1ère partie : Le Sahara : ressources, conflits (étude de cas)
Un cours inspiré des travaux de Mme. C. COURREGELONGUE. Merci à elle !
Introduction :
Qu'évoque le mot Sahara ?
Erg
Touaregs
Reg
In Amenas, exploitation pétrolière
Le Sahara est le plus vaste désert du monde (8,5 millions de km2 soit presques les Etats-Unis qui en font 9). Il s'étend sur une dizaine de pays dont les frontières sont héritées de la colonisation, et traverse aujourd'hui une période agitée. Ce vaste espace n'est cependant pas vide : peuplé de plus de 5 millions de personnes, il voit se développer l'insécurité et les trafics en tout genre, et s'attiser les convoitises liées à ses ressources.
Problématique : En quoi les ressources du Sahara sont-elles à la fois facteurs de développement et de conflits ?
I. Un espace de fortes contraintes mais doté de ressources abondantes.
Pourquoi le Sahara est-il à la fois un territoire répulsif et attractif ?
A. Des contraintes naturelles
Le milieu est très contraignant :
- fortes aridité et fortes chaleurs
- pas de fleuve hormis le Nil
- un désert soit de sable (erg) soit de pierres (reg)
- l'immensité (8 M de km2) le rend difficile à contrôler.
B. Des ressources importantes
1. Les matières premières.
Minerai de phosophate
Mines de phosphate dans le désert marocain.
Localisation des mines d'Areva au Niger
Minerai d'uranium
"Yellowcake"
Paysage près d'Arlit
- Les hydrocarbures sont présents en grandes quantités mais concentrés en Algérie ou en Libye.
- Des minerais sont également présents : uranium au Niger, phosphate au Maroc, potasse en Tunisie et le fer en Mauritanie.
Ces ressources stratégiques sont pour la plupart exploitées par de grandes FTN (Areva pour uranium du Niger) : ces Etats ont développé des économies de rente c'est-à-dire que l'économie dépend de l'exportation de produits peu ou pas transformés.
2. Les ressources en eau.
Des nappes phréatiques ont été découvertes à l'occasion des prospections pétrolières : ces réserves sont utilisées pour l'irrigation, mais aussi pour alimenter les villes.
3. Vers de nouvelles ressources ?
Document 2 p.248.
Développement de l’énergie solaire et de l’énergie éolienne.
II. Un espace politiquement fractionné mais uni par des flux divers.
En quoi le Sahara reflète-t-il la forte instabilité politique régnante en Afrique ?
A. Le découpage frontalier.
Carte politique de l'Afrique en 2015
Empires coloniaux
=> Deux problèmes majeurs.
La répartition des Touaregs
Le Sahara Occidental : affrontement entre le Maroc et le Front Polisario.
Un espace sans frontières : le Sahara
Jusqu'à la fin du XIXème siècle la traversée du Sahara, des rives de la Méditerranée jusqu'aux grandes capitales du Sahel au Sud, représentait une prouesse sur le plan technique et humain, tout au moins pour les étrangers non sahariens (…) Mais ce que les Occidentaux n'imaginaient guère à cette époque, … c’est que pour les populations sahariennes, vivre au Sahara, parcourir le désert en tous sens et y acheminer des marchandises, était un exercice quotidien, somme toute banal, bien que difficile et souvent dangereux. Le désert avait ses règles de vie sociales, écologiques, politiques. Pour survivre, il fallait connaître toutes ces règles, savoir les respecter ou les contourner, mais aussi et surtout savoir se comporter avec les nombreux groupes de nomades qui avaient autorité sur ces espaces en exigeant des contreparties immédiates et concrètes. Ces nomades perçus le plus souvent comme des primitifs, barbares, «sauvages» … étaient organisés; mais leur organisation politique, socio-économique, était de nature différente de celle des Occidentaux; en outre, chaque groupe ethnique ou fédération de tribus était régi par une structure socio-politique qui lui était propre, souvent très différente de celle de ses voisins. Leur différence globale était fondamentale : à la conception occidentale de l'Etat- Nation ancrée dans des structures fixes, ils opposaient celle de groupes nomades, très mobiles, démocratiques ou hiérarchisés, voire parfois sans chef (comme les Toubous) où les décisions étaient collégiales et où la responsabilité à l'égard du monde extérieur était collective. Ces nomades devaient leur survie à la façon dont ils avaient su exploiter les maigres ressources du désert (élevage, cueillettes et culture) mais aussi aux profits qu'ils tiraient d'échanges commerciaux qui traversaient leurs territoires.
