Grondin-Gamache Cécile

« Ce soir, il faut que quelqu'un soit plus heureux à cause de moi ». C'est le but que se donne chaque matin à son éveil, Madame Cécile Grondin Gamache, artiste peintre, autodidacte. Une fois le soir venu, elle n'oublie pas de faire le bilan de sa journée.

C'est un 15 août (1930) à Sainte-Marie de Beauce, après avoir eu cinq garçons, que Albert Grondin et Léda Bisson accueillent enfin dans le monde leur première petite fille : Cécile. Cinq autres garçons suivent avant que Mme Grondin ne redonne naissance à trois filles et un garçon.

Étant enfant, Cécile Grondin Gamache amasse tous les objets qu'elle peut afin d'essayer de les faire revivre. Elle affirme le plus sérieusement du monde à sa mère que lorsqu'elle sera grande elle fera sûrement quelque chose de bien. En attendant, elle apprend à travailler en secondant sa mère et effectue ses études primaires et secondaires à Ste-Marie.

Mariée très jeune en (1948) à Maurice Gamache,(1923-2011) elle donna naissance à deux garçons et une fille décédée à 9½ mois lors d'un incendie à leur propriété.

Elle continue, au fil des ans à entretenir son grand rêve de petite fille, celui de raconter l'histoire laborieuse de nos ancêtres beaucerons. Afin d'exprimer ce qu'elle ressent, elle essaie toutes les sortes d'artisanat, du crochet au macramé. Mais c'est dans la peinture qu'elle trouve enfin satisfaction. Épaulée par un mari et des fils « en or », elle commence à peindre.

Pendant ce temps, elle occupe tout de même la fonction de sacristine de 1956 à 1984 et elle peint. Ses plus belles leçons, elle avoue les avoir prises au contact de ses parents et la meilleure école pour elle, ce sont les personnes âgées. C'est d'ailleurs à la suite de leur récit sur la vie d'autrefois qu'elle produit ses toiles. Les vieillards sont pour elle une " lampe allumée " sur le passé.

Elle rend visite le plus souvent possible aux personnes âgées avec qui elle entretient une relation d'amitié. En 1985, Mme Grondin Gamache a d'ailleurs produit un livre de recettes anciennes amassées auprès de personnes âgées. Tous les profits du livre sont allés aux personnes âgées du Centre d'accueil de Sainte-Marie. Les plats d'autrefois, Imprimerie Bô-Modèle inc., Scott-Jonction, 1985.

Sa première exposition, c'est Robert CIiche qui la pousse à l'organiser. Depuis, elle a à son actif 14 expositions solo faites dans tous les coins du Québec, à Ottawa et en Europe, plus précisément à Paris. Elle ajoute à cela 15 expositions de groupe dans la plupart des provinces du Canada jusqu'à Yellowknife au Yukon. Il ne faut pas oublier non plus sa participation à plusieurs livres et sa représentation dans 15 musées du Québec.

DÉMARCHE

J'aimerais peindre comme les Oiseaux chantent, à la façon des grands maîtres. Je ne travaille pas d'après nature, mais j'aime la voir a travers la fenêtre de mon studio. Lorsque je dis que je puise mon inspiration dans les choses et les êtres qui m'entourent, j'insinue que tout, les arbres, les fleurs, la fumée peut devenir un point de départ. C'est en ce sens qu'il existe toujours dans mes tableaux un rappel de la nature.

Pour peindre, il faut d'abord cultiver son esprit en acquérant une technique et en la maîtrisant comme un outil. De là, le peintre évolue vers ce qu'on appelle un style non pas comme une signature à exploiter, mais un trait vraiment personnel issu de recherches et de « Connais-toi toi-même ».

La formation que j'ai reçue n'étant pas spécifiquement orientée vers une éventuelle production artistique, cela m'a permis, je crois, d'emprunter les avenues de l'art avec l'état d'esprit d'un explorateur dont le fil conducteur serait la représentation, évitant dans ma quête , du mieux que je pouvais, les pièges que sont les dogmes du modernisme. À travers de cette recherche dont le sujet demeure figuratif, j'essaie d'atteindre une dimension psychologique de l'être.

Je propose donc à celui qui regarde de participer à l'interprétation de l'oeuvre, comme une espèce de réflexion, le tableau agit en tant que miroir de la conscience en renvoyant le spectateur a ses expériences et a ses souvenirs. Je ne peux pas peindre que pour peindre, j'ai toujours peint pour m'exprimer, pour trouver ou retrouver quelque chose, pour découvrir des histoires des personnages, des lieux dans la mémoire. Tant de personnes ont existé avant nous. On charrie tellement de choses, et pourquoi pas des images, non seulement dans notre enfance, dans le subconscient, mais peut-être avant aussi. Des images qui nous ont été transmises et transportées par nos ancêtres les plus lointains. Je crois que l'homme se dépasse par le passé autant que par l'avenir. On passe quatre-vingt ans sur terre ; il y a tellement en avant, il y aura tellement après. On ne sait pas tout ce qu'on peut trouver. C'est cette pensée qui m'aide beaucoup à vivre et qui m'aide à travailler. On me demanda un jour : pourriez-vous m'expliquer exactement ce qu'est la peinture pour vous ; je répondis : c'est pour faire revivre les sentiments que je ressens à l'intérieur et à les rendre vivants. Je n'aime pas les définitions, ce qui me contraint, les mots à la mode, les clichés, les barrières. Peindre m'a donné l'occasion par chaque tableau d'ouvrir une nouvelle fenêtre. Alors vient le temps où on ne sait plus très bien si on est à l'intérieur ou à l'extérieur de son tableau. Le tableau n'est plus que l'aboutissement, la concrétisation de ce qui a été regardé, soupesé, fouillé, remis en question, senti de mille façons et je me demande si l'acte de création n'est pas surtout dans cette sorte de prise de possession.

Je crois beaucoup à la lumière ; c'est elle qui donne la forme, la couleur et ce qui est extraordinaire c'est qu'elle est constamment en mouvement. Alors on ne saisie plus que des instants. Créer m'a donc forcée à regarder de plus près, de plus loin, sous différents angles et c'est ce changement modulé par la lumière qui me fascine.

Je ne dissocie pas la vie et le travail. Voir, sentir, écouter fait partie essentiellement du travail. J'aime beaucoup voir dans ce qui m'entoure ce que j'avais cru inventer et qu'on ne peut pas vraiment prétendre inventer ce qui existe déjà.

Quant au sens de ma démarche... Elle a été plus une recherche humaine du bonheur, du plaisir et du savoir. Elle est devenue figurative un peu par la force des choses. Je ne saurais pas comment la qualifier autrement. Il ne m'appartient pas de faire d'autres commentaires, d'autres s'en chargeront beaucoup mieux. On devient international quand on a bien transmis notre message national.

On devient éternel quand on a bien transmis la mentalité de notre peuple.

Cécile Grondin Gamache