Thème II : Puissances et tensions dans le monde de la fin de la Première Guerre mondiale à nos jours.
Question I : Les chemins de la puissance.
1ère partie : Les Etats-Unis et le monde depuis les "14 points" du Président Wilson (1918).
Un cours inspiré des travaux de Mme. COURREGELONGUE. Merci à elle !
Port de New-York et la Statue de la Liberté.
Fat man / Little Boy
Flotte américaine
Coca-Cola dans l'Atlas marocain.
Accords d'Oslo 13 septembre 1993
Quelle est l’attitude des Etats-Unis envers l’Europe ?
- Liens commerciaux
- Peu de liens politiques
- Pas d’implication dans les conflits européens
=> isolationnisme
Qu’observe-t-on à la fin du XIXè siècle ?
- Intervention en Amérique : doctrine Monroe
- Affirmation de la puissance = la politique du gros bâton
=> interventionnisme
Les E-U ont d’abord eu une attitude isolationniste. La PGM apparaît comme une étape dans l’accession à la puissance : malgré un engagement tardif les EU jouent un rôle capital dans la fin de la PGM, et ils deviennent alors une grande puissance planétaire. Jusqu'aux années 1940, ils développement une puissance essentiellement économique et financière, leurs interventions politiques internationales sont assez limitées. Cet isolationnisme, remis en question par l’attaque japonaise de Pearl Harbor, s’effondre totalement en 1947 : la puissance devient alors assumée, les E-U rayonnent à travers la planète. Cependant, cette puissance est aujourd’hui fragilisée et contestée.
Problématiques :
Comment les Etats-Unis se sont-ils imposés comme la principale puissance du XXe siècle, puissance aujourd'hui contestée ?
Comment la notion de puissance est-elle modelée et transformée au XXe siècle par les Etats-Unis ?
I. 1918 - 1945 : entre isolationnisme et tentation d'engagement, les hésitations de la puissance américaine ?
A. Des 14 points de Wilson à l'isolationnisme des années 1920.
1. Un règlement de la guerre proposé par les Etats-Unis : les 14 points.
Document 2 p.224.
Pourquoi les Etats-Unis sont-ils entrés en guerre ?
Quels principes le président Wilson défend-il ici ?
- L’abolition de la diplomatie secrète
- Le libre accès à la mer
- Le désarmement
- La restitution de la souveraineté sur les terres occupées
- Le droit à l’autodétermination des peuples
- La faveur accordée au libre-échange : abolition des droits de douanes, ouvertures des marchés de capitaux et de m/ses
- La création de la Sociétés Des Nations.
En janvier 1918, dans un texte connu sous le nom des « 14 points », le président Wilson formule dans son quatorzième point la nécessité de créer une société générale des nations pour préserver la paix. Il exige donc que la création de la SDN soit débattue lors des négociations de paix à Versailles. Il s’agit d’établir un nouvel ordre mondial fondé sur la défense de la démocratie, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et la sécurité collective garantie par une « société des nations ». Le pacte fondateur de la SDN, intégré au traité de Versailles en 1919, est donc marqué par les principes de Wilson.
2. Les échec des idéaux de Wilson.
Document 3 p.225.
A qui s'adresse Wilson ?
Que cherche-t-il à faire ici ?
Quelle était la principale crainte des élus américains ?
Comment se nomme la doctrine voulue par le Sénat américain ?
Quelles en sont les conséquences ?
Document 5 p.225.
Décrivez et expliquez le document.
Le pacte wilsonien est rapidement un échec, d’abord à cause de l’attitude des E-U eux-mêmes. Le Président Wilson ne réussit pas à imposer ses idées dans son propre pays, marqué par la politique d’isolationnisme : ni l’opinion publique, ni le Congrès, qui est passé aux mains des républicains lors des élections de mi-mandat (novembre 1918), n’y sont favorables. Au final, les républicains rejettent le Traité de Versailles et l’entrée des E-U dans la SDN.
L’isolationnisme est une politique d’isolement d’une nation, particulièrement le refus de s’engager dans des traités pouvant entraîner une intervention militaire.
B. Un isolationnisme en trompe l'oeil (années 1920 - 1940)
1. Une puissance fragilisée par la crise des années 1930.
Document 1 p.222.
