanquefort (Gironde), et Théophile, contremaître de tissage de l’usine Walbaum. Au décès de son patron, Louis Dupuy, Léon Ernst fit le courtage des laines, et représenta notamment la maison Boulé, d’Elbeuf. Rentré à Reims, après-guerre, en 1923, il habita chez Mme Veuve Louis Schnetzler, rue Croix-Saint-Marc, 85, et exerce, en 1930, rue Montoison.

César Amédée Risbourg, de Landrecies, 28 ans, rue David, 22, comptable chez le notaire Mandron, et Fernande, 21 ans, fille du bimbelotier Olin-Limoges, au Grand-Polichinelle, rue de l’Étape, à l’angle gauche de la place d’Erlon, remplacé depuis par la Taverne Flamande.

Un jeune industriel rémois, Henri Collet, né le 30 janvier 1861, des Collet-Delarsille, épouse Berthe Fanart, 20 ans, fille de l’organiste Louis Fanart, décédé le 15 mars 1870, et de Clémentine Rivart, habitant à Paris avenue Marceau, 74. Témoins : son frère Léon, qui décédera en 1923, à Reims ; son beau-frère Lucien Meunier, 44 ans, et l’oncle des Fanart, Émile Lochet. Les Collet Fanart réhabitent depuis la guerre leur hôtel restauré du boulevard de la Paix, 1.

Charles Émile Delageneste, de Remiremont, lieutenant au 6e Cuirassiers, et Jeanne Rivart, 23 ans, rue des Templiers, 21, fille des Rivart-Roy-Dumeurier. Marcel Rivart, frère de la mariée, est violoniste à la Philharmonique et au Quatuor Abel Lajoie.

Gaston Cabanis, 29 ans, directeur du Bureau central de mesurage et de conditionnement, rue Sainte-Marguerite, 40, fils de Canabis-Petitzon, et Émélie Lagneau, 33 ans, dont le père Lagneau-Tatat avait été huissier place d’Erlon, 91.

Constant Colmart, de Saint-Souplet, 35 ans, rue du Barbâtre, 7, fils de Charles Colmart-Péchenet, et Sophie, 29 ans, fille des époux Chamelot-Dardart. Les témoins sont le cousin Nestor Colmart, 30 ans, rue de Venise, 67 ; et l’apprêteur Arthur Chamelot, rue des Poissonniers, 9. Constant apprit le commerce des laines chez son oncle Colmart, négociant en déchets, rue du Barbâtre, 7, et à la mort de celui-ci, entra au service de la Société des Déchets, en même temps que son frère Honoré. Les Colmart-Chamelot eurent un fils, Maurice, ex-élève à l’école du Jard, qui, mobilisé en 1914, et ayant atteint le grade de sous-lieutenant, fut tué sur le front de Champagne.

Charles Lecomte, de Bazeilles, né le 17 avril 1861, habitant chez sa mère, épicière rue Saint-Thomas, 13, et fils de Jean-Baptiste Lecomte-Glautin († 1866) ; et Eugénie Lerzy, 22 ans, fille de feu Irénée Lerzy, ébéniste et débitant rue des Augustins, et de Marguerite Athalie Guinot. Charles Lecomte est comptable à la maison des laines Gaston Hédin, rue des Murs, 9. Réfugié de Reims à Paris en 1914, il décéda en 1916 à Aix-les-Bains, réfugié chez un gendre de Maupinot le professeur, instituteur. Sa veuve décéda en 1926 à Reims, en leur maison de la rue du Bastion, 48. Rentrée à Reims aussitôt l’armistice, Mme Charles Lecomte avait été affectée au service des entrées de pèlerins en quête d’abri, à la Maison de Retraite, puis à la cantine du Bureau de conditionnement, rue Eugène-Courmeaux, près du boulevard de la Paix.

Charles Lecomte était un bugliste distingué qui fit partie, avec son frère Émile, piston à coups de langue, de la Fanfare des Tonneliers. Les témoins au mariage son : l’oncle Arsène Lerzy, débitant route de Cernay ; Gaston Hédin, mort à Paris en 1919 ; et Pierre Eugène Guinot, 58 ans, de Liry, trieur de laines, fils de feu Napoléon, exploitant des Bains froids, à Fléchambault.

