CHAPITRE XVIII
LE P. D'ALZON ET LES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
(1845 - 1855)
Nous avons déjà parlé du début des relations spirituelles entre le P. d'Alzon et la Bse Marie-Eugénie (Ch. IX). Selon les désirs de la Mère, le P. d'Alzon accepta d'être auprès d'elle et de son oeuvre directeur spirituel et conseiller religieux. Dès qu'il eut formé sa Congrégation, leurs rapports devinrent aussi des rapports d'entraide fraternelle pour le développement de leurs oeuvres respectives (Ch. X C, XII, XIII, XIV).
Pour la période qui va jusqu'au décret de louange accordé à la Congrégation de Mère M. Eugénie en 1855, le P. d'Alzon fit une vingtaine de fois le voyage à Paris, requis par sa fonction de membre du Conseil supérieur de l'Instruction publique (Ch. XVI) et par la nécessité où il se trouve de voir ses religieux en leur fondation parisienne au faubourg Saint-Honoré, en 1851, transférée l'année suivante à Clichy-la-Garenne (Ch. XII B). Cette documentation et ces faits permettent d'établir, d'une part, que, selon le désir de Mère M. Eugénie, le P. d'Alzon se sent obligé en conscience de l'aider à avancer dans les voies spirituelles, et, d'autre part, que leur entraide fraternelle va au développement de leurs fondations religieuses, dans une mise en commun d'inspirations, de ressources et de conseils.
Cet aspect de leur vie a été présenté, soit par Soeur Jeanne-Marie, dans les Origines de l'Assomption, vol. III, soit par le P. S. Vailhé, dans sa Vie du P. d'Alzon, vol. II. Dans le cadre général de cette double présentation, et en continuation de ce que nous avons dit (Ch. IX), nous montrerons que le P. d'Alzon demeure, dans un contexte élargi :
A. - Le directeur spirituel de Mère M. Eugénie,
B. - et le conseiller religieux de sa fondation.
A
LE P. D'ALZON DIRECTEUR SPIRITUEL DE MERE M.-EUGENIE
Le lecteur d'une correspondance spirituelle doit savoir qu'en matière de direction, il y a, d'une part, des aveux à ne pas majorer, d'autre part des exigences à ne pas exploiter, pour rester dans le vrai : la commune recherche de la volonté de Dieu. Cette recherche lie autant le dirigé que le directeur, et c'est à ce niveau que le P. d'Alzon et Mère M. Eugénie ont voulu se placer par des engagements réciproques et renouvelés, en vue de leur sanctification (v. infra 1). Ces engagements sauvegardent la liberté des personnes, qui peuvent se reprendre, mais, si la confiance demeure, le P. d'Alzon entend bien trouver sa sanctification en travaillant à celle de sa dirigée : "Je vous conjure de devenir une sainte, afin que je puisse avoir la pensée que mes rapports avec vous ont été utiles devant Dieu" (Ch. X, 20 c).
Pour aider Mère M. Eugénie à ne pas se renfermer dans ses difficultés intérieures, le P. d'Alzon cherche dans la prière ce qu'il devrait lui dire, et se place avec elle sous l'action du Saint-Esprit (v. infra 2). Dès lors, ils ne pouvaient l'un et l'autre qu'être renvoyés à un amour exclusif du Christ, sans reprise et sans partage, pour être avec lui sauvés et sauveurs, comme doivent l'être ses disciples (v. infra 4). Le moindre exemple extérieur, le moindre mouvement intérieur doivent être accueillis comme un appel à s'humilier et à se dépasser. "C'est pour cela que des âmes sont venues nous confier la responsabilité de leur salut et de leur sanctification" (v. infra 5). Ces idées fondamentales, ou plutôt ce réalisme spirituel, le P. d'Alzon ne cesse de l'exposer à Mère M. Eugénie, comme un "Simon de Cyrène, maladroit quelquefois, mais toujours plein d'affection pour sa pauvre âme" (v. infra 3).
La sainteté ainsi poursuivie dans une très pure amitié spirituelle (v. infra 6), ne peut que déboucher sur l'oubli de soi, dans la recherche d'une sainteté apostolique, selon ce que Dieu leur a confié de responsabilité comme fondateur et fondatrice d'une oeuvre vouée à l'extension de son règne (v. infra 7). En ce domaine, comme en celui de l'ascèse, peut surgir l'incompréhension. Le P. d'Alzon, comme il l'a fait sur le plan de l'amitié chrétienne, accepte, sur celui du dévouement apostolique, les gronderies de sa dirigée, mais toujours dans une recherche plus parfaite de la volonté de Dieu (v. infra 8 a et b). Lorsqu'en 1855, son état de santé le gêne pour une correspondance suivie, et que la Mère pense ne plus devoir lui imposer le poids de son âme, le P. d'Alzon prend cet aveu comme un appel à lui être encore plus dévoué (v. infra 8 c et d).
La lecture des quelques textes que nous avons choisis de préférence à d'autres, dans une vaste documentation, nous autorise à dire que, s'il y eut des incompréhensions, le P. d'Alzon, pour la sainteté de Mère M. Eugénie, n'a cessé de lui parler tour à tour avec l'autorité du directeur, la simplicité de l'ami ou l'humilité du disciple. La récente béatification de Mère M. Eugénie valorise en quelque sorte le rôle du P. d'Alzon auprès d'elle.
Sûr de l'aide et de la confiance de sa dirigée, le P. d'Alzon n'hésite pas à lui révéler ses sentiments intimes, et c'est un autre aspect de cette correspondance. Nous entrons dans l'intimité même de la conscience du P. d'Alzon face à Dieu et à ses exigences de don de soi et de dépassement. Qu'il suffise, pour en juger, outre les textes cités à présent, de reprendre l'une ou l'autre phrase de lettres déjà utilisées : "Priez Dieu pour que votre pauvre Père ne soit pas un jour puni d'avoir voulu trop faire, vu son incapacité" (Ch. X, 20 a). "Votre responsabilité et la mienne sont quelque chose de très sérieux, qui nous met dans la nécessité de devenir des saints" (Ch. X, 27 a). "Vous remarquez, dites-vous, que je suis meilleur que vous; je crois que très positivement vous vous trompez, mais je veux le devenir" (Ch. X, 27 b). "Je ne suis pas très bon, ces jours-ci, cependant je prends de bonnes résolutions" (Ch. X, 27 d). "Je vous ai donné ces détails [sur notre fondation], ils vous feront voir le peu que je suis" (Ch. X, 29 a). "Je tâche de porter ma croix le plus doucement possible, au lieu de la traîner comme j'ai fait si souvent et si mal" (Ch. XII 6). "Au milieu des peines qui ne lui manquent pas et de sa mauvaise santé", [la possibilité de] "donner à certaines personnes" [un but apostolique], me pousse à devenir moins mauvais" (Ch. XIII, 7 d). "Je prierai bien pour vous, cette semaine sainte; ma fille, ma fille, sanctifions-nous. Dieu nous bénira dans nos oeuvres, en proportion de notre sainteté" (Ch. XIV, 13 c). "Je m'applique à prendre toutes ces épreuves [de santé et d'argent] de la manière la plus soumise et la plus sanctifiante; je n'y réussis pas toujours" (Ch. XIV, 21 a). "Au fond, je laisse faire le bon Dieu de mon mieux; il me semble que jamais je n'ai été moins mal disposé à paraître devant lui" (Ch. XIV, 21 d). "Je voudrais être un saint, je ne puis que me taire. Heureusement que Notre-Seigneur s'est tu. Je me persuade que je l'imite par là" (Ch. XIV, 21 g). "Je prends sans cesse la résolution de m'appliquer à sentir le plus possible cette action divine [de Jésus-Christ en nous] et de vous la rappeler, ma chère enfant, car voilà notre grand bien, Jésus-Christ" (Ch. XIV, 20 e).
