Je me lève tôt, très tôt, comme tous les jours lorsque je dors à la belle étoile. Surtout qu’on m’avait prévenu que le Sheriff rodait dans les parages pour mettre des amendes à ceux qui dormaient sur la plage. Heureusement pas de Sheriff à l’horizon. Je débute la mission autostop Tesla. Cette voiture étant électrique, ma stratégie est d’aller sur les points de recharges Tesla, et de taper la discut’ avec les proprios pour entrer dans leur voiture. Il me faut rejoindre la ville d’Oxnard, c’est là bas qu’il y a le premier Superchargeur. Je commence à tendre le pouce sur le bord de la route pour aller jusqu’à cette ville. Et au bout de quelques instants, Rosa, me fait rentrer dans sa voiture. Elle trace à fond sur l’autoroute qui mène jusqu’à San Fransisco, ma destination terminale. Elle va jusqu’à Santa Barbara, mais je lui demande de me déposer à Oxnard. Me voilà face à 10 Tesla en train de charger. Je suis content de voir que la station n’est pas désertique. Une femme est dans sa voiture, je me rapproche de sa portière, et elle me fait un signe de la main pour que je m’éloigne, ça commence bien… Je me dirige vers une autre femme qui promène son chien « This is not my kind of things, but I am sure that someone will pick you up ». Je me pose, en attendant que les conducteurs reviennent de leur pause. Une famille arrive, mais la voiture est déjà blindée… Une autre femme « I am alone, It will not be a smart move to pick you up » Je commence à désespérer. Les voitures s’en vont les unes après les autres. Je pars faire un tour dans le centre commercial, et quelques minutes plus tard le parking est à nouveau plein. C’est fou comment les Tesla fonctionnent bien ici. J’essuie encore de nombreux refus. Il faut me rendre à l’évidence, mon plan est un peu trop ambitieux. J’abandonne mon rêve de traverser la Californie en Tesla et repars me positionner face à l’entrée de l’autoroute. Il est déjà 17h. Et même en autostop « traditionnel » personne ne veut de moi. Je commence à me demander où est ce que je vais bien pouvoir camper ce soir. C’est à ce moment qu’Edouard s’arrête et propose de me déposer dans la ville suivante de Ventura. J’accepte directement. Il me dépose sur le bord de la plage. Je discute avec un mec, qui vend des bracelet sur le bord de la plage, il est très cool, mais me prévient que ce n’est pas très safe que de dormir ici, quelqu’un a été assassiné il y a quelques temps, sans raison particulière. Il m’apprend à me servir de ma planche de skate comme d’une arme. J’étudie les différentes options envisageables. Je suis juste à côté de la gare, et un train ne va pas tarder pour aller à Santa Barbara. Je n’hésite pas longtemps et j’y vais. Dire que j’aurais pu arriver directement là bas, si j’étais resté dans la voiture avec Rosa… Je débarque à 23h dans une nouvelle ville, je suis crevé, mais il me faut repartir à la recherche de mon futur campement. J’ai l’impression que Santa Barbara sort directement d’un magazine de décoration, la ville est clean, belle et sent le neuf. Je suis un peu frustré, des panneaux interdissent de skater dans la rue. Mais je n’y prête pas attention. Et me dirige vers la plage avec mon gros sac à dos. Je décide de prendre à droite vers le port. J’avance aussi vite que possible, mais je pense que j’irais plus vite en marchant. Je tombe sur une plage, elle est à moitié éclairée, je n’ai pas la force d’aller plus loin et me pose dans un coin d’ombre. J’installe ma couverture de survie au sol et je m’enfile dans mon sac de couchage. Je me fais réveillé dans la nuit, une voiture est sur la plage, je tente de me dissimuler tant que possible. Je m’endors à nouveau et me réveille au petit matin complètement mouillé, rosée ou légère pluie, je ne sais pas trop. Je prends un petit dej et me m’attarde pas trop. On est samedi et la ville commence doucement à se réveiller. Joggeur, cycliste, et quelques sans abris. Je repars vers le centre ville et cherche un supermarché pour