Compte-rendu de notre réunion du mardi 14 janvier 2025
Du Domaine des Murmures Carole Martinez
Onze avis ont été donnés sur ce roman. L’un a été très négatif, un autre mitigé, les autres élogieux.
Une lectrice a souligné le caractère très sombre et prétentieux de ce texte sans aucune poésie à ses yeux, mais fait de vide, d’invraisemblable ; un roman écrit par une autrice troublée en manque de quelque chose.
Une autre lectrice n’a pas trop aimé cette histoire d’une jeune fille privilégiée qui a choisi une vie difficile comme sur un caprice semble-t-il mais a apprécié le récit des Croisades (ce qui lui a d’ailleurs donné envie de relire Jeanne Bourdin)
Cette évocation de la 3ième croisade a été diversement jugée : on a pu voir là un peu comme une verrue dans le récit essentiel : mais ça a pu aussi paraître comme un rêve, une vision, une aventure facilement mise en image par cette jeune recluse qui est souvent inactive et dont l’esprit est un peu perturbé. (et cela a été un rappel historique)
Les blessures dans les mains du bébé ont aussi posé question : cruauté du père ? Non, acte plutôt nécessaire pour faire croire au miracle. Si le bébé avait été normal, la maman aurait été rejetée ; là il y a une marque divine ; on ne peut que s’incliner devant la mère .
La transformation du fiancé violent, Lothaire, en troubadour amoureux a été jugée un peu invraisemblable ou comme une forte preuve d’amour.
Tout le monde a apprécié le rôle de l’évêque,Thierry II, peu chrétien mais très technicien.
Ceux qui ont beaucoup aimé ce livre ont insisté sur le mélange croyances religieuses,légendes, mythes, obscurantisme religieux et croyances païennes, mysticisme et histoire.
Une lectrice intéressée par l’Histoire a fait des recherches. Elle nous a appris comment l’autrice se destinait à écrire un récit sur Barbe-Bleue et cherchait un château où le situer et comment elle a trouvé ce Domaine qui existe vraiment en Bourgogne. Et en Bourgogne, il n’y a pas bien longtemps on se méfiait encore des légendes, dans les forêts le long de la Loue, parole d’une bourguignonne !
Elle a aussi présenté les Recluses, des femmes plutôt pauvres ou malades rejetées par la société.
On a pu constater que les gens se déplaçaient beaucoup au Moyen-Age et pas seulement pour les Croisades, surtout pour vénérer des reliques.
On a surtout été envoûtés par le coté mystique de ce récit, par cette fille, Esclarmonde, qui croit en un idéal, par tous ces gens qui croient aux intercessions de cette jeune recluse pour rendre leur vie plus douce. (Peut-on oser le mot ‘influenceuse » ?)
Et enfin n’oublions pas de souligner combien ce récit donne la parole aux femmes qui peuvent diriger un domaine en l’absence de leur époux, qui osent se rendre auprès du pape, qui
prennent le dessus sur leur mari ou fiancé et même sur leur père. L’amour filial, la maternité ont adouci la cruauté de certains passages.
Le titre évoque le château qui existe réellement et le contexte dans lequel vit l’héroïne : on murmure beaucoup autour d’elle…..
Donc un livre qui a bien plu, un conte médiéval au-delà du temps, du royaume des vivants et des morts, de l’Histoire et de la Légende, de la réalité et de la fiction où la poésie se mêle à la
cruauté.