Archives 11 juin 2025
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Textes 11 juin
L’idée semble aller de soi. Pour laisser les autres exister, il faut leur laisser de la place. Comme à Emmaüs, Jésus explique aujourd’hui les Écritures aux siens. Mais cela ne suffit pas. Il promet l’Esprit… et s’éclipse ! Beau mot ! Qu’est-ce qu’une éclipse sinon la disparition – du champ de notre vision – d’une réalité toujours présente ? Oui, c’est ça ! À l’Ascension, Dieu s’éclipse. Tout est dans le mouvement. Il y a des mystiques de l’union – sainte Catherine de Sienne. Il en est d'autres de la fusion – saint Jean de la Croix. Pourtant, la mystique chrétienne « de base » reste celle du mouvement, à l’imitation de la vie de Jésus-Christ lui-même.
Le Verbe se fait chair et plante sa tente parmi nous, lit-on dans le prologue de l’évangile de Jean. Autrement dit : il vient. Il naît en transit à Bethléem et fuit en Égypte. Autrement dit, il s’adapte. Il se fait baptiser au Jourdain et s’attarde à Jéricho. Autrement dit, il descend au point le plus bas du globe. Il va à Césarée et arpente la Décapole. Autrement dit, il voyage. Il s’élève au Thabor. Autrement dit, il grimpe.
Il monte à Jérusalem pour faire ses dévotions comme tout bon juif… Et là, il change de registre : la croix le montre aux yeux de tous. Il s’enfonce dans les enfers, au secret d’une pierre roulée sur un tombeau. Et puis… il apparaît : au bord du lac, à Emmaüs, à Jérusalem. Ici, là, ailleurs. Jamais en place mais toujours à sa place.
Notre frère. Notre Dieu.
Frère Benoît Vandeputte, d’après Luc 24, 46-53
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On nous dit souvent : « Dieu ne nous fait pas porter plus que nos capacités ». Aujourd'hui, nous entendons le fondement de cette affirmation dans l'Écriture. Jésus s'abstient d'enseigner car il estime que ses disciples ne sont pas encore capables de l’entendre. « Vous ne pouvez pas les porter », Jésus emploie le même terme quand il parle de « porter » sa croix ou quand saint Mathieu affirme que Jésus est venu pour « porter » nos maladies. Jésus passe le relais à l'Esprit pour qu'il continue son œuvre et distille son enseignement en fonction de notre évolution, de notre capacité à « porter », en communion avec le Christ, le poids du monde.
L'Esprit s'ajuste au rythme de notre course, à notre foulée, à nos fatigues, à nos blocages, à nos ouvertures. Il est un compagnon de route discret et efficace. Comme le moteur d'un vélo électrique, il s'ajuste : plus nous pédalons, plus il nous communique sa force. Mais il y a une différence : l'Esprit impulse le mouvement avant de s'adapter à notre réponse.
Dans ce passage de l'évangile, l'Esprit est un véritable interlocuteur, un acteur de sanctification avec le Père et le Fils. Il reçoit tout du Fils et le Fils possède tout ce que possède le Père. Leur communion est parfaite et ils n'ont qu'un désir : partager avec nous leur bonheur.
Frère Benoît Ente, d’après Jean 16, 12-15
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Jésus professeur de droit ! Il y a en effet un procès qui doit avoir lieu après le sien : celui du monde. Le principal acteur de ce procès, c’est l’Esprit saint qui est ici appelé le « Défenseur », c’est-à-dire l’avocat. Cet avocat mettra en évidence le péché du monde, c’est-à-dire l’incrédulité, la cause qui amène les hommes à condamner Jésus à mort.
L’œuvre de l’Esprit est ici une œuvre judiciaire ; et qui a subi l’injustice saura combien un jugement juste est une véritable consolation. Mais le coupable aussi peut chanter « dans ta justice, défends-moi, libère-moi ! » (Ps 70, 2). Car reconnaître permet de regretter le mal commis. C’est parfois par là qu’on vient à la confession, non seulement des péchés, mais de la foi ! Le procès du monde est donc une bonne nouvelle, une nouvelle de salut, pour le juste et pour l’impie. Il est l’œuvre accusatrice de la lumière, mais destinée à détruire le mal. Et en le reconnaissant, on peut s’en libérer. Courage !
