Cameroun
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LIBÉRATION DES ÉTUDIANTS CONDAMNÉS À 10 ANS DE PRISON POUR UNE BLAGUE SUR BOKO HARAM
« La libération de Fomusoh Ivo Feh, Afuh Nivelle Nfor et Azah Levis Gob, les trois jeunes hommes qui ont été punis contre toute logique simplement pour avoir partagé une blague sur leur téléphone portable est un grand soulagement. Savoir qu’ils ont été libérés ce week-end [26/12/2021] et qu’ils ont enfin pu retrouver leur famille après sept longues années derrière les barreaux nous remplit de joie.
« Toutes les personnes qui ont fait campagne sans relâche en faveur de leur libération, notamment les plus de 300 000 personnes à travers le monde qui ont écrit en 2016 au président Paul Biya pour lui demander de mettre fin à cette injustice, ont également été ravies d’apprendre qu’ils sont enfin libres. Ces trois étudiants, qui n’ont fait qu’exercer pacifiquement leur droit à la liberté d’expression, n’auraient pour commencer jamais dû être arrêtés. Les autorités camerounaises doivent protéger les droits humains et veiller à ce que toute personne puisse s’exprimer librement sans craindre de représailles. » Samira Daoud, directrice pour l’Afrique de l’ouest et l’Afrique centrale à Amnesty International
Originaire de Bamenda, au nord-ouest du Cameroun, Fomusoh Ivo Feh, 27 ans, semblait promis à un bel avenir. Il avait réussi son General certificate of education (GCE), l’équivalent de notre baccalauréat et s’apprêtait à entrer à l’université. Avant qu’un SMS sarcastique ne bouleverse le cours de sa vie.
À la fin de l’été 2014, Ivo reçoit d’un ami ce texto : « Boko Haram recrute des jeunes à partir de 14 ans. Conditions de recrutement : quatre matières au GCE, y compris la religion ». Manière de dire, sur le ton de la plaisanterie, qu’il faut être bon élève et réussir ses examens pour prétendre être embauché, même par un groupe terroriste. Ivo a la mauvaise idée de faire suivre le texto à un ami qui l’envoie à un autre lycéen. Un enseignant en prend connaissance, confisque le portable et alerte la police. La blague de potache se transforme de manière inconsidérée en affaire d’État.
Ivo et ses deux amis sont arrêtés entre septembre et décembre 2014, incarcérés et accusés d’avoir tenté d’organiser « une rébellion contre l’État ». Après plusieurs renvois, le tribunal militaire a enfin jugé ces très dangereux lycéens le 7 septembre dernier. Au terme de l’audience, Ivo et ses amis ont été reconnus coupables pour « non-dénonciation » et condamnés, le 2 novembre, à dix ans de prison ferme par le tribunal militaire de Yaoundé. L’erreur d’Ivo a sans nul doute été d’avoir grandement sous-estimé le niveau de tension régnant dans le pays, en particulier dans l’Extrême-Nord
Dernière mise à jour : 27/12/2021