Des relations glaciales en Arctique, à l’image de la scène internationale ?
L’état des lieux des politiques et stratégies des États riverains pour assurer leur sécurité nationale.
Des relations glaciales en Arctique, à l’image de la scène internationale ?
L’état des lieux des politiques et stratégies des États riverains pour assurer leur sécurité nationale.
Par Audric Subra, étudiant en 1ère année (FG)
CIA World Fact Book, Domaine public
Un enjeu stratégique dans la conjoncture
La guerre russo-ukrainienne, amorcée en février 2014 avec l’annexion de la Crimée, suivie du conflit dans le Donbass avait déjà affecté les relations interétatiques dans le Grand Nord. Or, après quelques années d’apaisement des hostilités militaires, le mois de février 2022 a marqué un retour au premier plan des hostilités russo-ukrainiennes sur la scène internationale. Les enjeux de ce conflit ne se limitent pas à l’Europe de l’Est : ils remettent en jeu la ligne de contact entre Moscou et l’OTAN, notamment via l’Arctique. Les récentes déclarations de Donald Trump sur sa politique de défense nationale ravivent l’intérêt pour cette région. Les menaces à répétition proférées à l’encontre de ses voisins, notamment d’annexion envers le Canada et du Groenland inquiètent. Tous ces éléments prouvent une chose : l’Arctique devient un nouveau théâtre clé des rivalités géopolitiques au sein de l’hémisphère nord.
L'Arctique, un trésor énergétique
Du haut de ses 21 millions de kilomètres carrés, l’Arctique est reconnu par le droit international comme une zone maritime gelée, occupant 6 % de la surface terrestre. Les géographes délimitent la zone arctique au 66e parallèle Nord. C’est aussi un territoire convoité, qui représente des enjeux géostratégiques de taille nous permettant de légitimer tout questionnement sur l’utilité de l’étude des relations interétatiques dans le Grand Nord.
D’après l’United States Geological Survey (USGS) qui a publié en 2017 un rapport intitulé The 2008 Circum-Arctic Resource Appraisal, l'Arctique renferme une incroyable densité de réserves d’énergies fossiles. Selon eux : « Le CARA a estimé que 44 à 157 milliards de barils (BBO) de pétrole conventionnel non découvert et 770 à 2 990 milliards de pieds cubes (TCF) de gaz naturel conventionnel pourraient être trouvés au nord du cercle arctique […]. Le CARA a rapporté que le pétrole conventionnel récupérable non encore découvert équivalait à 1,5 à 5 ans d’approvisionnement au rythme actuel de consommation mondiale de pétrole […]. Le montant des ressources gazières estimées pour l’Arctique, en revanche, représente environ 30 pour cent du gaz conventionnel mondial non découvert, ce qui représente environ 27 ans d’approvisionnement au rythme actuel de consommation mondiale ». Selon le rapport, c’est pas moins de 13 % des réserves de pétrole non découvertes qu’abriterait l’Arctique.
Cette estimation est perçue par de grands groupes pétroliers comme sous-évaluée, ce qui suscite naturellement l’intérêt de ces compagnies d’extraction pétrolières et gazières. La manne financière ne peut que s’avérer énorme alors que 84 % de ces ressources seraient situées dans les ZEE de cinq États riverains (Canada, Russie, USA, Norvège et Danemark). « Les endroits géologiquement les plus susceptibles [...] sur le versant nord de l’Alaska, au large des mers des Tchouktches et de Beaufort aux États-Unis, dans le delta du fleuve Mackenzie au nord-ouest du Canada, au large du nord-est du Groenland, ainsi que dans le nord de la mer de Kara et dans la Sibérie occidentale adjacente en Russie. ».
Cependant, le rapport ajoute qu’une production à grande échelle de gaz naturel dans l’Arctique « est irréalisable en raison des faibles prix du gaz, en grande partie à cause de l’exploitation de ressources gazières non conventionnelles en Amérique du Nord. Par conséquent, la plupart des réserves de gaz arctique non découvertes ne seraient probablement pas exploitées dans un avenir proche. ». En outre, l’Arctic Council souligne en 2022 que le développement d’infrastructures modernes d’extraction ne demeure pas suffisant pour exploiter de telles quantités dans des conditions climatiques extrêmes. Ces ressources comme le pétrole non conventionnel comme le pétrole de schiste, le gaz de schiste, le pétrole lourd, le gaz de houille et les hydrates de gaz représentent en effet des coûts non négligeables.
Outre les hydrocarbures, l’Arctique est riche en ressources halieutiques, on estime à 70 % des réserves de poissons blancs dans la zone, ce qui laisse imaginer les possibilités de développement de la pisciculture. En parallèle, selon le United Nations Environment Programme (UNEP, 2023), s’y cachent ressources minérales et terres rares comme le nickel, le cobalt, le lithium, l’uranium, etc. Concernant les terres rares, les nations qui en sont les plus dotées (90 % des réserves mondiales) sont la Chine (37 %), le Vietnam (18 %), le Brésil (17 %) et la Russie (17 %). A contrario, moins de 7 % sont situés dans des pays de l’OCDE, partagés entre l’Australie, le Canada, les États-Unis et le Danemark via Groenland. Il est presque devenu d’enjeu de défense nationale de posséder ces matériaux sans lesquels des modes de production d’énergies vertes, les technologies civiles et militaires ne pourraient être produites.
Changements dans la température moyenne à la surface
(1986-2005 à 2081-2100)
Les dynamiques géopolitiques qui tracent l'avenir de la région
Dès lors, il est central de saisir l’importance géostratégique de la région pour les nations qui cherchent à se moderniser, ou tout au moins se reconstruire, comme c’est le cas pour la Russie. Les sanctions occidentales dues à aux relations diplomatiques tendues avec Moscou renforcent son isolement à la fois économique et politique. Cela accroît en conséquence sa nécessité d’exploiter ses territoires pour atténuer ses pertes. Selon Jean-Michel Valantin, géopolitologue, « les champs de pétrole sibériens, (…) semblent être entrés dans leur phase de peak oil […] l’ampleur des changements en Arctique n’ont aucun équivalent ». En réponse, le Pentagone, le quartier général du département de la défense étasunienne s’est fixé des objectifs, pour renforcer leur présence et surveiller ces espaces. Cette situation entre dans le cadre d’un avantage technologique de taille, détenu par la Russie, face à ses voisins de l’Arctique, et sur lequel nous reviendrons plus tard.
Ce regain d’intérêt intervient alors que cet espace gelé fond, en proie au réchauffement du climat global, attisant des convoitises entre États côtiers. Le changement climatique entraîne une fonte accélérée des glaces en Arctique. Alors que la banquise pourrait totalement disparaître en été d’ici 2030 et ayant fondu de 40 % depuis les années 1970, la Triplice (USA, Europe, Chine) pourrait voir en cette catastrophe d’origine anthropique une façon de favoriser l’exploitation d’énergies et de multiplier leurs routes et débouchés commerciaux.