A la fin des années 1920, l’économie des E-U est en forte croissance (chimie, automobile, innovation) et les investissements se multiplient à travers toute la planète. Cependant, la PGM et la crise de 1929 marque la fin de cette période de prospérité. Simple Krach boursier à New-York au départ, elle se transforme en dépression (recul de la production et des richesses) en s’étendant progressivement dans tous les pays industrialisés.
A partie de mars 1933, l’arrivée au pouvoir de Franklin Delano Roosevelt entraîne les E-U dans la voie de l’isolationnisme et la résolution de la crise. Il lance donc son New Deal (Mesures sociales, réformes bancaires…) qui réorganise totalement le système économique et financier américain. Il réussit à résoudre partiellement la crise en 1939 : le PIB des E-U est revenu à son niveau de 1928 et le chômage régresse.
2. Un isolationnisme qui se heurte aux réalités internationales.
L’isolationnisme des années 1920 n’est pas total : les E-U restent très actifs en A. latine, leur « chasse gardée » depuis la doctrine Monroe (1823), où ils développent leurs intérêts économiques. (ex : United Fruit contrôle 90 % du commerce de la banane en Amérique dans les années 20’)
L’isolationnisme américain n’est donc en fait un levier plus ou moins utilisé pour permettre à la puissance économique des E-U de s’épanouir dans les années 1920.
Document 3 p.223
Document 4 p.223
Document 2 p.226
La résolution de la dépression a entraîné une absence quasi-totale des Etats-Unis sur la scène internationale dans les années 1930, concrétisée par les Neutrality Acts de 1935-1937 : ont pour but d’éviter aux Etats-Unis d’être entraînés dans une nouvelle guerre européenne.
Cet isolationnisme forcené n’est cependant pas du goût du Président Roosevelt, qui prépare l'opinion et le Congrès à un éventuel changement de politique (il commence par exemple à alerter l’opinion, sans grand succès, lors de l’invasion japonaise de la Chine en octobre 1937, arguant que « l’anarchie internationale détruit les fondements de la paix »).
Avec l’invasion de la Pologne par Hitler et le choc de la défaite française de mai 1940, Roosevelt relance son projet, déjà évoqué en 1938, de remplacer les Neutrality Acts par la loi dite « prêt-bail », qui est votée le 11 mars 1941 après la réélection de Roosevelt de novembre 1940 : les Etats-Unis prêtent au Royaume-Uni resté seul en guerre contre l’Axe (puis à l’été à l’URSS dès le déclenchement de l’Opération Barbarossa, le 22 juin 1941) des armes pour la durée de la guerre. Cependant, l’opinion américaine n’est toujours pas prête pour l’entrée en guerre : c’est l’attaque d’une base militaire à Pearl Harbour qui en est donc le déclencheur.
C. 1941 - 1945 : le tournant de la Seconde Guerre mondiale.
Document 4 p.227.
Document 5 p.227.
II. 1945 - 1991 : une puissance assumée pendant la Guerre froide.
A. Une puissance multiforme.
1. Les Etats-Unis affirment leur puissance économique, politique et militaire (="le Hard Power").
Carte p. 228-229. et doc 3 p.377.
Avant même la fin de la Seconde Guerre mondiale, la fondation d’un nouveau système économique mondial est un enjeu essentiel. La guerre a permis aux Etats-Unis d’accroître leur puissance économique, leur PIB double quasiment à l’occasion de la guerre, ils possèdent en 1945 près des 2/3 du stock d’or mondial. Cette puissance est renforcée par la mise en place d’institutions internationales qu’ils dominent dans le cadre du système de Bretton Woods de juillet 1944 (parité or-dollar). Mais le « rêve » d’un nouvel ordre mondial pacifié est vite contrarié par les tensions entre les deux grands vainqueurs de la Seconde Guerre mondial.
Afin d’empêcher le communisme de se répandre, le président des Etats-Unis énonce dans son discours du 12 mars 1947, la doctrine Truman s’appuyant sur l’idée du containment ou de l’endiguement. Les Etats-Unis s’affirment à travers celle-ci comme un modèle politique, celui de la démocratie libérale, dont l’objectif est le triomphe des valeurs dont ils se veulent porteurs : démocratie, liberté, capitalisme. Afin de concrétiser la doctrine Truman est mis en place le plan Marshall d’aide à la reconstruction de l’Europe. Celui-ci constitue bien une arme économique et politique, car la reconstruction de l’Europe doit permettre d’intégrer celle-ci dans la sphère d’influence étasunienne et consolider les intérêts des Etats-Unis. De plus, les tensions de la Guerre froide amènent les Etats-Unis à intervenir constamment à l’étranger et à intégrer un nombre croissant d’Etats dans des systèmes d’alliances militaires (ex : OTAN).
