Marie, mère de Jacques

Marc 16, 1-8






Dessin de J F Kieffer,

colorisé par Jacques





























Tôt matin, nous voilà, Marie Madeleine, Salomé et moi, Marie, mère de Jacques, en chemin vers le tombeau que Joseph d'Arimathie a mis à disposition pour y déposer le corps de Jésus, descendu de la croix du supplice il y a trois jours. Hier, après la fin du sabbat, nous nous sommes procuré les aromates pour embaumer le corps du Maître. C'est le travail des femmes. On ne pouvait pas laisser Marie s'en occuper. Sa peine est encore plus grande que la nôtre. C'est son fils qui a été crucifié sur le Golgotha !

Tu devines notre état d'âme. Plus que de la tristesse. Un désarroi profond. Et une totale incompréhension. Cette dernière semaine, les choses ont été trop vite ! La liesse de l'entrée de Jésus à Jérusalem, sur cet ânon emprunté, sous les cris de "Hosannah" et passant entre la double haie de palmes, elle a vite été oubliée.

Le repas solennel de la Pâque, au Cénacle, avait, il est vrai, cette année un ton plus intime. L'ambiance y était particulière, m'a-t-on raconté. Jésus a résumé tout son enseignement et il a donné un sens nouveau à des gestes rituels bien connus.

A la fraction du pain pour le partage, il a ajouté des paroles nouvelles : "Ceci est mon corps." Tout en brisant le pain en douze parts. Et aussi : "Ceci est mon sang." Il avait en main la coupe de vin. Personne n'a rien compris.

Tout aussi étrange : Jésus a insisté pour laver les pieds de tous les convives. Or c'est le rite d'accueil, au seuil de la maison. "Prenez exemple", a-t-il dit à voix basse.

Nous voilà donc, avec nos vases d'aromates, remplies de questions sans réponses. Et nous avançons, comme des automates, dans l'air frais de l'aube. Tout à coup, je m'arrête. "Qui va nous rouler la pierre ?" – "C'est vrai, le tombeau est fermé !" – "A trois, nous n'y arriverons pas !"

Nous approchons de notre but et constatons que la pierre est roulée, que le tombeau est ouvert. Qui a osé ? Qu'est-ce que cela signifie ?

Qu'est-ce qui l'a emporté, notre courage ou notre curiosité ? Nous sommes entrées.

Nouvelle surprise : il y a une présence, mais ce n'est pas Jésus. "Il est ressuscité !" C'est ce que chacune de nous a perçu. Il n'est plus là, enfermé dans le tombeau.

L'obscurité habituelle des tombeaux avait laissé place à une lueur de vie, apaisante. Nous n'avions encore rien compris, mais nos peurs s'étaient envolées.

Cette "bonne nouvelle", nous ne pouvions la garder pour nous. Laissant là nos vases remplis d'aromates, nous n'avions plus qu'une idée : annoncer à Pierre l'incroyable découverte : Il est vivant !

En chemin, un peu essoufflée par la course, je me demandais si on allait nous croire. Le témoignage des femmes était rarement accepté par les hommes. Notre mission n'était pas de les convaincre, seulement de les informer. A eux d'y croire ou pas. Ou de vérifier. S'ils viennent au tombeau, ils constateront, comme nous.

S'il est vivant, il va se manifester. Peut-être. Comment allons-nous le reconnaître ? Aura-t-il sa couronne d'épines ?

Ah, nous voilà en vue du Cénacle, où Pierre et les Apôtres se sont enfermés, de peur d'être arrêtés, eux aussi. Vont-ils nous croire ?

Je te raconterai la suite plus tard. Peut-être la connais-tu ?