B
LE P. D'ALZON CONSEILLER RELIGIEUX DE MERE MARIE-EUGENIE
La correspondance échangée entre le P. d'Alzon et la Mère M. Eugénie n'est que pour une part de direction spirituelle. Elle nous montre encore deux personnes attentives à suivre au jour le jour les événements de l'Eglise et du monde, et soucieuses de poursuivre dans un esprit commun leur mission apostolique au service de l'Eglise présente au monde de leur temps.
Nous avons parlé des services rendus par Mère M. Eugénie pour le développement de l'oeuvre du P. d'Alzon, qu'il s'agisse : - de préciser le but et l'esprit de sa fondation religieuse (Ch. X, 22, 25 b, 27); - de trouver des professeurs pour son collège ou des vocations pour sa Congrégation (Ch. XII, 8 a); - d'obtenir pour cet établissement scolaire le plein exercice (Ch. XIV 8); - de réaliser à Paris, comme il en est à Nîmes, la constitution d'un Tiers-Ordre féminin (Ch. XIII 7); - de préparer les voies pour un établissement à Paris (Ch. XII, 19 et 20); - d'aider, quand le moment sera venu, à sauver la Congrégation de la crise financière qui pèse sur ses oeuvres de Nîmes (Ch. XIV C). Plus que quiconque, le P. d'Alzon savait ce qu'il devait au dévouement de Mère M. Eugénie; mais, dès le début, il posa et voulut maintenir l'autonomie légitime des deux fondations.
Il dut, à plusieurs reprises, encourager la Mère à demeurer, parce qu'elle en était la fondatrice, la supérieure de son jeune Institut (Ch. X, 27 g; - v. infra 9 a). Quand elle crut devoir lui demander d'être le supérieur ecclésiastique de la Communauté, à Paris, le P. d'Alzon lui signifia, malgré ses instances, qu'il valait mieux, entre leurs deux Instituts, maintenir des rapports d'amitié que d'établir des rapports d'autorité, conformément à la pratique du droit (v. infra 9 b). De même, il voulut que toute aide financière soit faite dans le respect des Constitutions et du droit canonique et civil (Ch. XIII; XIV 5, XIV 21 f; - v. infra 9 c).
Ces règles de prudence étant établies, le P. d'Alzon ne refuse aucun des services qui lui sont demandés. De passage à Paris, il assure des retraites et des prédications aux Religieuses et aux Tertiaires; il prépare, à partir de ses relations nîmoises, de nouvelles vocations (Ch. X, 27 f). Il ne refuse à aucune Soeur qui le lui demande la direction spirituelle dont elle éprouve le besoin. Il s'intéresse à toutes les fondations : au Cap, en 1849; à Richmond (Angleterre), en 1850; à Sedan, en 1854; à Nîmes, en 1855. De ces fondations, deux sont plus particulièrement marquées de son dévouement :
D'abord, ce fut la mission lointaine que les Soeurs avaient acceptée en Afrique du Sud, à la demande de Mgr Devereux, vicaire apostolique du district oriental du Cap de Bonne Espérance. Dès le départ, il souhaita que le lien entre la fondation et la Maison-Mère soit parfaitement précisé et agréé. Il voulait par là prévenir une rupture, qui finira par se produire (v. infra 10 a et b).
La fondation de Nîmes fut proposée par lui dès 1852, dans le cadre de son action auprès des protestants et des oeuvres d'Adoration eucharistique. Il souhaitait qu'il y eût à Nîmes une maison d'Adoration et de retraites, sur laquelle prendraient appui d'autres personnes, appelées à rayonner dans le monde une vie de prière plus intense et de zèle apostolique plus actif (Ch. XIII C). La prudence de Mgr Cart servit à mûrir le projet (v. infra 11 a). En effet, il fallait que cette fondation s'harmonise avec le but et l'esprit de la Congrégation de Mère M. Eugénie, dont les Religieuses venaient pour une part des milieux protestants d'Angleterre, et dont la spiritualité propre était ouverte à une prière adoratrice (v. infra 11 b). Après la mort de Mgr Cart, un local ayant été trouvé, la fondation put être réalisée en 1855, avec l'agrément de Mgr Plantier (v. infra 11 c). Comme il avait souhaité que les Religieuses ouvrent un pensionnat, l'année suivante, dans un local plus vaste, les Soeurs, tout en assurant le but premier de prière et d'accueil, annexèrent à leur "Prieuré" les débuts d'un établissement scolaire.
Dès que l'occasion se présenta de solliciter, pour la congrégation de Mère M. Eugénie, le décret de louange, le P. d'Alzon l'aida à obtenir les lettres de créance d'évêques, entre autres d'Avignon, de Nîmes et de Montauban. Lui-même ayant eu à se rendre à Rome, voulut apporter une satisfaction de plus en faisant transformer le décret en bref de louange. Il fut servi, en l’occurrence, par Mgr de Ségur, qui lui obtint une audience toute particulière du Saint-Père, ce que nous savons par une lettre de l'abbé Gay à Mère M. Eugénie (v. infra 12). Il n'est pas sans intérêt de penser que Mgr de Ségur et le futur Mgr Gay aient été considérés comme des vocations possibles pour l'Assomption par Mère M. Eugénie. Le P. d'Alzon l'aurait évidemment très vivement désiré.
1
Engagements réciproques du P. d'Alzon et de Mère M. Eugénie pour leur propre sanctification, 1846-1854
Nous regroupons ici des pièces de nature différente qui nous révèlent les engagements que prirent l'un envers l'autre, et en vue de leur sanctification, Mère M. Eugénie et le P. d'Alzon en 1846 et qu'ils renouvelèrent, l'une en 1852 et l'autre en 1854.
a)
Engagements réciproques pris en 1846
C'est par deux lettres du P. d'Alzon que nous savons comment, en 1846, Mère M. Eugénie fit à son directeur spirituel le voeu d'obéissance auquel le P. d'Alzon répondit quelques mois plus tard par un voeu de se dévouer à la perfection de sa dirigée. C'est le 24 avril 1846 que Mère M. Eugénie avait pris son engagement, comme nous permet de le préciser une de ses lettres au P. d'Alzon (lettre du 8 mai 1846 -n° 1721).
1° Nîmes, le 29 avril 1846. - Orig.ms. ACR, AD 417; V., Lettres, III p. 51.
