Rappel des nouveautés en matière d'exécution forcée immobilière

Il existe trois voies d’exécution :

- la procédure d’attente qui est l’inscription de l’hypothèque d’exécution forcée

- l’exécution forcée elle-même

- une voie un peu oubliée : l’administration forcée des immeubles. Le créancier fait nommer un administrateur qui distribuera les fruits de l’immeuble.

Cette voie s’avère intéressante si on ne souhaite pas devenir adjudicataire.

Les titres exécutoires

Il s’agit de tous les titres, étrangers et français.

Les titres du droit local sont exécutoires s’ils mentionnent la soumission à l’exécution forcée.

La seule exception concerne le partage judiciaire pour lequel l’ordonnance est exécutoire immédiatement.

La créance doit toujours être déterminée ou déterminable.

Une difficulté peut se présenter en matière d’ouverture de crédit.

Pour éviter les contestations il faut impérativement inclure dans l’acte une procuration donnant mandat irrévocable, en général à un clerc du Notaire, d’arrêter le solde débiteur.

Selon le décret du 07.10.2004, une procuration par acte sous seing privé est acceptée mais la signature doit être légalisée par Notaire.

A noter : pour l’exequatur, jusqu’à la réforme introduite le 10 janvier 2015, l’acte notarié européen sera soumis pour exequatur au Président de la Chambre des Notaires compétente s’il s’agit d’un titre étranger et, s’il s’agit d’un titre français à exécuter à l’étranger, la compétence appartient au Greffier-Chef de la juridiction.

Titres et annexes :

Selon un arrêt de la Cour de Cassation du 13 décembre 2012, le titre est valable même si la procuration du prêteur n’est pas annexée.

Voir aussi arrêt IIIème Civ., 7 fév. 2012

Titre contre un tiers :

Caution hypothécaire

L’identité du débiteur ainsi que la créance doivent être mentionnées précisément.

A noter : art. 2191 du Code civil, pour un prêt de refinancement, l’objet change donc il y a novation. La garantie est de ce fait éteinte.

Les juridictions compétentes

Le Juge de l’Exécution est compétent pour se prononcer sur le titre jusqu’à l’enregistrement de la requête forcée au Tribunal de l’Exécution Forcée Immobilière :

Selon une certaine doctrine, le juge de l'exécution resterait compétent jusqu’à ce que le cahier des charges ait été rédigé.

A noter : en cas de prêt à une entreprise individuelle, il appartient à la banque d’informer le débiteur qu’il peut donner en garantie un bien de l’entreprise avant d’hypothéquer un bien personnel. Si cette information n’est pas donnée, la garantie est perdue.

En cas de prestation compensatoire par abandon d’un bien immobilier, ce bien sera insaisissable, le juge du divorce peut également libérer un des époux de ses engagements pour l’entreprise, ce qui rendra toutes poursuites impossibles.

Les clauses d’inaliénabilité

Le motif doit être énoncé, il doit être temporaire mais peut être viager.

L’action oblique des créanciers est impossible car la clause est personnelle.

Biens de famille :

La Loi de 1909 sur les biens de famille a été abrogée en 2011. Les biens de famille étaient insaisissables.

En cas de clause de tontine le bien est également insaisissable car le propriétaire n’est pas connu jusqu’au décès de l’un d’eux.

Déclaration d’insaisissabilité :

Un acte notarié est obligatoire ainsi qu’une publication.

Les biens ne doivent pas être professionnels.

En cas de liquidation judiciaire, le liquidateur ne peut pas demander la levée de la clause ou vendre le bien.

CA COLMAR, 22.06.2011 et CA COLMAR, 13.03.2012.

L’adjudication

Adjudication d’un immeuble et d’un fonds de commerce :

L’adjudication globale n’est pas possible, deux procédures seront nécessaires : une vente forcée immobilière pour l’immeuble et une vente de fonds de commerce selon l’article L143-13 du Code de commerce.

Il est à noter que le cahier des charges peut éventuellement prévoir que l’adjudicataire consentira un bail au commerçant établi.