À cet égard, la Russie, le Canada, le Danemark, la Norvège, la Suède, la Finlande, l’Islande, les États-Unis et presque ou bientôt la Chine feront de cet espace de conquête un pôle incontournable dès lors que les passages du nord-ouest et du nord-est permettent de relier les pôles économiques majeurs. Ainsi, nous verrons quels sont les différents comportements et relations qu’entretiennent entre elles les grandes puissances nordiques face à ces questions inédites. À cet effet, nous tâcherons d’analyser la nature de l’enjeu et de nous demander dans quelle mesure pouvons-nous dire qu’à l’échelle locale, les relations entre États riverains de l’Arctique sont représentatives d’une situation mondiale en tension.
By Rickmouser45 - Own work, Vue aérienne de Prudhoe Bay, juillet 2018
Selon Christelle Calmels, doctorante au Centre de recherches internationales de Sciences Po Paris, l’Arctique présente un enjeu grandissant, phénomène marqué par l’arrivée des États-Unis au-devant de la scène régionale. Depuis la guerre froide, l’Alaska, qui fut un territoire longtemps oublié dans les stratégies de gouvernance américaine, s’est avéré un moyen d’accéder au Grand Nord ainsi que de créer une frontière avec la Russie. Depuis les années 70, avec la découverte de gisements à Prudhoe Bay (Nord de l’Alaska), un intérêt croissant a été observé. Pourtant, cet intérêt est largement à relativiser. Dans le contexte de la guerre froide, le Grand Nord représentait un intérêt défensif en cas de conflit nucléaire avec l’URSS, mais n’était que peu considéré comme un territoire représentant de réels intérêts économiques et géostratégiques. Le rapport de l’USGS et les transformations climatiques ont permis de bouleverser le rapport que les grandes puissances entretenaient avec le nord.
Moscou ou l'originel centre de la gouvernance du Grand Nord
« Notre tâche la plus importante est de transformer l’Arctique pour en faire la base de ressources de la Russie au XXIe siècle », Dmitry Medvedev, 2008, Président russe.
« Depuis 2001, la Russie semble définir et préciser sa stratégie géopolitique dans le Grand Nord. C’est à cette date que le gouvernement russe soumet à l’UNCLOS (United Nations Convention on the Law of the Sea) une requête d’extension de ses ZEE jusqu’au centre du pôle » explique Katarzyna Zysk, professeure associée au Norwegian Institute for Defence Studies d’Oslo. Bien que cette revendication territoriale ait été rejetée en 2011 par le comité scientifique de l’institution, les Russes ne cessent d’imposer leur présence. La révolution stratégique de l’Arctique russe est datée du 2 août 2007, et marque une réelle volonté de contrôle russe sur la zone arctique. C’est en effet à cette date que, lors d’une expédition cartographique (Arktika 2007), l’équipe scientifique a envoyé un bathyscaphe (un engin sous-marin capable de s’aventurer dans les grandes profondeurs) pour planter un drapeau russe au centre même du pôle Nord.
L’objectif évident du gouvernement russe est d’employer ses technologies pour affirmer sa présence et sa domination sur le territoire maritime. Ainsi, Moscou impose sa légitimité à exploiter ces territoires : « Cette image du drapeau russe est l’une des plus marquantes de la politique Arctique, dépassant de loin les autres symboles de la politisation de cette région » analyse Elena Wilson Rowe, professeure à l’institut d’études internationales norvégien. Jean-Michel Valantin, docteur en études stratégiques et sociologie de la défense, spécialiste de la stratégie américaine, et chercheur au CIRPES, quant à lui, voit en cet événement « le symétrique du geste des astronautes américains déposant un drapeau américain sur la Lune le 20 juillet 1969 ».
De ce fait, cet acte symbolique fait de l’Arctique un outil de soft power et de leadership. L’essentiel de la stratégie russe est de mener une action à portée internationale et ainsi, faire du Grand Nord une propriété privée, sous l’égide de Moscou. Cela sous-entend naturellement une tactique de dissuasion signifiant que nulle puissance étrangère ne peut pénétrer la zone détenue et surveillée par les forces armées russes. Cette action n’est pas passée inaperçue par le Canada, qui revendique, au même titre que la Russie, la souveraineté de la dorsale océanique de Lomonossov. En réaction, Ottawa a répondu par la commande d’enquêtes scientifiques de cartographie afin de déterminer que la dorsale est bien une extension de leur territoire.
Depuis 2007, la Russie a fait encore beaucoup de chemin en investissant de façon considérable dans des navires-brise-glaces. Moscou tire un grand profit de ces technologies, sans lesquelles l’accès maritime serait impossible, notamment en périodes hivernales. Aujourd’hui, c’est de très loin la nation la plus dotée, avec deux fois plus de brise-glaces que toutes les autres nations réunies. En 2023, on comptait environ 55 effectifs, dont certains en développement. Ainsi, les progrès en termes de technologies à la fois de navigation, mais aussi d’extraction et d’exploitation des ressources la placent à la tête du business nordique.
En 2015, la Russie revendique 1,2 million de km² en Arctique et lance la construction du plus puissant brise-glace à propulsion nucléaire du monde : Arktika. En 2016, 80 % du gaz naturel russe provient de cette région. Face à cette avancée, les États-Unis dénoncent leur manque de brise-glaces et leur incapacité à peser face à la Russie dans l’Arctique.
L'éveil des États-Unis face à un concurrent de taille
En dépit de la position géostratégique jusqu’alors négligée de l’Alaska, les États-Unis ont reposé les jalons d’une politique arctique. Le premier président à s’y rendre et à y redonner un intérêt est Barack Obama. Celui-ci, en 2015, trois mois avant l’ouverture de la COP21, fixe les intérêts nationaux et économiques relatifs à la zone arctique, incluant une exploitation plus intensive des oléoducs et une collaboration avec l’OTAN, dissuadant ainsi toute agression ou menace potentielle d’un État rival. Cette prise de conscience se matérialise par une prise de la présidence du Conseil arctique en avril 2015. Les États-Unis, étant conscients de la montée en puissance de la Russie, s’inquiètent alors de leur hégémonie sur un territoire dont les recherches scientifiques et les différents atouts scientifiques représentent un fort levier de puissance.
Susie Harder — Arctic Council — Arctic marine shipping assessment
Par ailleurs, c’est leur position géographique qui leur offre un avantage commercial inédit. En effet : « Le Passage du Nord-Est (PNE) est le plus emprunté (227 navires en 2018). Il longe la Côte-Nord de la Scandinavie, reliant le port de Mourmansk au détroit de Béring. Cette route permet de réduire de 40 % la distance parcourue pour relier l’Asie à l’Europe par rapport à une traversée par le canal de Suez (c’est le cas du trajet Shanghai-Rotterdam). Lors du Forum sur l’Arctique de juin 2019 à Saint-Pétersbourg, Vladimir Poutine annonçait que le volume annuel transporté via le passage du Nord-Est avait atteint 20 millions de tonnes en 2018.
Le Passage du Nord-Ouest (PNO) relie, lui aussi, l’océan Atlantique à l’océan Pacifique. Il passe entre les îles Arctiques du Nord canadien, puis à travers la mer de Beaufort et la mer des Tchouktches. Néanmoins, ce passage, praticable uniquement pendant le court été arctique, reste peu privilégié par les acteurs du commerce international. », selon Caroline Henriques.