Je vous dirai que, tout en conservant les rapports de père que Notre-Seigneur veut que j'exerce envers vous, il me semble qu'il manque quelque chose à nos relations et que la balance penche plus de votre côté, depuis que vous m'avez fait pour toujours voeu d'obéissance. L'impression que me produit votre engagement si absolu me rend jaloux, et je souffre de ne pouvoir vous donner quelque chose à mon tour. Car enfin, quoique je m'engage par l'acceptation de ce voeu à porter toujours la responsabilité de votre âme, par le fait même du droit que j'ai de vous relever de ce voeu, je conserve une plus grande portion de liberté que vous, et c'est ce que je ne voudrais pas. J'ai eu l'idée, un moment, de promettre à Dieu de me consacrer au soin de votre âme d'une manière toute particulière, mais mon embarras est de savoir quel mérite j'aurais en faisant une pareille promesse.
2° Lavagnac, le 8 septembre 1846. - Orig.ms. ACR, AD 451; V., Lettres, III p. 128.
Ce matin, à la messe, j'ai renouvelé les voeux que vous savez que j'ai faits. J'en ai fait un de plus, celui de me dévouer entièrement à votre perfection. J'avais hésité, il y a quelque temps, à le faire. Il me semblait que les liens d'un voeu gênaient les libres allures de l'affection, mais il m'a paru que la charité s'alimentait de tout ce qu'il y a de meilleur. Vous voyez, ma chère enfant, que me voilà engagé envers vous, autant que vous pourriez le vouloir, car si vous m'êtes liée par votre obéissance, je vous suis lié par tout ce qui vous rapprochera de Dieu et de notre divin Maître. Vous dirais-je que je l'ai prononcé avec une plénitude de forte amitié et de joie, qui vient de cette paix de Dieu, laquelle dépasse tout sentiment? Voilà ce que j'ai ressenti.
b)
Renouvellement des engagements de 1846
C'est par deux notes manuscrites de Mère M. Eugénie et du P. d'Alzon que nous savons qu'ils renouvelèrent leurs engagements réciproques, pour la Mère en 1852 et pour le P. d'Alzon en 1854.
1° Note manuscrite de Mère M. Eugénie, datée du 24 septembre 1852, ajoutée à la formule de sa première profession du 14 août 1841.
Je promets à Dieu de me consacrer, selon l'esprit de notre Institut, à étendre par toute ma vie le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans les âmes, et je fais voeu d'obéir à notre Père, M. d'Alzon, en tout ce qu'il me commandera.
Soeur Marie-Eugénie de Jésus
24 septembre 1852 fête de saint Mathieu
2° Note manuscrite du P. d'Alzon, datée du 25 mars 1854, jointe à une lettre datée du 23 mars. - Orig.ms. ACR, AD 937; T., Lettres, I p. 404.
[25 mars 1854]
En présence de Dieu, de la bienheureuse Vierge Marie, ma Mère, de tous les patrons de notre petite famille et de nos anges gardiens, aujourd'hui, 25 mars 1854, en la solennité de l'Annonciation, au moment de la consécration du corps et du sang de Notre-Seigneur entre mes mains, j'ai fait voeu de prendre ma Soeur Marie-Eugénie de Jésus pour ma fille, et de me dévouer à sa sanctification, sauf les droits de nos supérieurs et les obstacles apportés par des causes prises dans la considération de la gloire de Dieu.
Frère Emmanuel.
2
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 31 mai 1846. - Orig.ms. ACR, 425; T.D. 19, p. 76-77.
En réponse à une lettre de Mère M. Eugénie qui lui révèle son désir de changer sa raideur naturelle en souplesse et en humilité, le P. d'Alzon l'invite à penser leur entraide mutuelle à la lumière de l'Esprit-Saint.
Je réfléchissais profondément à votre état et je demandais à Notre-Seigneur de me faire voir ce que je devais vous dire pour vous donner un peu de repos. Or ce qui me parut être très clairement la volonté de Dieu est ceci. Il faut que vous laissiez tomber toutes vos misères, tous vos troubles, dans l'océan d'amour qui est le Saint-Esprit. C'est là que nous devons nous retrouver dans ces rapports de simplicité et d'unité, tels que les veut la disposition très simple et très pure de Dieu à notre égard, de telle sorte que vous y soyez tantôt ma fille et tantôt ma soeur, ma fille dans l'ordre de la sanctification de votre âme, ma soeur dans l'ordre de la formation de l'oeuvre. Ceci m'apparaît si clairement et si distinctement que je n'ai pas la moindre difficulté à vous l'exprimer, et vous voyez ce que je puis bien vous assurer que, si je n'eusse pas été dérangé, je vous aurais transmis la réponse avant de recevoir la question. Quand bien même, ni vous ni moi n'aurions rien compris à vos troubles passés, et que nous ne pourrions en indiquer la cause, ce ne serait pas une raison pour ne pas accepter ce que je vous dis, parce que je le vois avec une telle évidence qu'il m'est impossible de dire autrement, quand même je le voudrais.
3
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 4 mai 1843. - Orig.ms. ACR, AD 641; T.D. 20, p. 86.
Pour engager Mère M. Eugénie à dépasser ses épreuves intérieures, le P. d'Alzon l'invite à prendre appui sur le bien qu'elle peut faire par ses Soeurs, et s'offre à être auprès d'elle comme Simon de Cyrène auprès du Seigneur.
Ma fille, ma fille, le temps n'est-il pas enfin venu où vous ne devez plus tant vous préoccuper, pour vous occuper davantage de Dieu et de son oeuvre ? Quel moyen plus merveilleux Notre-Seigneur peut-il vous offrir pour vous désenchanter de la contemplation de vous-même et des murmures que cette contemplation enfante, que cette grande et amoureuse contemplation que vous pouvez faire pour étendre son empire ! J'espère donc, ma chère enfant, que le remède à vos souffrances, Notre-Seigneur vous le donnera désormais lui-même. Non que je refuse de vous faire tout le bien possible. Qui sait si, tandis que vous ferez du bien et beaucoup de bien au dehors, il ne voudra pas que vous me réserviez toujours le spectacle de vos tristesses, de vos souffrances et de votre découragement, afin de vous maintenir dans l'humilité nécessaire ? S'il en est ainsi, vous savez que je veux être toujours pour vous Simon de Cyrène, maladroit quelquefois, mais toujours plein d'affection et de compassion pour votre pauvre âme. Mais je ne puis m'empêcher de croire que vous allez entrer dans une nouvelle période de votre vie spirituelle, et que vous y puiserez des secours que vous n'avez pas connus jusqu'à présent. Seulement, soyez fidèle à Jésus-Christ.
4
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes, le 21 janvier 1850. - Orig.ms. ACR, AD 697; V., Lettres, III p. 541.
Le P. d'Alzon encourage Mère M. Eugénie à vouloir suivre le Christ dans sa mort et dans sa résurrection, pour être avec lui sauveur comme doivent l'être tous les chrétiens.
Je vous avoue que le titre de sauveur, que les chrétiens doivent porter, à leur tour, s'ils ont la plénitude de l'esprit de Jésus, me touche extrêmement, puisque le degré le plus haut de cet esprit, c'est de faire que non seulement ils soient sauvés, mais qu'ils puissent aider au salut des autres. En sorte qu'ils reçoivent comme le flambeau qu'un autre flambeau allume, la lumière et la chaleur, c'est-à-dire la vérité et la charité, et encore ils aident à les communiquer. Comme Jean-Baptiste, ils ne sont pas la lumière, mais ils sont des lampes, d'autant plus ardentes et brillantes qu'ils participent davantage à l'action rédemptrice du Sauveur.