Frère Thomas Zimmerman, d’après Jean 16, 5-11
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Avant d’entrer dans sa Passion, Jésus annonce qu’il enverra d’auprès du Père un Défenseur pour rendre témoignage en sa faveur. C’était vrai hier, mais ça l’est encore aujourd’hui dans son Église. S’il n’y avait pas l’Esprit Saint, il n’y aurait tout simplement pas d’Église. Certes, il n’est pas faux de dire que le Christ a fondé l’Église. Mais ne pensons pas qu’elle existe simplement parce qu’il est venu et a laissé une poignée de disciples courageux et entreprenants.
C’est par l’Esprit qu’ils seront quelque chose ensemble, car sans l’Esprit saint, les apôtres auraient été laissés à leur seul témoignage. Non, ils ont un Défenseur, c’est-à-dire un avocat qui appuiera et prouvera l’authenticité de leur témoignage. C’est le problème : convaincre, et si l’on veut convaincre, il faut convaincre de la vérité. Pour l’Esprit Saint, qu’est-ce que convaincre ? C’est établir l’homme comme témoin de la vérité du salut de Dieu offert au monde entier.
Frère Yves Habert, d’après Jean 15, 26. 16, 4a
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De paroles, on pourrait dire qu’on en est souvent plus que rassasiés ! Ça parle tout le temps, ça bavarde beaucoup, ça jacasse à tort et à travers. Plus le temps de tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler. Ça parle même très souvent pour ne rien dire. D’ailleurs une parole chasse l’autre, aussi vite oubliée que dite. Désespérant !
Et pourtant, au milieu de tout ce flot, il est des paroles qui ont du prix. Quand on aime quelqu’un par exemple, on boit ses paroles. Et si elles sont écrites, on les lit, on les relit. N’est-ce pas l’expérience de tous les amoureux ? Et qui ne garde pas précieusement telle ou telle parole d’une personne décédée qu’on a beaucoup aimée ? Combien plus alors cela ne peut être que vrai quand il s’agit de la Parole de Jésus, cette parole qu’il nous fait entendre de la part de son Père du ciel : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon père l’aimera ».
Voilà assurément une parole qui n’est pas faite de mots, mais de gestes, de regards, d’écoute, de tendresse. Une parole d’amour au sens le plus fort du terme, qui me fait entrer dans la relation d’amour qui unit le Père, le Fils et l’Esprit. Une parole d’amour qui me fait être le prochain de celui ou celle qui a besoin non de mon bavardage, mais d’une présence aimante qui guérit, qui relève, qui apaise. C’est une parole de vie, de bénédiction, de salut. « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute ! » Tout l’Évangile est là.
Frère Jean-Luc-Marie Foerster, d’après Jean 14, 23-29
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Dans La Joie de l’Évangile, le pape François met en garde les chrétiens contre l’esprit du monde. Il évoque une certaine superficialité, une indifférence : une vie tiède et confortable qui certes se réclame du Christ, mais le laisse de côté. Il est si facile d’être emporté par le courant !
Pourtant, Jésus nous rappelle que nous n’appartenons pas au monde, parce qu’il nous a choisis. Certes, nous vivons dans le monde. Nous nous mêlons à la foule, nous goûtons avec bonheur aux petites et grandes joies du quotidien. Tout cela est bon, mais notre horizon ne s’arrête pas là. Ce qui fait la différence, c’est le regard de foi et d’espérance que nous posons sur le monde. À travers tout ce que nous vivons, nous percevons la présence de Dieu, son action, sa fidélité. Nous découvrons son projet fou d’amour pour ce monde. En quelque sorte, nous avons été choisis pour voir l’invisible et le partager !
Impossible alors de nous installer, car l’amour est toujours nouveau. Notre capacité à nous émerveiller sera le signe que nous ne sommes pas du monde.
Soeur Marie-Laetitia Youchtchenko, d’après Jean 15, 18-21
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« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » Mais tu devrais savoir, Seigneur, que ce que tu me commandes est impossible ! Comment moi, un pauvre pécheur, pourrais-je aimer les autres comme tu m’as aimé ? D’autant plus que les autres ne sont pas nécessairement mes amis. Aimer ses amis, sa famille, ses proches, c’est déjà difficile, mais aimer l’autre, n’importe quel autre !
