L'inconscient multiple


Sous la plume d'Isabelle Taubes, nous lisons : "L’inconscient ne nous veut ni bien ni mal. Nous en possédons un parce que notre moi refuse de laisser pénétrer dans la sphère consciente tout élément susceptible de nous heurter, de nous faire peur, de nous donner une trop mauvaise image de nous ou de ceux que nous aimons"(1). L'Inconscient serait-il le gardien qui veille sur nous avec bienveillance ? Mais on le connaît aussi sous un jour moins favorable lorsqu'il nous joue des tours ou nous confronte à l'aspect obscur de nous-mêmes.

Nous avons choisi de suivre le chemin du rêve, "fenêtre sur l'inconscient". Pour J-P.Tassin le rêve n'est pas le produit du sommeil paradoxal : "Une chose est sûre pour Jean-Pol Tassin : pendant les quinze ou vingt minutes de sommeil paradoxal qui viennent  de s'écouler, quelque chose se passait bien dans votre cerveau, mais ce n'était pas un rêve… Ce que les neurologues croient savoir aujourd'hui, c'est que, pendant le sommeil paradoxal, le cerveau, libéré du contrôle conscient exercé par les lobes frontaux du néocortex, remodèle tout à sa guise les réseaux neuronaux. Ce remodelage a forcément toutes sortes de répercussions somatiques –musculaires, digestives, hormonales, respiratoires... – et des effets psychiques… S'adaptant en un éclair à ce contexte accidentel, à l'instant du réveil, votre cerveau a transposé le travail non conscient du remodelage en un contenu cognitif explicite… L'illusion serait de croire qu'il suffirait d'en observer les «outputs», autrement dit tout ce qui en sort –chimiquement sous forme de molécules, électriquement sous forme de tracés encéphalographiques, subjectivement sous forme de récit–, pour pouvoir appréhender la logique interne, le langage, bref, le fonctionnement effectif de notre cerveau". Ces découvertes du fonctionnement cérébral nous éloignent inévitablement de l'inconscient freudien. Nous poursuivons avec la lecture du texte de P.Van Eersel : "Pour tenter de nous faire comprendre de quoi il retourne, le neurobiologiste nous apprend que son travail l'a amené à diviser le fonctionnement du cerveau en deux parts très inégales, l'une à 99 % et l'autre à 1 %... Son travail a donc fait aboutir Jean-Pol Tassin à deux réseaux neuronaux. Appelons le premier «réseau de base» : il concerne environ 99% des neurones. Ce réseau traite toutes les opérations de la vie : réceptions sensorielles, motricité, décisions, volonté, mémorisation, etc. Le second réseau ne compte que 1% des neurones, voire 0,6%. Il est superposé au premier, dans un arrangement anatomique spécifique, qui part du mésencéphale : c'est le «réseau modulateur». Sa mission est d'orienter en permanence toutes les opérations du grand réseau de base : à chaque instant, en effet, selon ce que l'on est en train de vivre, nos neurones modulateurs doivent décider vers quelles structures et quels réseaux de notre cerveau dispatcher lesdites opérations, de la façon la plus adaptée à la situation. Mission capitale : selon les circonstances, le réseau modulateur peut décider d'affecter telle tâche corticale au «cerveau cognitif lent» —et on en aura conscience, on pourra en parler, le mémoriser, etc. —, ou bien la tâche sera confiée à des instances inconscientes, d'une façon que Jean-Pol Tassin décrit comme «analogique rapide» —et, par définition, l'opération se déroulera à notre insu ou de façon instinctive. Exemple simple : on peut respirer sans y penser, donc en analogique rapide ; on peut le faire de façon volontaire et notre respiration entre alors dans le champ de notre cerveau cognitif lent. Exemple plus sophistiqué : la voie basse de l'intelligence relationnelle, dont nous parlions à propos des neurones miroirs et des neurones en fuseau, traite les informations de façon ultrarapide et analogique, comme un réflexe instinctif de survie (pour réagir à un éventuel danger) ; la voie haute traite les mêmes informations en les confrontant à la mémoire, à la sensibilité, à la volonté, etc., bref en passant par le cerveau cognitif lent". Revenons un instant sur le rêve et sur les travaux de M.Jouvet : "Ne dit-on pas, notamment depuis les recherches de Michel Jouvet sur le sommeil, que c'est le temps du rêve ? «Non, répond Tassin avec une quasi-certitude, le rêve ne peut survenir qu'au moment où vous vous réveillez. Pourquoi vous réveillez-vous ? Parce que vos neurones modulateurs se sont remis à fonctionner, ne serait-ce qu'une fraction de seconde (ils font cela pour assurer leur survie, car n'oublions pas qu'un neurone qui ne fonctionne pas meurt rapidement, notre sommeil est ainsi constellé de micro-réveils neuronaux de survie). Que se passe-t-il alors ? Le cerveau cognitif lent se réveille, même très brièvement, et en une fraction de seconde, il fabrique une histoire –à raison d'une image par cinq centièmes de seconde, le cerveau peut vous envoyer toute une histoire en un rien de temps »"(2)."Un rêve serait ainsi la suite de plusieurs images qui s'enchaîneraient à la manière d'une bande dessinée. Chaque image ne durant que de 60 à 100 millisecondes, un rêve pourrait correspondre à une vingtaine d'images, soit l'équivalent d'une ou deux pages d'un album de Tintin"(3). A propos de cette incessante quête du sens, nous citons L.Naccache : "Nous ne cessons d'interpréter les choses que nous percevons, de leur assigner des identités (un visage, un nombre, un mot...), des significations, et la première couche de cette production de sens opère à notre insu et en amont de notre prise de conscience. Nous prenons conscience d'objets visuels déjà interprétés. Autrement dit cette première couche d'attribution de sens est réalisée par notre cinéma intérieur de manière inconsciente ! Vers la fin des années 1990, durant ma thèse de neurosciences cognitives, j'ai ainsi démontré avec Stanislas Dehaene que le sens d'un mot ou celui d'un nombre sont déjà interprétés dans les coulisses de notre perception consciente en quelques fractions de seconde. Depuis, de nombreuses études scientifiques ont répliqué, étendu et raffiné ces premiers résultats. Nous faisons sens des choses, inconsciemment, irrépressiblement et sans effort… Par ailleurs, le sens des choses n'est pas figé. Ainsi, dans la vie quotidienne, nous butons régulièrement sur des significations qui surgissent de manière immédiate à notre conscience, mais qui ne nous satisfont pas. Nous modifions alors nos interprétations subjectives à travers des allers-retours entre des attributions de sens conscientes et des attributions de sens inconscientes, jusqu'à la création d'un sens qui fasse véritablement sens pour nous de l'instant vécu"(4).

