Archives 10 décembre 2025
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Textes 10 décembre
Cette année, l’avent commence de manière tonique ! Cet évangile nous tire de toute torpeur béate, type « cadeaux et chocolats »… allez, on se réveille ! Ici, pas de flocons de neige, mais un déluge. Pas de naissance, mais un engloutissement général. Et au lieu d’une sainte famille veillant le divin enfant dans la nuit, un voleur, qui perce le mur de la maison dans notre sommeil !
En effet, chaque année, les textes de la liturgie font un magnifique rapprochement entre les deux venues du Christ dans notre monde : celle de sa naissance à Bethléem (le Noël qu’on connaît bien), et celle de son retour à la fin des temps (le « Noël » qui vient comme un voleur, et que l’on attend encore) ! Avec, à chaque fois, leur double effet : pierre d’achoppement pour les injustes qui refusent Dieu, et illumination joyeuse pour les pécheurs qui ont soif de Dieu ! Et c’est aussi pourquoi Jésus évoque le déluge et Noé…
Le déluge, c’est à la fois l’événement terrible qui engloutit une humanité corrompue, et l’histoire qui a peut-être émerveillé notre enfance : celle de l’arche, bien remplie de tous les êtres vivants de la terre, et de Noé et les siens qui vont découvrir l’arc-en-ciel de l’Alliance, la colombe avec son rameau d’olivier, la terre enfin sèche et habitable… Quelle force spirituelle, dans cette histoire antique, qui nous fait espérer un monde neuf et réconcilié !
Ainsi, nous commençons l’avent avec le père, non pas Noël, mais Noé ! Père d’une humanité nouvelle, à qui Dieu donne une seconde chance. Père qui protège toute vie, et prend soin de sa famille. Noé est entré dans l'arche mais qui nous fera entrer, à notre tour, dans l’Arche de la Nouvelle Alliance, celle du Christ ? Je crois que ce sera cet autre père, ni Noé, ni Noël : le père Joseph. Il nous mène à Marie, qui, nouvelle arche, porte Jésus en elle, vie des hommes et vie du monde. Avec Noé et Joseph, entrons tout neufs dans l’Alliance, et veillons jusqu’à Noël, veillons jusqu’au retour du Christ !
Frère Thomas Carrique, d’après Matthieu 24, 37
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Dans la Genèse, Joseph, le fils de Jacob et de Rachel, avant-dernier d’une fratrie de douze, est un homme de songes. Et il a la naïveté de les raconter à ses frères et même à son père, Jacob, qui lui portait une grande affection « parce qu’il était le fils de sa vieillesse ». Percevant cette préférence paternelle, les frères de Joseph se prirent à le détester et ses songes ne firent qu’ajouter à cette jalousie.
Il faut savoir que pour l’homme biblique, le songe n’est pas une simple rêverie : c’est un temps, un espace où Dieu communique son projet, soit par le biais d’un ange comme pour cet autre Joseph, l’époux de Marie, soit par les événements que le songe annonce sans qu’aucune parole ne soit prononcée.
Les songes ne sont pas inconséquents ! Et c’est peut-être cela que les frères de Joseph ont perçu : « Voudrais-tu donc régner sur nous ? nous dominer ? » Ils voient pour eux une menace qui transforme la jalousie vis-à-vis du chouchou en une haine qui les conduira jusqu’à la porte de l’homicide. Ce projet n’aboutira pas, mais ils vendirent leur propre frère pour vingt pièces d’argent aux gens de Madiane qui l’emmenèrent en Égypte.
Il fut donné à Joseph des songes ; il lui fut donné aussi de savoir les interpréter, les siens comme ceux des autres, notamment celui du Pharaon. De songe en songe, Joseph va discerner le plan providentiel de Dieu et il pourra s’écrier devant ses frères médusés : « C’est pour vous conserver la vie que Dieu m’a envoyé ici avant vous […]. Vous aviez voulu me faire du mal, Dieu a voulu le changer en bien ».