Vous avez, dans tous les cas, bien raison de vous jeter dans la puissance, la sagesse et l'amour infini de Dieu. Perdez-vous dans cet abîme; c'est le seul moyen de vous retrouver telle que vous devez être. Je me reproche souvent de ne vous y avoir pas assez poussée. Mais puisque la grâce de Notre-Seigneur vous y attire, ne craignez pas d'y céder, malgré la résistance de la pauvre nature qui se débat contre de pareilles immolations. Oui, il faut consentir à sa confusion, et non pas seulement une fois, mais toutes les fois qu'il plaira à Dieu de nous l'envoyer. Puisque, à la fin de vos oraisons, vous sentez le besoin de vous donner à Dieu pour souffrir, je vous engage à n'y pas résister et à prendre, le plus que vous pourrez, cette conclusion pour but de vos prières. Si vous vous y abandonnez, croyez que vous ferez en peu de temps plus de progrès que par toute autre voie. Oui, vouloir souffrir, vouloir mourir, c'est la passion du Sauveur, c'est la première partie de la rédemption, car le Christ n'est ressuscité qu'après être mort, et la voie des chrétiens ne peut être autre que celle de leur modèle.
5
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 26 février 1850. - Orig.ms. ACR, AD 701; T.D. 20, p. 142.
Pour soutenir l'effort de Mère M. Eugénie vers une sainteté qui soit vraiment apostolique, le P. d'Alzon l'invite, comme il le fait lui-même, à s'interroger sur la nécessité de faire pénétrer l'esprit de Notre-Seigneur dans l'oeuvre qu'ils ont entreprise.
Je vous ai écrit assez longuement la dernière fois; et pourtant il me semble que j'ai besoin de vous parler un peu et toujours de la nécessité de faire bien pénétrer l'esprit de Notre-Seigneur dans cette pauvre petite oeuvre de l'Assomption. Que faisons-nous, en effet, en y laissant se développer notre esprit à nous ? C'est-à-dire nos défauts, nos misères, nos idées tout humaines. Est-ce pour cela que des âmes sont venues nous confier la responsabilité de leur salut et de leur sanctification ? Hélas ! voilà des années que nous avons cette charge, et que voyons-nous s'accomplir pour le bien ? Souvenez-vous des détails que vous m'avez donnés sur vos filles. Je pourrais vous faire un tableau semblable des miens. Mais dans tout cela, où est la vie complète de Notre-Seigneur, reproduite avec amour par des chrétiens qui veulent être parfaits. Tout cela me préoccupe beaucoup, je vous assure, et me force à penser que, puisqu'il n'est pas bon de se décourager, il faut autant que possible commencer par travailler sérieusement, vous et moi, afin d'arriver à notre but, qui est Jésus connu et glorifié dans les âmes.
6
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 15 septembre 1851. - Orig.ms. ACR, AD 784; T., Lettres, I p. 83-84.
Mère M. Eugénie venait de perdre un oncle qui lui était très cher. Elle se demande : "Comment mon cher Père ne m'a-t-il pas aidée de ses conseils et de son amitié quand, il y a un mois, il a dû voir que ma peine commençait à tourner en tentation?" A cette demande du 12 septembre, le P. d'Alzon répond par retour du courrier :
Pour vous parler avec la même franchise, je vous dirai que, loin de me faire de la peine, la première partie de votre lettre me tranquillise, puis me fait trouver au fond de votre coeur une disposition à la perfection qui me fait un grand plaisir. Puis enfin, vous le dirai-je ? Tout en voulant me réserver le droit de vous traiter sévèrement comme votre directeur, je dois reconnaître que j'ai des torts comme votre ami. Mais je veux vous expliquer comme je l'entends par un exemple. Ce sera ce qui s'est passé à l'occasion de M. de Franchessin. J'ai cru que vous vouliez être un peu seule, puis j'ai senti la blessure de votre coeur, puis j'ai été embarrassé pour savoir comment la guérir, et, au lieu de vous rien dire, j'ai préféré me taire. Voilà en quoi j'ai eu des torts. Je désire que cet aveu, de ma part, et le pardon que je vous demande paternellement, et comme votre ami, vous aide, ma chère fille, à reprendre votre souplesse. [...] Que puis-je faire pour vous faire du bien ? C'est devant Dieu que je vous dis ceci. Vous voulez être sainte, vous croyez avoir besoin de moi. Je ne veux pas vous donner, je vous donne tout ce qui peut servir à atteindre ce but, et croyez que c'est fait dans mon désir le plus sincère, et dans mon amitié la plus intime. Êtes-vous contente ? Je le demande à Notre-Seigneur.
7
Extraits d'une lettre du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 11 avril 1853.- Orig.ms. ACR, AD 877; D'A., T., Lettres, I p. 261-262.
Mère M. Eugénie, le 9 avril, exprime en ces termes son attitude spirituelle, dans la célébration de Pâques : "Notre-Seigneur a été bien bon de me donner à Pâques ce sentiment de liberté de coeur pour la terre, de ne pas m'y reposer, mais de ne vouloir prendre tout que de lui, n'aimer que lui, pour lui-même et avec un dévouement qui ne se repose qu'en lui. Croyez-vous que je n'en aie pas besoin en ce moment?" Le P. d'Alzon l'invite, comme lui-même désire le faire, à se mettre sous l'emprise de l'Esprit-Saint.
Tout ce que vous m'avez écrit trouve sa réponse, ce me semble, dans une pensée que je me sens pressé de vous communiquer. Ce qui fait notre misère devant Dieu, c'est que nous n'aimons pas assez et [...] nous ne donnons pas assez à nos actions le mérite de l'amour; et la cause pour laquelle nous ne donnons pas assez à nos actions le mérite de l'amour, c'est que nous ne savons pas entrer assez en rapport avec l'amour substantiel qui est le Saint-Esprit, dont je suis le temple et, si vous y réfléchissez un peu, je pense que vous vous sentirez également coupable de ce côté. Que faire ? Ne convient-il pas que, vous et moi, nous nous retrempions un peu sérieusement dans nos relations avec le Saint-Esprit ? [...]
Pourquoi une supérieure, un supérieur comme vous et moi, dont la vie a quelque chose d'apostolique, ne s'efforceraient-ils pas de se pénétrer si fort de l'action du Saint-Esprit en eux qu'ils pussent le reproduire dans tous leurs actes et toutes leurs paroles ? Quelque chose me pousse à entrer dans cet état de dépendance à l'esprit de Dieu jusqu'à la Pentecôte. N'est-ce pas un bon moyen de profiter du temps pascal ? Voilà ce que je voulais vous dire et vous inviter à mettre votre âme dans la même disposition que la mienne.
8
Echange de lettres entre Mère M. Eugénie et le P. d'Alzon (janvier-février 1854)
L'entraide fraternelle pour le bien de leurs âmes et de leurs oeuvres permettait à Mère M. Eugénie comme au P. d'Alzon de se dire en toute franchise ce qui leur semblait être ou faiblesse ou danger, pour ce que le Seigneur leur demanderait avant tout. Ainsi, au début de l'année 1854, Mère M. Eugénie croit devoir dire au P. d'Alzon que son zèle apostolique peut nuire à sa mission de fondateur. Le P. d'Alzon accepte la gronderie et lui promet d'en tenir compte.
a)
De Mère M. Eugénie au P. d'Alzon, Paris le 29 janvier 1854. -Orig.ms. ACRA, lettre n° 2380.