Auguste Chastagner, de Paris, 25 ans, ex-sergent-major aux 132e de ligne, fils de Régis Philippe Chastagner-Gonnet, mort à Clermont-de-l’Oise en 1867, et Amélie, 19 ans, fille aînée de Marlier-Henry, débitant rue Chanzy, 55. Témoins : André Godou, du café de ce nom, à Bezannes, livreur de lait dans le quartier Chanzy ; Justin Camus, as de la pêche à la ligne, ex-gargotier réputé à l’angle des rues des Cordeliers et Saint-Étienne, où l’on vendait notamment des huîtres de choix et des escargots faits à la maison. Camus était président du Syndicat des pêcheurs, et, après avoir repris un fonds de limonadier à Paris, revint à Reims, rue des Fusiliers, 48 ; il était oncle de la mariée par les Henry, de Liry. Justin Vassart, de Lançon, à l’église duquel il a fait don d’un vitrail de Vermonet, avait épousé Lisa Henry, sœur de Mme Marlier, et après avoir été receveur aux omnibus de Reims, il s’établit aubergiste au faubourg de Laon, Au Cheval-Blanc, et, de là, loueur de voitures à la Porte-Paris. Amélie Chastagner est décédée à Paris, rue d’Annam, 5, en 1920.

Henri Célestin Alexandre Cabay, 23 ans, journalier, fils du tisseur Cabay-Terrois, avenue de Paris, 47, et Céline Alby, 22 ans, fille de Désiré, camionneur, et d’Eugénie Meunier, rue Sainte-Claire, à Clairmarais. Cabay est en 1930 concierge à la Maison du Peuple, ou Bourse du Travail, boulevard de la Paix., et son fils est un excellent musicien, violoniste et pianiste de talent.

Le Dr Jules Lacoste, de Toulouse, 30 ans, à Rilly-la-Montagne, et Léonie Coquet, 22 ans, fille du marbrier Coquet-Lallier. Vers 1898, Lacoste était le médecin des Dupont-Gautier, de la rue des Fusiliers, 41. C'était un brutal, mais intelligent, féru d’art et d’œuvres sociales telles que l’U.P. Intime des Nouvion-Jacquet et des Aubert-Picard. Mort avant la cinquantaine, et avant-guerre. Les Lacoste habitèrent une originale et artistique demeure, peuplée d’œuvres d’art comme un musée, rue des Tournelles. Témoins : Victor Besnard, capitaine des Pompiers, et Honoré Ribaille, de Monchenot.

Jean Glad, de Metz, 33 ans, plombier rue de Mars, 57, fils de feu François († 1876) et de Catherine Volkringer ; et Louise Corpelet, fille du boulanger Corpelet-Créténier. Les fils Glad furent les inventeurs de la pompe à bière qui porte leur nom. Leur sœur Marie, célibataire, habite en 1930 rue des Telliers.

Louis Bachelart, ex-élève de l’école du Jard, 29 ans, mécanicien passage Poterlet, fils de Théodore Bachelart-Carrière, directeur du tissage Grévin, rue Brûlée, 21, et Berthe Barat, de Sommerance.

Arthur Émile Taillet, de Tugny, boucher place des Marchés, fils du boulanger Taillet-Polonceau († 1884) et une demoiselle Dérosses, de Luttenbach.

Eugène Paul Verrier, de Boult-sur-Suippe, rue Hincmar, 31, 31 ans, professeur à l’École professionnelle, et Louise Léonie Preinsler, 22 ans, fille du cabaretier Preinsler-Arnoult, au Café de l’Univers, rue de Vesle, 63. Verrier est mort jeune, laissant une belle et nombreuse famille qui, après exode de guerre et rentrée à Reims en 1923, boulevard Henry-Vasnier.

Un peintre barbouillat de persiennes et de façades, Lempereur (François Joseph), de Rethel, 23 ans, fils de Jean Noël, nourrisseur à Saint-Brice, et de Victoire Collignon, et une fille de l’entrepreneur de maçonnerie Schmich-Moraux.

