Vitesse Spécifique

Rien de mieux pour définir la Vitesse Spécifique (ou VS) que cette phrase sans doute déjà entendue et que vous entendrez sans doute encore :

"On est fort à la vitesse à laquelle on s'entraîne".

QUOI ?

La VS dépend de la compétition mais également du compétiteur. Si l'on ne définit ni la distance visée ni le coureur concerné, la VS ne signifie pas grand-chose. La VS est donc la vitesse prévue d'un coureur pour un objectif de course bien déterminé.

Le jour de la compétition, le but est alors de courir à cette vitesse bien définie le plus régulièrement possible (s'entend sur un parcours plat).

Si cette VS a été déterminée correctement, le coureur doit pouvoir tenir cette vitesse durant toute la course ... pour craquer une fois la ligne d'arrivée franchie :-)

J'emploie le terme de :

    • VS5 pour Vitesse Spécifique sur 5km
    • VS10 pour Vitesse Spécifique sur 10km
    • VS21 pour Vitesse Spécifique sur semi-marathon
    • VS42 pour Vitesse Spécifique sur marathon

On pourra également trouver les termes de VS1h ou VS2h qui correspondent à la Vitesse Spécifique sur une course de durée, respectivement d'1h et 2h.

Si l'on emploie le terme de VS en se référant à une vitesse exacte calculée selon un objectif précis, la réalité est un peu différente. En effet, principalement selon la gestion de course voulue ou subie (la vitesse ne sera pas réellement constante), l'imprécision inévitable d'estimation du chrono objectif, les conditions du jour (du coureur, météo, ...), la vitesse spécifique de course pourra osciller autour de la VS établie lors du plan d'entrainement et il sera alors peut-être utile de balayer un registre de vitesses/allures autour de la VS calculée plutôt que de se tenir exactement à la seconde près à la VS calculée.

POURQUOI est-on "plus fort" à VS quand on s'entraîne à VS ?

    • Physiologiquement, les différents métabolismes fonctionnent de concert. Mais à une vitesse donnée, les proportions de chacun sont plus ou moins fixées et si l'on court régulièrement à cette vitesse, par adaptation, le fonctionnement du métabolisme concerné sera progressivement optimisé : captation de l'oxygène, distribution via le coeur vers le muscle puis utilisation de l'oxygène par ce dernier, utilisation au fur-et-à-mesure de l'entrainement d'une plus grande proportion de lipides par rapport aux glucides (à même vitesse) ...
    • Mécaniquement, en travaillant à cette vitesse, la foulée du coureur va s'adapter petit à petit afin de l'optimiser pour limiter toute dépense énergétique supplémentaire inutile. La foulée deviendra plus efficace, le coureur va trouver de lui-même la fréquence et l'amplitude ainsi que le mouvement des tendons et muscles les plus adaptés à la vitesse travaillée. Bref, le rendement/coût énergétique de la foulée sera optimisé.
    • Enfin psychologiquement, si on s'entraîne à VS, on finit par connaître et bien appréhender cette vitesse. On ne découvre pas cette vitesse le jour de la course et on n'a pas alors à faire l'effort de se caler, au risque d'avoir une vitesse "heurtée" qui oscille et qui demande des efforts supplémentaires énergivores. Bref l'intérêt est alors que l'on mémorise cette vitesse et que l'on se rassure psychologiquement lors de la pratique de celle-ci.

POURQUOI est-il important de déterminer précisément la VS ?

Il s'agit de :

    • Ne pas sous-estimer sa valeur auquel cas, on risque de terminer la course "en dedans" et finalement on ne titille pas ses possibilités maxis sur la distance. L'objectif de la compétition n'est alors pas atteint ... avec des remords !
    • mais l'erreur inverse est également plus que risquée car en sur-estimant sa VS, on prend le risque de ne pas pouvoir tenir cette vitesse jusqu'au bout et "d'exploser" avant la ligne d'arrivée. L'objectif de la compétition n'est alors pas atteint ... avec des regrets !

COMMENT déterminer la VS ?

    • Grâce à des courses passées sur la même distance dans une logique de progression chronométrique
    • En "transposant" des chronos observés sur des compétitions autres mais pas trop éloignées de celle-ci (chronologiquement mais aussi au niveau de la distance)
    • Grâce à la VMA du coureur en supposant qu'il tient un certain pourcentage de celle-ci sur la distance considérée
    • En tenant bien évidemment compte de la situation de la course (météo, etc.) et du coureur (forme) le jour J !

COMMENT travailler à VS ?

De façon régulière (au moins une fois par semaine), la séance de VS a lieu essentiellement durant le cycle spécifique. Par contre des rappels pourront être effectués de temps à autre durant le cycle de préparation générale.

