Janvier 2019
PS Ce courriel n'est pas parti au moment de l'envoie! Je le renvoie maintenant!
Cher Donald,
Tout d'abord un grand merci pour votre lecture, cela rend autrement engageant le travail! Je viens juste de faire une première lecture sur papier et mes premières remarques concernent justement le manque de liens - notamment quand elle introduit le concept de "intersubjectivité" mais à plusieurs endroits - comme vous me signalez!!
Avant d'aller plus loin (je dois quitter mon bureau dans quelques minutes), j'ai une question. Quand l'étudiante présente les modèles de médiation (triangle de J.H. + carrré de R.), elle poursuit avec mon modèle opératoire du concept. Pour moi, ce n'est pas le même niveau d'abstraction, c'est un outil à l'intérieur de l'approche. J'ai inséré, juste pour que vous pussiez voir, trois autres schématisations qui, l'une ou l'autre (avec explicitations) pourrait mieux convenir pour la comparaison. Je joins le texte ou j'ai simplement inséré ces schémas. (p. 8,9,10,11 dans cette pagination) pour que vous pussiez voir de quoi je parle.
Excusez ma hâte, je reviens à un autre moment, c'est la soirée ici! Bien à vous,
Britt-Mari BARTH
4 janvier 2019
Merci, Donald, pour ces nouvelles "supplémentaires" qui m'ont fait plaisir!! J'imagine la beauté de votre lieu au Mexique! Cela donne envie de s'y rendre - à Paris nous n'avons eu que grisaille et humidité!
J'étais heureuse d'apprendre les bonnes nouvelles de santé pour les maris de Josée et Danièle!! C'est vraiment extraordinaire dans les deux cas!
Bravo pour le travail sur "conseillance pédagogique", vous me tiendrez au courant!
Le temps des fêtes et des vacances scolaires se termine - heureusement, je dirais presque, car c'est un temps très intense qui vous laisse un peu fatigué quand tout se termine! Nous étions heureux d'avoir toute la famille rassemblée (sauf Christophe, Mai et Max, bien sûr, trop loin - et la nouvelle naissance approche, plus tôt que prévu.... Les conditions là-bas ne sont pas les mêmes, et je ne me sentirai pas tranquille avant que tout se soit bien passé...
J'ai beaucoup de travail avec les doctorants. Je codirige également (avec Sylvie Cartier à l'Université de Montréal) le nouveau projet de thèse de mon "ancienne étudiante", aujourd'hui amie et collège, Sylvie Léone (ancienne prof de maths, également pour sourds ) je vous en avais parlé, je crois. Dans le cadre de ce travail (sur l'inclusion), elle doit faire une synthèse de lectures sur trois thèmes donnés. Pour l'instant, elle vient d'envoyer celle de "Thème 2 : la médiation en formation des enseignants" que je dois lire et commenter sur le fond et la forme. Auriez-vous le temps de le lire et de donner vos commentaires (moins de 20 pages de texte)? C'est juste une question, je comprends bien si vous êtes déjà trop pris par ailleurs - mais ce serait sympathique d'en parler avec vous! Je ne peux commencer la lecture que ce week-end moi-même et voudrais renvoyer le commentaire en début de semaine, avant mercredi.Vous me direz!
Portez-vous bien! Une nouvelle décennie commence, pleine de promesses!
Bonne continuation,
Amitiés,
B-M
Britt-Mari BARTH
Avril 2018
Bonsoir Donald,
Non, il faut surtout pas la diffuser, je ne sais pas qui peut comprendre quelque chose!
J'ai un mauvais passage : mardi dernier j'avais un RV à l'hôpital pour subir une intervention chirurgicale sur le nez (!) à cause d'un carcinome basocellulaire -je pensais que ce ne serait pas grand-chose, mais l'intervention a été plus invasive que prévue - et plutôt spectaculaire (je me demande quand je vais retrouver un visage normal!) et incommodante. Surtout, l'oeil droit est tout enflammé et je ne peux pas rester longtemps devant l'écran. Bon, "une leçon de patience" dirait mon père! J'espère ne pas avoir des séquelles à long terme; j'ai l'impression que le chirurgien y est allé un peu fort (25 points de suture!) par "prudence".
La semaine pascale approche, nous passerons le grand week-end avec Frédéric et famille en Normandie. Il semblerait que cette fois-ci la neige est définitivement partie!! Mes fleurs de printemps dans le jardin ont survécu la dernière couche!