Sérieusement, mon cher Père, voici les pensées qui me préoccupent pour vous. On n'est père dans la vie spirituelle et surtout en religion que par la doctrine spirituelle que l'on transmet aux siens et dont on les nourrit. L'autorité n'est donnée aux supérieurs que pour exercer une constante sollicitude de perfection, d'avancement, de développement de l'esprit propre à l'Ordre dans chaque religieux et dans chaque maison. [...] Que vous prêchiez les protestants, ou que vous combattiez le gallicanisme, ou que vous vous laissiez dévorer par les importuns, ou que vous fassiez autre chose, là n'est pas la question; ce que vous ne faites pas, c'est ce dont vous êtes le plus chargé au monde, c'est ce qui vous occupe le moins. [...] Prenez saint François, saint Dominique, saint Ignace, c'étaient des prédicateurs, mais avant tout, comme religieux, c'étaient des maîtres spirituels, et ils l'étaient à toute heure et partout, avec cette plénitude de feu sacré dont vous dispersez les étincelles sur toutes choses. Je vous assure que je pense quelquefois que vous vous êtes trompé et que vous étiez fait pour être évêque et non pas fondateur, car vous prenez assez bien les choses à la manière dont les doit prendre un évêque chargé de tout un diocèse et redevable de tous. Pensant tout cela, pouvais-je ne pas vous le dire ? Serait-ce être fille ? Serait-ce être amie ?
b)
Du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 1er février 1854. -Orig.ms. ACR, AD 12; T., Lettres, I p. 382-383.
En me rendant à Mireman [...] je pensais à vous et je me demandais pourquoi je vous témoignais si peu d'amitié, quand j'en avais une si grande dans le coeur. Il se trouve, laissant de côté tous mes raisonnements, qu'aimant un peu plus Notre-Seigneur, je me sentirais capable de beaucoup plus d'ouverture, car je serais bien moins gêné dans une affection où je fais tout passer par lui. C'est vous dire que vos si bonnes gronderies me mettent tout à fait à l'aise et me dilatent tout à fait. Vous avez parfaitement raison. Je ne suis pas assez fondateur et je veux l'être davantage. Quand j'irai à Paris, je vous expliquerai ce que je fais pourtant, comme aussi je vous dois quelques explications:
1° Les dérangements que j'ai ici viennent presque tous de la maison ou de ce qui s'y rapporte;
2° Mes prédications pour les protestants ont réveillé déjà quelques vocations religieuses.
Une fois cela dit, je vous accorde que vous avez très fort raison, et je vous promets de garder avec moi votre lettre pour la relire souvent, jusqu'à ce que je me sois corrigé. Continuez, ne vous découragez pas(1).
c)
De Mère M. Eugénie au P. d'Alzon, Paris le 27 juillet 1855.- Orig. ms. ACRA, lettre n° 2495.
Depuis la maladie du P. d'Alzon, ses lettres s'étaient faites beaucoup plus brèves et sa direction spirituelle en avait peut-être souffert. En juillet 1855, il put faire une visite rapide à Paris et, au terme d'une conversation avec Mère M. Eugénie, celle-ci, avant son départ, résume ses impressions :
Je suis extrêmement portée, mon Père, et extrêmement poussée à me rendre à vous sans réserve. Si vous n'étiez pour moi qu'un ami, quoique le premier de tous, je vous assure que je n'attacherais pas à cette question l'importance que j'y attache, mais je sens et j'éprouve que vous êtes en une façon, qui n'a rien de comparable, le représentant pour moi de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Me redonner à vous, c'est me livrer de coeur et avec amour à des dispositions si saintes qu'en les voyant telles qu'il me semble que je les aurais aujourd'hui, je ne puis pas ne pas les désirer. [....] Souvent, encore dernièrement, je me suis dit que c'était faire acte de charité que de vous éviter cette charge, que c'était à moi de chercher d'autres moyens d'aller à Jésus-Christ et de vous être bonne et aimable en mettant de côté cette vie de l'âme qui ne peut être sérieuse sans qu'avec mon imperfection actuelle elle ne soit encore souvent une source de fatigue, soit par des scrupules que je voudrais dire, soit par les appuis que je demanderais, soit enfin par les combats dont je vous ferais partager la peine. Vous m'avez ce matin dit que vous me préfériez toute donnée à vous si le plus grand service de Notre-Seigneur n'en souffrait pas. C'est cette parole qui me fait vous écrire ces lignes. Je voudrais bien au fond tendre à la perfection et devenir une sainte, et le Vae soli pèse sur moi avec un certain découragement. Je me connais et je vous donnerai mille ennuis. Je ferai peu de tout ce que je crois sentir et pouvoir faire, je dois vous demander mille pardons pour le passé, ceci très sincèrement, car d'après ce que vous m'avez dit ce matin, j'ai dû vous faire plus de peine que je ne croyais. Dans l'avenir, je serai probablement encore lourde à qui voudra me porter. La conclusion est donc facile à tirer. Au moins, vous verrez, mon Père, que quant à vous et à notre amitié, mes pensées sont surnaturelles ainsi que mes désirs.
d)
Du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes le 2 août 1855. - Orig.ms. ACR, AD 1020; T., Lettres, I p. 572.
De retour à Nîmes, le P. d'Alzon l'assure à nouveau de tout son dévouement pour qu'elle retrouve confiance en elle-même.
Je veux vous dire tout d'abord que je suis très heureux de notre dernière conversation. J'espère que le résultat sera pour vous de vous convaincre un peu plus de ce que je veux vous être, et en même temps, de vous donner un peu plus confiance dans la perfection à laquelle il faut que vous tendiez. Ah ! que vous pouvez devenir bonne, si vous tournez toujours plus vers Dieu toutes les puissances de votre coeur. [...] Je prends tout ce que vous m'avez donné pour l'offrir à Notre-Seigneur et je le prie de le transformer en lui.
9
Extraits de lettres du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, relatives aux rapports de leurs deux Instituts (1846-1853)
Le P. d'Alzon, malgré les demandes réitérées de la Mère, et quoi qu'il en ait été d'une identité de but apostolique et d'esprit religieux entre leurs deux fondations religieuses, a toujours voulu maintenir une autonomie légitime. Il engage la fondatrice à assumer, quoi qu'il lui en coûte, son rôle de supérieure. Il préfère des rapports d'amitié à des rapports de juridiction, et maintient la séparation des caisses en cas d'entraide financière.
a)
Nîmes, le 11 janvier 1846.- Orig.ms. ACR, AD 403; V., Lettres, III p. 14-15.
