1962-19 mars

Accord du 19 mars 1962 sur le "Cessez-le-feu".

source

Quelques extraits significatifs d'un respect unilatéral.

L'armée française rentre aux casernes, l'article 5 prévoit qu'elle stationne de façon à éviter tout contact avec les forces du F.L.N. Un décret secret du gouvernement leur indique : "l'armée française ne pénétrera pas dans les zones fixées pour le stationnement des forces F.L.N. Tout contact avec les forces F.L.N. sera évité".

"Voilà une algérie nouvelle, libre, prospère, heureuse, qui trouvera dans son indépendance les ressources de sa fierté, dans sa coopération avec la France l'exaltation de ses souvenirs et les raisons de ses espérances."

C'est dans cette superbe langue de bois que jean Morin, ministre résident à Alger, annonce aux français d'algérie leur mort future dans d'horribles tortures ou leur exil. (la valise ou le cercueil).

En algérie les militaires reçoivent avec étonnement la circulaire qui leur donne les consignes précises : Elles sont contenues dans un T.O. du 18 mars 1962. Le point essentiel en est que l'Armée française s'interdisait d'entrer dans les zones d'implantation du FLN. Mais, en fait, il convient d'indiquer que la capacité d'intervention de nos troupes était plus limitée encore. Elle se bornait aux cas de légitime défense, pour tout ce qui concernait l'atteinte aux biens publics et privés. Qu'on en juge: "Au cas où des éléments regroupés de l'ALN (ou du MNA) se livreraient à des opérations de pillage, saccage, destruction, harcèlement et embuscades sur nos forces et nos installations ou sur des biens publics et privés nos forces ne devront riposter que pour assurer leur propre défense et celle de nos installations tout autre action ne pourra être engagée que sur réquisition par l'autorité civile". (...)

Ces nouvelles directives, l'esprit qui préside à leur mise en oeuvre, et la difficile réalité sur le terrain vont aboutir à un décalage aigu entre ce qui est envisagé et le vécu des populations. L'effervescence dans le camp indépendantiste, le développement du gangstérisme vont bénéficier de la retenue des troupes françaises et de l'inexistence de l'Exécutif en matière d'ordre public. Une des conséquences du cessez-le-feu sera de laisser dans une position délicate les Européens dont les appartements, les fermes, les voitures sont occupés ou confisqués par centaines, bientôt par milliers. La vague d'occupation des logements de certains quartiers périphériques d'Alger est une conséquence directe de la situation créée par l'application des directives Debré. La conception du cessez-le-feu qui a prévalu est fondamentalement restrictive. Certes, elle limite de façon importante les possibilités de heurts entre les nationalistes et l'Armée mais uniquement, en invitant cette dernière à une attitude de non-intervention de principe. Rien de tout cela n'est à proprement parler nécessaire ou indispensable, surtout si l'on se souvient que les forces françaises ont vaincu le FLN sur le terrain. Ces directives reposent sur la conception, qui va se révéler parfaitement illusoire, que les nationalistes algériens sont un partenaire fiable, responsable, honnêtement désireux d'appliquer les Accords. Conséquence: les textes qui précisent la conception du cessez-le-feu et son orientation de base ouvrent un boulevard aux éléments contrôlés et incontrôlés du FLN.(...).

La politique c'est quoi ?

"Lors de l'émission "Droits d'inventaire" de Marie DRUCKER du mercredi 3 décembre 2008 à 22h sur FR3, en présence de Max GALLO et du journaliste de Libération Jean-Dominique MERCHET, Jean-Pierre CHEVENEMENT, officier SAS durant la guerre d'Algérie, a confirmé avoir été le témoin du massacre de ses propres moghzanis en Algérie le soir de la "paix" d'Evian du 19 mars 1962. Ce massacre avait fait la "une" du "Parisien Libéré" du 21 mars 1962. (...) Le 11 novembre 1997, "Jeune Pied-Noir" avait écrit à Jean-Pierre CHEVENEMENT, alors ministre de l'Intérieur, pour qu'il témoigne et ouvre les archives du crime d'état du 19 mars 1962. Une lettre restée sans réponse. A l'époque, le ministre avait préféré se taire. Jean-Pierre CHEVENEMENT a aussi été le témoin des enlèvements massifs d'européens du 5 juillet à Oran, où lui même faillit être enlevé ! (cf. son livre "Le courage de décider" - Robert Laffon - 2002) Pourquoi, Jean-Pierre CHEVENEMENT n'a-t-il pas porté secours à ses Moghaznis désarmés et abandonnés ? Pourquoi n'a-t-il pas alerté la presse et l'opinion publique des crimes dont il a été le témoin direct ? Pourquoi n'a-t-il pas ouvert les archives sur ce "crime d'état" ? Au nom de quels principes, au non de quelle morale a-t-il préféré se taire durant plus de vingt ans, jusqu'à son premier témoignage lors de l'émission de François Gaspard " 500.000 harkis à la recherche de leur histoire".

