Le dernier coup de feu résonna un instant dans la vallée et avec lui s'envola le fracas du combat. Chaque guerrier, le souffle court, cherchait du regard une ultime menace. Un long hurlement déchira cet instant solennel. C'était Huados qui laissait éclater son ardeur guerrière pour célébrer la victoire. D'autre braves l'imitèrent mais le temps était désormais compté pour les blessés. Il fallait agir prestement et gérer les priorités. L'archéologue demanda à Firmin de tenir le coup, le temps qu'il obtienne le concours de deux guerriers pour aider Dad à descendre de la corniche le naturaliste toujours inconscient. Lorsque les blessés furent à l'abri dans le village réinvestit par ses habitants, le chef indiqua à tous que la bataille avait coûtée la vie à huit Kungahaï dont la mémoire serait célébrée lors d'un Pow-wow le soir même. Emile restant pragmatique, toujours aussi curieux, proposa au Wekneeg d'aller jeter un oeil à la position qu'occupait le capitaine lors de la bataille.
Sur place, les deux hommes découvrirent, comme ils le subodoraient, de magnifiques fusils de précisions estampillés "Withworth". Ils étaient malheureusement pour la plupart inutilisables. Aussi Emile ne put en récupérer que deux et une dizaine de cartouches. Sur la dépouille du capitaine, l'archéologue récupéra une longue-vue, un sabre et une étrange clef frappée d'un logo "CNR" et d'un N° de série: Rs-7823.
Cet objet insolite intrigua Emile qui pensa devoir le conserver pour le soumettre à une expertise ultérieure. En continuant leurs fouilles sur les autres lieux d'affrontement, les deux hommes essayèrent de retrouver un soldat encore en vie. Se faisant ils s'avisèrent qu'il serait judicieux de s'emparer de trois uniformes militaire canadiens ainsi que de leur fusils de dotation, des Winchester modèle 92 en calibre 38. C'est finalement au tout dernier moment, sur la position surélevée où ils avaient eu raison du canon, qu'ils parvinrent a découvrir un soldat survivant. Il étouffait noyé sous le sang poisseux de deux cadavres de ses amis déchiquetés par l'explosion des caisses d'obus. Cherchant à le sauver du probable courroux des Kungahaï, ils installèrent le blessé à l'abri des regards et lui portèrent les premiers soins, sans toutefois parvenir à le ranimer. Sur ces entrefaits, Firmin et Hector qui avaient été isolés dans une cabane, comme en quarantaine, recevaient leurs premiers soins. Les femmes du village s'occupaient d'eux avec application, suivant à la lettre les instructions du chamane. Il avait fait disposer une marmite pleine d'eau et de plantes sur un feu qui transformait la pièce où ils étaient en une sorte de sauna thérapeutique. Firmin assommé par les effluves chaudes, mais passablement soulagé de la douleur qui irradiait dans sa cuisse entaillée, arriva a discuter un instant avec Yagun. Il essaya de lui parler de la morphine. Sans trop en dire, évoquant un pressentiment, il informa le chamane du danger que présentait ce médicament et son pourvoyeur. Yagun resta sceptique, semblant accorder une grande confiance à l'homme qui les fournit habituellement, bien que celui-ci ai du retard dans sa dernière livraison. Ce fait était, semble-t'il, inédit depuis une trentaine d'année que la fourniture s'effectuait sans délais. Firmin tenat de mettre ce fait en rapport avec l'assaut des militaires, pour amener l'indien a envisager une complicité de son fournisseur, mais Yagun refusait obstinément d'accabler Finger. Comprenant à qui il avait à faire, l'ethnologue, abattit une dernière carte en proposant d'interroger son ami médecin lorsqu'il émergerait de sa léthargie. Apprenant ainsi au chamane que son compagnon inconscient était médecin, il pu lire sur son visage un sentiment mêlé de joie et de confusion. En effet, Hector s'était présenté à lui, la veille au bord du lac, comme étant naturaliste. Mais c'était un détail, et dans la situation actuelle Yagun requis de déplacer le Français dans une autre maison où il s'évertuerait à le tirer de son coma pour pouvoir bénéficier de ses connaissances.
