Boghar

Carte d'EM. (S/C Louis)

Boghar et Boghari

BOGHAR (mai-juin-juillet 1962)

Ancien camp d'instruction du 1er Régiment de Tirailleurs Algériens

Les derniers mois d'existence du 4 e RT sont assez confus à cause de la mise en place de l'organe liquidateur du régiment. Beaucoup de cadres se sont vus affectés dans d'autres compagnies afin de rationaliser la dissolution. Il n'est plus question pour la majorité d'entre eux de participer à des opérations de protection de postes, ni même à des opérations de secteur. Les nombreux déplacements sur routes vers les dépôts seront le lot quotidien. Les mutations des cadres et les changements de statut des tirailleurs FSNA ( Français de Souche Nord Africaine) qui se sont opérés dans les compagnies d'origine après le 20 mars 1962 (date du cessez le feu) font que le corps est devenu inopérant. De nombreux FSNA ont opté pour la nationalité algérienne. Certains engagés, ont poursuivis une carrière dans l'Armée française. Ils ont été rapatriés sur le champ en métropole. Il ne restait plus que de rares appelés avec la pléthore de cadres pour liquider le régiment à contre cœur.

Boghar : l'hôpital et l'église. Boghari : le centre ville desservit par la RN 1 et le chemin de fer

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2 ème Compagnie

La 2e Compagnie du 4e RT a séjourné près de BOGHARI au camp des KOUBAS d'août à octobre 1961. Elle avait une double mission : le Massif du MONGORNO et la garde et les patrouilles à BOGHARI. Elle s'installe ensuite à la ferme Foulon près de Berrouaghia jusqu'en avril 1962. Elle prend enfin ses quartiers à Boghar jusqu'à la dissolution du régiment le 31 mai 1962.

Camp des Koubas.

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6ème Compagnie

Lettre adressée par le Capitaine Techer depuis Saint-Maixent où il était en stage de capitaine lors de la dissolution de la 6°compagnie. Cette lettre sera distribuée à tous les tirailleurs lors du rapport. (Lt Latournerie commandant par intérim la 6ème Cie)

" Je suis resté longtemps avec la 6e Cie près de Rocher Noir pour effectuer des postes de surveillance et recevoir des FSNA de passage vers les Forces Locales. Un soir un incident aurait pu devenir une catastrophe. L'adjudant de compagnie cours vers moi : "Mon Lieutenant ils vont se tuer". Je vais jusqu'à la chambre où un caporal ancien para complètement ivre insultait les FSNA; en face un caporal-chef FSNA avec sa canne le tenait à distance. Après deux "Garde à vous" sonnants le calme est rétabli, je mis au trou l'ex para un peu égratigné.

Le chef de corps avait diffusé une note ordonnant d' enchaîner les armes des tirailleurs qui n'étaient pas sentinelles lors des missions nocturnes. Cette note me sembla contraire à l'honneur des soldats. Je pris la parole lors du rapport, expliquais que depuis trois ans nous avions un climat de confiance entre européens et FSNA, donc je n'appliquerai pas cet ordre, mais précisais que j' autorisais de descendre celui qui déserterait avec son arme. Dans ma compagnie il n'y eut aucune désertion alors qu'elles furent nombreuses dans les autres quand les armes étaient rendus aux tirailleurs au retour de mission. Entre ces missions, la caisse noire de la compagnie me servit à payer le cinéma à tous les tirailleurs. Nous fîmes du tourisme, visitant le magnifique jardin d'essai d'Alger où les singes firent la joie des tirailleurs. Nous allâmes également nous baigner à Chénoua-Plage. Ce site touristique avait été prévu comme siège du Régiment à son retour de Tunisie, mais ce siège n'eut d'existence que dans les dossiers du Ministère ! Nous eûmes en contrepartie les sables et les rochers de l'Atlas Saharien !

Je ne suis retourné à Boghar que pour la dissolution du Régiment où le des Services administratifs comptait avec précision les matériels rendus à l'Intendance qui allaient être immédiatement brûlés !!!

On m'a dit qu'il a eu une dépression nerveuse, il y a de quoi !