(…) Le passage de ces territorialités « floues » sahariennes à une territorialité « dure » dans des Etats modernes a donc été le résultat d'une conception coloniale dont les intérêts étaient autres et dont les stratégies de gestion et de découpage favorisaient les contrôles d'un pouvoir dans les principaux centres de décision se trouvaient en Métropole. C'est la raison pour laquelle les révoltes et les tentatives de dissidences furent nombreuses.
Gast Marceau. In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°48-49, 1988. Le monde musulman à l'épreuve de la frontière. pp. 165-172.
Les frontières de l’espace saharien ont été tracées par les puissances coloniales (France, Grande-Bretagne, Italie …).
Ces frontières ont artificiellement divisé un espace qui fonctionnait comme un ensemble :
- l’espace de migration des peuples nomades a été coupé par des postes frontières : exemple des Touaregs.
- le tracé des ces frontières a été et est toujours contesté : ex entre le Maroc et l’Algérie, entre le Soudan et le Soudan du Sud / Le cas du Sahara occidental.
Le tracé des frontières fait que les destinées sont variables : au nord se trouvent des Etats en voie d’intégration par leur ouverture méditerranéenne, alors qu’au sud les Etats sahéliens (Niger, Mali, Tchad) sont enclavés : contrainte supplémentaire.
B. Un espace de flux.
1. Les flux de matières premières.
Les matières premières doivent être transportées pour être transformées ou exportées :
-le nord du Sahara est donc traversé par des oléoducs et des gazoducs qui aboutissent dans de grands ports méthaniers ou pétroliers comme Arzew en Algérie.
-l’exploitation des ressources en eau nécessite aussi des infrastructures importantes, financées comment en Libye par les revenus des hydrocarbures.
2. Les flux humains.
Le désert est parcouru par des flux de personnes :
-pistes caravanières
-flux de migrants
-flux de réfugiés
-Migrations des Touaregs.
3. Les flux de marchandises.
Les flux de marchandises correspondent le plus souvent à des flux clandestins et sont composés de contrebandes en tout genre : cigarettes, armes, stupéfiants,
essence. En effet, ces flux sont possibles car la région est difficilement contrôlable et les frontières sont poreuses. De plus, les autorités luttent mollement car ces
activités permettent la circulation de monnaie.
Le Sahara apparaît donc, ici, comme une zone de non-droit, une « zone grise » qui s’inscrit dans la mondialisation par le développement de ses activités illicites.
III. Un espace qui suscite des tensions et des convoitises.
Pour qui et pourquoi le Sahara est-il devenu aujourd'hui un espace stratégique ?
A. Des nombreux facteurs d'instabilité.
Abdelhamid Abou Zeid
Otages français enlevés par AQMI
Mokhtar Belmokhtar alias M. Marlboro
- Présence d’Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Sud de l’Algérie, Mauritanie, Niger, Mali) : ce sont également des trafiquants variés qui pratiquent des activités mafieuses et des prises d’otages (ex : prise d’otage à In Amenas, exploitation pétrolière en Algérie qui a fait 38 morts).
- Rébellion touareg : cherchent à faire reconnaître leur identité.
- L’eau : La Libye puise dans des nappes fossiles dont certaines se trouvent sous le territoire égyptien
- La persistance des conflits et des litiges frontaliers
B. La présence d'acteurs internationaux.
-Les ressources attisent la convoitise des FTN (Firmes transnationales) américaines, européennes, et asiatiques = compétition pour les ressources.
-Les grandes puissances cherchent à utiliser leur influence politique pour obtenir des conventions leur permettant d’exploiter les ressources.
Conclusion :
Le Sahara, plus grand désert du monde, est un territoire habité, urbanisé, riche en ressources minières et en hydrocarbures. Il est traversé par de nombreux flux de marchandises, souvent informels et illicites, et de migrants espérant pour certains rejoindre l’Europe. Il attire les convoitises des entreprises étrangères et des acteurs locaux pour contrôler le territoire. Il est représentatif d’un continent africain en changement et qui s’intègre dans la mondialisation.
Le Sahara, loin d’être un espace à la marge, constitue l’une des préoccupations majeures de la géopolitique européenne et internationale, mais aussi des FTN.
Longtemps considérée comme une région peu peuplée, peu développée et difficile à contrôler, le Sahara entre de plain-pied dans la mondialisation (découverte de ses gisements d’hydrocarbures et miniers).
À l’échelle internationale, les conflits parfois anciens (Sahara Occidental), les migrations clandestines, les trafics, ainsi que le terrorisme, placent la région au cœur de la sécurité internationale. De même, le Sahara est au cœur de l’actualité géopolitique avec les récentes révolutions tunisienne, égyptienne et libyenne.