Charles Piquet, 23 ans, rue Ponsardin, 30, fils de feu Eugène, scieur de long, († 1878) et d’Éléonore Gruny, marchande des quatre-saisons, remariée, elle, à Louis Guibart, trieur de laines, lequel apprit ce métier à son beau-fils ; et Marguerite Darreye, née à Metz le 7 février 1866, couturière, fille de Jean Darreye, mécanicien, et de Barbe Weber, de Metz, rue Savoye, 28. Charles Piquet, en 1914, s’engagea dans un régiment de zouaves et fit campagne admirablement, ce qui lui valut une citation et la Croix de guerre : il avait 49 ans ! Les époux eurent deux enfants, un fils, René, employé aux tramways de banlieue à Reims, et une fille, Jeanne, artiste lyrique à Paris. Vedette de petits théâtres, depuis 1928, notamment aux Folies-Bergère, sous le nom d’Yvette Drancy. À la suite du divorce, Marguerite Darreye s’est remariée à Émile Gautier, menuisier à la maison Pommery d’abord, et après guerre, chez Léon de Tassigny, boulevard Pasteur et château de Maison-Rouge, où il est chargé du travail d’ébénisterie pour meubles de style. Avaient été témoins à ces noces, en 1888 : l’aïeul Gruny, tisseur, 79 ans, cour des Sœurs, au faubourg Cérès ; Paul Émile Berlin ; Alexis Weber, domestique à Courcy, et le peintre Lefebvre, rue de Vesle, 205.

Édouard Henri du Cauzé de Nazelle, de Paris, 28 ans, lieutenant au 5e dragons, à Compiègne, fils du marquis Hérard de Nazelle et de Antoinette Émilie Le Leu d’Aubilly, des souches Hérard et Leleu, – et Éléonore Barbe Jeanne Werlé, 19 ans, fille d’Alfred Werlé de Montebello, petite-fille d’Édouard Werlé, ancien maire de Reims et député au Corps législatif, natif de Mayence, en Rhénanie. Témoins : le général baron Henri Berge, commandant du 7e corps d’armée, à Montpellier ; Maurice Duval de Dampierre, baron de Hans ; Lucien Gustave Lannes de Montebello, 50 ans, ambassadeur de France à Constantinople, et le cousin Mathieu Werlé, 79 ans, membre du Conseil supérieur de Commerce, à Mayence.

Constant Adolphe Houpillard, 26 ans, accordeur de pianos, rue des Poissonniers, 43, fils du cordonnier Bénoni, et Caroline Schüller, de Schiltigheim, près Strasbourg, tapissière, rue Brûlée, 66. L’oncle Constant Magloire Houpillard est facteur luthier, rue Buirette, 40.

Henri Walbaum, 33 ans, commissionnaire de roulage, rue de Talleyrand, 9, fils de Florens, et Louise Juliette Rasselet, 27 ans, rue Clovis, 25, et anciennement rue du Jard, 6. Fille de feu Rasselet-Lupo, serrurier. La Rasselet était une fort jolie blonde frisée, à peau d’albâtre rosé, élégante, avec une ligne admirable. Mésalliance, mais mariage d’amour. Henri Walbaum beau rouquin, même teint, doux et affectueux. Témoins : Poulain d’Andrecy, beau-frère de l’époux ; le cousin Henri Louis Walbaum, le pasteur Lauga et le notaire Paul Douce.

Louis Barbey, de Fismes, 25 ans, fils des Barbey-Petit, et Marguerite Marie, 23 ans, fille du notaire Gérard-Billet, décédé à Chenay en 1884.

Émile Lambert, de Poix, et Lucie André, fille de André-Jacquemin, ex-entrepreneur de maçonnerie.

Un caviste auquel on devra plus tard un jardin-cabaret de plaisance à la chaussée des Bains, vers Cormontreuil, Abraham Ramette, d’Élincourt-Cambrai, et Louise Crochet, chemin de la Procession.

Raoul Lafforgue, de Beauvais, 28 ans, peintre en voitures chez son père Lafforgue-Butteux, rue Libergier, 87, et Léontine Stengel, 24 ans, repasseuse, fille du maître sonneur à la cathédrale, Auguste Stengel, victime, en septembre 1914, de la bombe d’avion allemand dite des Loges-Coquault. Raoul est mort avant-guerre de congestion cérébrale, rue d’Anjou, 14. Leur fille Jeanne épousa le comptable Gruy, de la maison Gaston Rohart. Un fils fut parmi les as de l’aviation française pendant la guerre, et en mourut. Les Stengel habitaient en 1914 rue du Jard, 12.