Le commandement préalable à la vente forcée :

Le commandement de droit local n’a pas les mêmes effets qu’en droit général.

Il n’emporte pas saisie.

De ce fait un clerc assermenté peut signifier le commandement.

Le commandement n’interrompt pas la prescription.

La requête enregistrée au Tribunal de l’exécution Forcée interrompra la prescription.

Le commandement ne doit pas être publié comme en droit général.

CA METZ, 15.05.2013

Il n’y a pas non plus de délai à respecter entre le commandement et la requête.

Il n’y a donc pas de risque de caducité.

Le Tribunal de l’Exécution Immobilière:

Si plusieurs biens immeubles sont situés dans le ressort d’un même Tribunal de Grande Instance, le créancier devra saisir le Tribunal de Grande Instance qui désignera le Tribunal d'instance compétent.

S’il s’agit d’immeubles situés dans des ressorts de Tribunaux de Grande Instance différents, le Tribunal de l’Exécution compétent sera celui du lieu de situation du domicile ou de la résidence du débiteur.

Le Tribunal de l’Exécution Forcée Immobilière est compétent à compter de sa saisine pour toute demande de sursis, toute question ayant trait à la prescription de la créance, le principe de la créance.

Le Tribunal de l’Exécution Forcée Immobilière saisi notifiera selon l’article 45 de la Loi de 1924 aux créancier(s) et débiteur(s) l’ordonnance rendue.

Le délai de 15 jours pour former pourvoi se décompte à compter de la réception de l’ordonnance.

A compter de l’ordonnance, le débiteur devient séquestre du bien saisi, il ne peut plus le vendre ni s’approprier les fruits de l’immeuble.

Le pourvoi immédiat n’est pas obligatoirement motivé.

Cela a été tranché par la Cour de cassation par un arrêt du 04.03.2004.

Le Juge doit inviter à le faire.

L’ordonnance de vente forcée est publiée au Livre Foncier selon l’article 45 de la Loi de 1924.

La procédure devant le Notaire

Toute décision du Notaire peut être soumise à des observations ou objections auprès du Tribunal de l’Exécution Forcée Immobilière.

En fin de procédure, le procès-verbal d’adjudication est un titre d’exécution.

En ce qui concerne le créancier poursuivant, s’il ne se présente pas à l’adjudication, il est présumé avoir tout abandonné la procédure.

Si la procédure aboutit et qu’un procès-verbal d’adjudication est rédigé, une copie sera adressée aux créanciers inscrits ainsi qu’à ceux qui détiennent une hypothèque légale.

La procédure de liquidation judiciaire en cours d’adjudication

Le liquidateur peut reprendre la procédure à son compte.

Par ailleurs, en cas de carence du liquidateur pendant trois mois, les créanciers hypothécaires et privilégiés peuvent reprendre la procédure.

Cependant, c’est le Juge Commissaire qui fixera le cahier des charges ainsi que la mise à prix.

Les débats – Article 147-2 de la Loi de 1924

Un délai de convocation des parties n’est pas prévu.

La convocation se fait par lettre recommandée avec accusé de réception.

La signature doit être lisible.

Si le débiteur refuse la lettre recommandée, la citation se fera par voie d’huissier.

Si le débiteur demeure à l’étranger, il devra désigner un fondé de pouvoir dans le ressort du Tribunal d'instance.

Il est utile de préciser cette obligation dans la requête lorsque le débiteur réside à l’étranger.

Le procès-verbal d’adjudication n’a pas être signé par les parties, sauf en cas d’accord.

Le cahier des charges

La Loi Carrez n’est pas applicable à l’adjudication.

Cass. 03.10.2002

Le délai de rétractation ne s’applique pas.

Par contre les diagnostics techniques doivent être faits.

Aucun délai n’est fixé pour la rédaction du cahier des charges.

La date de l’adjudication doit quant à elle être fixée dans les trois mois de la rédaction de ce cahier des charges.

La publication doit être faite au plus tôt deux mois avant l’adjudication et au plus tard quinze jours avant.

La mise à prix est faite par le Notaire mais des objections sont possibles.

