Dernier réveil, dans mon petit paradis, je profite à fond de ces derniers instants. Baignade, lecture, et peinture. Mes potes surfeurs rentrent de l’école. En Indonésie, les gamins ont la belle vie, car a midi l’école est finie. Ils viennent se poser à ma terrasse, je leur montre quelques photos de la session de la veille. Et je vois qu’Aldi, à plein de cicatrices sur les tibias et genoux, je lui demande « Suicide ? » « Yes i am a real surfer ». Il s’est ramassé plus d’une fois sur les coraux. Je salue les petits jeunes en espérant les revoir au plus vite. Edik vient me choper pour aller déjeuner à la grande maison, car Lara nous a préparé un très bon repat de poisson. C’est l’un de mes derniers repas que je vais mangé avec la main. Manger avec la main est très agréable et nous connecte directement aux aliments ingérés. Le principe est simple, on forme une sorte de boule de nourriture dans sa main, et que l’on pousse avec le pouce vers la bouche. Attention, on ne mange qu’avec la main droite, sinon ca pourrait être mal prit. La main gauche, représentant Satan (d’après Massoud) et ayant une utilité bien autre, se laver le popotin. Car dans ce pays, le papier toilette n’existe pas, donc il vaut mieux que chaque main conserve son utilité bien précise. Je voyage le plus local possible, oui, mais me passer de PQ, non, il ne faut pas exagérer. C’est l’heure de faire mes adieux, ou plutôt au revoir, à ma famille, car je reviendrai c’est sûr. Harris a oublié son permis de conduire au boulot, et pas de chance il y a un contrôle de flics sur la route. On décide donc d’aller à pied jusqu’à l’embarcadère. Le soleil est à son zénith. Il fait chaud, très chaud. Une dernière accolade à Harris, et je rentre dans mon fastboat. En trois heures, je me retrouve à Padang. Et comme à l’aller, je n’y passe qu’une nuit, pas grand chose à faire dans cette ville. J’ai rendez-vous avec un nouveau couchsurfer Dally. Je l’attends en admirant un dernier coucher de soleil Indonésien, en sirotant un dernier jus de fruit frais. Il n’est pas très ponctuel, avec 2 heures de retard, mais je ne suis pas pressé, j’ai tout mon temps. Il me demande ce que je souhaite faire, manger, pour changer. J’ai entendu parler de la spécialité locale le randang, il m’amène dans son resto favori. C’est un délicieux plat, à base de bœuf dans une sauce indescriptiblement bonne. Il est professeur à l’université et forme des infirmiers. Personnage très intéressant. On fait un tour par la nouvelle mosquée qui est gigantesque avec son architecture si particulière, reprenant le style des maisons de la région, avec les quatre coins pointus reliés entre eux par des demies lunes. On rentre chez lui, on partage le même lit, pour ma dernière nuit.
Au réveil, l’Indonésie pleure mon départ, et une très forte pluie s’abat sur la ville. Dally part au boulot et me laisse dans un mini resto le temps que la pluie se calme et que je prenne mon petit déjeuner. Au bout, de 3 heures la pluie se calme, je profite pour aller prendre mon bus pour rejoindre l’aéroport. C’est le début d’une très longue, la traversée de l’océan pacifique pour rejoindre l’Amérique centrale et la ville de Mexico. Ce périple va durer une quarantaine d’heures, avec pas moins de quatre vols différents. Mon premier avion, m’amène à Jakarta, la capitale indonésienne. Je vole cheap, Lionair, l’une des pires compagnies, réputé pour avoir toujours du retard. Je prévois large, car il est hors de question que je loupe mes vols suivants. Ca ne loupe pas, j’ai une bonne heure de retard, j’avais prévu une escale de 6 heures au cas ou. Lors de cette attente, je me mets un coup de pression, « Et si j’avais besoin d’un visa pour transiter par les états unis ?? » Et au bout de 2 minutes, j’ai la réponse, il me faut bien un visa, et même pour rester 3 heures sur le sol américain. Je commence à angoisser, car il faut faire la demande ESTA au moins 72 heures avant de rentrer sur le territoire, alors que j’y serais dans de 24 heures. Cela serait un comble pour un américain que de rester à la porte de son pays. Car je voyage actuellement avec mon passeport français. Qu’a cela ne tienne, je le fais immédiatement, je me connecte au site internet, rempli le formulaire, galère à scanner mon passeport, car la photo n’est jamais conforme à leur exigence, et valide la transaction par carte bancaire pour 14$. Et pour une fois ma CB ne me lâche pas. Je suis soulagé, de plus je reçois immédiatement un message « demande approuvé ». Il est si simple que ça de rentrer aux states ? Je me questionne, suis-je aller sur le bon site ? Est-ce un site pirate, dans le but d’extorquer de l’argent à de pauvre touriste de sachant pas comment si prendre ? Réponse dans quelques heures… J’entends mon nom dans les hauts parleurs, il est temps d’embarquer, il serait con que je loupe mon premier vol…
Jakarta, l’attente est longue. Je me prépare psychologiquement à passer le check-in, prépare les réponses à toutes les questions qu’on va me poser, car je sens que mon cas va poser des problèmes. H-3, le desk ouvre, j’y vais directement. Je donne mon passeport et montre mon e-billet.
