16 février 2018
CONFIDENTIEL
« Je ne voudrais pas que ce courrier soit diffusé, car j’y énonce des opinions que je souhaiterais exposer moi-même le cas échéant. »
Bonjour Isabelle,
J’ai fait l’effort de décoder le message que j’ai reçu ce matin.
Ce que je comprends...
1. Je comprends que le comite de pilotage a accepté le paiement d’honoraires pour le travail que toi et moi réalisons dans le cadre du projet de recherche.
2. Suzanne se demande si il était possible que tu sois en conflit d’intérêts avec le code d’éthique de l’ACCPQ. À cette interrogation, tu réponds faire la vérification avec le CA.
[À cet égard, je ne crois pas que tu sois, ni moi, en conflit d’intérêts. Sinon, depuis le debut, on l’aurait été et le CA a toujours entériné le travail ainsi que les modalités.]
3. Suzanne suggère que Ginette te remplace ou s’ajoute à l’équipe.
Mes réactions et commentaires...
1. Si toi ou moi avions été en conflit d’intérêts avec l’ACCPQ, comme je le mentionne ci-dessus, cela aurait été dénoncé bien avant le moment présent.
2. Si toi ou moi sommes en conflit d’intérêts, j’imagine que Suzanne ou Nancy le seraient tout autant, car je ne comprends pas comment ou en quoi toi ou moi serions plus en conflit d’intérêts qu’elles pourraient l’être.
3. Il y aurait conflit d’intérêts si toi ou moi prenions une décision qui va à l’encontre d’une démarche rigoureuse et scientifique fondée sur l’objectivité et l’impartialité. À cet égard, je suis convaincu que, depuis le début, toi et moi avons fait preuve de ces postures fondamentales d’une recherche dite scientifique.
4. J’ai de la difficulté à comprendre que Ginette ou Abla seraient plus neutres, ou impartiales, ou objectives. Je ne saisis pas le sens de cette avancée. J’aime bien travailler avec Ginette, pour l’avoir fait à plusieurs reprises, mais je me demande si elle-même ne serait pas en position de malaise face à une éventuelle demande de ce genre.
5. Je comprends la démarche de Suzanne de « garantir » l’objectivité et l’impartialité de la démarche; je la perçois fort bien, dans son rôle, de gardienne de l’intégrité de la démarche.
6. Si on parle de conflit d’intérêts, j’ai un plus grand malaise quant à la présence de Nancy. Elle a été intégrée à cause du poste qu’elle occupe plutôt que ses compétences ou expériences dans le domaine d’étude de la recherche. Je ne doute pas de ses compétences à titre de chercheurs, mais elle a toujours été enseignante au secondaire.
7. Dans cette phase importante d’analyse et d’interprétation, on ne peut pas faire fi de l’expertise et l’expérience que toi et moi avons acquises. L’interprétation repose sur le cadre de référence que toi et moi avons élaboré et qui a été cautionné par Suzanne. C’est fondamental. À cet égard, je ne reconnais pas l’aisance de Abla, ni de Nancy. Certes, Nancy peut s’y appuyer, mais elle n’a pas fait la « longue » démarche de réflexion, d’appropriation et de construction.
8. La question, quand j’ai entendu parler de conflit d’intérêts, que je porte est la suivante : En quoi toi et moi serions plus en conflit d’intérêts que peut l’être Suzanne? Le chercheur conserve toujours une certaine subjectivité; il est impossible d’en faire fi. Toutefois, l’objectivation de ces choix doit être fondée sur le cadre de référence.
9. En conclusion, il s’agit de faire entériner par le ÇA, lundi, la décision du Comité de pilotage. Je suis assuré de l’appui inconditionnel de ses membres. Toi et moi devons conserver le poste et jouer le rôle qui nous ont été assignés et dévolus.
J’espère avoir été clair et précis; j’avais besoin de décortiquer la question. Je peux comprendre le souci de Suzanne, il est juste et approprié, mais je retiens le fait qu’il y aurait eu conflit d’intérêts si on avait perçu une carence d’impartialité ou un manque flagrant d’objectivité. Cordialement, bon vendredi, bonne fin de semaine.
Donald GUERTIN
19 décembre 2017
Bonjour Isabelle,
Je suis content d’apprendre que ton garçon se porte bien et est rétabli; quelle bonne nouvelle!
Au sujet de la question que tu formules, elle est certes fondamentale. Voici quelques pistes de réflexion que je suggère.
1. Je crois que cette façon de construire une définition, autrement que de la prendre toute faite chez un auteur, en associant des mots-clés qui, comme notions, donnent une clarté à la définition. J’ai fait cette démarche des dizaines de fois avec différents intervenants. Et c’est probant.
2. Certes, l’exercice qui donne de la validité à une définition est de la contextualiser; ainsi, on mesure la validité, la rigueur, la qualité et la pertinence de la définition. En la contextualisant et en la decontextualisant, on apprécie la justesse de ladite définition. En d’autres termes, peut-on appliquer la définition dans tel ou tel contexte?
