Infirme de la Belle Porte

Actes des Apôtres, 3, 1-12 et 4, 14 et 22

Ce jour-là, je vis approcher deux hommes qui montaient pour prier. Ils avaient un regard différent des autres. Ils sont venus droit vers moi. Un signe ? J'ai tendu la main. « Regarde-nous », m'a dit le plus âgé. Je leur ai fait mon plus beau sourire. « De l'argent, nous n'en avons pas ! » J'ai continué à les regarder, car j'avais appris à insister. « Lève-toi et marche ! » ai-je entendu. Tous deux me tendirent la main. Je prends ou pas ? Rien à perdre ! Je les ai attrapées. Ils m'ont soulevé. Et je tenais debout, pour la première fois de ma vie ! Et marcher ? Je le pouvais. « Qui êtes-vous ? Comment avez-vous fait ? »

« Nous sommes Pierre et Jean. C'est par le pouvoir de Jésus le Nazaréen que nous t'avons remis debout. »

L'histoire n'a pas retenu mon nom. Et c'est assez normal.

J'étais infirme de naissance. Mes jambes ne me portaient pas. Les membres de ma famille devaient m'aider pour tout. Pas drôle ! Enfant, ça allait encore, mais devenu adulte et incapable d'être indépendant, ce fut très dur. Jusqu'à mes quarante ans !

Mon rôle a été de faire la manche, à l'entrée du Temple, où on me « déposait » chaque jour. Il y avait beaucoup de concurrence ! J'avais un certain charme, m'a-t-on dit, alors j'essayais d'en user pour ne pas avoir bourse vide le soir. Chaque jour ressemblait au suivant, mais je devais gagner mon pain.

Le meilleur endroit était la « Belle-Porte ».

Je rentrai avec eux dans le Temple en rendant grâce à Dieu et j'ai tourné autour d'eux en bondissant de joie. Des gens me reconnaissaient et je leur disais : « Oui, c'est bien moi. Vous voyez, j'ai été purifié ! » On voulait me voir de plus près, me toucher, alors qu'avant, c'est à peine si on ne me marchait pas dessus ! Arrivés au Portique de Salomon, Pierre, Jean et moi, nous fûmes applaudis par la foule. Pas par les responsables du Temple, qui nous fusillaient du regard.

Alors Pierre se mit à faire un discours, auquel je n'ai pas compris grand chose. En fait, je n'écoutais pas. Je laissais éclater ma joie en bondissant encore autour d'eux, ce qui leur faisait un peu de place. Ils parlaient du prophète Jésus, qui avait parcouru le pays en enseignant, en guérissant, en fréquentant les pauvres et les exclus. Il était souvent en désaccord avec les Pharisiens, les Scribes et les Docteurs de la Loi. Ceux-ci sont parvenus à l'arrêter, le condamner et le crucifier. Mais, disaient-ils, trois jours après sa mort, Dieu l'a ressuscité. Il est vivant et il donne audace et courage à ses disciples ...

Moi je sais que, maintenant, je peux marcher et que je ne devrai plus mendier.

Je vais les suivre. Je ne les lâcherai plus ! Peut-être pourrai-je aussi devenir un disciple. J'aurai de quoi témoigner de la Bonne Nouvelle !