2. La puissance culturelle qui s'impose dès les années 1950 (=le Soft Power).
Le modèle culturel américain s’impose par sa capacité de séduction, d’attraction (= le soft power) qui permet aux Etats-Unis d’atteindre leurs objectifs internationaux. Les Etats-Unis sont un pays porteur de rêve, d’espérance et les limites réelles du modèle n’y changent rien : les Etats-Unis sont souvent vus comme un eldorado contemporain. Leur culture populaire est devenue une culture monde connue et reconnue puis diffusée par le cinéma hollywoodien et la télévision dès les années 1960,, diffusant un modèle de vie fantasmé : c’est l’American way of life.
B. Les Etats-Unis à la tête du "monde libre" : entre interventions et incertitudes.
1. L'interventionnisme des Etats-Unis.
L’interventionnisme direct s’opère en Asie (Ex : de la guerre de Corée de 1950 – 1953). Les Etats-Unis adoptent le rollback : vise à refouler le communisme et non plus simplement à contenir sa progression.
2. Une image parfois dégradée.
Mouvements beatnik et hippie
Mohamed Ali : "Je n’ai rien contre les Viêt-cong » […] aucun Vietnamien ne m’a jamais traité de sale nègre"
Photographie de Nick Ut : bombardement au napalm d'un village vietnamien par les Etats-Unis.
A partir des années 1960, le leadership américain est partiellement remis en cause. L’image des E-U est fortement dégradée par la connaissance des exactions commises au Vietnam, mais aussi par l’importance des problèmes intérieurs : dénonciation de la guerre par la jeunesse étasunienne qui s’incarne dans une contre-culture (mouvements beatnik et hippie), ségrégation et émeutes des ghettos noirs 1965 – 1968, l’assassinat de Martin Luther King le 4 avril 1968.
3. Les années 1980 : le "sursaut" des Etats-Unis.
Avec l’arrivée de Reagan à la tête du pays, on assiste à un « sursaut » des E-U. Derrière le slogan de campagne, America is back, il entend affirmer avec force la supériorité des E-U et dénonce l’idée d’un déclin inévitable. Il décide de relancer l’effort militaire du pays (doc 1 p.134) avec l’initiative de Défense Stratégique ou Star Wars, le budget militaire augmente alors très fortement (de moins de 5% du PIB à 6,5 % en 1987). Il impose ainsi une course aux armements que l’URSS ne peut suivre. De plus, il réaffirme ce qu’il considère être la supériorité morale des E-U sur l’URSS, qu’il qualifie « d’empire du Mal », une vision fortement imprégnée de religiosité et inspirée par le renouveau évangéliste que connaissent les E-U. Avec l’arrivée de Gorbatchev au Kremlin et l’épuisement de l’URSS, les deux Grands entament des pourparlers sur le désarmement (accords de Washington en 1987), puis se rapprochent progressivement.
La Guerre froide a permis aux E-U de consolider leur leadership sur la planète. Avec l’implosion du bloc de l’Est puis de l’URSS entre 1989 et 1991, ils se retrouvent dans une position inédite, celle d’unique superpuissance.
III. L'apogée de la puissance états-unienne et les contestations dans le monde.
A. Une puissance sans égale dans les années 1990.
Première Guerre du Golfe en 1990 - 1991
Guerre en ex-Yougoslavie en 1991 - 1995
Bill Clinton, Président des Etats-Unis de 1993 - 2001
Politique dite d'enlargement
La disparition de l’URSS laisse les États-Unis seule puissance incontestable, à la suprématie incontestable dans les quatre domaines clés : l'armée, l'économie, la technologie et la culture.
Mais la guerre froide achevée, la pax americana est-elle pour autant instaurée ?
En réalité, la disparition de l’URSSS gêne les États-Unis tout autant qu’elle les place dans une position unique, et la réponse doit être nuancée : la première guerre du Golfe (1991), renforce le rôle des États-Unis comme « gendarmes du monde ». De même, la non-réélection de George Bush face à Bill Clinton aux élections présidentielles de novembre 1992 exprime aussi, dans une certaine mesure la volonté des Américains de se préoccuper d'abord d'eux-mêmes, comme une tentation du retour à l’isolationnisme...