Les années 2007-2018 ou la ruée vers l'or
L’intérêt pour la région s’intensifie en 2008 avec le rapport publié par l’USGS que nous avons étudié auparavant et surtout avec les voies commerciales dont leur potentialité d’exploitation est grandissante. À cela s’ajoute la capacité technique de certains projets russes projetant la possibilité de développer le trafic maritime dans la région. Toutefois, la question de la souveraineté dans ces territoires n’est toujours pas sanctifiée ; les campagnes de cartographie soulèvent des conflits entre États qui cherchent à revendiquer leurs droits territoriaux. Le droit international maritime accorde aux États côtiers une zone de 22 km d’eaux territoriales et jusqu’à 370 km de zone économique exclusive (ZEE). Une extension jusqu’à 650 km est possible si un pays prouve que son plateau continental s’étend jusque-là. Ce processus, fondé sur des preuves géologiques, favorise les puissances capables de financer des expéditions scientifiques.
Dès 1989 est créé l’institut chinois de recherche polaire, qui entre dans le cadre d’une coopération entre les pays limitrophes. Bien qu’éloignée géographiquement, la Chine s’affirme comme un acteur grandissant dans la région, en renforçant son influence non seulement économique, mais aussi politique et stratégique. Étant actuellement un pays très gourmand en énergies, ainsi qu’une puissance commerciale concentrant les plus grands hubs portuaires, ses besoins énergétiques ne sont plus à démontrer. Dès lors, elle impose progressivement son influence et sa présence, notamment pour l’exploitation des ressources naturelles, les recherches scientifiques et les routes maritimes. C’est dans le sillage des nouvelles routes de la soie que Pékin encourage le développement du territoire, permettant de contourner certains points d’étranglement à risque de piraterie comme le détroit de Malacca ou le canal de Suez. Le gain de temps entre Rotterdam et Shanghai pourrait alors se limiter à jusqu’à 30 % à 50 % sur les 48 jours de trajets habituels.
Quant à la Russie, encore une fois, le pays n’a pas cessé d’investir. De plus, passer par l’Arctique sibérien nécessite désormais de payer une taxe ; ce qui va à l’encontre du droit international, dans lequel la liberté de navigation dans les eaux dites « internationales » prime. Qui plus est, « la Russie a déclaré qu’elle n’autoriserait plus les outils militaires occidentaux à passer par la route du Nord », indique un rapport de l’IRIS en mars 2019. En février 2014, la Russie envahit la Crimée, face aux sanctions occidentales en réaction à cette action belliqueuse, Moscou se rallie à Pékin, qui lui tient une posture favorable au non-alignement. Ce rapprochement se renforce d’autant plus en 2022 avec l’invasion à grande échelle du territoire ukrainien.
Dans ce contexte, Pékin a rapidement saisi l’opportunité. En pleine reconfiguration énergétique mondiale, la Chine a signé avec Moscou un contrat historique de 400 milliards d’euros en 2014. Ce partenariat scelle l’approvisionnement de la Chine en gaz russe pour 30 ans. En quelques années, la Chine s’impose donc comme le premier investisseur étranger en Arctique, tout en s’implantant dans des dizaines de projets pétroliers et gaziers. Elle cofinance un gigantesque projet de gazoduc reliant la Russie et la Chine. Au final, selon certains analystes, ce n’est pas moins de 500 milliards de dollars qui ont été investis dans des contrats sino-russes. À cela s’ajoute un accès illimité aux bateaux chinois sur le Grand Nord.
En multipliant les accords, elle s’impose géographiquement. En 2018, elle tente de financer trois aéroports au Groenland, un projet bloqué par les États-Unis qui ont fait pression pour garder la mainmise sur leur influence régionale. Elle cherche aussi à acquérir des infrastructures stratégiques, comme une mine d’or au Canada, empêchée par le gouvernement canadien pour des raisons dites de « sécurité nationale ». Par conséquent, la même année, Xi Jinping décrit la Chine comme un « État proche de l’Arctique », sous-entendant une expansion et une recherche d’influence dans le Grand Nord, qui n’est pas reconnu par les acteurs internationaux. Les événements récents confirment ce constat, faisant de la Chine un nouvel acteur régional.
D'une diversification d'acteurs vers une cristallisation des rapports de pouvoirs ?
La gouvernance de l’Arctique repose sur le Conseil de l’Arctique, une institution intergouvernementale fondée en 1996. Celle-ci rassemble huit États membres (Canada, Danemark, États-Unis, Finlande, Islande, Norvège, Russie, Suède), ainsi que d’autres représentants indépendants. Le Conseil de l’Arctique constitue un espace de dialogue entre les États riverains de l’Océan Arctique et les autorités locales, favorisant les discussions autour des enjeux environnementaux et géopolitiques. Toutefois, son efficacité demeure régulièrement entravée lors de désaccords, en dépit des volontés individuelles des membres. Depuis 2014, les tensions croissantes entre la Russie et les pays occidentaux paralysent pléthore d’initiatives, alimentant un climat assez défavorable à l’efficacité de l’institution.
Le Canada, une puissance dépourvue des capacités de ses ambitions
Le Canada, poursuivant sa stratégie d’affirmation dans l’Arctique que nous avons brièvement entrevu, déposait le 23 mai 2019 une demande visant à étendre les limites de son plateau continental, revendiquant ainsi 1,2 million de kilomètres carrés du fond marin et du sous-sol océanique. C’est le résultat de 17 expéditions de recherches menées conjointement avec les États-Unis, le Danemark, la Suède et l’Allemagne. En élargissant ses revendications jusqu’au pôle nord, le Canada intensifie les zones de chevauchement avec la Russie. C’est une façon pour Ottawa d’imposer sa souveraineté en dépit de son grand manque de forces de dissuasion.
En effet, bien que le Canada revendique ces eaux, c’est une nation bien trop dépourvue de brise-glaces et d’infrastructures adaptées. De ce fait, elle est dépendante de la mince flotte et de l’aura régionale de Washington pour exploiter cet atout. Le passage du Nord-Ouest est une opportunité souvent qualifiée de ratée pour le Canada. Celui-ci pourrait réduire de 40 % la distance entre l’Europe et la Chine, représentant une alternative aux routes contrôlées par l’hégémonie thalassocratique étasunienne. En 2025, c’est encore plus le cas avec les questions autour du canal de Panama.
Pour autant, les relations américano-canadiennes s’opposent sur ces questions de souveraineté. Le Canada et les États-Unis se disputent le statut du passage du Nord-Ouest : le Canada le considère comme une voie maritime intérieure, tandis que les États-Unis le revendiquent comme un détroit international. Indirectement, c’est une façon cachée d’affirmer sa volonté de contrôler l’espace, en prônant des principes généraux relatifs au droit international et à la liberté de circulation. Faute de moyens pour défendre sa position, le Canada voit les navires étrangers emprunter cette route sans consultation préalable. D’ici quelques années, le passage du Nord-Ouest pourrait devenir navigable toute l’année, ce qui imposera une nouvelle gouvernance de l’Arctique. Le risque pour le Canada est de passer au second plan, de laisser Ottawa dans un rôle passif face aux transformations politiques et économiques liées au commerce mondial.