Le concept d'inconscient évolue considérablement sous l'influence des recherches neurologiques. S.Dehaene fait état des opérations inconscientes qui façonnent notre approche du monde : "Dès que nous ouvrons les yeux, notre cortex visuel se lance dans d'innombrables calculs —mais nous n'en avons cure. Comme nous n'avons aucun accès aux opérations intimes du cerveau, nous croyons qu'il ne travaille dur que lorsque nous avons conscience de travailler dur— par exemple lorsque nous faisons des calculs mentaux ou que nous jouons aux échecs. Nous nous méprenons totalement sur la complexité des opérations qu'il met en œuvre, inconsciemment, pour créer l'impression d'un monde visuel simple et sans coutures"(5). L'élaboration de notre vision du monde résulte d'une activité inconsciente : "Notre cerveau abrite toute une série de dispositifs astucieux mais inconscients, qui évaluent en permanence les entrées sensorielles, guident notre attention et orientent nos pensées. Grâce à ces étiquettes subliminales, les stimuli amorphes qui bombardent nos sens deviennent un paysage familier au sein duquel notre cerveau distingue aisément les aubaines à saisir et les risques à éviter. Seuls les événements les plus saillants et les plus pertinents attirent notre attention et acquièrent ainsi une petite chance d'accéder à la conscience. À notre insu, notre attention inconsciente évalue sans relâche les opportunités qui se présentent à l'aune de nos buts et de nos systèmes de valeur".