Les accords d'Oslo le 13 septembre 1993
Les accords de Dayton le 13 décembre 1995
Le désarmement entre les deux Grands : traité START
Création de l'OMC en janvier 1995
Pendant cette période, les États-Unis semblent pratiquer un interventionnisme « au nom du droit » à géométrie variable. Le Président américain Bill Clinton promeut, dans les années 1990, une politique dite d’Enlargement. Cette politique vise à « élargir le cercle des nations démocratiques » en utilisant différents outils tels que le soft power ou le hard power puis la Maison-Blanche prend en main le dossier de l'ex-Yougoslavie, s'implique fortement au Proche-Orient, bref exerce un leadership mondial. Mais ce leadership rencontre des difficultés : impasse des négociations israélo-palestiniennes, menaces répétées contre les États « voyous » (rogue States) comme l'Irak, vagues d'anti-américanisme et de violences dans l'aire arabo-musulmane.
B. Une puissance contestée.
1. Sur le plan économique.
- Essor des puissances émergentes : les BRICS.
- Crise financière en 2008 avec la faillite de Lehmann Brother
- le poids considérable de la dette publique qui dépasse le PIB
2. Sur le plan politique : le choix du 11 septembre 2001 et le durcissement de la politique extérieure.
Le 11 septembre 2001 amène un durcissement de la politique extérieure étasunienne : guerre contre le terrorisme et « l’Axe du Mal » devient l’objectif premier d’une puissance qui considère comme légitime d’intervenir massivement pour défendre ses intérêts avec l’aide de l’OTAN (Guerre d’Afghanistan en 2001).
En 2003, GW Bush, conformément à sa stratégie de « croisade » contre les « Rogues States » (Etats Voyous) lance de manière unilatérale et préventive une guerre en Irak au motif que Saddam Hussein serait un soutien d’Al Qaïda et qu’il posséderait des armes de destruction massive. Cette guerre est enclenchée sans l’accord de l’ONU et provoque de très fortes manifestations de par le monde. La France refuse d’y participer.
L’unilatéralisme désigne le choix d'un Etat de prendre ses décisions et d'agir seul, sans concertation avec ses alliés ni négociation avec ses adversaires.
3. La diplomatie de Barack Obama.
Vidéo : Discours de Berlin le 24 juillet 2008 sur le multilatéralisme.
Lors de son 1er mandat (2008-2012) B. Obama pratique le smart power (pouvoir de l’intelligence), un mélange d’habileté et d’expérience, articulé entre hard power et soft power. Obama est un pragmatique, il entend permettre aux E-U de restaurer leur image dans le monde, pour cela le multilatéralisme et la coopération internationale sont les instruments essentiels de sa politique étrangère (ex : Discours du Caire en 2009).
En 2014, il réaffirme ce principe qui privilégie la diplomatie et n’utilise la guerre qu’en dernier recours.
« Ce n’est pas parce qu’on a le meilleur marteau qu’on doit voir chaque problème comme un clou »
« le recours au marteau ne peut être la seule, ou même la principal, composante de notre leadership »
Cependant, Obama n’entend bien sûr pas se priver du levier militaire. Il fait le choix de privilégier les opérations secrètes plutôt que la guerre classique. Il considère que le déploiement de la puissance miliaire de façon spectaculaire est contre-productif car il peut être perçu comme de l’arrogance et se retourner contre les E-U
Conclusion :
Pôle majeur de l’espace mondial, les E-U ont construit leur domination sur la puissance et le dynamisme de leur économie, mais également sur la conviction qu’ils ont un rôle prééminent à jouer dans le monde, « la destinée manifeste ». Les guerres mondiales dans la 1ère moitié du XXe siècle les ont amenés à développer par étapes un modèle de puissance multiforme qui, dans le cadre de la guerre froide, assume son leadership sur une grande partie de la planète. Avec la disparition de l’URSS, les E-U se trouvent confrontés à un nouveau défi, celui de construire autour d’eux un nouvel ordre mondial pacifié. Les E-U ne parviennent cependant pas à réguler seuls la marche du monde : ils suscitent des formes de séduction et d’attraction inégalées, mais aussi d’opposition voire de rejet virulent.