[J'ai à vous parler] de vos peines à l'égard de votre charge. Ma bonne fille, laissez-les donc. Ou dites-moi que vous ne me trouvez plus bon à rien, que je suis incapable de vous aider à les porter; ou laissez-m'en la responsabilité devant Dieu. N'est-ce pas moi qui veux que vous soyez là ? L'obéissance ne peut-elle vous être en ceci bonne à quelque chose ? Vous me disiez de vous faire beaucoup obéir. Eh bien ! je vous ordonne de vous décharger sur moi de la responsabilité qui pourrait vous gêner en quelque chose. Je sais qu'il y a certaines peines intimes, dont on ne peut passer la piqûre à un autre. De celles-là je ne puis accepter la douleur; c'est votre affaire personnelle. Mais il me semble que, si vous voulez bien, vous pourrez très certainement obtenir un peu de soulagement de la pensée que c'est moi qui prends devant Dieu, sans trouble ni crainte, la charge de votre position. Je prierai Dieu, ma chère fille, de vous soutenir directement dans tout ce en quoi il ne voudra pas m'en confier le soin(2).
b)
Nîmes, le 18 janvier 1852.- Orig.ms. ACR, AD 809; T., Lettres, I p. 135.
A la fin de 1851, il fut question de donner aux Religieuses de l'Assomption un nouveau supérieur ecclésiastique. Mère M. Eugénie songea à obtenir la nomination du P. d'Alzon à ce poste. Le P. d'Alzon l'invite à traiter d'abord l'affaire avec l'archevêché de Paris et lui signifie clairement, malgré ses instances, qu'il vaut mieux, entre leurs deux Instituts, maintenir des rapports d'amitié que d'établir des rapports d'autorité. Son dévouement personnel ne peut être mis en cause pour autant.
Voici ma réponse à vos questions.
1° Je suis tout disposé à être votre supérieur, mais je ne crois pas que le moment soit favorable pour être nommé.
2° J'ai parlé à M. Buquet(3), non pas en mon nom, mais comme ne désirant pas qu'un jour la Congrégation ait une trop haute autorité sur la Congrégation des femmes.
3° J'ai le plus grand désir de prendre de vos affaires ce qu'il y a de plus pénible, ce n'est pas ce qui me ferait reculer. Je redoute uniquement pour l'avenir les trop nombreuses relations entre les deux Congrégations. Cependant, je crois tellement que nous pourrons vous être utiles que je fais préparer, pour d'ici à deux ans, des sujets pour Mgr Griffiths(4).
J'ai tellement l'intention de porter vos Constitutions à Rome, que je le disais, il y a à peine huit jours, à ma mère. Est-ce assez catégorique ?
Je me résume. Je serai très heureux de me dévouer à votre oeuvre, qui est la nôtre. Je ne crois pas bon d'être encore supérieur. Si l'archevêque me nomme, je ferai mes observations, dont je vous parlerai, quand je serai à Paris, et qui se résument en ceci : accusé de m'écraser d'oeuvres, obligé au point de vue matériel de me restreindre, il serait imprudent à moi de prendre de nouvelles charges. Je lui ferai observer encore qu'en me nommant supérieur il me donnera peut-être involontairement plus de puissance qu'il ne voudrait à cause des deux Ordres. Plus tard, je ne pense pas avoir besoin de donner ces explications. Je voudrais que vous fussiez convaincue de mon dévouement personnel et de l'obligation où je crois être de garantir l'indépendance de l'Ordre des hommes.
c)
Nîmes, le 1er mai 1853. - Orig.ms. ACR, AD 887; T., Lettres, I p. 274.
Les deux Instituts eurent l'occasion de s'aider en matière financière. Le P. d'Alzon eut toujours la prudence de maintenir l'autonomie des caisses en ce domaine. Ainsi, lorsqu'il fut question d'acheter le terrain de Clichy, Mère M. Eugénie offrit au P. d'Alzon sa caution, puisqu'il ne pouvait faire aucune avance. Le Père accepte avec reconnaissance cette proposition, mais rappelle le droit et la pratique du droit, en s'appuyant sur les Constitutions mêmes des Religieuses de 1'Assomption.
Convient-il que vous fassiez caution pour moi ? En général, on recommande de ne pas prêter de communauté à communauté. [...] On engage les communautés à s'appuyer sur elles seules. J'avoue que ce principe me paraît anticharitable. Mais à cause de nos futures relations, ne devons-nous pas, autant que possible, séparer nos affaires ? J'y vois des avantages, quoique j'en visse un très grand pour moi en ce moment à la méthode opposée. Il est sûr que je vous ai rendu service, quand je vous ai prêté 30 000 francs. Il est sûr que les Sulpiciens avaient prêté 200 000 francs à l'abbé Poiloup(5). Voyez et jugez, surtout examinez s'il faut que nous gênions nos relations spirituelles, de Congrégation à Congrégation, par des liens d'argent. La seule chose qui me déterminerait à accepter votre caution serait que, par là, vous entreriez dans l'esprit de celle de vos règles qui porte que vous viendrez en aide à des oeuvres pieuses. Or, vous nous aidez merveilleusement en cette circonstance. Mais alors, quoique je ne veuille certes pas diminuer ma part de reconnaissance envers ma fille, ce n'est plus Soeur Marie-Eugénie de Jésus qui aide M. d'Alzon, c'est la Congrégation des femmes qui aide la Congrégation des hommes, et ce point de vue me semble mettre plus votre conscience à l'aise, car vous faites une oeuvre dans l'esprit de votre Ordre.
Voyez, priez et réfléchissez d'après ces observations. Moi, je me réserve de vous être reconnaissant de ce que décide votre coeur de fille et d'amie, quelque parti que vous preniez(6).
10
Extraits de lettres du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, à propos de la fondation du Cap (1849-1852)
En 1849, les Religieuses de l'Assomption, dont certaines étaient d'origine anglaise ou irlandaise, furent sollicitées par Mgr Devereux, vicaire apostolique du district oriental du Cap de Bonne Espérance pour fonder une mission sur son territoire. Le P. d'Alzon ne fit aucune opposition de principe à une fondation aussi lointaine pour une Congrégation récente, malgré l'appréhension d'une scission possible entre la fondation et la Maison-Mère.
a)
Nîmes, le 9 août 1849. - Orig.ms. ACR, AD 664; V., Lettres, III p. 468.
Le P. d'Alzon offre à Mère M. Eugénie d'aider les Soeurs en partance pour la Mission, mais il rappelle la nécessité de "préciser, écrit-il, la question de vos rapports avec l'évêque" pour que soit sauvegardé le lien de la fondation avec la Maison-Mère.
1° Il n'y a pas à s'inquiéter beaucoup de ce qui sera entre vous et lui, tant qu'il vivra.
2° Tant que vous ne serez pas approuvées par l'archevêque de Paris, il n'y a pas moyen de prévenir le cas où la colonie qui va en Afrique, voulant se détacher de vous, se ferait relever de ses voeux par l'évêque du pays où elles seront.
3° Il faut donc s'occuper de faire approuver votre Institut par le Pape.
4° Il faut que, avant de partir, l'évêque du Cap vous laisse des lettres pour demander l'approbation de votre Institut.
5° Il faut vous occuper sérieusement de la maison que l'on vous propose de fonder en Angleterre.
6° Quand je serai à Paris, une des plus graves questions dont je m'occuperai sera d'examiner avec le nonce si l'on ne peut pas rétablir les voeux solennels; car je ne vois pas d'autre moyen d'obtenir que les religieuses envoyées à l'étranger relèvent de la maison-mère. [...]