" Il sera mis fin aux opérations militaires et à toute action armée sur l'ensemble du territoire algérien le 19 mars 1962 à 12 heures". Cet accord ne sera que partiellement respecté, en raison d'un certain nombre d'incidents temporaires et locaux. Il annoncera la fin du conflit, connu sous l'appellation de Guerre d'Algérie.

Il en va tout autrement du second article :"Les deux parties s'engagent à interdire tout recours aux actes de violence collective et individuelle. Toute action clandestine et contraire à l'ordre public devra prendre fin."

S'il est vrai qu'à partir du 19 mars, une certaine convergence a rapproché le FLN et les forces spécialisées pour mettre fin à l'activité des commandos de l'O.A.S., ce qui découlait de l'application même de cet article 2, le FLN a continué à ordonner et à organiser des activités clandestines. Il en a résulté des troubles divers venant s'ajouter à ceux que suscitait l'O.A.S. Ceci a entraîné des violations répétées de l'accord particulièrement de l'article 3 (les forces du FLN devaient se stabiliser à l'intérieur des régions correspondant à leur implantation du moment) tandis que de nombreux enlèvements étaient perpétrés ce qui violait de surcroît la Déclaration des Garanties jointe à l'accord.

Précisons en outre que sous la dénomination générale d'Accords d'Evian, se trouvent rangés, avec l'accord de cessez-le-feu, un décret d'amnistie de toutes les infractions commises avant le 20 mars 1962 (sauf pour l'OAS, non signataire, et dont les actes sont juridiquement considérés comme de droit commun) et une Déclaration Générale.

Cette dernière se subdivise en parties détaillées. Elles sont au nombre de trois : l'une concernant l'organisation du référendum d'autodétermination, l'autre l'organisation des pouvoirs publics jusqu'à l'autodétermination et la troisième, mais non la moindre, une Déclaration de Principes. Cette déclaration énonce les règles devant assurer la protection de la minorité européenne dans le cadre du futur état algérien indépendant, les règles de la coopération entre les deux pays, celles devant présider à la mise en valeur du Sahara, et à la coopération culturelle. Cette partie de l'accord ne fut pas moins violée que les précédentes.

Le GPRA fit savoir que les déclarations relevaient du droit interne français. (Note manuscrite jointe au Dossier Rose du Quai d'Orsay.) (et donc ne s'imposaient pas à eux).

Cet "exécutif " est une institution éphémère, exclusivement destinée à préparer le scrutin d'autodétermination. Il n'a eu d'existence que du 19 mars au 3 juillet 1962. Il a été créé et mis en place par le gouvernement français lui-même et ne pouvait tirer sa très provisoire légitimité que de lui. Il ne pouvait représenter que lui. C'est d'ailleurs le gouvernement français qui a désigné son président en la personne Abderahmane Farès, grand notaire algérois, précédemment président de l'Assemblée algérienne.

Devant l'opinion tant métropolitaine qu'internationale, il proclamait: la guerre est finie, je me suis débarrassé de cette "boîte à chagrin" !... La manière importait peu.

En revanche, son effet moral sur les Français d'Algérie fut, on l'imagine, sans ambiguïté. "Grande a été (leur) amertume de n'avoir en rien été associés à des négociations qui engageaient leur avenir et celui de leurs enfants. La roue de l'histoire est passée sur eux en les ignorant. Cent trente ans d'efforts, de souffrances, de sacrifices, de bonheur aussi, étaient effacés d'un coup ".

L'armée arrête ses comptes au 19 mars, il y a eu depuis le premier Novembre 1954, 2788 tués, 7451 blessés et 375 disparus parmi la population européenne. Rien qu'à Oran en un jour, le 5 juillet 62, il y aura 3000 morts, on admire les effets fabuleux du cessez le feu.

Extrait d'un tract FLN daté du 20 mars 1962 (région Rouiba)

" (.....) Rappelez-vous que, quand nous serons indépendants et dans un minimum de temps, nous combattrons les trois cents kilomètres que nos ancêtres ont envahi en France. Voici les limites, Poitiers, Saint-Étienne, Lyon, les environs des Alpes et les Pyrénées. Toutes ces terres et ces villes sont celles de nos ancêtres. Après la guerre d'Afrique du Nord, nous allons envahir les trois cents kilomètres qui nous appartiennent et les ports de Toulon, Marseille, Bordeaux. (...)".

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4e RT

Le relevé ci-dessus est partiel voir partial, il est à mon avis sincère dans ses sources et dans son développement, on ne maîtrise pas tout, loin s'en faut, à chacun de porter son jugement sur cette affaire manifestement mal engagée. j'invite le lecteur à aller plus loin dans la lecture du site. Il existe d'autres écrits sur ce sujet pour se forger une opinion. J'invite aussi les anciens du 4e RT à exprimer leur ressenti lors de la déclaration du "Cessez-le-feu".