Joseph va passer des ténèbres du fond de la citerne où ses frères l’avaient jeté à la gloire auprès de Pharaon. Sans le savoir, en le faisant descendre dans la cuve, ils ont placé Joseph sur la rampe de son ascension et inauguré par là même leur propre salut et celui du peuple élu. Car le projet de Dieu est en marche et trouvera sa pleine réalisation plus de 250 ans plus tard avec l’Exode d’Égypte. Puis, 1000 ans plus tard, Jésus par son ascension nous ouvre les portes du Royaume.
Frère Jean-Didier Boudet, d’après Genèse 37, 5
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Lorsqu’on lit ces évangiles relatifs à la fin du monde, on peut se laisser aller à des spéculations : quand cela va-t-il arriver ? A-t-on atteint le moment décrit par Jésus ? De fait, un certain nombre de sectes ou de prédicateurs soucieux de leur succès populaire cherchent à agiter les peurs et aiment à proclamer que la fin est arrivée. Ce type de propos ont toujours existé et certains phénomènes historiques, voire météorologiques, ont suscité des annonces catastrophistes au nom de ces passages d’évangile.
Mais on peut faire une autre lecture des paroles de Jésus sur les « fins dernières ». Au lieu de les voir uniquement comme parlant de l’ultime venue du Christ, on peut les regarder comme nous parlant d’aujourd’hui, des grands moments de notre vie.
En effet, dans nos histoires personnelles, nous sommes confrontés à des situations où les « puissances des cieux sont ébranlées », où nos puissances des cieux sont ébranlées. Si tout changement implique une remise en cause, certaines mutations peuvent faire vaciller nos fondations. La perte d’un proche, une confiance trahie, l’abandon d’un cadre de vie habituel, l’annonce d’une maladie grave… Autant de situations humaines où la fin de notre monde semble alors sonner.
Dans ces moments, le Christ nous le redit : il vient à notre rencontre, « avec grande puissance et grande gloire ». Alors, relevons la tête. Nous ne sommes pas seuls dans l’épreuve.
Frère Jacques-Benoît Rauscher, d’après Luc 21, 20-28
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Quand on prononce le mot apocalypse, immédiatement nous viennent des images de films catastrophes. Il faut dire que l’imagerie du livre de l’Apocalypse est assez suggestive. Entre les animaux hybrides tous plus horrifiques les uns que les autres et les batailles gigantesques entre les forces du bien et du mal, le texte inspiré n’est pas en reste. Son auteur, saint Jean, veut marquer la réalité du combat dont parle Jésus dans l’évangile. Oui, Satan s’est dressé contre Dieu et contre son Église : le livre de l’Apocalypse parle de cela. On peut voir dans le monde le visage déformé et cynique du mal de manière de plus en plus explicite. Il nous faut refuser cette invasion. Ce combat se livre d’abord à l’intime de notre personne.
Jésus nous dit qu’il est là pour nous donner une sagesse et un langage irrésistibles. Cette sagesse du discernement est nécessaire. Surtout quand les frontières du bien et du mal deviennent floues. Comme dit le proverbe, à force de tout voir, on finit par tout accepter. Il faut être courageux pour s’élever contre des formes pernicieuses du mal auxquelles nous sommes, hélas, parfois accoutumés. C’est ce mal que le Seigneur nous demande de voir et de révéler, et c’est précisément le sens du mot apocalypse : révélation. La vérité déniche le mensonge, la justice débusque l’injustice, la lumière dénonce les ténèbres. Alors, pour mener ce combat, nous avons bien besoin de la grâce de Dieu.