faire quelques courses. Je m’arrête également au MacDo, avec regret, car depuis quelques années j’ai complètement arrêté d’y manger, mais pour des raisons budgétaires, j’ai craqué, presque tous les jours j’ai le droit à quelques McChicken pour 1$. Il est l’heure de poursuivre ma route vers le nord. J’installe en bordure d’autoroute. Et ca mord très rapidement aujourd’hui, Austin et sa copine me prennent dans leur Van. Malheureusement, ils ne vont pas très loin et me dépose quelques kilomètres plus loin à une intersection. Il n’y a absolument pas de passage ici. Je ne suis pas vraiment sûr d’avoir fait un bon choix. Pour faire passer le temps, en attendant les quelques très rares voitures, je développe doucement mes qualités de skateur. C’est alors, que Victor arrive, un hispanophone, il me dépose un peu plus loin. J’avance 20km par 20km, alors que je souhaite en faire 200km pour rejoindre Monterey. A ce rythme là, il me faudra encore quelques jours. Puis Luis, un architecte, qui va prochainement voyager en Europe, m’avance de quelques kilomètres. Puis Mike me dépose à San Luis Obispo. Impossible de bouger de là, et il me reste encore plus de cent kilomètre pour rejoindre mon objectif. J’en ai marre d’être au bord de la route, je me dirige vers la gare pour voir si un train ou un bus peut m’avancer. Pas de chance, le train vient de partir. Prochain départ demain matin. Il me faut trouver un nouveau lieu pour dormir. Je commence à fatiguer de dormir à l’arrache tous les jours, j’envoie un message à Luis, l’un de mes autostopeur, qui doit rejoint des potes dans la soirée. Mais mon téléphone est doucement en train de me lâcher depuis quelques jours, et rend définitivement l’âme aujourd’hui impossible de le charger et donc de lire la réponse. Tant pis, je vais devoir me démerder en solo, je me rends dans un parc, car pas de plage dans cette ville. Je me trouve quelques arbres et m’installe à la tombée de la nuit. La nuit est très fraîche, heureusement que j’ai conservé mes collants, bonnet et écharpe, dont je ne me suis pas servi depuis l’hiver dernier.
On est dimanche, je laisse tomber l’autostop, pour me déplacer en bus, mais forcement ce n’est pas le meilleur des jours pour voyager en transport en commum, le service est vraiment minimum. Je prends un bus municipal pour rejoindre la ville de El Paso de Robles, j’ai une heure d’attente, je vais me poser dans un parc où il se déroule un évènement autour du vélo avec un concert de musique, c’est parfait pour faire passer le temps. Je prends un nouveau bus pour me rendre à Salinas, puis encore un autre pout Watsonville et encore un dernier pour rejoindre Soquel. Une longue journée de transport, pour retrouver la chaleur d’une famille. Après avoir laissé quelques messages sur couchsurfing, Lizzie et Ian, sont les seuls à avoir répondu positivement à ma requête. Et ils m’ont gentiment proposé de venir chez eux quelques jours. J’ai très rapidement compris que nous serions sur la même longueur d’onde, malgré notre différence d’âge. Ils m’accueillent dans leur charmante maison, et me font faire la visite des lieux. Je me sens déjà comme chez moi. La maison est toute mimi, et le jardin coloré. Ils ont deux enfants, Nathan, 15 ans et Ryan 18 ans. C’est une famille de globetrotteur, ils ont voyagé en vélo à travers l’Europe, et l’Australie avec leurs enfants en bas âge. Lizzie est professeur de ballet et Ian est écologiste à la retraite. Mais retraite très active car il ne peut pas s’arrêter de faire, faire et faire. C’est un fan de sport, et un aventurier de l’extrême. C’est le Mike Horn californien. Lizzie nous prépare un magnifique repas, accompagné d’une bonne bière. Un vrai plaisir. J’en avais vraiment marre de manger de la merde. On se retrouve dans le jardin, autour d’un feu de camp à nous raconter nos histoires. Ils me parlent du programme des prochains jours et j’en salive d’avance. Ce soir je dors dans un lit, un plaisir de retrouver ce confort.