Ernest Bertrand, de Saint-Quentin, 33 ans, chef de caves rue de Bouzy, chez les Saint-Marceaux, fils de Bertrand-Caillaux, conducteur des ponts et chaussées, et Céline, 22 ans, née à Yerres (Seine-et-Marne), fille de Maufroy-Legoux, directeur du tissage Dauphinot, rue des Moulins, 30. Témoins : les deux frères Henri et Edmond Bertrand, ce dernier à Antibes depuis la guerre, et l’autre à Cannes ; et Alcime Marchand, chef de caves, à Moussy.

Émile Wenz, l’aîné des fils du négociant mondial de la laine, dont la maison-mère est à Leipzig, avec succursales sur toute la planète, de retour d’un voyage en Égypte grâce auquel le Musée de Reims s’est enrichi d’une momie des temp pharaoniques, épouse une Marseillaise, Marie Pauline Chaponnière.

Léon Legrand, bimbelotier au Grand Turc, dans le Cadran-Saint-Pierre, qui fut élève des Frères de la rue des Telliers, sous Aunicien, était fils aîné de Legrand-Marion. Son frère cadet voyageait pour leur maison, laquelle avait, à la fin du siècle, une importante boutique de gros et d’exportation rue du Clou-dans-le-Fer. Sa femme, Mlle Gally, est de Damery.

Le libraire papetier Jules Collet, rue Chanzy, 109, un grand feuchelet perché sur de longs abattis, maigre comme un coq de bruyère, roux de poil, au nez et aux yeux effarés de perroquet, toujours fourré dans des bouquins ; et Maria Fromentin, de Bazancourt, jolie fille distinguée et instruite, qui tint de main de maîtresse le ménage et la boutique. Pendant la guerre, le couple se réfugia à Paris où, pendant que le mari s’occupait de librairie et de papeterie, fouillant assez souvent dans les boîtes des quais, l’épouse tenait une succursale fort achalandée en amateurs de pain d’épices et biscuits de Reims, façon Sigaut, dans la rue de Notre-Dame-des-Victoires. Ils avaient été précédés rue Chanzy par un jeune charcutier beau comme Ganymède, le fils de Mme Comot, qui transporta ses boudins et ses saucisses à Saint-Dizier.

Le restaurateur Geyer épouse sa voisine de la rue de l’Étape, Mme Ferrette.

En signalant son divorce d’avec Mlle Louise Viel, nous aurons l’occasion de rappeler au souvenir des Rémois Hubert Courtois, employé la Compagnie de l’Est, auquel son organe sonore avait fait réserver le poste de crieur à la gare, pour l’appel des voyageurs à l’heure des départs. Durant la guerre et jusqu’à ce qu’on l’expulsât, il habita rue de Châtivesle, soigné par une fidèle compagne, qui ne le quittait pas d’une semelle, car il était devenu gâteux, et tous deux eurent besoin de l’Assistance publique.

Louis Prince, rue de l’Arbalète, 10, chargé du rayon de bonneterie mercerie à la Société Rémoise d’Épicerie, et Marie Ehret, cuisinière, rue du Cadran-Saint-Pierre, 33.

En 1914, ils habitaient rue Brûlée, 4, près la boulangerie Besnard, propriété d’Alfred Couvreur.

Eugène Vautier, 25 ans, rue Henri-IV, 5, fils de Édouard, professeur de musique à Chaumont, lui-même violoniste au Théâtre et à la Philharmonique de Reims ; et Blanche Bünzli, fille cadette du vieux maître ès arts de la chanterelle Frédéric Bünzli-Treuvelot, rue de l’Échauderie, 6. Témoins : Jules Appert-Tatat, de Suippes, conseiller municipal, fabricant rue Montoison, 2 ; le peintre en décors Alfred Delsuc rue de Bétheny, 32 ; l’artiste peintre Louis Georges Delaunay, 33 ans, rue Boissy-d’Anglas, à Paris, et Blaise, ex-greffier de justice de paix. Blanche Bünzli tenait une partie de second violon à la Philharmonique d’une façon parfaite, avec un maintien d’exécutante conforme aux principes rigoureux qui étaient de règle au studio de son père, où passa un artiste qui s’appelait Henri Marteau et cet amateur Georges Appert, possesseur d’un authentique stradivarius. Blonde aux traits réguliers, charmante à tous égards. Son époux, Vautier, était de taille moyenne, cheveux noirs, yeux pétillants de vivacité, artiste au tempérament nerveux, tenait une place remarquable au pupitre des premiers violons. Les deux époux durent, en 1914, battre en retraite sur Paris où Vautier réussit à être embauché dans des concerts et théâtres. Rentrés à Reims en 1928, ils habitèrent au nouveau quartier de la Maison-Blanche, rue Gustave Bazin. C'est là que peu après, Vautier mourut presque subitement, au retour d’une soirée musicale au Ciné de l’Opéra, rue de Thillois.

