Identité, mémoire et musique : la musique andalouse comme ancrage identitaire pour les Juifs du Maroc vivant en Israel

Joseph Chetrit, Université de Haifa

Déracinés, déculturés et délégitimisés dans les trois premières décades de l’Etat d’Israel, les centaines de milliers de Juifs du Maroc qui se sont installés en Israel se sont sentis obligés de se forger leur propre identité israélienne et changer leur image tant à leurs propres yeux qu’aux yeux des autres Israéliens. Au lieu des processus de dépossession et d’abandon général des valeurs culturelles communautaires qui étaient les leurs au Maroc, les Juifs venant de ce pays ou de parents marocains ont été amenés à cultiver tout en les rénovant différentes traditions et activités communautaires qui étaient tombées en désuétude aptrès leur arrivée en Israel et d’en faire des ancrages identitaires majeurs et réparateurs.

C’est le cas de la musique andalouse, à travers ses performances hébraïques dans les chants des Piyoutim et Baqqashot comme dans ses interprétations dans la langue originale, l’arabe médiéval. Les nombreux cercles de Piyoutim, les nombreux artistes interprètes, dont la plupart sont nés ou sont arrivés très jeunes en Israel, et les nombreux musiciens qui jouent cette musique dans différents ensembles d’amateurs ou de professionnels prouvent qu’il ne s’agit pas là d’un simple engouement passager pour ces traditions musicales mais bien d’un fixateur identitaire qui a permis aux Juifs du Maroc vivant en Israel de mieux vivre et de mieux assumer leur identité israélienne.

La communication traitera des différentes étapes de ce ressaisissement identitaire à travers la récupération de la mémoire communautaire de la musique andalouse, des conditions socio-culturelles et socio-historiques qui l’ont rendu possible, des agents culturels qui l’ont animé ou promu, et des différentes expressions et manifestations que ce phénomène connaît de nos jours.