En réponse à ces inquiétudes, le budget fédéral canadien a alloué en 2019 700 millions de dollars sur 10 ans pour développer les infrastructures de l’Arctique canadien. Ce budget ne finance pas uniquement des projets défensifs, mais aussi pour l’amélioration des conditions de vie des locaux. Pourtant, bien que des efforts croissants soient menés par les autorités, le Canada demeure en position de faiblesse stratégique. Les équipements militaires, notamment les brise-glaces arriveront à la fin de capacité d’ici 7 ou 8 ans. Pourtant, les nouveaux navires ne pourraient être produits à temps pour prendre le relais des anciens. Dans un avenir proche, le Canada pourrait être une cible particulièrement vulnérable. L’actualité récente confirme cela avec de croissants conflits avec l’administration Trump.
L’Union européenne et les pays scandinaves, des acteurs timides
L’Union européenne (UE) ne s’est quant à elle intéressée que tardivement à l’Arctique, en 2007, percevant tardivement les implications stratégiques dans la région. Jusque-là, l’Arctique n’était vu que comme une périphérie géographique, politique et économique, mais l’opération symbolique de la Russie au pôle Nord en 2007 a focalisé l’attention mondiale et a précipité l’éveil européen en matière de gouvernance.
La première référence à l’Arctique réalisée par l’UE apparaît dans le rapport, An Integrated Maritime Policy for the European Union. En octobre 2008, le Parlement européen a adopté une résolution dans la région : préoccupations environnementales face aux effets du changement climatique, notamment sur les peuples autochtones, la défense de la liberté de navigation contre les revendications souverainistes canadiennes et russes. Un appel à un moratoire sur l’exploitation des ressources et d’une proposition d’un traité international pour la protection de l’Arctique similaire à celui de l’Antarctique a aussi été lancé. Elle réclame en parallèle d’être considérée comme un acteur légitime de la région. En novembre 2008, la Commission publie sa communication officielle intitulée The European Union and the Arctic Region, formant le pilier d’une politique arctique à l’échelle européenne.
Cependant, les réactions à ces ambitions furent mitigées. Sous la pression de lobbies environnementaux, l’UE défendait une forme de sanctuarisation environnementale qui va à l’encontre des volontés russes et norvégiennes, qui voyaient dans l’Arctique un levier de développement. L’ambassadeur russe auprès de l’UE, Vladimir Chizhov, rappelait en 2009 que l’UE n’était pas membre du cercle arctique. La Norvège, pourtant favorable auparavant à une implication européenne a tenu une position critique face aux décisions de l’institution. En conséquence, certains États comme la Suède, le Canada et le Danemark limitent la portée politique de l’UE, car la considèrent mal placée pour traiter de ces affaires. Ainsi, malgré la volonté de s’imposer, l’UE demeure une spectatrice extérieure. Lors de la réunion ministérielle de Kiruna en 2013, sa candidature au statut d’observateur permanent est bloquée par le veto canadien tandis que la Chine et Singapour sont acceptées. Désormais, l’UE adopte une position jugée plus pragmatique par l’observatoire de l’Arctique, avec moins d’appels à une « nouvelle gouvernance », mais sur la promotion de la coopération internationale ainsi que les enjeux écologiques en termes développement durable et de prévention des risques de catastrophes environnementales.
D’un point de vue économique, on peut dire que l’UE est largement dépendante des ressources arctiques : elle importe un quart de ses hydrocarbures consommés en Europe ainsi que 88 % de son fer, provenant de la mer de Barents. Les ressources halieutiques y sont de même un enjeu crucial : un tiers de la pêche est destinée au marché européen. De plus, la fonte des glaces permet des trajets allant jusqu’à 4000 kilomètres pour les transports européens vers l’Asie, sachant que 90 % du commerce extérieur européen passe par voie maritime. En janvier 2023, la découverte du plus grand gisement européen de terres rares en Suède pourrait, comme le souligne Emmanuel Hache, directeur de recherche de l’IRIS, renforcer la souveraineté énergétique européenne en terres rares, dont 98 % de son approvisionnement provient de Chine.
« L’Arctique dans sa globalité est considéré comme une zone géographique à haut potentiel pour les terres rares (la deuxième du monde). Désormais, la question est de savoir quand la production sera disponible. L’entreprise a annoncé qu’il faudrait entre 10 et 15 ans pour vendre ses premières terres rares sur les marchés mondiaux, ce qui invite donc l’ensemble des acteurs européens à ne pas surestimer les attentes et les bénéfices de cette découverte. »
La Russie, isolée par les sanctions, intensifie son exploitation des ressources arctiques, tandis que l’OTAN renforce sa présence via l’adhésion de la Suède et de la Finlande. L’UE adopte un discours ferme à l’encontre de ce processus de militarisation en Arctique. Pour autant, en dépit de ses atouts économiques et militaires, sur le plan politique, l’UE ne s’impose pas comme un acteur légitime et incontournable du Nord. En termes d’infrastructures, nous pouvons observer un manque notable de moyens concernant les territoires arctiques.
Plus qu'un éveil, une zone de conflit croissant
Des tensions diplomatiques dans le sillage des années 2010-2020
L’essor de la compétition internationale est marqué par l’importance croissante du Conseil de l’Arctique dans la gouvernance régionale. Ce qu’il s’y passe est de plus en plus médiatisé et attire l’attention au fil des événements qui s’y déroulent. En outre, c’est un lieu symbolique, tel le champ de bataille de toutes les confrontations diplomatiques interétatiques dans la région, chacun cherchant à optimiser la coopération en sa faveur.
Le mois de mai 2019 témoigne d’un intérêt particulier des USA au Conseil de l’Arctique. Pour la première fois, un secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, prend la parole, et les volontés expansionnistes chinoises inquiètent « Il y a des États arctiques et des États non arctiques. Il n’existe pas de 3e catégorie. La Chine peut prétendre le contraire, mais cela ne lui donne droit à absolument rien [...] l’Arctique se transforme en une nouvelle mer du Sud chinoise, étranglée par la militarisation ».
La Russie a par ailleurs souhaité faire payer une taxe pour emprunter le passage du nord-est. Elle s’y considère en effet souveraine pour décider ou non du passage de navires étrangers. Cette conception contrevient au droit international, dans lequel la liberté de navigation prévaut, même dans les eaux territoriales. La Russie a donc presque « privatisé » le passage le long de ses côtes sibériennes. Qui plus est, la Russie a déclaré qu’elle n’autoriserait désormais plus les bateaux militaires des pays de l’Ouest à passer par la route du Nord. Comme le commente un spécialiste de la zone, il y a ici de quoi déclencher une vraie confrontation militaire — car bien sûr, plus la glace recule, moins les autres pays accepteront cette nouvelle donne dictée par la Russie.