Frère Olivier-Marie Corre, d’après Luc 21, 12-19
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Je ne suis pas sûr d’avoir toujours répondu à temps aux faire-part que j’ai pu recevoir. Une amie me rapportait que sa génération avait tendance à retarder le plus possible l’acceptation d’une invitation. C’est, me disait-elle, pour attendre de savoir si on ne recevra pas entre-temps une proposition plus intéressante. Une manière de dire : « En soi, je veux bien, mais s’il y a mieux après, je réserve ma réponse. »
On peut dire positivement de cette attitude qu’elle montre que des gens attendent qu’il se passe quelque chose dans leur vie. C’est un peu l’inverse d’une attitude blasée, à la manière de Qohélet : À quoi bon ! « Ce qui a existé, c’est cela qui existera ; ce qui s’est fait, c’est cela qui se fera ; rien de nouveau sous le soleil. »
Aujourd’hui, l’Écriture nous invite à attendre vraiment. Vraiment, car il s’agit d’être tendu vers ce qui doit advenir, mais vraiment aussi, parce qu’il s’agit de ne pas cesser de vivre jusqu’à ce que cela advienne — et de vivre vraiment.
Si la venue du Seigneur n’était que sa venue dans la chair, il y a fort à parier que les générations successives auraient connu ce blues qui nous envahit après une fête longuement préparée. La Nativité serait une joie passée. Un souvenir lointain qui s’estompe à mesure que les années filent. Si la venue du Seigneur n’était que sa venue dans la gloire, il y a fort à parier qu’une telle attente en découragerait plus d’un.
La toute dernière phrase de l’évangile à l’honneur cette année nous rappelle cette promesse de Jésus : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »
Sûrs de cette présence, nous pouvons vivre l’aujourd’hui dans la joie et la confiance. Il ne s’agit plus d’attendre que quelque chose de meilleur nous fasse oublier le quotidien, mais de le provoquer pour nous-mêmes, pour notre prochain, pour notre monde — aujourd’hui et maintenant, hic et nunc.
L’intensité de l’aujourd’hui, qui ne s’attarde ni ne s’étiole, est la raison même de l’engagement chrétien. Si, par mon action — en me retroussant les manches ; par ma prière — en élevant les mains et le cœur vers Dieu ; par mes prises de position — en assumant avec courage les exigences de l’Évangile plutôt que mon confort ; si, par tout cela, je peux faire entrer un peu de ces signes du Royaume dans l’histoire des hommes, alors je vis déjà, dans le présent, la joie de la vie éternelle.
Cette joie est alors dédoublée : je suis dans la joie, car un surcroît de vie est entré dans le monde ; je suis aussi dans la joie, parce que le Royaume de Dieu s’est approché. Oui : le Seigneur vient bientôt.
Serons-nous de la fête ? “Réponse souhaitée avant le 25 décembre”… Faisons de notre aujourd’hui le temps favorable pour être d’authentiques citoyens du Royaume des cieux, et pas seulement des invités blasés ou opportunistes !
« Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau ! »
Frère Benoît-Marie Florant, d’après Matthieu 24, 37-44
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Veuve, indigente, que possède-t-elle en propre ? Rien de rien, elle n’a rien, ne compte pour rien, hier comme aujourd’hui, on s’en écarte et pourtant, elle est ! Jésus ne l’identifie pas à un groupe comme « les gens riches », mais elle est « cette pauvre veuve ». Cette main tendue qui sait encore s’ouvrir lui donne toute sa dignité et sa beauté, elle devient manifestation de son être le plus profond : fille du Père.
Cette main se tend dans nos rues, lasse, honteuse, désabusée, mais voici qu’ici elle s’offre à son tour. Notre veuve ne lâche pas sa piécette, d’un pas rapide, sans un regard, soulageant sa conscience comme nous savons le faire, tels les gens riches dans le temple. Elle est tout entière présente dans cette obole, le cœur sur la main elle dépose son offrande, elle offre sa vie à cœur ouvert sans rien retenir. Le tout de sa vie est dans ce « rien ». Ce « rien », qui pourrait bien nous être enlevé (Mt 13, 12) si nous ne le vivons pas en ouverture à un don plus grand, ce « rien » devient son Tout ! Cette folle audace de tout donner sans rien retenir pour elle-même, sans la sage prudence de ceux qui ont en abondance, manifeste cette confiance absolue, ce saut dans le vide, sûre d’être étreinte par l’Amour qui n’abandonne aucun de ses enfants.