Alors qu'il redescendait de la corniche avec Emile, Dad aperçut les silhouettes de trois cavaliers pénétrant dans la vallée. Sortant sa longue-vue, il reconnu Finger, son disciple Anton Cooper, et l'indien Maïam qui les accompagnent partout: Gatgaïnan. Conscient du danger, les deux hommes établir un rapide plan d'action: Emile se rendit en couverture à Skung Gwaï pour protéger ses amis tandis que Dad se mêla aux Kungahaï charriant les cadavres de soldats. Lorsqu'il arriva sur le champ de bataille Finger sembla blêmir et dissimula difficilement sa colère. Il interrogea des indiens sur se qui venait de se passer et se dirigea vers le village. Dadjingits le devança à la rencontre du chef Kaïganis. Il tenta de le mettre en garde mais se heurta à la même incompréhension que Firmin avait rencontrée peu avant avec Yagun... Les kungahaï semblaient définitivement confiant à l'égard de l'homme de main d'Avranche. Cependant, lorsque celui-ci aborda la chef, il dû répondre de son retard. Ce à quoi il consenti en expliquant que de son côté, son chef, à savoir Noël, avait eu maille à partir avec des étrangers et qu'il avait été obligé de lui prêté main forte. Désireux d'éclaircir la situation, Kaïganis organisa une réunion dans sa maison entre Finger, Dad et Emile. Howkan, servant d'interprète, fut aussi surpris que l'archéologue lorsque celui-ci entra dans la cabane et que Finger se précipita à sa rencontre pour le serrer dans ses bras, comme l'aurait fait un homme retrouvant un vieil ami. Emile le repoussa sans ménagement, mais il ressenti, au delà du malaise, que Finger venait de faire quelque chose... sans qu'il pu toutefois dire quoi. Le rustre souriait maintenant, il persistait a se comporter comme si tout cela était une farce, une sorte de coutume occidentale étrange. Pour dissiper le malentendu engendré par le comportement du gangster, Emile l'accusa ouvertement d'avoir commandité l'attaque du village. Il répondit que c'était une absurdité, qu'il ne connaissait pas ces militaire et qu'il n'avait aucun intérêt a faire une chose pareil. Il persista même lorsque Dad évoqua le campement des militaires dans la zone de chasse qu'il préserve des visiteurs à Illcillwaet. En fait il retourna même l'accusation à demi-mot, tout en continuant a afficher un large sourire. Son stratagème, qui consistait à semer le trouble dans l'esprit des Kungahaïs, semblait assez bien fonctionner et il demanda au chef de bien vouloir le laissé seul un instant avec les étrangers pour qu'il règle ce problème qui était une histoire entre occidentaux. Kaïganis accepta, tout comme il acquiesca lorsqu'avant de quitter la pièce avec Howkan, Dad lui proposa en Haïda de bien vouloir demander à Howkan d'espionner la conversation de dehors. Dés que les Kungahaï furent sortis, le visage de Finger s'assombrit. Il félicita tout d'abord les deux hommes d'avoir réussis à neutraliser un pareil atout d'Avranche en la personne de Shaler et de ses hommes. Ils s'enquit ensuite de leur employeur puisque dans son esprit il était inconcevable qu'ils aient agit autrement que pour de l'argent. Il ne reçu aucune réponse. Pire encore Emile l'appela par son vrai nom "Jack Morton". Cela le plongea dans une fureur noir et il leur expliqua qu'ils avaient intérêts à rapidement venir remettre à Avranche ce qu'ils lui avaient dérobé, sans quoi leur ami comptable, il parlait de Lepoil, ne survivrait pas longtemps. Il quitta brusquement la cabane, sans prendre le temps de répondre à la question que l'archéologue venait de lui poser sur la morphine qu'il livrait aux indiens.
Pendant ce temps, plongé dans les tréfonds de son subconscient, Hector tentait de s'extraire de son coma. Il se savait en train de rêver, aussi n'avait-il pas vraiment peur. Mais enfermé dans son esprit, il s'imaginait perdu au fond d'un puits obscur, grelotant dans une eau noir et glacée. Cherchant sa lampe torche, il se trouva presque aussitôt en train d'ausculter les parois du puits qui lui semblaient praticables, car suffisamment riches en aspérités. En observant brièvement la sortie, dans le faisceau lumineux, il vit un ours occupé à l'observer se débattre au fond du trou. Tâchant de ne pas prête attention à l'absurdité de la situation, il commença a se hisser hors de l'eau. Il grimpa deux mètre et glissa, retombant dans le liquide froid et ténébreux.