Le secrétaire d’État, Mike Pompeo, prononce un discours à la réunion du Conseil de l’Arctique à Rovaniemi, en Finlande, le 6 mai. (Département d’État/Ron Przysucha)
Pompeo ajoute « Et il y a la Russie. Moscou exige illégalement que les autres pays demandent la permission pour emprunter la route du Nord ( …) et les menace d’utiliser la force militaire pour les couler s’ils n’obéissent pas. (…) On entend déjà leur bruit de bottes dans la neige ». Ce discours à un sens fort, il marque un affrontement direct et sans précédent entre Moscou, Pékin et Washington. La Russie ne cache pas sa volonté de devenir une puissance prééminente et cherche même à le faire savoir. Moscou déploie à ce sujet toute une communication politique vis-à-vis de l’Occident, en invitant des journalistes occidentaux à venir voir ses bases, en multipliant les démonstrations militaires sur place, et en diffusant des images de Vladimir Poutine se mettant en scène en Arctique.
En 2017, Jean-Michel Valantin écrit que « les moyens alloués par les États-Unis dans cette région sont étonnamment faibles ». Trump marque un tournant en 2019, il s’y intéresse de très près en faisant part de préoccupations économiques et stratégiques ; mais jamais écologiques, puisqu’il rouvre l’Alaska aux forages pétroliers, y compris dans les réserves naturelles. Lors de sa campagne présidentielle en 2024, le slogan « Drill baby drill » de Donald Trump explicite son désintérêt total pour les enjeux environnementaux et démontre a contrario son obsession pour les ressources pétrolières. Il a rapidement décidé de repositionner ses actifs militaires de lutte anti-sous-marine en Islande, pour surveiller les navires russes dans la zone. Une autre grande inquiétude des Américains tient à la présence de grandes sociétés chinoises dans la région, notamment au Groenland, qui représente une terre d’ingérence liée aux autorités militaires chinoises.
Les tensions territoriales sont aussi marquées par une méfiance mutuelle entre la Russie et le Canada. Bien que ces différends ne soient pas récents, leur instrumentalisation a pris une plus grande ampleur. Les incidents sont perçus comme des provocations mutuelles, par exemple avec l’affirmation de la présence russe par l’envoi de navires en août et septembre 2014. Face à cela, l’ex-Premier ministre Harper avait déclaré « En Europe, nous voyons les ambitions impériales de Vladimir Poutine, qui semble déterminé à ce qu’il n’y a pas de paix pour les voisins de la Russie », « et puisque la Russie est aussi un voisin du Canada, nous ne devons pas non plus faire preuve d’aveuglement ». Le Canada a donc boycotté une réunion tenue à Moscou en avril 2014 après l’annexion de la Crimée par Moscou, tout en offrant un soutien militaire symbolique à l’Ukraine et en plaidant pour l’exclusion de Moscou au G8.
Enfin, la gouvernance régionale est plus que fragilisée : le Conseil de l’Arctique, principal organe de dialogue entre les huit nations arctiques, est souvent paralysé par les tensions diplomatiques. Le Center for Strategic and International Studies (CSIS, 2023) alerte sur l’absence de cadre de régulation efficace pour prévenir les risques de conflits et encadrer l’exploitation des ressources. À noter aussi que parmi les huit pays riverains de la zone arctique, cinq sont membres de l’OTAN, marquant une surreprésentation de l’alliance occidentale dans la région. En conséquence, un sentiment d’encerclement à la fois politique et militaire affecte les prises de décision russes, faisant de cette zone un espace de confrontation, alimenté par la crise ukrainienne. « L’Arctique reste essentiel à notre posture de dissuasion et de défense », déclare le président du Comité militaire de l’OTAN, l’amiral Bauer, lors de la 10e édition de l’Assemblée du cercle arctique les 20 et 21 octobre 2023.
Une (re)militarisation de l'espace très surveillé(e)
La militarisation de l’Arctique s’inscrit dans un héritage de la Guerre froide, période durant laquelle la région constituait un terrain stratégique pour la confrontation bipolaire. Le géopolitologue François Thual la décrit comme « l’un des bancs d’essai de la dissuasion nucléaire mondiale », où Russes et Américains testent de nouvelles générations de sous-marins. Cette dynamique perdure, portée par des exercices militaires réguliers. Selon le SIPRI (2023), la militarisation progressive du Grand Nord s’est intensifiée avec la suspension des activités du Conseil de l’Arctique en raison du conflit. Le 24 mars 2017, la Russie a simulé une attaque d’avions contre un radar norvégien, Globus 2. « S’il y a un conflit, la première chose que nous ferons sera de faire sauter ce radar » commente un politologue russe interrogé. « La Norvège doit comprendre que, maintenant qu’elle est devenue un avant-poste de l’OTAN, elle devra faire face à la force militaire de la Russie », déclarait, en juin 2017, l’ambassadeur russe en poste à Oslo « Par conséquent, il n’y aura plus d’Arctique pacifique ».
À cet égard, les années 2010 ont marqué l’augmentation du nombre d’incidents militaires reportés dans l’océan Arctique. En mars 2019, des bombardiers B-52 américains et des F-16 norvégiens, dans le cadre de l’OTAN, ont effectué une mission d’entraînement au-dessus de la mer de Norvège. Cependant, deux bombardiers russes Tu-160 ont pénétré l’espace aérien, en direction du Royaume-Uni. La Russie a interprété cela comme une menace aux abords de ses frontières, car ces avions sont à même de transporter des armes nucléaires et représentent donc une réelle menace. De la même manière, en juillet 2023, une patrouille de navires chinois et russes avait été signalée en Alaska ; une menace directe pour le pays.
Mais ces intimidations s’accompagnent aussi de déploiements militaires massifs. En 2021, la Russie lançait ainsi l’expédition Umka-2021, mobilisant 200 unités d’armement et d’équipements militaires. Des postes militaires datant de la guerre froide sont étroitement surveillés et modernisés afin d’y tester des missiles balistiques hypersoniques (Satan 2) et torpilles nucléaires ; historiquement c’est une zone « chaude » en cas de menace nucléaire. Depuis 2009, la Russie a aussi mis en place la Flotte du Nord, la « pièce maîtresse de la stratégie arctique russe », composée de SNLE (Sous-marin Nucléaire Lanceur d’Engins), de cuirassés, de brise-glaces. Il y a un important développement d’infrastructures logistiques : des ports, pistes d’atterrissage, stations de ravitaillement ; ainsi qu’un investissement dans les outils de communication pour garantir des liaisons fiables dans des conditions difficiles. L’armée américaine a tardivement réagi en annonçant, en janvier 2021, une « reconquête de ladomination sur l’Arctique ».
Ces actions expansionnistes agressives ont été prises tardivement au sérieux par les États-Unis, qui ont annoncé en janvier 2021 une « reconquête de la domination sur l’Arctique ». L’enjeu est donc pour les USA d’entretenir la puissance et la coopération européenne. Leur démonstration se solde avec le programme Nordic Response 2024, est plus grand exercice aéronaval de l’OTAN organisé depuis des décennies. La Suède et la Finlande prenaient part à cet exercice. En tout, 20 000 soldats, 50 navires, 110 aéronefs sont déployés par 14 nations différentes à Finnmark en Norvège.
