Par le toit

Marc 2, 1-12

Je suis un habitant de Capharnaüm et ma vie n'avait rien de glorieux. En fait, je passais mes journées couché sur un brancard, paralysé. Autour de moi, on se demandait ce que j'avais bien pu faire pour mériter un tel châtiment. Heureusement, j'avais quelques amis qui me déposaient au centre du village, ainsi j'avais quand même un peu de vie sociale. Le plus terrible, c'était le regard de reproche que m'adressaient les " gens bien ".

Tous les jours se ressemblaient, jusqu'à celui au cours duquel ma vie a changé.

Je vous raconte ce qui s'est passé. Ce matin-là, à Capharnaüm, se dessine un mouvement inhabituel. Où courent-ils tous ? Ils ne vont quand même pas me laisser seul ! Un prophète qui parle de Dieu ? J'appelle mes porteurs habituels, mais lorsque nous arrivons à sa maison, impossible d'approcher. Comme toujours, me dis-je, je serai laissé pour compte !

C'est alors que, couché sur mon brancard, j'aperçois le toit de la maison. Et je rêve de pouvoir y accéder. Mes amis porteurs ont suivi mon regard et, discrètement, ils me hissent là haut, juste au-dessus du cercle des plus proches auditeurs. Je ne vois rien, on ne voit pas, mais j'entends. C'est Jésus qui affirme que Dieu veut le bonheur de tout homme.

Mes porteurs sont à mes côtés. Ils y croient ! Eux aussi veulent mon bonheur. Ils font alors une ouverture dans le toit et descendent mon brancard au beau milieu du cercle, interrompant le discours. Tous me regardent. Qu'est-ce que je vais pourvoir lui dire ? Comment justifier mon intrusion, dont je ne suis même pas responsable ?

C'est Jésus qui reprend la parole et me dit : " Mon enfant, tes péchés sont pardonnés. "

J'avais entendu dire que ce prophète était aussi guérisseur, mais ... je reste paralysé.

Dans la foule, c'est l'étonnement. Et puis, un grand et long silence.

Certains murmurent : " Seul Dieu peut pardonner les péchés ! Cet homme blasphème. Nous ne pouvons plus l'écouter..."

Vont-ils tous s'en aller ? Comment va-t-il réagir ?

Nouvelle surprise : " Lève-toi, prends ton brancard et marche ! "

Là j'ai senti en moi une force que je ne n'avais plus éprouvée depuis très longtemps. Jamais on ne m'avait parlé de la sorte. Comment fait-on pour se lever tout seul ? ...

J'y suis arrivé ! Je me tenais debout. Stupeur générale !

Ni une ni deux, j'ai ramassé mon brancard et j'ai fendu la foule qui s'écartait pour me laisser passer.

Ce jour là, comme je vous l'ai dit, ma vie a changé. J'ai entendu et compris plusieurs choses essentielles.

D'abord, porté par les acclamations des gens assemblés, j'ai rendu gloire à Dieu.

J'ai réalisé le lien entre la guérison physique - je pouvais à nouveau marcher - et le pardon des péchés. C'est vrai que j'en voulais un peu à tout le monde d'être handicapé et ma compagnie n'était pas toujours agréable.

Et enfin, j'ai compris pourquoi j'ai dû emporter mon brancard. Je pensais d'abord que c'était pour ne pas le laisser traîner, inutilement. Je n'en aurais plus besoin et je pourrais le donner à quelqu'un d'autre. Ce sont mes amis porteurs qui m'ont dit : " Tu as reçu une mission ; celle de témoigner de l'amour de Dieu. Mets ton brancard devant ta porte. Il sera un signe d'espoir pour tous les paralysés et pour ceux qui prennent soin d'eux. "

Maintenant, vous savez tout ! Sauf mon nom...