Anton et son mentor, suivie de Gat remontèrent sur leur chevaux. Kaïganis se résolut à les laissé partir, manifestement inquiet de la tournure que prenait les événements, il se sentait incapable de déterminer à qui accorder du crédit. C'est à ce moment, alors que les trois cavaliers venaient de quitter Skung Gwaï, qu'Emile s'aperçut qu'il n'avait plus son couteau de survie sur lui. Il compris instantanément que Finger portait bien son surnom et qu'il le lui avait dérobé lors de l'étrange accolade. Il se précipita hors du village pour l'intercepter. Toujours accompagné de Dad, il le héla en lui demandant son bien. Morton refusa de lui rendre son couteau, prétendant qu'il ne savait pas de quoi il parlait, et continua sa route. L'archéologue, plus déterminé que jamais, sorti le fusil Martini-henry qu'il avait dérobé à Avranche, l'épaula et tira sur le cheval du gangster. La pauvre bête s'effondra et Finger, désarçonné, éprouva quelque difficultés à se relever. Rouge de colère, il se précipita sur Emile, relevant ses manches comme pour régler l'affaire aux poings. Lorsqu'il fut à sa hauteur, l'archéologue lui décrocha un violent coup de crosse en plein visage qui le laissa sur le carreau un instant. Anton et Gat, tenus en respect par Dad s'approchèrent doucement mais n'intervinrent pas. Le Wekneeg, tout en continuant de les menacer de son fusil, cria "Au voleur!" dans sa langue natal. Si bien que lorsque Finger se releva, il avait Kaïganis en face de lui. Le chef vint lui demander des comptes, et celui-ci dû se résoudre à rendre son couteau à Emile. Il savait, en effet, que le chef saisirait cette opportunité pour trancher entre la bonne foi des uns des autres. Il tenta maladroitement de faire passer cela pour une autre blague, mais lorsqu'Emile pris le chef à témoin, celui-ci sembla excédé et mit brusquement un terme à cette visite. Il dit à Finger qu'il rejetait sa demande et qu'il lui demandait de partir. Le gangster obtempéra en montant sur la croupe de la monture d'Anton, tandis que Gat tirait le cheval blessé par ses rênes. Le Français et son ami regagnèrent quand à eux SkungGwaï avec le chef et les Kungahaï curieux qui avaient suivis l'altercation de loin. Intrigué par l'offre que le chef disait avoir refusé à Finger, Emile appris que ce dernier avait fait demandé par ses hommes, lors de la réunion, à ce qu'on lui remettent le prisonnier blanc. Il parlait de Jarvis bien entendu.
Mais tréve de bavardage, Kaïganis, s'inquiétait de plus en plus du déblaiment du champ de bataille qui n'avançait plus et demanda à Dad et Emile de bien vouloir aider les siens a creuser une fosse pour ensevelir les cadavres des militaires. Se mettant à la tâche, les deux hommes remarquèrent qu'a proximité de la rivière où ils étaient en train de creuser, se trouvaient tout un ensemble de structures de bois effondrées et vermoulues, comme s'il avait eu un important chantier en ce lieu par le passé. Ceci étant, l'état de délabrement de l'ensemble laissait présager un abandon très lointain. Plusieurs dizaines d'années a n'en pas douter.
Pendant ce temps, Firmin, toujours alité, se faisait à nouveau changer son bandage. Il regardait la jeune femme travailler patiemment à prendre soin de lui. Se faisant il remarqua un coup d'oeil furtif qu'il reconnu pour être de ceux qui rosissent les joues plus pâles de ses conquêtes habituelles. Il réalisait alors ce qui aurait sauté aux yeux de n'importe quel indien. Cette jeune femme seul s'occupait de lui alors que lorsqu'Hector était encore là les femmes se relayaient pour pratiquer les soins. Il s'inquiéta de ce que la situation pourrait engendrer comme malentendu et s'efforça de mettre de côté ses réflexes de courtoisie élémentaire. Il se surpris lui-même de l'aisance avec laquelle il y parvint et répondit aux oeillades de la Kungahaï avec tout le dédain dont il se sentait capable. Et ce n'étais pas facile pour lui car, se faisant, il comprenais qu'il perdait un atout majeur pour créer des liens avec cette tribu dont il convoitait tant les moeurs.
Lorsque, sur la berge de la rivière, la fosse fut rebouchée, l'indien et le scientifique retournèrent sur la corniche voir leur prisonnier survivant. Il n'avait toujours pas repris conscience aussi décidèrent-ils de le descendre au village. Il allait s'agir de tenter de faire accepter aux Kungahaï d'héberger et éventuellement de soigner un ennemi dans la perspective de l'interroger. La tâche s'annonçait ardue.
Joué avec David, Arnaud, Louis et Gabriel le jeudi 27/05/2010.