Afin d’exemplifier la militarisation de l’espace nordique, nous pouvons prendre pour exemple la base de Mourmansk, qui marque la suprématie de Moscou sur la région. Cette ville militaire, industrielle et logistique : c’est même la plus grande ville arctique au monde. C’est un port qui se situe dans la presqu’île de Kola fondée en 1915 pour accéder à la mer de Barents, qui a été modernisée en 2014. L’une des missions centrales est de constituer la tête de réseau de la Route maritime du Nord, d’acheminer des ressources naturelles tirées de l’Arctique vers le trafic mondial : l’oblast de Mourmansk rassemble près de 40 % du transport maritime russe. Cette base assure à la Russie une présence militaire permanente dans l’Océan Glacial Arctique. Elle joue également un rôle dans le renseignement et la surveillance de l’espace aérien et maritime, notamment dû à sa proximité avec l’OTAN via la Norvège et la Finlande. Elle développe donc une double posture : offensive et défensive, car protège ses infrastructures énergétiques, mais affirme sa souveraineté et son plein droit sur les routes maritimes émergentes.
À noter tout de même que depuis la chute de l’URSS, le caractère stratégique de l’arctique s’est érodé pour Moscou : les effectifs de la marine de guerre russe qui y sont stationnés ont par exemple été divisés par deux entre 1988 et 1995. Sur la presqu’île de Kola, le complexe militaro-industriel semble s’effondrer. La population de la ville chute de 468 000 à 300 000 habitants entre 1989 et 2018. « Le quartier général de la Flotte du Nord se situe dans la ville Severomorsk, à 20 kilomètres au nord de Mourmansk. Au sud, à Safonovo se trouve un des plus importants chantiers navals militaires. On observe au sud la piste de l’aéroport militaire, bien visible sur l’image puisqu’elle mesure plus de 3 000 mètres de long sur 80 mètres de large », indique Camille Escudé-Joffres, enseignante agrégée de géographie à Sciences Po.
Qui dit militarisation, dit surveillance et renseignement. Par exemple, cette photographie a été prise par le satellite Sentinel 2A en août 2018 par le CNES (Centre National d’Études Spatiales). Ces questions de renseignement sont évidemment comprises par tous. En avril 2021, le ministre de la Défense russe Sergueï Choïgou a expliqué souhaiter poursuivre la construction d’infrastructures militaires en développant ses technologies de radars et de missiles à longue portée, afin de fournir des appuis, des données terrestres plus détaillées, pour une vigilance continue et accrue et offrant un soutien militaire.
Cette rivalité s’exprime par les mers, par le biais de l’USCG, l’United States Coast Guards, ou bien les Rangers canadiens, voire la Flotte du Nord russe, qui tous trois déploient des navires qui ont de multiples rôles, dont la recherche d’informations et de défense des intérêts nationaux. Pourtant, la rivalité et les enjeux de renseignement s’expriment avant tout dans les airs, comme le démontre l’image ici mobilisée. En effet, en février 2015, la direction canadienne du renseignement militaire a exprimé des inquiétudes concernant la présence éventuelle de drones espionnant le territoire canadien pour le compte de Moscou. Tous les membres de l’OTAN du Grand Nord, et ses alliés ont recensé des dizaines d’incidents par mois, impliquant des avions militaires russes, frôlant les frontières. Ces situations de tensions amènent parfois des avions militaires à décoller d’urgence pour intercepter les chasseurs étrangers, jouant avec les lignes rouges qui induiraient des crises diplomatiques.
Enfin, la surveillance de l’Arctique repose aujourd’hui de plus en plus sur l’espace, en particulier grâce au développement des satellites. La Russie a développé une réelle architecture satellitaire (dont l’orbite Molniya). Il existe trois systèmes satellitaires : le GLONASS, qui est un système de géolocalisation équivalent au GPS américain, garantissant aux forces armées russes une capacité de navigation autonome. L’EKS, qui est un système d’alerte avancée contre les missiles balistiques, permettant de détecter toute menace provenant des puissances nucléaires. Enfin, l’Arktika, qui est une constellation civile dédiée aux données météorologiques et environnementales, qui, dans un contexte militaire, peuvent guider les opérations militaires dans des conditions difficiles.
Ces infrastructures satellitaires s’ajoutent en soutien aux moyens terrestres et maritimes. Les bases militaires servent de points d’appui aux opérations, dotés de multiples technologies modernes et radars. Les budgets militaires russes croissent de façon massive pour maintenir leur suprématie face aux timides efforts occidentaux. Pour rappel, l’importance de ces moyens s’explique par la mutation stratégique de l’Arctique : il est à la fois un théâtre potentiel d’affrontement militaire, un réservoir de ressources et un raccourci commercial majeur entre Europe, Asie et Amérique. Dans ce contexte, la capacité de renseignement, de surveillance et de communication crée un climat de « guerre silencieuse » des technologies, une forme de guerre froide dans laquelle la maîtrise du renseignement spatial, de la surveillance permanente constitue un levier stratégique pour s’imposer de façon hégémonique.
Qu'en penser ?
Tout au long de l’énonciation de faits et de dynamiques géopolitiques ici exposées, il faut avouer que jusqu’à maintenant, nous faisons face un vide conséquent quant aux rapports de puissance et à l’analyse prospective déjà amorcée. Il s’agit ici non pas d’exposer des faits (sous un angle partiellement biaisé), mais de mener une analyse plus fine. Alors que les médias sont souvent accusés d’émettre des scénarios catastrophes et alarmistes, certains analystes mènent une réflexion plus tempérée « et il n’est dans ce domaine aucune rivalité qu’une bonne négociation ne puisse apaiser, en témoigne le traité russo-norvégien de 2010 en mer de Barents. », indique Frédéric Lasserre en 2017.
Le débat public est largement influencé par l’omniprésence du champ médiatique, qui traite et manipule le sujet à sa guise, et souvent portant une vision à la fois simplifiée et sensationnaliste. Il est important de se concentrer sur l’accroissement de la navigation dans le Grand Nord, sujet qui laisse à réfléchir concernant les détroits internationaux : alors qu’Ottawa et Moscou revendiquent une souveraineté absolue, donc un contrôle accru dans leurs archipels, pour l’UE, la Chine et les États-Unis, la liberté de navigation prime avant tout. Ils s’opposent ainsi fermement à créer une « propriété privée », dans laquelle le trafic fluvial serait mis en suspens. En parallèle, il est aussi question des ZEE, qui sont un enjeu à analyser différemment tant par leurs enjeux que par les alliances (plus que jamais changeantes) qu’ils suscitent. La simplification du traitement de ces sujets ne permet en rien de saisir la singularité de la situation.
Loin de là la volonté de se substituer la parole d’un spécialiste du sujet, il sera ici question d’accorder plus de visibilité à des discours alternatifs, permettant de rendre possible un débat axé sur des pistes d’analyses plus fines.
Vers un retour à un conflit bipolaire ?
De nombreux commentateurs des dynamiques arctiques tendent à dessiner grossièrement les rapports de pouvoir dans la région, en décrivant une opposition entre deux mondes : le monde occidental, et « les autres », « les dangers de l’Est ». Initialement, il était question de se demander si la géopolitique de l’Arctique était représentative de la géopolitique mondiale. En omettant au moins les trois quarts des États dans le monde, le cas arctique permet d’exemplifier certaines dynamiques centrales, mais très probablement pas la complexité de la politique mondiale. À l’heure de l’administration Trump, de conséquents bouleversements se produisent, et cela à une vitesse étourdissante. La littérature scientifique aura besoin de temps pour faire l’état des lieux du bilan de ces changements et remettre cela au goût du jour.