P.Buser écrit : "Les théories psychanalytiques ne sont pour l'essentiel pas bâties sur des faits que nous considérerions aujourd'hui comme scientifiques, mais sur des hypothèses construites à partir de constatations cliniques et psychopathologiques souvent isolées, et habilement interprétées et insérées dans un système préconstruit qu'elles contribuent à parfaire. Tandis que l'inconscient cognitif traduit sa réalité par des manifestations objectives et tangibles, celui du psychanalyste est largement créé à partir d'indices d'une autre nature, propre à chaque patient, à ce qu'il dit lors de l'analyse sur le divan, et ce qu'il raconte de ses rêves". Le concept d'inconscient développé par la psychanalyse n'est pas élaboré sur la même base que celui des neurosciences.  P.Buser rappelle l'historique du cheminement suivi par S.Freud: "Commençons par un exposé et un débat sur Freud. Certes il ne fut pas l'inventeur de l'idée d'inconscient ; bien d'autres avant lui y avaient pensé et avaient invoqué son existence. Mais il a, mieux que bien d'autres, su donner à ses vues, à ses hypothèses et finalement à un système qu'il a su construire, un élan jamais atteint, un élan qui à ce jour encore étonne. Médecin, il vint à s'intéresser aux problèmes d'hypnose dont il avait eu connaissance lors de séjours chez Charcot à la Salpêtrière à Paris, puis chez Bernheim à Nancy. Il s'installa ensuite à Vienne comme neuropsychiatre et avec Joseph Breuer (1842-1925) commença à constituer un groupe autour de lui. Il pratiqua d'abord l'hypnose, mais l'abandonna pour la méthode cathartique, qui consistait à débarrasser le sujet de ses troubles physiques ou mentaux en faisant surgir à sa conscience une idée ou un souvenir qui était refoulé et qui les produisait. Ainsi la psychanalyse freudienne naquit-elle entre 1895 et 1906. Freud, perfectionnant sa thérapeutique, pressentit en même temps la possibilité de fonder une psychologie dont la neuropathologie ne serait qu'un cas particulier et peu à peu ses vues fragmentaires se coordonnèrent en un véritable système. La vie mentale reposait, pensa-t-il alors, sur une dualité d'instincts, l'instinct sexuel, la libido, tendant à la conservation de l'espèce, et des instincts du Moi, tendant à la conservation de l'individu. Il appela libido cette énergie motivationnelle, cette pulsion et insista bien sûr tout particulièrement sur le versant sexuel, le besoin sexuel étant le plus fort de tous socialement. Freud introduisit autour de ce thème beaucoup plus que le rapport sexuel lui-même. La libido est devenue la pulsion sexuelle (ce que n'ont pas accepté la plupart des autres analystes, soit contemporains de Freud, soit plus récents). Plus tard, Freud reconnut que tout n'était pas résolu avec l'instinct de vie"(6).