- So you are flying to Mexico city ?
- Yes exactly
- Perfect, you are flying with different compagnies, so you will have to check in, again in Los Angeles. I can arrange that you take your bag directly in Mexico.
Jusqu’à la tout va bien.
- So you are flying via United states of America. Do you have ESTA visa ?
Premier test, est ce ca va passer ? Je montre la confirmation sur mon téléphone.
- Ok perfect. Where are you going after Mexico ? Do you have a flight ticket ?
Les choses sérieuses commencent. J’ai prévu le coup. Pour sûr, je n’ai pas de billet de sortie, car je ne sais pas quelle sera ma prochaine destination. Mais en fouillant sur le net, j’ai trouvé plusieurs sites qui pouvait me créer de faux billets, il suffit de renseigner un vol déjà existant et de générer le faux billets. Mais les résultats ne sont pas probants, ca fait trop fake et j’ai peur de ne pas pour passer le contrôle, voir même la douane. En recherchant davantage, je tombe sur un forum, qui parle d’une compagnie aérienne sur laquelle on peut bloquer pour 24h le prix d’un billet et comme j’ai de la chance, c’est une compagnie sud américaine. Je me précipite dessus, je m’invente une prochaine destination vers Cuba. Qui sait ? Et je reçois une magnifique réservation, qui ressemble à deux gouttes d’eau à un billet, sauf qu’il y a écrit solde restant en espagnol, les indonésiens n’y verront que du feu.
- Yes sure. I am going to Cuba. I am doing a world tour.
Avec un grand sourire, certainement un peu crispé.
- No problem if I take a picture ?
- Please go ahead.
Il part avec la photo au bureau d’à côté, avec la manager et une autre personne. Ils parlent, font des recherches sur internet, passent des coups de fils. Ces minutes paraissent des heures. Je ne sais pas où me mettre. Puis il revient à mon desk.
- It’s ok Timothy. Have a nice trip !
- Thanks so much
J’ai envie d’exploser de joie, de crier. Mais je reste impassible et je me dirige tranquillement vers le contrôle de sécurité. Il me reste deux bonnes heures avant mon vol. J’ai besoin de décompresser, je m’offre un bon massage d’une heure. So relax. Je rentre dans mon avion, première escale dans huit heures à…Pékin. Il m’aura fallu plus de deux mois pour arriver jusqu’à Jakarta et simplement quelques heures pour revenir à Beijing. C’est beau la technologie.
Mon escale de 4 heures à Beijing se passe son problème, je monte dans un nouvel avion en direction de Los Angeles, il est midi. Je vole envie avec la même compagnie AirChina, loin d’être la meilleure, mais ca me suffit amplement. Le vol dure une douzaine d’heure. Je pensais que l’avion allait traverser le pacifique, mais étrangement il reste au dessus de la terre pendant presque toute la durée du vol, on remonte jusqu’au nord de la Russie, pour rejoindre l’Alaska et redescendre vers la Californie. Je m’enchaîne trois films, et en français, ca ne fait du bien d’entendre sa langue natale, enfin presque. Impossible de dormir. Pourtant il le faut, car je suis en train d’assister à un phénomène étrange, je suis véritablement en train de remonter le temps. Car je vais arriver plus tôt à Los Angeles que je ne suis parti de Pékin, car j’arrive le même jour à 9 heure du mat. Il est temps de vérifier si le visa que j’ai fait sur internet fonctionne ou si je vais rester bloqué à la frontière. C’est un des postes de frontière le plus moderne que j’ai rencontré. On commence à passer par une borne électronique, où l’on doit laisser nos empreintes digitales. Puis on passe devant un douanier, il me demande « Why are you going to Mexico, Timothy ? » Je réponds en plaisantant « Travelling, why not ? ». Sa réponse me déstabilise totalement « I am asking to question here ! » Je ne sais plus où me mettre et m’excuse. « I am joking, i am joking, Timothy ». Je rigole. Il me laisse passer. Ce sont des douaniers en détente. Je rentre sur le sol américain pour quelques heures, mon pays natal. Et directement je m’y sens comme chez moi. Un vrai choc de culture, entre l’Indonésie et ses femmes voilées, et les US avec ses femmes libérées portant des shorty. C’est un vrai melting pot culturel, un peu comme en France. Pas le temps de tergiverser, je dois m’enregistrer de nouveau, cette fois je ne passe même de contrôle de douane, pourtant je sors bien des US pour aller au Mexique. Moi qui pensais que les relations étaient tendues entre le deux pays, il faut croire que non. Je m’engouffre un gros burger américain. Et je m’envole pour une durée de 4 heures, qui est passée en 4 secondes, car je n’ai fait que dormir. Mon corps ne comprend pas trop ce qu’il se passe. Moi qui pensait que le jetlag était de la gnognotte...