Commentaire du lieutenant Técher alors commandant la 6ème Compagnie en poste près du col de Benchicao, (Nord de Berrouaghia).

"Selon le JMO de la 6ème compagnie, le dimanche 18 mars 1962, comme le samedi 17 mars 1962, nous étions en opération dans le Mongorno. Pour le lundi 19 mars 1962, il précise : matin RAS. Après, il n'y a plus rien. Nous avons dû partir pour Alger le 20 ou le 21 mars 1962.

A mon avis , la perspective du départ pour Alger nous a fait ignorer ce que pouvait être véritablement cette journée."

Le sergent-chef Louis de la CA de l'EMT1, en poste à la ferme Malval près du col de Benchicao (nord de Berrouaghia) relate :

" Je séjournais en perme dans le Vaucluse quand la nouvelle du "cessez-le-feu" me parvint par les ondes. J'avais comme voisin un garde mobile retraité et avec lui échangions nos impressions sur ce sujet. Nous étions d'accord qu'il fallait que ce conflit s'abrégeât au plus tôt dans les conditions les plus acceptables. Il nous fallait abandonner l'idée d'une Algérie française et laisser les Algériens maîtres de leur destin. Cependant, pour avoir vécu la triste fin des militaires français après l'indépendance du Maroc, je voyais déjà se profiler la même réplique tout aussi honteuse et inadmissible de la part d'un gouvernement à laisser son Armée s’empêtrer dans un chaos indescriptible. Nous serons encore une fois les seuls à respecter les accords.

Les jours suivants, une amertume me minait. Après réflexion et en connaissant un peu plus les termes de l'accord, j'avais cette impression d'être bafoué. Nous étions militairement les vainqueurs sur le terrain et voilà que l'on a négocié une part belle avec ces vaincus. Depuis ce jour j'ai porté un regard plus suspicieux sur les hommes politiques afin de les découvrir tels qu'ils étaient. Manifestement on bradait l'Algérie quelles que soient les conséquences. Rentré dans mon unité en fin de mois (d'autres événements tragiques se sont produits entre temps), le travail de secrétaire comptable et les heures passées à assurer le sécurité du poste m'avaient évité de songer aux répercussions inévitables. Le calme de la région fit aussi qu'il n'était point nécessaire de s'inquiéter. La vie militaire suivait son cours comme par le passé. Enfin pour moi, car les cadres de notre compagnie mêlés à la regrettable affaire du 26 mars 1962 à Alger, portaient en eux le poids considérable d'un passé indicible. Plus rien n'était comme avant, ambiance cassée, retrait d'une vie de camaraderie, chacun vivait sa réclusion volontaire et traînait son boulet. Première conséquence d'une traîtrise politico-militaire qui ne s'est dévoilée que bien plus tard, car l'information ne circulait pas. En avril - mai 1962, ces camarades, je ne l'ai plus revus. Ont-ils été mutés ou tout simplement bannis ou encore quittés l'Armée volontairement ?"

Les mois suivants apportèrent leur lot de déceptions, de misères et d'abandon. Nos politiciens complètement dépassés par les événements aggravèrent une situation plus qu'inextricable en l'occultant. Les militaires, confrontés à la réalité du quotidien, s'aigrirent davantage et demeurèrent indifférents quant au malheur engendré à une population "pieds noirs et arabes" qui avait tant espérée."

Muté en juillet 1962 au 117e RI près d'Alger, Je vivrais les derniers six mois en Algérie dans une insouciance coupable. Voir le site ci-dessous pour connaître la fin de cette aventure mal engagée".

117e RI,rubrique:1962

Commentaire d'un sergent appelé, secrétaire à la CCS alors en poste à Berrouaghia :

"Effectivement le Capitaine BRADY avait raison. Il connaissait trop les "horreurs" de la guerre pour les avoir déjà vécues en Indochine.

Il savait ce qu'il adviendrait en Algérie après le départ de l'armée. De GAULLE, aussi le savait, c'est pourquoi il a tardé à signer les accords d'EVIAN. Il voulait d'abord une victoire militaire totale sur le terrain. Cependant, il s'est lourdement trompé sur la "loyauté" de ses interlocuteurs.

Personnellement, je pense qu'il est arrivé trop tard dans ce conflit. Le mal était fait et les "événements" à venir, irréversibles.

Des deux côtes, les "purs" ont été écartés par trop de "politiques", à l'orgueil démesuré, avides de pouvoir, âpres au gain, prêts à toutes les compromissions (du côté français, je pense notamment aux porteurs de valises .... ).

Pour ces "politiques" là, les militaires ne sont que de la "chair à canon" et les victimes civiles , des dégâts collatéraux tout simplement."

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