Le Train Avant

Dans ce genre de restauration, il est possible de passer sans problème d'un sous-ensemble à un autre. Cela permet de varier les plaisirs ou de continuer à faire progresser le chantier même si on est bloqué pour une raison quelconque sur ce qu'on était en train de faire. Dans mon cas, cela permet également d'emmener chez moi certains éléments moins encombrants et d'y travailler une heure par çi par là car le châssis est à environ 40 km de chez moi.

Après le boitier de direction et le volant, je me suis donc attaqué au train avant.

Pour démonter une roue, il faut enlever un écrou central puis sortir le roulement extérieur (remis en place sur la photo. Première bonne surprise, non seulement les roulements sont d'une dimension standard, ce qui n'est pas toujours évident sur des véhicules de cette époque, mais en plus ils existent en version étanche, ce qui ne peut pas faire de tort vu le montage.

J'ai décidé de sortir l'essieu complet en démontant au niveau des 4 étriers de maintien de l'essieu sous les lames de ressorts. Cela c'est bien passé pour 7 écrous mais beaucoup moins bien pour le 8ème. Une pièce de plus à remplacer.

Entre la lame maitresse et l'essieu, il y a une cale de chasse. Plutôt que de faire une pièce usinée, elle est constituée de 3 tôles superposées.

En glissant l'essieu pour le sortir de sous la voiture, je m'aperçois de quelque chose d'inquiétant, l'essieu semble avoir été rechargé à la soudure. Evidemment, je ne m'étais aperçu de rien jusque là !

Pour démonter les porte-fusées, il faut dévisser les bouchons inférieur et supérieur en bronze

Ensuite on chasse vers le bas les axes de pivot qui ont une portée conique. Sur la photo on voit les 2 bouchons remis en place sur l'axe

Le nettoyage de l'essieu confirme qu'il a été rechargé sur les 2 faces. Pourtant on ne voit aucune trace de fissuration sur le dessus ou le dessous

La poursuite du nettoyage a fait apparaitre des frappes à froid. Sur le dessus il est frappé Emile POTRON, le nom du sous-traitant. Les docs de 1913 mentionnent que SCAP s'approvisionnait chez Vermot. Sur les photos les pièces ont l'air identique de même que sur l'autre type A survivante. Peut-être ont-ils changés de fournisseur.

Côté droit, il y a une date, 1911, peut-être un mois, 7 et enfin un numéro à 4 chiffres. Est-ce une référence du sous-traitant ou un numéro de fabrication? A ce stade impossible de répondre. Il faudrait trouver d'autres essieux du même fabricant pour pouvoir espérer répondre à la question

Au milieu, à l'avant du châssis est frappé le numéro 10. Est-ce en rapport avec un numéro de châssis ?

J'ai poursuivi le nettoyage des pièces par les porte-moyeux. Côté gauche, pas de problème

On retrouve sur la fusée le marquage POTRON ainsi que G pour gauche et à la base un numéro 4

Par contre côté droit, le nettoyage révèle le même problème que sur l'essieu, la pièce a été ressoudée

J'ai donc un essieu qui a à priori été endommagé côté gauche mais pour le pivot c'est le droit qui a trinqué. Bizarre ! L'essieu a l'air symétrique, une hypothèse serait qu'au remontage il a été retourné. Je suis donc reparti à la recherche de marquages et autres poinçons et j'ai trouvé la marque suivante sur le côté droit de l'essieu

Et j'ai la même marque sur ... le pivot droit

On peut donc penser que l'essieu était bien monté sauf que ... je ne sais pas de quand date ces marquages, le mystère reste donc entier.

En attendant de pouvoir faire radiographier ces pièces, j'ai fait un contrôle de géométrie et je n'ai rien noté de suspect.

Je suis ensuite passé à la barre d'accouplement de direction, j'ai démonté la chape côté réglable et j'ai découvert ...un filetage bien mal en point. Décidément, cette voiture a eu une vie difficile et il va falloir réparer cette pièce. Seul problème, je n'ai pas encore trouvé comment elle avait été assemblée, on trouve des marques de serrages et de la brasure. Était-ce déjà une réparation ?

Ah, au fait, sur la chape fixe (côté gauche) on retrouve à nouveau un chiffre 4

Après un arrêt du chantier pendant quelques années, le travail a repris en commençant par le train avant. l'essieu et le porte-moyeu ressoudés ont été contrôlés par ressuage. Aucune fissure n'a été mise en évidence. Comme la géométrie des pièces est également bonne, j'ai décidé de les préparer pour le remontage.

Les axes de pivots et les bouchons en bronze ont été contrôlés géométriquement. Au passage, il n''est pas possible de les permuter de droite à gauche car ils sont ajustés. Il n'y aurait donc pas eu de permutation des porte-moyeux sur l'essieu.

Le levier de direction de chaque porte-moyeu a été rebagué et j'ai usiné de nouveaux axes de direction.

Les porte-moyeux ont été réassemblés sur l'essieu, il ne manque que les bouchons de graisseurs qui attendent une température plus élevée pour passer en peinture

Pour réparer la barre d'accouplement je l'ai montés sur le porte outil du tour et je l'ai percé dans l'axe. Ensuite j'ai usiné une pièce comportant d'un côté le filetage (évidemment une dimension exotique) et de l'autre une partie cylindrique pour avoir un emmanchement serré dans la barre. Il me reste à mettre de rivets radiaux et à braser l'ensemble

Les jumelles étant complètement usées, j'en ai fait découper des neuves par laser y compris les ébauches des trous. Après meulage et perçage, il faut les ajuster aux axes graisseur. Pour ces derniers, j'en ai trouvé des neufs mais de 14 mm il faut donc les reprendre au tour à 13 mm et le filetage à 12 mm et reprendre la fente de graissage.