Bien que Donald Trump semble ne pas souhaiter attiser les troubles avec Moscou, sa relation avec Pékin est bien plus tendue. Trump suit un modèle de rupture avec les présidents précédents, au-delà d’opter pour un comportement hautement unilatéral, il souhaite s’imposer et obtenir une forme d’hégémonie agressive tout en devenant incontournable. C’est néanmoins la simple continuité de ce qu’il avait déjà amorcé lors de son premier mandat. En 2019, Donald Trump a annoncé vouloir racheter le Groenland au Danemark, faisant face à un refus catégorique de ce dernier. Dès son investiture, il a réitéré sa demande, jusqu’à menacer d’employer la coercition. Le sous-sol du Groenland est riche en minerais précieux ; qui plus est, avec le réchauffement planétaire, le Groenland devient un port intéressant en termes d’accès au commerce international. C’est le symbole d’une forme d’expression de la doctrine Monroe, en propageant son ingérence sur tout le continent, notamment nord-américain. Ce n’est pas la première fois que les États-Unis tentent de racheter le Groenland : ils l’avaient déjà proposé en 1946, à hauteur de 100 millions de dollars, afin de se prémunir de l’influence de l’URSS.
Cette tension intervient concomitamment avec les menaces de Trump de faire du Canada le « 51e État des États-Unis d’Amérique », supposant une annexion par la force. En même temps, celui-ci exprimait sa volonté de prendre le contrôle du canal de Panama. Cette succession d’actions n’a rien d’innocent : il veut affirmer sa puissance régionale, contrôler à lui seul les passages maritimes et agrandir sa ZEE. La thèse donc de « l’occident » contre la Russie et la Chine ne tient pas, alors que le Canada et l’Europe voient d’un très mauvais œil les exactions de Trump et ses volontés expansionnistes. À cela s’ajoute ce que nous avions pu déjà entrevoir précédemment, les divisions entre le Canada et l’UE. Bien que ces oppositions ne soient pas structurelles (et sont actuellement amenées à changer), elles démontrent une volonté opportuniste de chaque État de prendre sa part du gâteau. Néanmoins, nous pouvons observer l’émergence d’une méfiance vis-à-vis de Trump : même dans les milieux les plus « pro-américain » en Europe, des désaccords interviennent, quitte à se désolidariser du président étasunien.
Le discours de Claude Malhuret, sénateur président du groupe Les Indépendants, membre de la commission des affaires étrangères laisse entrevoir ce phénomène. « Washington est devenue la cour de Néron » - tout en omettant l’inexactitude historique - la référence à un empereur incendiaire, respecté par des « courtisans soumis » permet selon lui de dire « ce que pensent une majorité d’Américains ». C’est un discours aux symboles et aux mots cinglants qui s’inscrit dans un ensemble de contestation dans le monde occidental : au parlement danois, au Canada, la méfiance croît. Ainsi, les élections au Groenland du mois de mars ont été regardées de très près alors que le parti nationaliste indépendantiste présentait un risque pour l’intégrité du territoire ; il est arrivé second avec 24,5 % des voies face au centre-droit, l’emportant avec 29,9 %. La barre des 70 % de taux de participation marque un intérêt particulier inhabituel.
« Bonne chance au grand peuple du Canada », a affirmé Donald Trump dans un message sur sa plateforme Truth Social. Lors des élections législatives anticipées, il a appelé les Canadiens à « élire l'homme qui a la force et la sagesse de réduire vos impôts de moitié, de renforcer vos capacités militaires, gratuitement, jusqu'au plus haut niveau mondial, de quadrupler les secteurs de l'automobile, l'acier, l'aluminium, l'énergie et tous les autres, sans droits de douane ni taxes ».
Cependant, il est vrai que la souveraineté militaire de nombreux pays occidentaux est très largement limitée. En pleine période de réarmement des armées européennes, la proportion d’armes américaines possédées par celles-ci est énorme. De façon totalement hypothétique (et dans le pire des scénarios), en cas d’affrontement militaire, ces pays ne pourraient donc aucunement répondre en proportion face à la force étasunienne, qui connaît et contrôle la plupart des technologies occidentales. La tentative de certains États à vouloir peser face à la puissance américaine est sur certains points vaine et seulement symbolique. En parallèle, sans même mettre en jeu un affrontement militaire direct, ils sont toujours asservis par Trump, qui pourrait décider de rompre tout support militaire et en renseignement, en empêchant l’emploi d’armes à distance, affaiblissant ceux qui ont besoin, de près ou de loin, des États-Unis pour assurer la protection de leur souveraineté. Le Canada tente de préserver sa marge de manœuvre par des investissements dans ses propres capacités (brise-glaces, drones, Rangers, Garde côtière arctique), mais reste dépendant des infrastructures américaines pour le renseignement et la logistique. Cela amène à revoir les relations entre les puissances occidentales à moyen et long terme.
Concernant la Russie, la montée en puissance chinoise pourrait susciter un malaise : alors que Pékin se présente comme un "État proche arctique", le Kremlin n’a pas de réel intérêt à voir la Chine s’implanter, outre l’aspect économique direct et diplomatique. Cette « alliance » fonctionne grâce aux échanges d’hydrocarbures et d’autres marchandises, mais laisser la Chine déployer ses propres navires, notamment militaires, et installer des bases serait pour Poutine un aveu de faiblesse et une perte de souveraineté. De son côté, la Chine n’a pas intérêt à fonctionner par le biais de la force : elle a bien plus à gagner en collaborant avec son allié le plus proche ainsi qu’à mettre en place des partenariats commerciaux avec les autres pays du Grand Nord. Une autre des multiples raisons pour laquelle Trump souhaite prendre possession du Groenland et du Canada (du moins, met en place un rapport de force disproportionné) est d’empêcher la Chine de s’implanter dans la zone nord-américaine, comme nous avons déjà pu l’observer au Canada ainsi qu’au Groenland.
Au-delà donc de leurs intérêts communs, nous pouvons y voir des ambiguïtés : un chercheur russe Valery Mitko, président de la St. Petersburg Arctic Social Science Academy, a été arrêté par le FSB, accusé d’espionnage au profit de la Chine et d’avoir fourni des documents classifiés sur le design et la détection des sous-marins. La Chine est actuellement en pleine conception de technologies pouvant rivaliser avec d’autres États arctiques. Dès lors, un affrontement militaire est-il réellement envisageable ? En termes de moyens et d’intérêts, il est bien peu probable.
Vers une militarisation durable de l'Arctique ?
L’accroissement de la présence militaire russe ne signifie pas une possible attaque, nuance France 24 : « Moscou a aussi d’autres intérêts à protéger (…) le plus important est la question financière et économique de l’Arctique, moins que la gouvernance ». Il en va de même pour la Chine. De plus, il est important de préciser que l’angle de vue adopté est un discours alarmiste et une vision occidentale fermement opposée à la Russie et la Chine.
