L'affutage

Date de publication : 25 mars 2013 13:09:34

A l'heure où j'écris ces lignes, nos marathoniens entament leur sixième et dernière semaine de "travail" avec des charges conséquentes ... avant de relâcher progressivement durant 2 semaines jusqu'à l'échéance de la compétition. Sébastien, qui prépare les 24h de Portet-sur-Garonne, est déjà dans cette phase de relâchement ... relâchement qui devait lui tarder vu la durée et la consistance de sa préparation :-)

Cette phase de relâchement pré-compétition est cruciale et permet, à elle seule, un gain de performance. Parfois appelée affutage (ou tapering en anglais), cette phase comporte quelques règles à respecter ou du moins quelques conseils à suivre.

Préalable

Comme je viens de le préciser, la phase d'affutage fait suite à une phase intensive d'entrainement durant laquelle les charges ont été lourdes. Généralement même, la fin de la phase précédente connait les plus fortes charges d'entrainement imposées au coureur.

Mais revenons tout d'abord aux bases ... Qu'est-ce que la performance ?

Platonov, un des grands théoriciens de la planification de l'entrainement, la définit par ces mots : "La performance sportive exprime les possibilités maximales d’un individu dans une discipline à un moment donné de son développement".

Modélisation de la performance

La performance d'un individu à un moment donné se modélise classiquement par la différence entre :

    • l'aptitude physique du coureur concernant la ou les qualité(s) requise(s) pour la compétition ... la FORME
    • le niveau de fatigue (engendré principalement par les séances d'entrainement) ... la FATIGUE

Assez logiquement, la FORME augmente la performance et la FATIGUE la fait baisser.

Toute charge d'entrainement va ainsi générer un certain niveau d'aptitude et un certain niveau de fatigue :

    • La fatigue sera à un niveau très élevé dès la fin de l'application de la charge d'entrainement et diminuera de plus en plus avec le temps.
    • L'aptitude physique, selon le principe de surcompensation, va descendre dès la fin de l'application de la charge pour remonter assez rapidement à son maximum (dans un délai variable selon la qualité visée - vitesse/endurance/... , le coureur, etc.). Au delà de ce maximum, le niveau d'aptitude va, tout comme la fatigue, décroître avec le temps.

Seulement niveaux de fatigue et d'aptitude ne baissent pas de la même manière et, comme le montre le schéma ci-dessous, le différentiel est tel que le niveau de performance va croître avec le temps jusqu'à un maximum avant de redescendre.

Définition de l'affutage

L'affutage consiste alors à diminuer la charge d’entraînement au cours d’une période de durée variable, afin de diminuer la fatigue tant physiologique que psychologique induite par les cycles d’entraînement précédents tout en essayant de conserver au maximum les aptitudes développées précédemment ... en somme l'affutage a pour but principal d'optimiser la performance permettant d'atteindre un pic au moment de la compétition.

Contenu de la période d’affutage

En passant rapidement sur les notions compliquées à quantifier de fatigue, de performance et de charge d'entrainement, retenons l'essentiel des caractéristiques de cette période :

    • FREQUENCE : On conseille de ne pas (ou peu) modifier la fréquence d'entrainement et le respect de ses habitudes en terme de fréquence d’entraînement reste le meilleur moyen de ne pas se fatiguer.
    • CINETIQUE : La différence au final reste mince entre une baisse brutale, une baisse par paliers, une baisse linéaire ou une baisse exponentielle. On conseille une baisse de la charge à tendance "progressive".
    • DUREE : Cela est variable selon les qualités visées :
      • Plus la compétition mobilise des qualités de vitesse, plus le délai d'affutage sera court (de l'ordre de 3 jours pour un 10km).
      • Plus la compétition mobilise des qualités d'endurance, plus le délai d'affutage sera long (2 semaines pour un marathon voire plus pour un 100km ou un ultra-trail).
    • CHARGE (INTENSITE) : Il ne s'agit pas de ne plus rien faire, au contraire. On conseille de conserver des séances intensives mais avec un volume moindre et en réduisant au maximum les durées d'échauffement et de retour au calme.
    • CHARGE (DUREE/VOLUME) : On retiendra pour la baisse du volume un ordre de -40 à -60%.

Nous n'abordons pas ici l'aspect diététique non négligeable permettant d'arriver le jour J avec des réserves énergétiques à leur maximum.

Comme d'habitude, je rappelle ici que l'humain est un système complexe qui, si on aime pourtant à le faire, n'obéit pas forcément à des règles simples et strictes, et que la composante "entrainement" est une des composantes de la performance parmi d'autres. Il s'agit plutôt ici de donner un cadre et toutes ces variables d'ajustement sont bien entendu à personnaliser selon le moment, l'individu, le sport, la compétition visée, etc.

Sur ce, affutez-vous bien !

Sébastien