L.Naccache avance cette proposition à propos de l'inconscient freudien : cet inconscient n'est-il pas un peu trop conscient? Il écrit : "À travers notre lecture de son concept d'inconscient, tout semble indiquer que Freud n'a pas réussi à prendre suffisamment de recul face aux propriétés de la conscience, et qu'il a généralisé, par erreur d'interprétation, certaines d'entre elles à nos processus inconscients. Freud a bien contribué à la découverte de l'inconscient, mais il nous apparaît comme ayant échoué dans sa tentative d'une description consciente objective de l'inconscient. Nous avons pu constater qu'il a trop souvent limité sa construction théorique à des interprétations, dans lesquelles il a attribué à cet inconscient des propriétés dont il n'avait pas réalisé qu'elles étaient le propre de la conscience. Ces «erreurs» ne sont pas triviales ou évidentes puisque, rappelons-le, il s'agit ici de parvenir à penser l'impensable, c'est-à-dire ce dont on ne fera jamais l'expérience consciemment. On peut même isoler plusieurs passages dans lesquels Freud semble avoir touché du doigt ces inextricables difficultés, et avoir ressenti un profond désarroi. Dans un texte consacré à la névrose obsessionnelle, on peut lire par exemple que «celui qui souffre de compulsions et d'interdictions se comporte comme s'il était sous l'emprise d'une conscience de culpabilité [ ... ] inconsciente, ainsi qu'on est obligé de s'exprimer en dépit de la répugnance qu'ont ces mots à aller ensemble» (Freud, 1974). Ce «piège redoutable» commence d'ailleurs par le langage que nous utilisons pour parler de l'inconscient. Nos aventures neuropsychologiques nous ont appris à penser l'inconscient non pas comme une entité unifiée, mais comme une collection de processus absolument distincts et indépendants les uns des autres. Leur seul point commun est d'échapper à la conscience, mais ils ne constituent pas un système psychologique unifié comme l'est par contre la conscience. Parler de la conscience au singulier est donc parfaitement légitime, mais étendre cet usage du singulier à l'inconscient, c'est déjà s'engager sur la pente de la projection d'attributs conscients à nos processus mentaux inconscients. Le singulier de la conscience, processus temporellement unifié de notre psychisme, s'oppose ainsi au pluriel de nos inconscients évanescents, multiples et foisonnants"(7).

A propos de la "plasticité synaptique" F.Ansermet et P.Magistretti différencient le fonctionnement du cerveau de celui d'un ordinateur : "Comme première analogie, parlons d'un rhéostat -aux antipodes, donc, d'une communication binaire. Les circuits neuronaux ont bien peu de chose à voir avec des microcircuits gravés de manière définitive à la sortie de la chaîne d'assemblage (dans un contexte biologique, on dirait à la fin du développement du système nerveux). En effet, on retrouve ici une notion… celle de la plasticité. La plasticité, c'est l'inverse de la rigidité. Pour les circuits neuronaux, il s'agit de la capacité que les neurones ont de modifier l'efficacité avec laquelle ils transmettent l'information. Quelle propriété cette plasticité neuronale confère-t-elle donc à notre cerveau ? Celle d'enregistrer de manière durable dans les circuits neuronaux les informations provenant de notre environnement ; celle de permettre aux expériences vécues par chaque individu de laisser une trace dans les circuits neuronaux". Dans les lignes suivantes, ils  exposent l'action du fonctionnement conscient et inconscient : "La réalité externe émerge dans la conscience en étant reliée de manière inextricable à un état somatique… C'est dans ce sens que l'on peut interpréter l'affirmation freudienne que tout dérive de la perception. Les lois qui régissent la réalité interne, par le fait de transcriptions successives, aboutissent à une complexité nouvelle où le signifiant… correspond à un nouveau signifié… Le processus de la plasticité transforme les signifiants liés à la réalité externe. Ceux-ci, pris dans une chaîne d'associations, vont vers d'autres signifiants qui ne correspondent plus aux signifiés de la réalité externe… En d'autres termes, si, dans un premier temps, les mots, les lettres, donc le signifiant, correspondent au signifié de la réalité externe, c'est-à-dire à un objet ou à une situation, par une bascule qui s'opère au niveau inconscient, le signifiant s'associe à une chaîne d'autres signifiants pour produire un nouveau signifié, ce qui veut dire que le même signifiant peut être associé à une réalité externe et, en même temps, à un autre signifié dans la réalité interne en construction permanente, jusqu'à se couper du signifié initial qui s'en trouve tout à fait perdu… Il y a là un point de convergence entre la neurobiologie et la conception de la cure analytique, dans la mesure où un signifiant équivaut à un «signe de la perception», mais aussi à une trace synaptique… Les perceptions de la réalité interne sont tout aussi fortes et marquantes que les perceptions de la réalité externe. Elles nourrissent et s'intègrent au même niveau opérationnel pour générer une action, un comportement. C'est le propre de la psychanalyse de décoder cette physiologie de l'inconscient en partant des signifiants qui, dans cet inconscient, sont associés avec des signifiés qui ne correspondent plus aux signifiés du code de la réalité externe"(8).