Ne nous y trompons pas, c’est bien ce mouvement du cœur dont il s’agit et non de compte en banque ou de poches percées. Chacun de nous, riche ou pauvre, a dans son cœur un « rien » qui s’avère pourtant être un « tout » à ouvrir à la confiance pour recevoir la vie en abondance. Il y a des touts et des riens qui bouchent et obstruent la vie en nous. Des riens à donner tout entier, pour que jaillisse la vie en soleil levant !
Soeur Marie-Théo Manaud, d’après Luc 21, 1-4
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Le paradis est l’entrée dans une vie nouvelle et pas le prolongement de notre existence sur la terre. Le point de référence n’est alors plus notre monde tel qu’il va. Au ciel, ce que nous sommes aujourd’hui sera réorganisé en fonction de la vie même de Dieu, communiquée par la Résurrection de Jésus. Par conséquent, le point central de notre existence, à savoir notre vie et nos relations, ce sera d’abord l’amour des trois Personnes. Dans cet amour trinitaire, nous redécouvrirons toutes les relations que nous avons eues sur la terre en fonction même de la plénitude de l’amour de Dieu.
Pour l’instant, nous voyons tout à la mesure de notre existence actuelle et nous ne pouvons pas l’imaginer. Cependant, nous ne serons pas comme ces statues alignées sous le porche des cathédrales gothiques. Imaginez-vous côte à côte sans avoir aucune relation les uns avec les autres, mais toujours les yeux fixés sur Dieu ? C’est impossible. Dieu ne nous a pas donné de nous aimer pour qu’on s’ignore pendant une éternité !
Frère Yves Habert, d’après Luc 20, 27-40
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Rien n’est dit dans les évangiles à propos de la Présentation de la Vierge Marie au temple de Jérusalem. Pour avoir des informations sur la Nativité de Marie (8 septembre), sur ses parents Anne et Joachim (26 juillet), et sur sa présentation au Temple, il faut consulter le Protévangile de Jacques, un ouvrage attribué au frère du Seigneur, qui date du milieu du 2e siècle et qui fut très populaire au Moyen Age. Il défend à la fois l’humanité et la divinité de Jésus, en soulignant bien sûr le caractère exceptionnel de Marie. Présentée au Temple à l’âge de 3 ans, elle y passa toute son enfance.
L’évangile d’aujourd’hui nous invite à méditer sur les liens de parenté de Jésus. En effet, alors qu’il est en train de parler aux foules, des gens lui annoncent que sa mère et ses frères le cherchent et veulent lui parler. Sa réaction est surprenante ; il ne sort pas dehors à leur rencontre. Il montre plutôt ses disciples et dit : « Voici ma mère et mes frères. Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » Ces mots ont dû être difficiles à entendre, surtout pour Marie sa mère. Jésus est sorti de sa ville natale de Nazareth. Il est clair qu’il veut desserrer les liens trop étroits de la famille humaine. Sa mission est de les ouvrir à une dimension universelle.
Puisque Jésus veut se faire le frère de tous, il donne à tous sa propre mère. Du haut de la croix, ne dira-t-il pas au disciple bien-aimé : « Voici ta mère » et à sa mère : « Voici ton fils » ?
Frère François-Dominique Charles, d’après Matthieu 12, 46-50
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La naissance d’un enfant vient toujours bouleverser l’existence de ceux qui l’accueillent dans leurs vies. Mais qu’est-ce que ça a pu être pour Marie et Joseph ! Ils ont dû faire bien des sacrifices pour pouvoir s’occuper de Jésus, à commencer par tout quitter pour partir en Égypte – la maison d’esclavage – et échapper aux mains des persécuteurs.