Enfin, pour la bonne bouche et le divertissement de nos organes tactiles et olfactifs, citons le pâtissier de la place des Marchés (rue Royale), Henri Dalit, de Corbeny, 25 ans, fils d’un boulanger, et la cadette des demoiselles Deborre, Blanche, 22 ans, dont les parents habitent au faubourg de Paris, anciennement fabricants de chapeaux de paille rue du Bourg-Saint-Denis, 93. Un oncle, Pascal Deborre, dirige la fabrication de ces chapeaux au 34, place des Marchés.

Émile Faupin, de Saint-Denis, 31 ans, greffier de paix à Claye (Seine-et-Marne), fils des Faupin-Blanchin, décédés, et Marie Stéphanie, 27 ans, fille de l’architecte diocésain Thiérot-Clouet, rue Libergier, 39. Paul Faupin, lainier, habite rue Petit-Roland, 33 ; le cousin Jules Gabreau, fabricant de tissus, rue Nicolas-Henriot, 43, et Henri Jules Thiérot, élève à l’école des Beaux-Arts, à Paris.

Marie Isabelle Ohl, fille du fabricant de tissus, épouse Louis Henri Holzbacher, commissaire exportateur, à Paris.

Un grand mariage à la Cathédrale, dont les nefs regorgent de curieux : les Caffarelli-Kunkelmann. Lui, silhouette mince et de haute taille, crâneur, guindé comme il convient quand on porte un tel nom, tête jaune citron, à long col, avec un nez d’épervier ; elle, grande ainsi, de sa taille, d’où couple assorti sous ce rapport ; blonde et belle, étincelante sous sa coiffe de dentelles et les chapelets de cristaux rares. Maximilien, comte Caffarelli du Falga, 33 ans, de Leschelle-le-Nouvion (Aisne), agriculteur, fils de l’ancien député et préfet, décédé en 1878, et de Marie Henriette Fréteau de Pény. Lucie Caroline, 24 ans, fille de Théophile Kunkelmann, décédé en 1881, et de Ferdinande Dietz-Monnin. Le cousin Fréteau habite au château de Vaux-le-Pénil, près Melun ; le comte Louis de Kergolay, à Canisy, près Saint-Lô. Le frère Henri Guillaume Kunkelmann, est à Paris. Quatrième témoin : le banquier Georges Delius, 67 ans, rue du Marc, 8. L’Indépendant rémois fait un récit enthousiaste de la cérémonie. De nombreuses voitures de gala, un personnel à culottes et en mollets aristocratique. Aux grandes orgues débutent un compositeur, Henri Kunkelmann, frère de la mariée, qui exécute un Sanctus et une Marche triomphale de sa composition. Henri Marteau extrait de son stradivarius un Benedictuo et une impeccable Vision de Jeanne-d’Arc de Gounod. Mozart est de la fête avec un Agnus Dei. Ce couple aux destins rempli de promesses se sépara peu d’années après cette fastueuse cérémonie et ce défilé sans humilité sous les ondes voluptueuses de la Marche nuptiale du Songe d’une Nuit d’été, de tradition en pareilles circonstances.

Paul Pinon, 27 ans, fabricant de tissus, rue de Talleyrand, 48, fils de feu Pinon-Duplessis, et Antoinette d’Anglemont de Tassigny, 22 ans, fille de l’ex-capitaine de pompiers Alfred de Tassigny-Delbeck. Des oncles à la cérémonie : Edmond Pinon, rue du Levant (Marie-Stuart), 1, et le notaire G. Maireau, côté de l’épouse.

Jacques Léon Brion, de Carignan, 26 ans, fabricant de papier, rue de l’Université, 3, et en 1907, rue de l’Écu, épouse une demoiselle Lecrocq, de Châlons-sur-Marne.