A la suite nous voulons revenir vers une autre fenêtre sur l'inconscient, celle du transfert, en rappelant le propos de F.Ansermet et P.Magistretti : "le même signifiant peut être associé à une réalité externe et, en même temps, à un autre signifié dans la réalité interne en construction permanente"; et la phrase de J.Lacan : "Au commencement de l'analyse est le transfert". Nous citons un extrait de J-D.Nasio : "Freud nous propose deux exemples du transfert considéré comme une répétition en acte du refoulé. Premier exemple : un patient se montre insolent à l'égard de l'analyste au lieu de se rappeler qu'il avait été jadis un enfant insolent à l'égard de ses parents. Deuxième exemple : un patient déclare à son analyste qu'il n'a rien à dire au lieu de se rappeler que, étant enfant, il avait voulu séduire son père en se montrant soumis et silencieux. Dans ces deux exemples, le patient ne se remémore pas le fait refoulé mais le met en acte sur la scène de l'analyse. Voilà, la répétition agie !"(9). J-D.Nasio rapporte cette citation de S.Freud : "Les émois inconscients ne veulent pas être remémorés mais aspirent à se reproduire. Le malade veut agir ses passions". Entre autres fonctions, l'inconscient organise un mode d'être au monde. Ce mode d'être que permet d'explorer le transfert, en le mettant en acte. D'où le terme avancé par S.Freud : "psychanalyse"(10), du grec psukhê, âme, littéralement analyse de l'âme.