Cependant, il est évident que si des maisons fournissent des sujets et de l'argent, elles doivent savoir ce que devient l'argent et ce que l'on fait des sujets. Quant à la question de propriété des maisons, il me semble qu'il faut établir deux positions : ou l'évêque fournira la maison et vos Soeurs en seront les locataires, et, dans le cas où les Soeurs s'en retireraient un jour, on constaterait les améliorations qu'elles y auraient faites pour en tenir compte; ou les Soeurs, en entrant dans la maison, en prendraient possession comme propriétaires et reconnaîtraient devoir à l'évêque la somme équivalente au prix de l'établissement, prix qu'elles seraient tenues de payer à l'évêque (sans intérêts), si elles étaient forcées de se retirer, supposé qu'elles trouvassent plus avantageux de ne pas lui remettre l'établissement lui-même. Ce dernier projet me paraît le plus avantageux.
b)
Nîmes le 15 décembre 1852. - Orig.ms. ACR, AD 861; T., Lettres, I p. 222-223.
Conformément au droit du temps, qui soumettait les maisons religieuses à l'autorité immédiate des Ordinaires, Mgr Devereux avait cru devoir employer les religieuses selon les besoins de son diocèse. La scission d'avec la Maison-Mère devint très vite une menace. Le P. d'Alzon, avant qu'elle ne se produisît, fit tout pour la prévenir.
L'affaire du Cap est bien compliquée. Cependant, pour ma part, je suis plus content de la tournure qu'elle prend. Votre pouvoir comme supérieure générale y est reconnu, et je vois la possibilité de vous raccommoder avec Mgr Devereux, s'il ne prend pas trop la mouche, et je persiste dans mon opinion qu'il ne faut pas reculer, après avoir avancé. J'avoue qu'il y a, dans les détails que vous me donnez, et ceux que vous avait appris Soeur Marie-Liguori, des choses très graves. Je ne sais pourquoi je pense qu'on peut y remédier, et, si c'est possible, il faut le tenter. Sans doute, il ne faut pas se dissimuler que la vie de vos filles au Cap ne peut être la même que la vie de vos filles, rue de Chaillot. Mais de même que, en Angleterre, vous avez un peu étendu la courroie, de même, au Cap pouvez-vous voir en quoi il est convenable de céder tout en étant inflexible sur les choses de convenance religieuse(7).
11
Echange de lettres entre le P. d'Alzon et Mère M. Eugénie, au sujet de la fondation de Nîmes (1852-1855).
Dès le 12 janvier 1852, le P. d'Alzon proposait à Mère M. Eugénie d'établir à Nîmes une maison de prière avec l'Adoration perpétuelle et de retraite ouverte aux personnes du monde (ACR, AD 807. T., Lettres, I p. 131). Cette idée devait "être mûrie", la fondation n'aura lieu qu'en 1855, en plein accord de sentiments et avec l'autorisation de l'évêque.
a)
Du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes, le 31 octobre 1852. -Orig.ms. ACR, AD 847; T., Lettres, I p. 206-207.
J'ai eu, hier soir, une longue conversation avec l'évêque au sujet de la fondation de Nîmes. Je n'ai pu le tirer de cette réponse : "Vous entreprenez trop, vous ne pourrez y suffire. Si vous veniez à manquer!" J'eus beau lui répéter que je ne croyais pas que la fondation me coûtât un sou. Il se renferma dans son silence, et il n'y eut pas moyen de lui rien arracher. Il faut donc ajourner, à moins qu'une grâce spéciale ne lui fasse changer d'avis. Je me suis demandé si je lui ferai sentir la peine qu'il me fait en cette circonstance et l'espèce de blessure de coeur que j'éprouve. Je me demande ce qui serait le plus parfait, car après tout nous ne devons vouloir que cela. Donnez-moi vos idées, car il ne faut pas renoncer à notre projet. J'ai attendu quatre ans pour les Carmélites, j'attendrai bien huit ans pour vous autres. Si pourtant je pouvais vous avoir, j'en serais bien heureux.
b)
De Mère M. Eugénie au P. d'Alzon, Paris, le 18 septembre 1854. -Orig.ms. ACRA, lettre 2429.
En attendant l'autorisation de Mgr Cart, le P. d'Alzon se propose d'orienter vers la Congrégation de Mère M. Eugénie "quelques jeunes personnes qui n'ont pas d'attrait pour l'éducation, mais qui seraient, selon moi, d'excellentes Adoratrices du Saint-Sacrement" et "un aiguillon pour les Soeurs vouées à l'enseignement" (Ch. XIII, 9b). - A cette proposition, Mère M. Eugénie répond, en exigeant de la part de ces vocations une abnégation religieuse d'autant plus grande pour le bien de tout l'Institut.
Je pense qu'elles ne feraient pas une condition d'être dans telle ou telle maison. Pour moi, de mon côté, je les emploierais bien volontiers à fonder celle de Nîmes, si elles avaient les qualités désirables pour une fondation; et, soit là, soit ailleurs, je ne les emploierais pas à l'éducation puisque Dieu ne les y appelle pas. Nous avons assez besoin d'âmes de prière, de travail humble ou de zèle pour les autres oeuvres relatives au salut des âmes, que le bon Dieu nous envoie en outre des enfants, des pauvres, des retraitantes, des protestantes à instruire, etc. Comme au reste, on ne confie pas de pareilles oeuvres à des novices, ce serait une raison de plus pour que l'on fît dans d'autres occupations l'essai de leur charité et de la nature de leur esprit. Il y a des Soeurs que, par raison de non vocation pour l'éducation, nous n'avons jamais employées aux enfants, mais il y aurait de quoi scandaliser toute la Congrégation si une Soeur s'en vantait comme d'un droit.
Trouvez-vous que mes pensées à cet égard soient raisonnables ? Je désirerais bien avoir de bons sujets pour cette chère fondation de Nîmes, mais de bonnes filles dont toute la Congrégation fût d'autant plus édifiée, que leur vie se passera plus aux pieds de Notre-Seigneur(8).
c)
Du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, Nîmes vers le 7 novembre 1855. -Orig.ms. ACR, AD 1034; T., Lettres, I p. 615-616.
Le 21 octobre 1855, en qualité de vicaire capitulaire, le P. d'Alzon fonde à Nîmes le Prieuré de l'Assomption, avec l'agrément de l'évêque nommé : "Puisqu'elle vous semble opportune, je m'empresse d'y souscrire", écrit Mgr Plantier le 24 septembre 1855. - Le P. d'Alzon dit à Mère M. Eugénie sa satisfaction sur les débuts de la communauté confiée à Soeur M.-Walburge.
Je veux vous dire moi-même deux ou trois choses : 1° Sr M.-Walburge réussit mille fois mieux que je n'aurais osé l'espérer. 2° L'esprit de pauvreté de vos filles produit un merveilleux effet; je vous engage à les y encourager, parce que, certainement Dieu leur accordera des grâces de conversion. 3° Les Dames de Saint-Maur me conjurent de vous engager à prendre des élèves, pourvu que vous fixiez un prix élevé(9).