Quand ils peuvent enfin revenir chez eux, on pourrait s’attendre à une vie plus calme : au moins, Jésus est sage et obéissant, comme nous le rappelle l’évangéliste Luc. Mais ça n’empêche pas qu’il soit source d’ennuis et peut-être pour Joseph en particulier. On se souvient qu’ils l’ont cherché pendant trois jours quand il était resté au Temple après la fête !
D’autres histoires sur l’enfance de Jésus nous ont été transmises hors des Évangiles. Jésus y enseigne de manière admirable, comme au Temple, et accomplit déjà quelques miracles. Alors, Joseph doit souvent s’expliquer et parfois s’excuser auprès de son entourage pour cet enfant hors du commun. Ce Jésus dérange déjà, comme il le fera devenu adulte. Quand il sera adulte, on s’en prendra à lui, mais pour le moment, c’est à Joseph, son père, qu’on s’en prend ! Même parfois en faisant circuler la rumeur que cet enfant n’est pas son fils.
Bref, même avec l’enfant le plus sage qui soit, le rôle d’éducateur n’est jamais facile. Fonder une famille, c’est aussi envoyer un message à la société, c’est parier sur les générations futures tout en sachant que chaque enfant reste unique. Pour cela aussi, Joseph peut nous guider et nous inspirer !
Frère Vincent Loning, d’après Exode 20, 12
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Dans l’arbre généalogique de Joseph, le charpentier de Nazareth, on peut noter la présence d’un autre songeur : Jacob, fils d’Isaac, fils d’Abraham. On le voit là, endormi, une pierre sous la tête. Et voilà qu’il lui fut donné un songe : « voici qu’une échelle était dressée sur la terre, son sommet touchait le ciel, et des anges de Dieu montaient et descendaient ». Jacob n’avait rien demandé ni pour lui, ni pour ses fils et ses proches. Il vivait pourtant dans la crainte de son frère Ésaü qu’il avait trompé ! Non, aucune prière n’était montée jusqu’aux cieux portée par un ange qui serait redescendu pour lui porter un message de consolation. C’est mieux que cela : c’est Dieu lui-même qui descend du ciel et fait entendre sa voix, une parole qui est bénédiction et promesse :
« Je suis le Seigneur, le Dieu d’Abraham ton père, le Dieu d’Isaac. La terre sur laquelle tu es couché, je te la donne […], en toi et en ta descendance seront bénies toutes les familles de la terre. Voici que je suis avec toi ».
Jacob se réveille sidéré : ce Dieu qu’il ne connaît pas encore si ce n’est qu’il est celui de son père, ce Dieu est venu jusqu’à lui. « C’est vraiment la maison de Dieu, la porte du ciel ! » C’est la révélation d’un Dieu proche, tellement proche d’ailleurs qu’il l’affrontera et en sortira blessé de la hanche et avec un nouveau nom. Ton nom ne sera plus Jacob, mais Israël ».
Les songes dans la Bible ne sont pas sans lendemain ; celui de Jacob trouvera sa suite dans l’annonciation faite à Joseph, en songe là aussi et par l’intermédiaire d’un ange.« Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ; on lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : “Dieu-avec-nous” ».
L’échelle s’est prolongée jusqu’à nous afin que nous puissions atteindre le ciel en mettant nos pas dans ceux de l’Emmanuel, de celui qui est descendu pour nous élever jusqu’à son Père !