Les incidents

Une condition suspensive au paiement du prix n’est pas possible.

Des obstacles au libre jeu des enchères entraînent l’annulation.

A noter : la déclaration de command supprimée en droit général perdure en Alsace – Moselle.

Le délai est de trois jours pour indiquer pour qui on a procédé à l’adjudication.

Les effets de l’adjudication

- A l’égard des créanciers – art. 162 al. 2 Loi de 1924

Dès le dépôt au Livre Foncier, la purge des inscriptions intervient. Les garanties sont reportées sur le prix de vente.

- A l’égard du débiteur

Sur requête du Juge de l’Exécution Forcée Immobilière, l’expulsion de l’occupant est possible. Il est également possible de solliciter une indemnité d’occupation.

L’adjudicataire doit respecter le cahier des charges, payer le prix.

A noter qu’une clause résolutoire est possible dans le cahier des charges.

Le Tribunal constatera le jeu de la clause résolutoire.

A noter également : l’hypothèque doit être renouvelée jusqu’au paiement du prix suite à l’adjudication. De même en cas de liquidation, le renouvellement est bien sûr possible, même si aucune inscription nouvelle ne l’est.

La procédure collective

Si une liquidation judiciaire intervient après liquidation

La liquidation a un effet malgré tout sur la distribution qui relèvera du liquidateur.

Il est à noter que le règlement d’une provision ne libère pas du paiement.

Cass. Civ., Ch. Civ. 2, 06.06.2013

Déclaration d’insaisissabilité en cas de liquidation judiciaire

L’insaisissabilité est opposable au liquidateur.

Le bien ne sera pas dans le périmètre de la liquidation.

Cela signifie que le créancier pourra poursuivre l’exécution comme si le débiteur avait deux patrimoines distincts.

QUESTIONS D’ACTUALITE :

La Cour d’Appel de COLMAR suggère, afin de respecter le principe contradictoire soit respecté, que les Tribunal d’Instance notifient la requête du créancier en même temps que les ordonnances.

Sur problème du contradictoire en matière de procédure d’exécution

Cass. 21.03.2002, CA COLMAR, 03.03.2000, CA COLMAR, 08.06.2007

La Cour estime que les règles du contradictoire telles que fixées par la Constitution et CEDH ne s’appliquent pas à la procédure devant le Notaire mais par contre s’appliquent à la procédure contentieuse.

Sur les procurations à annexer aux actes notariés

La Cour d’Appel de COLMAR, confirmée par la Cour de Cassation, estime que même si les procurations et délégations de pouvoir ne sont pas annexées, l’acte reste parfaitement exécutoire.

L’omission ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique.

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La Cour d’Appel de COLMAR rappelle également que la prescription dépend de la nature de la créance et non du titre.

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Un autre arrêt rappelle que la cession de rente d’un usufruit ne fait pas disparaître l’usufruit, la cession de rente n’est possible qu’entre droits de même nature. En matière d’usufruit il faudra donc une renonciation.

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Dans un arrêt récent, la Cour a également confirmé qu’un acte de prêt ne peut pas procéder au calcul des intérêts sur année civile de 363 jours au lieu de 365, la sanction est la nullité des intérêts.

Arrêt du 17.09.2013

Surendettement

En cas de surendettement, la Cour d’Appel a également confirmé que la recevabilité du surendettement interdit toutes poursuites.

En cas de vente forcée immobilière, le report ne peut cependant relever que d’une ordonnance du JEX saisi par la Commission de Surendettement.

Si la date d’adjudication forcée est déjà fixée, seule la commission pourra demander le report pendant une durée maximale d’un an.

CA COLMAR, 13.04.2013

Péremption

La Cour d’Appel de COLMAR estime que la péremption d’instance ne peut intervenir tant que la procédure se déroule devant le Notaire car il ne s’agit pas d’une instance contentieuse.

Dans le cadre du pourvoi devant la Cour d’Appel, la péremption pourra intervenir.

En effet, le pourvoi rend la procédure contentieuse.

En cas de suspension par la banque de la procédure pendant plus de deux ans, la péremption sera intervenue.