12
Extraits de lettres relatives au bref de louange accordé à la Congrégation des Religieuses de l'Assomption, 1855
La Congrégation des Religieuses de l'Assomption étant suffisamment établie et appréciée, Mère M. Eugénie, avec l'appui du P. d'Alzon, entreprit des démarches à Rome, pour obtenir un décret de louange.
a)
Extraits de 2 lettres du P. d'Alzon à Mère M. Eugénie, mai 1855
Etant venu à Rome, comme délégué de Mgr Cart (Ch. XVIII E 3), le P. d'Alzon voulut obtenir que le décret soit transformé en bref de louange.
1° [Rome, le] 23 mai 1855.- Orig.ms. ACR, AD 1005; T., Lettres, I p. 546-547.
Après bien des courses inutiles, j'ai obtenu que Mgr de Ségur présentera au Pape la demande que le décret laudatif soit changé en bref; il fera la demande lundi. A la Congrégation des Evêques et Réguliers, on m'a donné cette voie pour réussir, et je pense qu'elle réussira.
2° [Rome, le 31 mai 1855]. -Orig.ms. ACR, AD 1007; T., Lettres, I p. 549.
J ' ai eu hier soir une seconde et très longue audience du Pape ! Je lui ai renouvelé la demande pour votre Bref, il me l'a de nouveau promis. Je vais m'occuper de l'emporter, si je le puis. Priez pour moi. Je vous assure que le Pape, si Dieu lui prête vie, fera encore de bonnes et belles choses. A plus tard les détails.
b)
De l'abbé Gay à Mère M. Eugénie, datée de juin 1855. - Orig.ms. ACRA..
Mgr de Ségur, intervenu auprès du Pape pour le P. d'Alzon, annonce à son ami l'abbé Gay le succès de sa démarche; celui-ci se hâte d'en informer Mère M. Eugénie.
J'ai vu hier Mgr de Ségur; il est ravi du P. d'Alzon, et m'a parlé de lui dans les termes les plus sympathiques. J'ai compris qu'ils s'étaient beaucoup vus à Rome. Le cher Gaston lui a obtenu du Saint-Père une audience toute particulière, qui a été très longue, et dans laquelle le P. d'Alzon a pu dire librement au Pape tout ce que la brièveté et la solennité de la première entrevue l'avaient contraint d'omettre. J'espère que du bien, un grand bien, sortira de là.
Pour ce qui vous concerne, ce n'est plus seulement un encouragement, c'est un bref d'approbation que vous allez avoir; et si j'ai bien compris, c'est Mgr de Ségur qui l'a lui-même demandé. Voyez si Dieu s'occupe de vous, d'inspirer à ses amis tant de sollicitudes à votre endroit et de tant bénir leurs démarches. Tout cela m'a extrêmement réjoui, et vous devinez si j'ai pour vous et pour moi remercié notre bon auditeur de rote. Décidément, j'ai pour tout ce qui touche l'Assomption les sentiments qu'on a pour une famille, et je ne puis vous dire mon contentement en entendant Mgr de Ségur parler comme il l'a fait du P. d'Alzon. Si ce n'est pas la vocation de ma vie, je suis bien sûr du moins que ce sera celle de mon coeur, d'aimer l'esprit qui vous anime et de m'intéresser vivement à votre oeuvre(10).
______________________
1. Le P. d'Alzon admet le bien fondé des remarques de Mère M. Eugénie, mais il faut savoir qu'en 1854, il est tout à la rédaction de la Règle des Religieux de l'Assomption, qu'il terminera au début de 1855. Par ailleurs, dans une lettre du 30 janvier 1854, qui s'est croisée avec celle de Mère M. Eugénie, il lui disait la nécessité de lier le zèle apostolique à la vie religieuse : "Saint François de Sales ne dit-il pas qu'autre est la dévotion de l'évêque, autre celle des Chartreux; nous sommes un peu évêques, ma chère fille, il faut en porter la charge. Et toutefois, je vous engage très fort à réserver vos moments; saint François-Xavier ne prenait-il pas tous les jours deux heures dans l'après-midi pour se réfugier en haut du clocher de Goa, pour s'occuper de son âme ? Voilà, je crois, ce que nous devons faire un peu; mais c'est là le point difficile [...,]". (ACR, AD 11; T., Lettres, I p. 379). Par là, le P. d'Alzon répondait à une lettre de Mère M. Eugénie datée du 23 janvier, où elle se plaignait d'être toute à ses Soeurs et à son oeuvre, ce qui nuisait, disait-elle, à sa prière. Fondateurs de Congrégations apostoliques, ne sont-ils pas l'un et l'autre "un peu évêques", et lui-même, comme vicaire général pour le diocèse de Nîmes, ne doit-il pas répondre à ce que Dieu attend de lui au nom même de cette charge ?
2. Le 16 mars 1849, le P. d'Alzon écrit de nouveau : "Je vous défends de vous occuper de savoir si vous serez supérieure en 1850 ou si vous ne le serez pas. Je me confirme chaque jour dans la pensée que vous devez être à vie, et alors, que vous devez vous arranger pour votre sanctification dans la position qui vous est faite. Je vous prie de ne plus revenir là-dessus, car c'est une affaire très décidément arrêtée dans ma pensée. [...] Donnez le plus que vous pourrez l'exemple de la règle et tout ira bien."(AD 633; T.D. 20, p. 73).
3. Vicaire général du diocèse de Paris.
4. Vicaire apostolique du diocèse occidental du Cap de Bonne Espérance.
5. Maître d'internat à Paris.
6. Dans la lettre suivante, du 8 mai, le P. d'Alzon ajoute une précision du point de vue légal : "Je ne pense pas que, légalement, ce soit la Congrégation qui dût s'engager. Aux yeux de la loi, on ne devrait être qu'une seule personne, mais il serait convenu que la bonne oeuvre ne se ferait que du consentement de la Congrégation. Voilà ce que j'aurais voulu vous dire. Ainsi, vous me prêterez, je suppose, mais avec la permission de la Congrégation." - ACR, AD 888; T., Lettres,I p. 279.
7. La rupture se produisit néanmoins, mais la fondation fit souche et donna naissance à une nouvelle Congrégation : The Missionary Sisters of the Assumption, qui comprend actuellement quelque 400 membres.
8. Le P. d'Alzon répondra le 22 septembre 1854 par ces lignes : "Pour les sujets que je veux diriger vers vous, j'entends les choses absolument comme vous l'entendez" (ACR, AD 952; T., Lettres, I p. 465).
9. La fin première du Prieuré était d'assurer une oeuvre de prière et un lieu de retraite "pour des conversions". Mais l'idée d'un pensionnat n'était pas exclue, d'autant que Mgr Plantier en avait exprimé le désir à Mère M. Eugénie, lors d'un passage à Paris, pour compléter l'oeuvre des Dames de Saint-Maur (Lettre de Mère M. Eugénie, 31 octobre 1855. - ACRA, lettre n° 2505) : "Mgr Sibour lui a parlé de notre fondation à Nîmes, et Mgr Plantier paraît compter sur un pensionnat."
10. Nous avons dit que c'est à Mgr de Ségur que le P. d'Alzon confia l'Association de Saint-François de Sales (Ch. XVII 16). Par ailleurs, Mère M. Eugénie aurait été heureuse que l'abbé Gay entrât dans la congrégation du P. d'Alzon.