A la dissolution du régiment le chef de corps organisa un repas de corps au cour duquel il laissa en dépôt les fanions des compagnies, je reçus celui de la 6 que je remettrai plus tard au capitaine Técher. "

(Lt Latournerie commandant par intérim la 6ème Cie)

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CCS

Témoignage du sergent AD, secrétaire du major à la CCS :

"Le 14 mai 1962, la CCS s'installe à BOGHAR ; "J’occupe toujours les fonctions de Major de Compagnie.

BOGHAR est un petit village au sud de BERROUAGHIA à plus de 1000 mètres d’altitude. Le camp est sous les pins. Les bâtiments sont en dur. Dommage que nous n’ayons pas d’eau, car ici, chaque « chalet » est équipé de douches, lavabos, w.c ; le vrai confort, quoi !

Avec ma vache à eau, j’improvise une douche et avec moins de 10 litres d’eau par jour j’arrive à faire ma toilette.

Le 12.06.1962 nous fêtons le repas de Corps. Autrement dit, le repas d’adieu. Nous sommes plus de 150 officiers et sous-officiers. Inutile d’insister sur le nombre de bouchons sautés.

La fin de notre régiment est maintenant programmée. Nous ventilons le personnel sur différentes unités. Pour ma part, je suis désigné pour rester à BOGHAR jusqu’au 15 juillet 1962 au sein de l’organe liquidateur. (hommes et matériel)

Le 14 juin 1962, je suis à ALGER afin de trouver un container nécessaire au déménagement d’un de mes chefs muté en Allemagne. Ici, il vit avec son épouse et ses quatre gosses.

A Alger, je dois faire jouer mes anciennes relations professionnelles pour dénicher enfin l’objet « rare » en ce temps d’exode, un container ! La mission est accomplie !

Le 18.06.1962, j’ai connaissance de ma nouvelle affectation. Je suis muté à la 270 ème Compagnie de circulation routière à MEDEA, au nord de Berrouaghia, que je dois rejoindre le 12 juillet 1962. Je change d’armes et passe « Tringlot » ne suis plus sergent, mais « Maréchal des logis », c’est assez pompeux, n’est-ce pas ?

Entre-temps, grâce à un tour de passe-passe j’obtiens une permission exceptionnelle. Le Colonel GOUBARD , certainement pour me remercier du travail accompli durant la liquidation du régiment, au lieu et place du Major, me signe la permission en blanc, me laissant le soin de mentionner le nombre de jours. N’exagère pas me dit-il !

Fin juin, je décolle d’ALGER en caravelle (j’ai décidé de ne plus prendre le bateau) pour une « perme » d’une vingtaine de jours.

J’effectue également le retour en caravelle et le 22.07.1962, je suis à BLIDA où la 270ème CCR a fait mouvement depuis MEDEA. "

Le sergent AD, relate la suite de son séjour en Algérie dans le site de la 270e CCR

Voir photothèque de la CCS.

Boghar et son kouba à droite de l'image

L'entrée de la caserne à Médéa, à gauche : le bureau de la garnison, au fond le bureau des vérifications des comptabilités des Territoires du Sud.

L'entrée de la caserne à Médéa, à gauche : le bureau de la garnison, au fond le bureau des vérifications des comptabilités des Territoires du Sud.

1 er Cie

Boghar en mai - juin - juillet 1962 : la 1ère Compagnie du 4e RT sous les ordres du capitaine Gabet. (Voir la photo de Boghar ci-dessus avec le Kouba)

Le Sergent-chef Louis se souvient, qu' après avoir quitté la Compagnie d'Appui installée à la ferme MALVAL, près du col de BEN CHICAO au nord-est de Berrouaghia, d'être muté à la 1 ère compagnie du 4e RT, à Boghar le 01 mai 1962 . Fin Avril 1962, la CA fait un bref séjour à Courbet Marine, regroupée comme d'autres compagnies de l'EMT1, autour de celui-ci, pour une dernière opération administrative de ventilation des FSNA ( Français de Souche Nord Africaine). Louis pense que la CA a dû être dissoute à l'issue.

