Compte-rendu de notre réunion du mardi 11 janvier 2022
Le bal des folles
Victoria Mas
Nous étions 10 ce mardi-là et 3 stagiaires de la médiathèque se sont joints à nous. Ils se sont présentés: un élève du Greta, une élève de seconde du lycée de Céret et un étudiant en troisième année de lettres à l’université de Perpignan.
On a d’abord résumé le roman pour qu’ils sachent de quoi nous allions parler. (Il a fallu préciser ce qu’est la Salpêtrière). Puis on a échangé à notre habitude sur ce roman.
La lecture en est facile, le style fluide.
Derrière cette simplicité se cache un fait social très profond: la condition des femmes au XIX siècle et un fait historique: les recherches médicales de Charcot sur l’hypnose et l’hystérie.
La condition de la femme nous a révoltés: un mari, un père peut faire interner son épouse, sa fille sans que celle-ci puisse dire quoi que ce soit. C’est ce qui arrive à l’héroïne Eugénie. Une fois entrée à l’hôpital, elles sont le jouet des médecins qui font leurs expériences sur elles, expériences qui peuvent parfois mal tourner comme quand Louise reste paralysée à la suite d’une séance d’hypnose. Ces femmes s’adaptent et se soumettent. Par inconscience? Par fatalisme? Plus étrange, elles sont parfois heureuses de leur situation comme Thérèse qui ne veut surtout pas sortir dans un monde qui lui fait peur et préfère rester là à tricoter inlassablement pour ses compagnes. L’hôpital est un asile au sens de lieu de protection pour plusieurs d’entre elles qui n’ont plus à craindre mari violent ou souteneur. Se créent entre elles des liens qui les poussent à s’entre-aider. Les séances avec les médecins de l’entourage de Charcot sont éprouvantes mais elles sont mises en valeur donc ravies. Le moment du bal annuel est pour elles un moment de grande effervescence: choisir son costume, le confectionner, l’essayer et ..rêver d’être demandée en mariage ce jour-là !! Elles ne se rendent pas compte que les bons bourgeois parisiens viennent à ce bal pour s’encanailler et profiter de leur innocence
Cette histoire est poignante et révoltante mais on y trouve une lueur d’espoir. Geneviève, une infirmière rigide au début et admiratrice des travaux de Charcot se prend d’amitié pour Eugénie et peu à peu se rend compte de la cruauté de la situation de ces femmes (au point qu’elle va aider Eugénie à s’évader) Le frère d’Eugénie venu avec son père accompagner sa sœur à l’hôpital est peu à peu pris de remords et cherche à l’aider. Cette prise de conscience de certains permettra de faire évoluer la situation de ces malheureuses.
Ce roman a beaucoup plu. Un bémol pour certaines : trop de présence «d’esprits», de surnaturel (Eugénie voit et entend des personnes décédées depuis longtemps) mais pour d’autres cela apportait un peu de rêve, de légèreté dans ce contexte si dur. La fin a pu laisser perplexe: Eugénie s’évade mais où ira-t-elle ? Pas chez elle assurément, certainement chez les tenants de le librairie ésotérique qu’elle fréquentait avant son internement.
Après ces échanges toujours fructueux, nous avons partagé la traditionnelle «galette des rois» avec les jeunes stagiaires.