J'ai reçu une intéressante invitation pour un séminaire national des IEN de mathématiques pour le mois de septembre. Malgré des hésitations, (et après quelques précisions de leur part), je pense que je vais relever le défi et l'accepter. Je suis en train de voir avec mes "anciens" ce qu'ils auraient (ou pourraient produire) comme exemple d'une séquence de conceptualisation en mathématiques - il s'agit du niveau CP, CE1 et CE2...Si jamais vous pensez à quelque ancienne situation enregistrée? Avec Sylvain? Le temps d'en faire une nouvelle? Il est vrai, je me suis susrtout investie en langue et littérature, histoire/géo, etc... et c'est pourquoi j'ai hésité..mais quand je vois le succès fulgurant de la "méthode Singapour" qui envahit la France - pas très différente de la construction des concepts - pourquoi pas?
Si jamais vous avez une idée la-dessus...
Merci pour le retour du courriel disparu! Le voyage en Italie a dû être formidable! Vous n'étiez pas à Villa San Michele, à Anacapri où le médecin suédois Axel Munthe a crée un lieu de rêve...cette côte est magnifique, je ne la connais que peu, cela me donne envie de revenir!!! Vous partez bientôt au Mexique!!!
Bien à vous (et salutations aux amis communs si vous les voyez!),
B-M
Invitation - confidentielle :
"De : EVELYNE TOUCHARD <evelyne.touchard@education.gouv.fr>
Envoyé : vendredi 9 mars 2018 15:00
À : bmbarth@hotmail.com
Cc : scuchin@editions-retz.com
Objet : Séminaire national Enseignement des mathématiques au cycle 2
Bonjour Madame Barth
Dans le cadre du plan national de formation, la direction générale de l'enseignement scolaire, en collaboration avec l'inspection générale de l'éducation nationale, organise en septembre prochain, un séminaire sur l'enseignement des mathématiques au cycle 2.
Chargée de la mise en place de ce séminaire, je me permets de prendre contact, par l'intermédiaire de votre éditeur Retz, pour solliciter une intervention de votre part.
L'enseignement des fondamentaux à l'école primaire est une priorité du minsitre. L'enseignement des mathématiques en particulier a fait l'objet d'un rapport avec 21 mesures.
L'une d'elle concerne les étapes d'apprentissage en mathématiques fondées sur : la manipulation et l'expérimentation, la verbalisation, l'abstraction.
Vos travaux connus et reconnus sur " Le savoir en construction", " l'apprentissage de l'abstraction" "Elève chercheur, enseignant médiateur" entre autres, pourraient éclairer et nourrir la réflexion des participants.
Le public ciblé concerne 160 inspecteurs de l'éducation nationale du 1er degré chargés de la mission mathématique et inspecteurs d'académie-inspecteurs pédagogiques régionaux de mathématiques.
C'est dans cette perspective, que nous serions très honorés de votre présence sur ce séminaire qui se déroulera à l'ESENESR à Poitiers du 24 au 27 septembre 2018.
Je propose, si vous en êtes d'accord, d'organiser un rendez-vous téléphonique pour vous exposer plus précisément ma demande, lundi 12 après-midi ou mardi 13 mars dans la journée, à l'heure qui vous conviendra.
En vous remerciant par avance de l'interet que vous pourrez accorder à cette demande, je vous prie d'agréer Madame, mes très sincères salutations.
Evelyne Touchard
Chargée d'études mathématiques-sciences
DGESCO-MAF2
Direction générale de l'enseignement scolaire
Ministère de l'éducation nationale
110 rue de Grene75357 Paris SP 07
Clarification "L’objectif est de contribuer au développement des compétences professionnelles des IEN . Ces deniers ne sont pas spécialistes des mathématiques. Ils apprécieront une ouverture sur la construction des savoirs. Des ateliers d’analyse de pratique et de productions d’élèves seront proposés aux IEN pour qu’ils puissent conduire une réflexion de fond et s’approprier des outils (grille d’observation et d’analyse des erreurs) pour la formation continue des professeurs des écoles.
(des apports en didactique des mathématiques sur la numération, le calcul et la résolution de problème)"
Britt-Mari BARTH
De : braisd@videotron.ca <braisd@videotron.ca>
Envoyé : lundi 26 mars 2018 18:48
À : Britt-Mari Barth
Objet : Re : RE: Soutenance à Lyon
Bonjour Britt-Mari,
J’ai écouté la vidéo dont vous m’avez envoyé le lien. Je ne sais pas dans quel cadre cela a été réalisé; l’auteur, Boyer, est une personne dont je connais pas les antécédents. Selon moi, outre le fait de ne pas faire référence à vos travaux, il y a des erreurs didactiques et des données incomplètes. Je n’aurais pas tendance, personnellement, à diffuser cette vidéo. Qui plus est, je trouve qu’il fait un usage maladroit des exemples OUI et des exemples NON.
Cordialement,
Donald GUERTIN
Le 19/03/18, Britt-Mari Barth <bmbarth@hotmail.com> a écrit :
PS Quelqu'un m'a donné cette référence : quelqu'un au Québec qui propose une stratégie exemples oui/exemples non, sur le concept de "justification".