Les États-Unis ont une capacité d’intervention négligeable dans les eaux froides de l’Arctique. Les Canadiens, bien que mieux équipés et préparés pour les conditions extrêmes que leurs voisins, n’ont pas la puissance militaire pour jouer le rôle de meneur dans une hypothétique confrontation. « Aucune nation ni même alliance ne pourraient aujourd’hui techniquement, mais surtout financièrement garantir la sécurité en Arctique et encore moins y mener une guerre. », souligne Élise Doumergue. Celle-ci continue : « On voit dès lors mal comment et pourquoi la Chine contesterait la souveraineté du Canada sur le PNO, en acceptant celle de la Russie sur le PNE que son entreprise d’État utilise bien davantage. Enfin, un rapport récent de chercheurs gouvernementaux souligne que la Chine a plus à gagner dans l’Arctique en cultivant de bonnes relations avec le Canada, donc en respectant la revendication canadienne sur le PNO ». Pourtant, certains universitaires chinois suggèrent la contestation des revendications russes et canadiennes sur les passages du nord.
L’observatoire de l’Arctique indique que lors de sa présence au Canada, ils ont pu échanger avec plusieurs experts travaillant dans l’Arctique et rapportent leur vision et approche personnelle par rapport à la Russie : « Deux courants découlent de cette approche identitaire. Les experts canadiens ont soit un discours alarmiste tourné sur la sécurité militaire – souvent repris par les médias – soit un discours apaisant tourné sur la coopération. Si les premiers se retrouvaient dans la politique et le ton utilisés par Harper jusqu’en 2015, les seconds se rapprochent de Trudeau, plus modéré dans son approche de la zone. Nous avons surtout croisé des experts du second groupe. Ces derniers ont insisté sur l’importance de la coopération régionale et sur la nécessité d’avoir une approche ‘pragmatique’ de la modernisation militaire russe. ».
Comme le souligne Plouffe, l’ « Arctique n’est pas à l’aube d’une guerre », « et il n’y a aucune menace militaire envers le Canada » dans la zone. De même, celui-ci « réfute l’hypothèse, émise par les médias, selon laquelle le dégel des glaces de mer, déclenchant une soi-disant « course » aux ressources naturelles nouvellement découvertes, a une incidence significative sur le développement des politiques » de défense nationale. En dépit des conflits extérieurs au Grand Nord, les relations interétatiques au sein des instances régionales ont été favorisées sous le gouvernement Trudeau. Celle-ci ajoute que « la coopération a continué tout le temps, y compris avec la Russie, et indépendamment de certaines positions que nous n’aimons pas de la Russie, par exemple l’annexion de la Crimée, qui est inacceptable », d’après Marie-Anne Coninsx, ambassadrice de l’Union européenne au Canada. « (…). C’est l’intention de tous les membres du Conseil de l’Arctique, et des observateurs que ce ne soit pas politisé. Parce que l’Arctique, c’est une responsabilité de nous tous, on ne peut pas le politiser ».
De plus, en raison des changements climatiques et du risque de catastrophes « naturelles et humaines » démontre la nécessité d’engager des unités de sauvetage dans des zones où les opérations sont coûteuses. Les forces armées seraient parfois les seules à pouvoir assurer cette protection dans ces zones difficiles, expliquant la modernisation des infrastructures. « Par ailleurs, cette côte, contrairement à la côte canadienne, est fortement peuplée et développée (routes, infrastructures, etc.). Les problématiques pécuniaires et matérielles liées à l’opérabilité de bases militaires ne sont donc pas comparables à celles du Canada, dont les côtes pauvres en infrastructures ne permettent pas une forte présence militaire. », explique l’observatoire de l’arctique.
Celle-ci explique la différence d’approche « grand public » du traitement médiatique des enjeux nordiques : au Canada, les questions se rapprochent des prises de position sur les problématiques régionales alors qu’en France, on questionne presque exclusivement la Russie et son programme militaire.
D’un point de vue technique, les États restent en difficulté quant à l’exploitation des ressources en conditions extrêmes, ils sont limités par leurs capacités techniques. Pour F. Lasserre, A. Choquet et C. Escudé-Joffres, il est important de déconstruire le mythe de l’« ouverture » pour souligner certains effets contradictoires du changement climatique : si ces changements « facilitent l’accès aux espaces maritimes, ils viennent compliquer l’accès aux zones terrestres en rendant la construction d’infrastructures difficile et coûteuse », souligne Doumergue. Le dégel des sols pourrait selon elle coûter plus de 68 milliards de dollars au Kremlin d’ici 2050, alors que 40 % des infrastructures construites sur des zones exposées à la fonte du pergélisol ont déjà subi des dommages.
Pléthore d’investisseurs privés et publics s’engagent dans le Grand Nord et capitalisent sur le positionnement de certaines villes en les dotant d’infrastructures afin d’en faire des « hubs » commerciaux. Pourtant, certains spécialistes dénoncent les spéculations sur l’usage futur de ces routes, car bien que représentent dans certains cas des gains kilométriques notables pour certaines livraisons, il n’est pas non plus de remplacer le canal de Suez. Outre la question des coûts liés à la navigation polaire, F. Lasserre, A. Choquet et C. Escudé-Joffres considèrent que « l’incertitude entourant la fiabilité du temps de transit » par ces passages est difficilement « conciliable avec la façon dont travaillent actuellement les armateurs » (Doumergue). Ainsi, « le scénario d’autoroutes maritimes [arctiques] […] traduit surtout une piètre connaissance des contraintes du marché du transport maritime », selon les trois chercheurs mentionnés précédemment. Cette dernière partie n’est pas faite pour nier les enjeux ou les possibles dangers, mais seulement de montrer leur caractère plus subtil, plus complexe. On ne peut se permettre de donner une réponse simple à une analyse simple, au risque de créer un effet auto-réalisateur en attisant l’inquiétude face à une situation qui est traitée par la diplomatie.
Enfin, il est plus que nécessaire de questionner ce qui ne l’est pas fréquemment. L’exploitation des ressources naturelles en Arctique représente un double danger : le dérèglement climatique et la guérilla. Nemtchenko explique dans un article publié par l’IRIS « En effet, le peu de considération des 5 États arctiques pour les peuples autochtones comme le manque de conscience écologique des différents exploitants industriels donne d’ores et déjà lieu à certaines tensions. À titre d'exemple, le positionnement inuit sur l’autonomie du Groenland pourrait donner des idées à d’autres. Tchouktches, Evenks, Koriaks, Samis et autres Yupiks sont autant de peuples qui ont vu les « blancs » venir souiller leurs terres en exploitant leurs ressources et souvent sans considération pour leur croyance ou leur mode de vie. ».
Il existe aussi un danger qui est parfois mentionné par l’UE et le Canada, qui sont les problématiques environnementales. Les activités minières, l’extraction d’hydrocarbures, la pêche, etc. représentent de sérieux dangers quant à la sauvegarde de la biodiversité et à la limitation d’émission de gaz à effets de serre. Il est légitime de nous questionner sur l’omission, volontaire ou non, des questions des droits des autochtones et de la protection de l’environnement. Alors que les nations affrontent leurs regards, sur cette zone naturelle et géographique très riche, est-il légitime de perdurer dans cette optique ?
Ouvrages et chapitres d'ouvrages :
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Articles scientifiques et contributions en revues :
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