La séance s'effectue après un échauffement plus ou moins long (travail éventuel de "pré-fatigue").

Toujours dans une logique progressive, il s'agit de se rapprocher petit à petit des conditions de la compétition : en terme de distance qui croit et en terme de récupération qui diminue ... tout en gardant à l'esprit qu'il s'agit de séances d'entraînement et faire une séance de VS21 du type 2x10km serait alors une grossière erreur.

Les volumes de travail de départ et maximum sont à adapter selon le type d'objectif visé, la distance visée, le profil du coureur, son degré d'entraînement, son passif, etc.

L'erreur typique de ce genre de séance est justement de ne pas respecter cette vitesse et comme le coureur est sensé tenir cette vitesse en continu le jour de la compétition, la tentation est grande vu normalement la marge qu'il est sensé conserver lors d'une séance d'entrainement, d'aller plus vite que le tempo prévu ... on quitte alors le but même de la séance. Cette erreur est d'autant plus à craindre en début de cycle spécifique où les volumes sont moindres et les récupérations plus importantes. Mais s'il respecte bien l'évolution de charge, le coureur sentira au fil des séances de VS que celle-ci augmente bel et bien :-)

Quelques exemples de progression de VS

Les progressions proposées sont "classiques" et sont plus là pour illustrer et donner des exemples. Elles ne tiennent notamment pas compte :

    • des semaines éventuelles d’assimilation (plus valable pour une préparation marathon) où on allégera/supprimera les séances de VS
    • du nombre de séances "disponibles" sur la durée prévue de la préparation spécifique
    • Des temps de récupération
  • VS10
      • Volume : S'étend classiquement entre 4 et 6km
      • Distance fractions : Généralement entre 1.000 et 3.000m
      • Progression : 6x1000m > 5x1200m > 4x1500m > 3x2000m > 2x3000m avec 1'30 de récupération systématiquement
  • VS21
      • Volume : S'étend classiquement entre 6 et 10km
      • Distance fractions : Généralement entre 1.000 et 5.000m
      • Progression : 2x3km > 2x4km > 3x3km > 5+4km > 2x5km avec 2 à 3' de récupération à chaque fois
  • VS42
      • Volume : S'étend classiquement entre 8 et 15km
      • Distance fractions : Généralement entre 3.000 et 10.000m
      • Progression : 2x4km > 2x5km > 3x4km > 2x6km > 7+6km > 2x7km > 8+7km > 10+5km avec 2 à 5' de récupération à chaque fois

Selon l'axe à travailler en VS on peut également construire les fractions en "escaliers" descendant (3000m/2000m/1000m en VS10) ou montant (1000m/2000m/3000m en VS10) ou en pyramide (1500m/3000m/1500m en VS10).

On peut également "jouer" sur un état de préfatigue afin de simuler une fin de course. Cette pré-fatigue peut être réalisée par un échauffement plus long qu'à l'accoutumée mais également par des premières fractions plus longues et/ou rapides.

Différentes approches peuvent être employées voire mixées :

    • Volume total constant dès le début du cycle avec augmentation des fractions ; récupération unitaire constante
    • Volume total qui croît avec des fractions relativement stables ; récupération unitaire courte au début puis qui augmente
    • ...

Au delà de la VS ...

Nous traitons ici du concept précis qu'est la VS mais on pourrait étendre plus largement le sujet au concept de "Conditions Spécifiques" à la compétition visée.

Le terme de Conditions Spécifiques peut alors englober tout ce qui fait la spécificité d'une compétition. En effet, comme précisé plus haut dans la définition de la VS, la majorité des courses sur route "labellisées" a lieu sur bitume et sur un parcours plat. La meilleure approche est alors le maintien d'une allure la plus constante qui soit. Auquel cas, la spécificité de telles courses peut se résumer à la seule VS.

Cependant, si on aborde des courses telles que Marseille-Cassis ou des corridas bien particulières dans la gestion de course, il se peut que d'autres éléments viennent caractériser la spécificité de la course : reliefs et gestion de course dans les cas présents.

Comprendre par là que pour quelque raison que ce soit, si une compétition est par exemple réputée pour faire la part belle aux relances et changements de rythme, il est tout a fait concevable voire justifié de s’éloigner du concept de VS pour travailler alors, lors des séances dites spécifiques, des conditions spécifiques de course intégrant notamment des changements d'allure comme par exemple alterner des fractions rapides et d'autres plus lentes ou travailler sur le principe d'une accélération continue toujours au fil des répétitions.

Bref, vous l'aurez compris, lors des séances spécifiques il s'agit de coller au plus juste aux conditions que le coureur rencontrera le jour de la course !