Lundi, Ian me propose une sortie en canoë en mer. On prépare les embarcations, et on les installe sur le toit de la vieille Volvo. Le matériel est un peu vieillot mais devrait tenir le choc. Il y a un peu de vent, ce qui ne nous effraye pas. On se lance à contre courant. On longe les falaises, on navigue sur des tonnes d’algues, ce qui effrayerai mon cher cousin Eliot. On croise d’étonnantes variétés d’oiseaux. On est heureux. Ian me propose un petit challenge, faire le tour d’une grosse roche. Une sorte d’île. Le passage semble étroit, mais faisable. La mer est forte, et les vagues présentent. On fait le tour et arrivons dans une petite crique. On y croise une otarie. La mer est de plus en plus forte, ce qui me déséquilibre est le fait tomber dans l’eau gelé. Je remets le canoë à l’endroit, remonte dessus et perd à nouveau l’équilibre. Je renouvèle l’opération à mainte reprise, mais le résultat est toujours le même. Je finis à l’eau. Je suis congelé et tremble de tout mon corps. Ian me propose d’aller jusqu’au petit bout de plage, le canoë est certainement rempli d’eau. Ce qui était forcement le cas, on l’a vidé de quelques dizaines de litres, ce qui rendait la stabilité impossible. J’ai très très froid. Je cours, je saute pour me réchauffer. Pour le retour, on échange nos canoes. Le sien est un peu plus moderne mais moins stable. Le retour est plus rapide car nous avons le courant avec nous. Ian me propose un dernier challenge, passer sous une arche. « Let’s Go ». Il s’élance, juste après une grosse vague, il a mal calculé sa trajectoire et se fait projeté contre la paroi, ce qui renverse son canoë. Un partout. Je passe presque sans encombre et je suis content de retrouver notre plage de départ. Ian, en a pas eu assez et plonge dans l’eau pour faire un peu de body surf. Un turque me demande s’il peut emprunter le canoë, j’accepte volontiers. Il s’éloigne un peu, et n’a pas l’air très alaise. Il se fait renverser par une vague. Il croit voir un requin et abandonne tout le matériel en pleine mer. Je n’en reviens pas. Je me vois obligé de replonger dans l’eau gelée pour récupérer le canoë. « Give me five Ian » on se félicite pour cette belle sortie en mer. On rentre pour une bière bien méritée. Autre bonne nouvelle de la journée, mon téléphone marche à nouveau, ce qui a toujours été le cas, c’était simplement la câble de mon chargeur qui était mort, alors que je venais de m’en acheter un nouveau au Bélize.
Aujourd’hui je propose à Ian de l’aider à construire sa cabane dans les arbres. Moi, qui rêve d’en faire mon métier. On se retrouve avec Ryan et Ian, à 7 bons mètres de hauteur, à travailler sur la toiture de la maison. On pose une couche isolante pour que la pluie ne pénètre pas dans la future maison. Il reste encore pas mal de boulot avant de pouvoir dormir dans la cabane, mais je suis convaincu que le résultat final sera une vraie œuvre d’art. Cette homme de ne peut pas s’arrêter. Il est increvable. Après avoir donné la classe de mathématique à son plus jeune fils, on enchaine par une grosse partie de tennis. Kafelnikov Vs Safin! La sagesse de l’ancien contre la fougue du plus jeune. Le niveau est bon et on s’envoie quelques bonnes patates. Il m’impressionne de plus en plus. J’espère pouvoir avoir la même énergie à son âge.
Je m’y plait bien dans cette famille, j’avais initialement prévu d’y rester que deux jours, mais je vais encore prolonger ce beau séjour.