Le bassoniste Henri Troëger, de Bruxelles, 41 ans, au casino de Spa, et Angélique Mabille, 26 ans, de Dour, près Mons. Des musiciens en nombre assistent à ce mariage, notamment ses compatriotes, Vautier, l’altiste Régnier, et Jules Surmont le père, 44 ans, contrebassiste au lutrin de Notre-Dame et au Théâtre, dont le fils né à Reims est un excellent violoniste ; Surmont, qui habitait alors rue du Faubourg-Cérès,75, décèdera, peu avant la guerre, à la Maison de Retraite ; Léon Eugène Charlier, clarinettiste et hautboïste, sous-chef aux Pompiers, en remplacement de Yund ; Léopold Bombaron, 44 ans, rue Gambetta, 42, musicien à tous instruments, piliers d’orchestre, décédé à Paris vers 1928.

Le courtier en laines Émile Herlicq, 25 ans, rue de Bétheny,38, fils de feu Martin († 1871), tourneur mécanicien ; et Anne Marie Françoise Reims, rue de Pontgivart, 10, 18 ans, fille de feu Nicolas Reims-Albustroff († 1884). Eugène Reims, frère de la mariée, est employé à la gare de Reims ; un autre à la maison de tissus Érard & Vitry, pianiste et accompagnateur recherché dans les petites sociétés.

Un trieur de laines, qui, à travers les vitres grossissantes de ses lunettes, y voyait à peine pour ce métier assez exigeant, a le bonheur qu’éprouvait le comédien Montcavrel , dans Giroflé-Girofla de Lecocq, lorsqu’il put marier ses deux filles. Je vous présente père, un père, un père, fort bien heureux d’en avoir casé deux ! Ferré en marie deux lui aussi ! Eulalie Ferré, son aînée, épouse Baratier, pâtissier au Grand-Hôtel ; et la cadette, Émélie, un Charpentier qui est meunier à Braine : la farine est assurée au pétrin de l’autre.

Désiré Léon Moret, de Paris, 26 ans, serrurier électricien, rue Croix-Saint-Marc, 21, fils de Jules Ernest, et de Adélaïde Victoire Thibaut, tisseuse. Charles Moret, frère du marié, est architecte vérificateur à Paris.

Léon Brébant, 23 ans, tisseur, rue Gambetta, 64, fils de Etienne Brébant-Fort, et Marie Gillet, de Heutrégiville, 30 ans, belle brune aux yeux noirs et rondelette de taille, à l’œil rieur et au tempérament vigoureux, fille de feu Gillet-Boudin († 1887). Témoins : le baryton des Enfants de Saint-Remi, Jules Fort, apprêteur, rue du Grand-Cerf, 6, faisant partie, comme sa cousine Marie Gillet, de la Société des Amis des Arts lyrique et dramatique. Léon Brébant fut, peu de temps avant-guerre, gérant de l’imprimerie de l’Éclaireur de l’Est, rue du Cloître, et conseiller municipal.

Le bel Adrien Bringues, de Cette, 24 ans, gérant d’alimentation place de Marchés, 19, épouse la fille de son patron, Alexandre Ollier, négociant en pinard bittérois, dont il reprendra le fonds à sa mort.

Charles Liénard, d’Arcis-le-Ponsart, 28 ans, un colosse au teint vermillon, sanguin, boucher à Verzenay, et la fille de feu Leblanc-Brunesseaux, qui fut boulanger à Dieu-Lumière († 1879). Son frère Casimir est boucher à Jonchery-sur-Vesle et dirigera dès 1890 un établissement de peaux et laines à Reims. Charles Liénard, devenu veuf, épousera en 2èmes noces Julia Jény, de la Salle-Jény, et mourra d’un accident de voiture.