Frère Jean-Didier Boudet, d’après Genèse 28, 12
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Le Christ vient, il vient pour nous sauver, et en plus rien n’est impossible à Dieu ! Voilà un programme enthousiasmant, mais qui pourrait nous pousser à rêver, à patienter sans rien faire. Je vais attendre bien sagement sa venue, il remettra tout en place dans ma vie et dans ma famille. Je n’aurai rien à faire, sauf l’action de grâces car, quand même, il faut savoir remercier…
Or rien n’est impossible à Dieu, sauf de nous sauver sans nous. Il peut tout faire, sauf se contredire. Or il a fait l’être humain intelligent, libre et capable d’agir par lui-même. Ce sont même ces qualités, ces compétences, qui constituent en nous l’image de Dieu. Lorsque le Christ vient nous sauver, il ne détruit pas l’œuvre du Père, il ne piétine pas l’image de Dieu en nous. Il invite le pécheur à la vie, il propose la liberté aux prisonniers de l’habitude ou de l’addiction, mais il le fait en nous rendant capables d’agir de manière nouvelle, et non en agissant à notre place.
Saint Augustin disait que « Dieu nous a créés sans nous, mais ne veut pas nous sauver sans nous. » Même les grands convertis, saint Paul, saint Charles de Foucauld ou Paul Claudel, lorsqu’ils racontent l’expérience bouleversante qui a transformé leur vie, reconnaissent qu’ils ont eu la responsabilité d’accepter cette expérience, de découvrir qu’elle venait de Dieu, de prendre des décisions nécessaires et courageuses pour changer de vie. Méditer sur le fait que « rien n’est impossible à Dieu » n’est pas une occasion pour se laisser bercer par l’illusion que moins j’en fais, plus Dieu peut agir. Je peux reconnaître les aspects de ma vie où il m’apporte le salut et attend ma participation. Sans Dieu nous ne pouvons rien faire, mais sans ma volonté, mon choix, ma réponse, il ne pourra rien changer !
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Ici, en Terre sainte, il y a deux lieux où l’on court. On court au Saint-Sépulcre, comme les femmes le jour de Pâques, pour voir le tombeau vide et chanter la gloire du Ressuscité. On court à la crèche de Bethléem pour voir l’enfant de Noël, dans l’humilité de sa grotte. Honnêtement, on peut comprendre pourquoi on se presse pour la Résurrection, un événement unique, inouï et qui a changé le cours de l’Histoire. Mais courir voir un bébé dans un berceau, qu’y a-t-il d’extraordinaire ? Des bébés, il en naît tous les jours…
À Bethléem, nous allons voir ce que personne, il y a deux mille ans, ne pouvait imaginer : Dieu fait homme. À Bethléem, nous apprenons à changer notre regard sur Dieu : Dieu, par nature inaccessible, ineffable, inconnaissable, prend notre humanité et s’incarne dans la fragilité d’un enfant. Cet abaissement de Dieu remet non seulement en cause nos idées préconçues, mais il nous invite aussi à un regard renouvelé sur l’homme, sur les autres. Si Dieu s’est abaissé, s’est vidé de lui-même, dit la théologie, pour venir dans notre humanité, c’est que notre humanité est aimable et que nous devons voir chaque frère comme une personne fragile, mais sacrée. L’Incarnation de Dieu a donc une conséquence directe sur mon rapport aux autres : en m’étonnant devant la fragilité et tous les besoins de l’enfant de Bethléem, je dois aussi voir en mon frère un être fragile qui a besoin de moi. Entraînons notre regard, habituons-le à voir la beauté et la fragilité de notre humanité : en aimant cet enfant né il y a deux mille ans, que je puisse aimer mon frère aujourd’hui.
Frère Olivier Catel
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Seigneur, permets-moi d’accueillir l’Avent comme l’Église l’entend : comme un moyen de me préparer à Ton arrivée. Que tout ce que je fais – chaque cadeau que j’envoie, chaque fête à laquelle j’assiste, chaque repas que je partage – me rappelle de préparer un espace pour Toi dans mon cœur.
Père céleste, guéris mon cœur en cette période de l’Avent. Aide-moi à aimer plus pleinement. À pardonner plus généreusement. À attendre plus patiemment Noël, en embrassant chaque jour et chaque heure en sachant la joie qui m’attend. Amen.