Le combat de trop 16 / 06 / 2011

Les naufragés se réveillèrent à l’aube du troisième jour avec différents projets en têtes. Hector et Firmin montèrent sur le pont principal pour poser des lignes de pêche ingénieusement bricolées. Ils usèrent de fil de cuisine, d’épingle à nourrice de l’infirmerie et guise d’hameçon et d’appâts… peu conventionnels. C’est en fait à Emile qu’incomba la funeste tâche de prélever les orteils du cadavre pourrissant d’Alice. Une idée avait germée dans sa tête la nuit même et il se dépêcha de la mettre en œuvre en allant trouver un stéthoscope à l’infirmerie. Il pensait avoir une chance de trouver la combinaison du coffre de Valentin Masu avec cet instrument, mais il échoua totalement dans son entreprise… en marchant par mégarde sur l’outil. C’est en voyant le soleil déjà au zenith que les investigateurs comprirent qu’ils avaient probablement dû se lever tard. Ils décidèrent donc d’œuvrer aux tâches les plus pressantes avant la nuit en se séparant comme à l’accoutumer en deux groupes. Hector et Firmin confectionnèrent à nouveau plusieurs litres de liquide potable tandis que Dad et Emile préparaient les funérailles sommaires de la chimiste amputée. Ils eurent le temps, juste avant le couché du soleil, de dégoter trois lampe a pétrole encore en état de marche. L’indien et l’archéologue avait longuement réfléchi à l’échec de leur guet-apens nocturne et se demandaient s’ils devaient à nouveau prendre le risque de tendre un tel piège. A ce sujet Dad rappela que le mystérieux agresseur avaient tout de même tué Alice sans la moindre hésitation. Emile lui rétorqua qu’il aurait d’autant moins de pitié pour eux. Comme il fut donc décidé de renouveler l’expérience, une lampe fut attribuée à Frimin et Hector qui retournaient au poste de commandement, l’autre resterait suspendu au-dessus de l’eau pour tenter d’amadouer une hypothétique proie, tandis que la dernière resterait éteinte sur les lieux de l’embuscade.

Encore une fois avant de s’endormir, les passagers du poste de contrôle réalisèrent un relevé radiogoniométrique de leur position, et évaluèrent à trois jours le temps qui les séparait du Lampshire. De leur côté, l’indien et l’archéologue s’apprêtaient à passer une nuit plus fructueuse que la précédente fusse au prix de précieuses heures de sommeil. C’est peu après minuit qu’un clapotis inhabituel retint l’attention du pisteur Haïda. Il présuma tout d’abord que les étrangers devaient sortir de l’eau au bout du couloir mais, en l’absence de signes supplémentaire, il faillit se résoudre à ranger cet événement au rang des fausses alertes lorsqu’une ombre, qui longeait silencieusement les murs lui apparu. Sous l’effet de la surprise, il relâcha machinalement la pression que sa main exerçait par crispation sur la poignée de la porte qu’il maintenait entrebâillée. Le bruit attira instantanément l’attention de l’intrus qui en referma le battant avec une vivacité stupéfiante. Le claquement sec réveilla Emile que Dad mit au parfum de son mieux en quelques gestes. L’archéologue, très remonté contre les meurtriers d’Alice, sorti son colt et fit signe à l’indien de lui ouvrir la porte. Dad s’exécuta promptement et Emile s’avança prés à en découdre. A peine son arme eut-elle franchie le pas de la porte que l’étranger se précipita pour le désarmer. Il y parvint avec une facilité déconcertante. Pris de cours par une telle dextérité, le Français tenta d’esquiver son agresseur en battant en retraite dans la cabine mais il comprit son erreur lorsqu’il ressenti un choc violent au niveau du thorax. Il pensa en premier lieu qu’on lui avait tiré dessus mais il comprit sa méprise en apercevant la fumée sortir du canon de la Winchester de Dad. L’indien avait à peine éraflé l’inconnu tandis que celui-ci venait de perforer la poitrine d’Emile d’un puissant coup de couteau. Le scientifique, pris de panique par la tournure des événements, pensa à sortir son luger qu’il avait gardé sous sa veste mais sa nouvelle blessure avait transformé ce geste simple en mouvement impossible. L’agresseur, qui s’agrippait férocement à lui, en profita pour replonger une seconde fois sa lame dans la plaie tout juste ouverte. Dans le même temps Dad essaya de porter un coup de crosse à l’inconnu mais la mêlée était telle désormais qu’il échoua à nouveau. Voyant l’homme achever son ami devant ses yeux en plongeant cette fois-ci son arme dans le cou du Français, l’indien fut pris d’une rage folle. Il rechargea en un éclair, épaula, et envoya une balle traverser l’abdomen du tueur qui s’effondra a son tour sur sa victime.

Le bruit des coups de feu eût au moins deux effets notables. Dans un premier temps il sembla à Dad qu’ils avaient mit en fuite le deuxième agresseur. D’autre part, les Français, tirés de leur sommeil, s’étaient tous deux vu trébucher de la plus pitoyable des manières en se précipitant au secours de leurs amis. Ils mirent de ce fait plus de trois minutes à rejoindre la cabine de l’embuscade en claudicant. La scène épouvantable qu’ils découvrirent alors les bouleversa. L’archéologue gisait là, couvert de sang tandis que l’Indien s’évertuait à contenir le précieux liquide en appliquant ses mains aux endroits les plus meurtris. Constatant rapidement la situation, le naturaliste se précipita à l’infirmerie, récupérer de quoi panser les horribles blessures. Mais il fût trop long. De retour à la cabine, le pouls d’Emile faiblissait dangereusement. Il ne put rien faire d’utile… jusqu’à ce que l’idée leurs viennent de tenter une folie pour l’époque: une transfusion. N’ayant plus rien à perdre, les investigateurs misèrent le tout pour le tout. Firmin, qui était instinctivement plus compatible avec l’archéologue que Dad, accepta de raccorder son bras à celui de son ami. Usant de stout son savoir faire, Hector parvint miraculeusement à transfuser Emile et à stabiliser son état. L’opération dura le restant de la nuit et au petit matin du quatrième jour, on dû délivrer Firmin sous peine de le tuer lui aussi. L’archéologue agonisait, personne ne pouvait dire combien de temps il survivrait ainsi. Il fallait impérativement nourrir Firmin pour qu’il reprenne des forces et Hector fut parfaitement soulagé de trouver qu’une anguille d’un bon kilo avait mordue à l’hameçon durant la nuit. L’agresseur, ligoté sur une chaise se réveilla quelque instant avant de succomber définitivement a sa blessure. Les investigateurs tentèrent de l’interroger mais n’en tirèrent rien. Il se contentait de marmonner une litanie de termes incompréhensibles. Sur son corps on voyait un peu partout de multiples scarifications et d’étranges appendices de chairs dégageant une odeur de vase repoussante. Firmin, le détaillant du regard reconnu l’un des « neveux » d’Emile qu’il avait aperçut la veille du « passage » à bord du bateau. Ils décidèrent que le bougre n’était pas même bon à servir d’appât pour la pêche et le jetèrent à la baille promptement. Dad, inspectant les lieux prés de l’escalier d’accès aux secondes classes, retrouva un étrange casque qui avait dû appartenir au bourreau d’Emile. Le ramenant à ses amis scientifiques, il fut déterminé qu’il devait s’agir d’un scaphandre de plongée d’une forme et d’une technologie inconnue.