Alfred Déquet, de Rochefort-sur-Mer († 1859), peintre en coffres-forts, rue Chanzy, 96, fils de Joseph, charpentier, décédé dans une clinique à Paris en 1872, et de Hortense Zélida Rateau, de Rochefort également ; et Marie-Louise, 29 ans, de Château-Porcien, fille de Eugène Hourlier-Cocu, décédé à Châlons en 1870. Témoins : Yves Rolland, camionneur rue Chanzy, 96 ; Gustave Félix, bijoutier rue Cérès, 2 ; Paul Lecocq-Hourlier, clerc de notaire à Château-Porcien, et Basile Ménard. Déquet est à la maison Bauche, au service du contremaître Arthur Dagot, des vétérans engagés mineurs de 1870. Fervent apôtre du vélocipède, Déquet fut l’un des premiers coureurs sur bécane, et on le vit, place d’Erlon, aux débuts de ce sport, si critiqué à l’origine, pédaler sur une machine qui ferait rire aujourd’hui, à cause son agencement sur roue de devant à grands rayons et celle de derrière, minuscule. Il faisait bon alors de savoir garder l’équilibre, mais en raison du développement de circuit de cette roue d’avant, le chemin était abattu plus rapidement qu’avec nos joujoux actuels, lesquels sont à vrai dire plus à portée de tous. Les Déquet-Hourlier eurent dans leur lignée le Léon Hourlier à qui les honneurs du Panthéon rémois ont été accordés par notre génération de sportifs pour qui la vitesse est reine, et une rue du faubourg de Laon porte son nom. Combien de nos concitoyens, remarquables dans l’ordre spirituel, attendront de lustres que le grand distributeur de gloire locale sur plaques de fonte soit disparu de ce monde, soit dégommé de son trône. Après Robespierre et le père Chose, s’il en reste !... Les Déquet eurent un as de la bicyclette dans leur progéniture : Eugène, l’aîné de leur fils, tué en traversant le passage à niveau de Saint-Brice, au temps où ses parents habitaient rue Philippe, voie nouvelle prenant au boulevard Jules-César pour aboutir au pont de la Husselle .

Louis Georges Henriot, 30 ans, lieutenant 45e R.I. à Laon, fils des Henriot-Lucet, et Clotilde Léonie, de Braine, 18 ans, fille de feu Achille Duffié-Forest, décédé à Alger.

À cette brillante cavalcade, il y a lieu d’ajouter, par la plume profuse d’un ex-professionnel du triage de laines les noms de quelques-uns de ses potes en divers chantiers de la place de Reims.

Pour l’avoir bien amusé et bien fait rire, au temps de sa jeunesse, par leurs bourdes, leurs lazzis et le grotesque parfois de leurs théories et de leurs réflexions saugrenues, il leur doit cette courte citation à l’ordre de la Commune de Reims, dont ils furent sinon l’ornement ; du moins collaborateurs, à leur petite et moyenne mesure, de son expansion industrielle ; et, contrairement à l’opinion générale, pas plus becs salés qu’on ne l’est en d’autres corporations ouvrières, – abstraction faite des peintres en bâtiments qui ont rivalisé avec les trieurs et les musiciens, luttèrent avec eux dans l’exercice du culte bachique et le respect de ses grands prêtres ; MM. les Troquets et tous débitants de vins de pays.

La céruse d’une part, le suint du mouton de l’autre, sont une excuse suffisante à ce qu’aucuns considèrent comme un travers, d’autre comme une marque de reconnaissance envers le créateur de toutes choses, notamment de la vigne et ses dérivés. Mais, allez donc empêcher la médisance et les langues de fonctionner tard et matin ! Les trieurs, au surplus, ayant conscience de leur valeur, ne s’en font pas !

Donc, voici quelques nouveaux promus.

À tout seigneur tout honneur ! Rustique Depontaillier, qui se vantait d’une ascendance remontant aux croisades, – et personne d’ailleurs ne sentait la nécessité de s’en assurer ! – curieux homme, à l’instar du Louis XI, de Paul Fort ; belle taille, figure martiale aux favoris larges et abondants, figure joviale et rubiconde, son bagout et sa silhouette faisaient impression dans les ateliers où il tranchait d’un ton sûr de soi n’importe quelle question parmi les mille et un sujets dont s’abreuvent les ingénieux esprits de ce forum qu’est un atelier de triage. Il a 36 ans, et dépourvu de tout sentiment d’égoïsme national, oublieux des crimes de 1870, il honore de son compagnonnage licite et officiel une bochesse d’Aix-la-Chapelle, Christine Betsch, veuve d’Adolphe Picherie († 1881) : donc, cette personne est âgée de 28 ans, et notre recteur d’Académie l’a jugée excellente pour tenir une garderie de mioches au titre d’institutrice adjointe, à l’école de la rue Simon. Rustique, mangeur de chats et de chiens à l’occasion, habitait rue Saint-Nicaise, 4.