3. J’ai toujours été impressionné par l’exemple que donne Britt-Mari Barth dans son livre, l’abstraction ou la construction du savoir (je ne me souviens pas, mais je retrouverais la référence). Elle a demandé à des professeurs de mathématique de niveau universitaire de définir ce qu’est un parallélogramme. Elle a obtenu 32 définitions différentes... Une définition n’est pas absolue, n’est pas une vérité. C’est un outil pour interpréter une situation dans un contexte donné. À la suite de cet exemple, tu pourrais demander à tes collègues de définir une notion aussi simple que ce qu’est un parallélogramme et leur présenter les 32 définitions obtenues de “spécialistes” en mathématique.
4. Tu as raison de rendre le processus transparent et de préciser que le choix de ta définition repose sur des références claires et précises; cela demeure le choix de l’auteure (en circonstance toi).
Selon moi, la résistance de tes collègues vient de leurs perceptions. C’est pourquoi il faut selon moi contextualiser la définition. Pour ce faire, ils peuvent être invités à décrire des situations et à mesure l’applicabilité de la définition à la situation décrite.
Je ne sais pas si ces précisions sont suffisamment claires et précises. Le plus souvent, lors des interventions que je me menais, je partais d’abord de situations et, à partir des récits, on dégageait des mots-clés qu’on n’organisait en schéma et en définition.
Je te souhaite un excellent séjour à Miami. Passe de belles vacances. Cordialement,
Donald G.
25 juillet 2016
Bonjour Isabelle,
Dans le but de poursuivre ou de nourrir la réflexion en cours sur la démarche et la méthodologie, je propose une réflexion que je porte depuis l'échange de courriers électroniques.
Dans le cadre de mes études en psychosociologie et, particulièrement, de mes études de scolarité de maîtrise (Université de Montréal en 1975 et UQÀM en 1984), j'ai eu plusieurs cours où étaient traitées les questions de logique, de rigueur, etc. C'était dans une optique de réflexion fondée sur la philosophie et la logique. En 1975, j'ai assisté au dernier cours de Pierre Lucier, l'ancien sous-ministre en Éducation, spécialiste en épistémologie (que les professionnels du MÉQ appelaient méchamment "Monsieur Virgule"). Tout cela m'a profondément marqué. J'ai une obstination "explicite" pour la rigueur dans une démarche de recherche.
Ainsi, dans ces cours, on traitait trois aspects importants de la recherche : l'épistémologie, l'heuristique et l'herméneutique. À cet effet, j'ai relu un texte de Grondin qui traite la question de l'herméneutique (l'interprétation). Il fait valoir le fait que, dans toute démarche d'interprétation, comme celle que nous avons entreprise, il y aura toujours une dualité entre l'objectivité et la subjectivité qui la fabriquent.
Or, ce qui est garant de la validité, de la justesse, de la pertinence de l'interprétation, est le fait que, dans l'ensemble de la démarche, soit montré le fait que les énoncés produits (agirs compétents) sont fondés sur des éléments objectifs et objectivables. Je suis personnellement préoccupé par la démarche, car elle est garante de crédibilité.
Illustration
Dans le cadre de projet, si je reprends les propos ci-dessus énoncés, je pourrais affirmer que :
1. Les actes et gestes professionnels posés par les CP sont des éléments suffisamment objectifs pour être saisis, décrits, catégorisés.
Exemples : rédiger une rapport, émettre un conseil, proposer un plan d'intervention, consulter la recherche, etc.
2. Ces gestes et actes professionnels sont "mobilisés" dans des situations dites professionnelles. Celles-ci sont, selon moi, plus aléatoires, contextualisés, circonstancielles, organisationnelles. Toutefois, même si elles diffèrent selon les milieux, elles appellent la mobilisation de gestes et d'actes professionnelles similaires.
Exemples : soutenir une équipe école dans la mise en place d'un ..., conseiller une équipe de direction au sujet du développement professionnel du personnel enseignant de leurs école, mettre en œuvre avec une équipe d'enseignement une communauté d'apprentissage, etc.
3. Déjà, avec les situations professionnelles, on introduit davantage la dimension "subjective". Afin de garder du "pouvoir" sur la démarche, il faut être en mesure d'y repérer les gestes et les actes professionnels.
4. Quant aux agirs compétents, il sera possible de les dégager en "interprétant" (démarche herméneutique) à travers l'analyse des situations où sont mobilisés les gestes et les actes professionnels. En fait, c'est la question du "pourquoi agir ainsi" dans telle situation...
Exemples d'agirs compétents : favoriser le développement professionnel de personnels scolaires, favoriser l'engagement des individus dans la mise en œuvre de projets ou d'activités pédagogiques, etc.
5. Pour en arriver là, il faut que la démarche inductive, à caractère herméneutique, soit garante de la validité des énoncés produits. À cet égard, il faut être soucieux des composantes nécessaires à la mise en œuvre de la démarche inductive. Or, le contenu obtenu (données) et produit (interprétation) pourra être validé.
Je réfléchis à tout cela depuis une semaine. Je suis préoccupé par la démarche rigoureuse. Cordialement,
Donald