Louis occupe alors l'emploi de gérant du dépôt de carburants commun au 3e REI et aux éléments du 4e RT implantés à BOGHAR. Le 3e REI préparait son départ pour la Guyane, alors que le 4e RT organisait sa dissolution.

" A mon arrivée, nous logions dans la Kouba qui trônait sur un tertre rocheux. Pièce unique propice à la promiscuité ou s'étalaient les bureaux et les lits de camp. Par la suite, je fus un privilégié par rapport aux autres cadres qui logeront plus tard sous la toile de tente ou pour certains dans des baraques en tôle. La température était insupportable. Au dépôt de carburants, mon bureau sis à l'entrée servait aussi de chambre à coucher. Cela présentait aussi un inconvénient majeur d'être isolé de la vie des régiments installés plus haut dans une ancienne garnison occupée précédemment par une compagnie d'instruction du 1er RTA, mais pas seulement, il y eut aussi le 11 ème Choc. Mon seul regret, l'impossibilité à fréquenter les anciens du 4e REI, connus au Maroc qui se trouvaient mutés au 3e REI."

A Boghar au mess commun du 3e REI et du 4e RT, nous avons remis le cadeau de départ à l'attention de notre colonel GOUBART, un superbe tapis (4X2) et un magnétophone dernier cri qui coûtait bien à lui seul la solde mensuel d'un sous-officier.

En quittant BOGHAR définitivement, j'ai regardé une dernière fois ces pauvres fellahs ( femmes et hommes) employés de force à la réfection de la route sous le contrôle de leurs libérateurs, des fellagas armés. Dans l'échange du regard on lisait une tristesse infinie. Ce peuple avait-il compris que l'on les abandonnait à une destinée peu radieuse. Car comme nous, ils ont été trahis par une politique mal négociée dont les accords ont été bafoués par les vaincus-vainqueurs. La suite des événements le prouvera car le 117e RI a quitté la région d'Alger que le 26 décembre 1962. Il a été témoin des vicissitudes engendrées par la mise en place d'un gouvernement Algérien et de l'évacuation forcée des européens. Peu à peu l'Algérie se vidait des troupes françaises". J'apprendrai plus tard qu'à Boghari, des massacres de la population et des joutes entre bandes rivales du FLN ont été perpétrées sans retenue, ajoutant à cela une indifférence totale du pouvoir en place."

"Le 4e RT est dissous le 30 mai 1962. Les mutations tombaient sans pour autant qu'elles soient effectives. Pour mon cas, affecté au II/117e RI à compter du 01 juin 1962, je n'ai rejoint ce corps que le 17 juillet 1962 à HUSSEIN-DEY, pour cause d'emploi provisoire à la garnison de MEDEA où j'étais chargé de la vérification des registres comptables des unités dissoutes des Territoires du Sud (foyer, mess etc...).

C'est à MEDEA que j'ai retrouvé le Chef de bataillon Genet ( mon ancien commandant de l'EMT1 du 4e RT) avec un bras en moins. C'est aussi à MEDEA où j'ai assisté sur la grande place à la liesse populaire pour l'Indépendance de l'Algérie ( 05 juillet 1962). Ma présence en militaire n'a provoquée en rien une réprobation de la part des musulmans. Certains même me souriaient comme pour signifier que la page était tournée. A vrai dire, les forces d'encadrement du FLN se trouvaient ailleurs que de ce côté. Le 4e RT est dissous le 30 mai 1962. Les mutations tombaient sans pour autant qu'elles soient effectives. Pour mon cas, affecté au II/117e RI à compter du 01 juin 1962, je n'ai rejoint ce corps que le 17 juillet 1962 à HUSSEIN-DEY, pour cause d'emploi provisoire à la garnison de MEDEA où j'étais chargé de la vérification des registres comptables des unités dissoutes des Territoires du Sud (foyer, mess etc...).

Pour voir la suite de la nouvelle affectation, du sergent-chef Louis, 117e RI 7e Cie Hussein-Dey

Fin de l'épopée du 4e RT