Nous rappelons la phrase de F.Ansermet et P.Magistretti : "Si la réalité externe perçue est colorée par un état somatique, pouvant aboutir à une réponse motrice, en même temps, la perception de la réalité externe nourrit une autre réalité, interne, en construction permanente, qui peut moduler la réponse motrice". A la suite nous citons A.Fraisse : "L'Analyse Psycho-Organique est une méthode née dans les années 1975, qui fait le pont entre la psychanalyse et les approches psycho-corporelles… Cette méthode étudie comment d'un mot, en passant par une image et une pré-image, le corps est touché. Elle analyse aussi le phénomène dans le cheminement inverse : comment à partir de l'inconscient corporel peut se former une image et se dire une parole… [G.Boyesen] met l'accent sur l'approche de la psyché par le travail organique, particulièrement par les massages"(11). G.Boyesen écrit : "Freud s'était posé  cette question : où se trouve l'inconscient ? La théorie bio-dynamique répond : l'inconscient est dans l'endoderme. Mais, pour être précis, il conviendrait de dire que l'inconscient est dans tout le corps. En effet, le système circulatoire va dans tout le corps à travers les artères, les veines, les capillaires, jusque dans chacune des cellules. Pour Reich, l'inconscient était dans les muscles... Qu'il soit possible d'influencer par le massage l'inconscient et les émotions refoulées fut une grande révélation. Que l'organisme soit capable de refouler des émotions et des conflits par des tensions musculaires et par une contraction chronique du diaphragme fut une autre révélation, essentielle. Je compris également que le corps opérait son processus de répression du haut vers le bas, de la surface vers les profondeurs du corps, vers le pelvis et les jambes. Ainsi, lorsque je massais les jambes, je déclenchais souvent des réactions dans le visage du patient, et des émotions réapparaissaient dans la gorge… Dans la thérapie bio-dynamique… nous connectons le système végétatif au système moteur, nous permettons l'expression émotionnelle et le mouvement du corps, le mouvement expressif du corps. De cette manière, il ne peut plus y avoir accumulation de stase dans les profondeurs de l'organisme. Lorsqu'on veut véritablement guérir la névrose, il s'agit d'éliminer ce conflit profond existant au niveau du système végétatif. Par le travail biodynamique, qui libère le péristaltisme intestinal, nous pouvons dissoudre le conflit qui existe au sein du système végétatif, avant même qu'il ne parvienne jusqu'à la conscience. La particularité de notre méthode psychopéristaltique est que précisément nous pouvons défaire, dissoudre cette stase en travaillant sur n'importe quelle partie, niveau ou couche de l'organisme : le ventre, la poitrine, la tête"(12). Selon A.Fraisse: "L'Analyse Psycho Corporelle, de façon singulière et originale, s'inspire des approches freudiennes, jungiennes et reichiennes. Ce qui reste commun à ces références, c'est le travail avec le transfert et le contre-transfert, l'attention portée à ce qui se joue dans la relation thérapeutique ainsi que les différentes voies d'accès à l'inconscient. Une des lignes de pensée de Paul Boyesen est d'affirmer que  «l'inconscient est situationnel». Si l'inconscient ignore le temps linéaire, il se réfère aux situations vécues : c'est donc à ces situations retenues dans l'inconscient qu'il faut permettre d'accéder". Nous voulons encore citer A.Fraisse et M.Tocquet, cette fois à propos de l'hystérie : "Freud met en évidence, dans le cadre de la névrose, un autre corps que celui de la clinique médicale à l'époque, un corps rebelle à  la logique anatomique. Un corps qui se révèlera être un corps pulsionnel de plaisir. Il découvre ainsi que le corps de la patiente hystérique «qui se comporte dans ses paralysies et autres manifestations comme si l'anatomie n'existait pas» (Freud 1893), est gouverné par le langage. La malade hystérique «prend les organes dans le sens vulgaire, populaire du nom qu'ils portent : la jambe est la jambe jusqu'à l'insertion de la hanche, le bras est l'extrémité supérieure comme elle se dessine sous les vêtements». Ainsi, si lésion il y a, ce ne peut être qu'une lésion de ce que représente pour la patiente le mot, ou le concept, de jambe ou de bras. Le corps dans l'hystérie se révélant vécu dans le langage, le mot ou le vocable concernés par la conversion hystérique apparaissent comme premiers, et mis à cette place du fait de l'histoire du ou de la malade. Cette histoire concerne la vie pulsionnelle, la vie libidinale de la patiente et la cure de la névrose se trouve ainsi habitée par le plaisir et le déplaisir sexuels.  Remarquons que, dès le début de ses recherches, Freud emploie le terme de «conversion hystérique», et il ne le remettra jamais en question par la suite, pour rendre compte du passage dans le corps d'un affect qui est d'ordre psychique et qui passe secondairement dans l'ordre du somatique. La conversion concerne donc exclusivement un conflit psychique qui se trouve transposé dans le corps, et constitue une tentative  de résolution de ce conflit dans des symptômes somatiques, dits de «conversion». Ces symptômes de conversion peuvent êtres moteurs (comme les paralysies) ou sensitifs (comme les anesthésies ou les douleurs localisées)"(11).

 

1-L-inconscient-cet-autre-qui-vit-en-nous. I.Taubes

2-Votre cerveau n'a pas fini de vous étonner. collectif. Sous la direction de P.Van Eersel

3-Les coulisses du cerveau. J-P. Tassin

4-Le cinéma intérieur. L.Naccache

5-Le Code de la conscience. S.Dehaene

6-L'inconscient aux mille visages. P.Buser

7-Le nouvel inconscient. L.Naccache

8-A chacun son cerveau. F.Ansermet et P.Magistretti

9-L'inconscient c'est la répétition. J-D. Nasio

10-https://fr.wikipedia.org/wiki/Psychanalyse."La première occurrence du mot, orthographié «psychoanalyse», remonte à 1896, dans un texte de Freud écrit et publié en français, L'hérédité et l'étiologie des névroses"

11-L'analyse psycho-organique: Les voies corporelles d'une psychanalyse. E.Champ, A. Fraisse,  M.Tocquet

12-Entre psyché et soma. G.Boyesen