« Qui est mon prochain ? » demandait le docteur de la Loi à Jésus dans la parabole du bon Samaritain (Lc 10, 29-37). Celui dont tu te fais proche, répond Jésus. Ainsi, c’est à moi de commencer à aimer, de m’approcher de l’autre tel qu’il est jusqu’à donner ma vie pour les autres. Seigneur, tu veux que j’aime l’autre comme tu m’as aimé moi. Tu n’as pas attendu que je sois sans défaut, sans péché, mais tu m’as aimé d’un amour gratuit en me donnant tout ton amour, sans aucun mérite de ma part. Tu m’as aimé sans condition pour que, rempli de ton amour, je puisse aimer les autres de ce même amour qui vient de toi. Heureux ceux qui se découvrent aimés de Dieu avec leurs défauts et leurs péchés, ils pourront alors aimer les autres tels qu’ils sont.
Nul ne peut faire miséricorde s’il n’a d’abord expérimenté la miséricorde de Dieu à son égard. Sainte Élisabeth de la Trinité écrivait : « Demeurez en moi […] C’est là, tout au fond, que l’abîme de notre néant, de notre misère, se trouvera en tête à tête avec l’abîme de miséricorde, de l’immensité du tout de Dieu ; là que nous trouverons la force de mourir à nous-mêmes et que, perdant notre propre trace - c'est-à-dire, en s'oubliant -, nous serons changés en amour. » (Sainte Elisabeth de la Trinité, Écrits spirituels)
Frère Patrick-Dominique Linck, d’après Jean 15, 12-17
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Fanny est médecin urgentiste, rompue aux situations risquées. Elle va accoucher. Ça devrait bien se passer sauf que… le bébé est mal placé. Tout se complique pour la mère qui n’en peut plus, épuisée après trois jours de travail pénibles et qui finit par crier : « Je veux mourir » ! Quelques jours après, je découvre Adèle, joli bébé, souriante, paisible, dans les bras de Fanny.
Après les paraboles tirées de la vie courante pour nous parler du Royaume, Jésus recourt à l’image de la femme qui accouche… Quoi de plus beau qu’un petit être de chair, tout juste au commencement et pourtant déjà aboutissement, libération - ou plutôt délivrance - et promesse de vie… Il en va ainsi du message de Jésus.
Le Royaume de Dieu est un accouchement permanent, un passage, avec ses contractions, ses douleurs, une naissance et la joie après l’épuisement. Il est délivrance, libération.
En disant « Que ton règne vienne », n’imaginons pas qu’il advient sans douleur, mais il est promesse de vie pour ceux qui l’accueillent et vivent dans la foi et l’espérance.
« En ce jour-là, vous ne me poserez plus de questions. » Tout sera clair, évident… On ne se demandera plus : « Pourquoi le mal ? la souffrance ? la guerre ? le silence de Dieu ? » On vivra libres et confiants, comme ces enfants que Jésus donne en exemple pour comprendre le Royaume.
Frère Philippe Jeannin, d’après Jean 16, 20-23a
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Seigneur, voilà déjà plusieurs années
que Tu m'as fait ce don précieux de la vie.
Comme Tu le sais, j'ai connu des joies et des succès,
j'ai rencontré aussi des épreuves et des deuils.
Quand je regarde ce que j'ai vécu,
quand je pense à ce que Tu as été pour moi,
je voudrais des mots tout neufs
pour Te dire ma reconnaissance.
Maintenant que j'ai le loisir
de regarder davantage Ta création,
fais-moi goûter la douceur du soleil,
la beauté d'une fleur et toutes Tes merveilles :
ces œuvres de tes mains qui proclament ta gloire.
Seigneur, garde la joie dans mon cœur.
Quels que soient mes soucis et mes misères,
accorde-moi de ne jamais me replier sur moi-même
mais de penser plutôt à ceux qui m'entourent
et qui ont besoin comme moi d'une présence fraternelle.
Amen.
Tiré du livret "Je parle avec le Seigneur"