Un autre qui n’est plus de première jeunesse et dont la position sociale a déjà subi maints avatars avant qu’il se fixât à la claie, Guillet, divorcé de la veille, épouse une demoiselle Mennesson, sœur d’un trieur de ce nom, qui, de courtiers en laines, avait ressaisi, à la suite de déboires commerciaux, le bâton à toisons et les crochets à deux dents. Guillet chiffonnait à temps perdu dans une baraque en pisé et planches à la Graineterie, lieudit situé au passage à niveau de la route de Witry, non loin d’un établissement militaire où l’Intendance stockait ses grains. Une aile de la baraque abritait un comptoir en zinc où servir la goutte, le canon et la chope aux mouches altérées qui passaient à proximité de cette toile d’araignée. Ces pauvres mouches ! on comptait déjà sur le terroir de Reims un millier de ces toiles d’araignée que sont nos braves concitoyens les Bistrots ! Il arrivait parfois qu’un ouvrier de fabrique eût, à la première heure du jour, à passer devant une douzaine de cabarets accueillants dont le tenancier se tenait sur le devant de la porte, amical et les mains offertes, avant d’atteindre le seuil de l’usine. Quelle force de caractère il eût fallu à cet infortuné travailleur pour résister à tant d’instances ! Encore un effort, il allait être sauvé. Patatras ! il faiblit, et le voici pris : son pauvre estomac, à jeun, va de nouveau connaître la sensation violente de l’ingurgitation à la volée d’un aigre vin blanc ou de la brûlante étreinte de l’eau-de-vie de balayeur ! Le Bureau d’hygiène, en aucun temps, ne s’est préoccupé des méfaits de ces assommeurs. Ne faut-il pas que tout le monde vive ! et la liberté du commerce, de quel droit y toucherait-on ? Matière à gloser à l’infini !

Un tout jeune trieur de 23 ans, Jules Jourdain, de Pontfaverger, fils de Jourdain-Malhanche, entrepreneur de triage, marchandeur suivant la formule professionnelle ; et Julie Estelle Vasson, de Bétheniville, 18 ans, fille d’Alcide Vasson-Leroy, trieur également.

Alexandre, de la dynastie de trieurs rémois les Lacomblez, né en 1868 à Roubaix, un jour que la famille avait dû, pour cause de chômage à Reims, faire un stage dans le Nord, – des époux Léopold Lacomblez-Debosschese ; il épouse la sœur d’André Tricot, trieur, Stéphanie Elisa, 18 ans, rue des Gobelins, 17.

Alexandre Lacomblez tenait, en 1914, un débit de vins à l’angle de la rue Ponsardin et de la rue Eugène-Desteuque, occupé précédemment par la mère Arnoux, dont les vins blancs de Cernay étaient appréciés parmi les ateliers d’alentour. Chez les trieurs de la maison Marteau, rue Cérès, on avait accoutumé de prendre ce qu’on appelait le coup de dix heures, en vin blanc sec à 0.60 le litre, renforcé de biscuits non moins secs, rapportés à la course par l’homme de chambre ou de corvée à tour de rôle. Alexandre accepta, sous les bombes, de cumuler les fonctions de restaurateur de poilus et de surveillant de caves pour le compte de certains propriétaires optimistes qui escomptaient une fin rapide de la guerre et du bombardement et espéraient ainsi assurer la sécurité complète pour les fins produits des vendanges champenoises, accumulés avec amour depuis des lustres. Beaucoup eurent à déchanter. De temps à autre, Alexandre allait à Paris constater de visu l’état moral de ses congénères, qui avaient choisi l’exil et le travail loin de leur petite patrie, où à vrai dire ils ne trouvèrent ni sécurité ni abondance de biens. Une de ces fois-là, ayant invité un de ses ex-potes, le trieur Remy, à une randonnée vers Sèvres et les comptoirs de banlieue, ils en revinrent un peu émus ; et là à une descente de tramway dans Sèvres même, pour changement de voiture, Remy glissa sur le sol et roula sous le convoi. La mort s’ensuivit à quelques jours de là, et Alexandre jugea qu’en définitive il avait plus de chances de survivre à Reims sous les bombes qu’à Paris entre les engins de locomotion. Va où tu veux, meurs où tu dois ! dit un proverbe, d’origine coranique sans doute.

Sur ses réflexions dépourvues de toute gaieté, tirons le rideau et laissons les nouveaux couples à leurs ébats conjugaux pour redescendre dans la rue, où maints petits, tout petits événements locaux donneront quelque attrait à nos promenades.

Eugène Dupont.