Cela aurait été bien de faire une référence au livre où il y a un exemple "en vrai"!
Stratégie exemple oui / exemple non
www.youtube.com
Amorce : Brève introduction à la stratégie d'exemple oui et exemple non dans un contexte de production écrite faisant appel à la justification
Britt-Mari BARTH
De : Britt-Mari Barth <bmbarth@hotmail.com>
Envoyé : lundi 19 mars 2018 15:37
À : Donald Guertin
Objet : Soutenance à Lyon
Cher Donald,
J'étais, ce dernier temps, plongée dans la lecture, l'analyse et l'écriture d'un rapport en vue de participer dans le jury de soutenance d'une doctorante que j'ai accompagnée ces dernières années - bien que Charles Gardou (handicap à Lyon) était son directeur officiel et avec qui elle a suivi les séminaires ces dernières années. La soutenance a eu lieu à l'Université Lumière-Lyon2, et malgré quelques inquiétudes avec une professeure de Genève (dans le jury) qui avait fait un pré-rapport un peu étonnant, cela a été très bien. La doctorante a été très bien accueillie et elle était méritante! Je vous mets ci-dessous l'introduction de mon "allocution" en tant que membre du jury; avant de commenter et poser des questions, je voulais situer notre rencontre. C'était un événement important pour moi (comme elle appliquait ma recherche pour faire la sienne) et je suis heureuse de penser que ses outils peuvent servir et avoir un impact auprès des enfants rencontrant des difficultés dans ce domaine.
En plein milieu de tout cela, j'ai reçu un courriel de vous avec plein de nouvelles que j'ai lu avec intérêt - mais figurez-vous, maintenant que je voulais le retrouver, impossible à le trouver!! Disparu! Pouvez-vous me le renvoyer?
J'ai bien appris avec soulagement (par Jocelyne) que l'opération a eu lieu!! C'est magique que ce soit possible!! Je suis tellement heureuse pour elle et pour lui! Pourvu maintenant que les premiers six mois se passent bien sans rejet!
Sinon tout va bien, nous avons encore de la neige sur Paris, mon jardin est tout blanc! et cache les jonquilles!!! En dehors de l'ISP et les tâches régulières, je dois préparer une conférence à tenir à Chambéry (colloque organisée par une Association un peu comme AQETA) sur l'apprentissage et la mémoire. Je me suis également engagée à faire le chapitre (20 pages, avec une structure imposée) sur Bruner dans un ouvrage universitaire collectif sur des "Penseurs en éducation". Ensuite il y a le colloque à Genève... Toujours pas de problèmes de loisirs!!
Portez-vous bien et tenez moi au courant,
Amitiés,
B-M
Voici l'introduction de mes commentaires lors de la soutenance. Je vous enverrai une photo par ailleurs, vous allez reconnaître Charles Gardou et Michel Develau.
Britt-Mari Barth, Professeure émérite de sciences de l’éducation, Institut Supérieur de Pédagogie, membre du jury.
Soutenance de thèse de Patricia Girardet le 14 mars 2018 à l'Université Lumière 2, Lyon.
Titre de la thèse : La construction de la compréhension des textes narratifs par des élèves avec troubles cognitifs : recherche conduite au sein d’unités localisées pour l’inclusion scolaire.
Félicitations pour le travail accompli. Une démarche exemplaire de recherche. Persévérance, implication. Travail soigné. Bonne connaissance du terrain, avec la volonté que tous les élèves atteignent le même objectif : réussir à apprendre. L’intérêt de votre sujet va sans dire et votre problématique est d’une grande actualité. En tant que chercheure, je ne peux qu’être heureuse de voir mon approche pédagogique utile dans un contexte spécifique qui est le vôtre.
Pour commencer je voudrais brièvement revenir sur votre parcours et notre rencontre sous forme de récit : Jerome Bruner nous a bien montré que le mode narratif de pensée est un mode complémentaire pour appréhender la réalité. Ensuite je reviendrai sur quelques points précis de ce parcours pour échanger avec vous.
D’abord le prologue :
Dans la situation initiale dont vous êtes le personnage principal l’objectif de faire réussir à apprendreles élèves avec troubles cognitifs, vous pose problème. Les enseignants ont du mal à réussir la tâche qui consiste à aider leurs élèves qui rencontrent des difficultés à comprendre des textes, notamment des textes narratifs. Pour vous, conseillère pédagogique, c'est une situation inacceptable, les enfants dans l’école inclusive ne doivent pas être exclus, dites- vous. Les enseignants se sentent impuissants et insatisfaits, les élèves perdent confiance en eux... vous sentez que vous devez agir.
Alors une rencontre se fait lors d’un colloque, vous rencontrez une chercheure qui s'intéressait justement à cette problématique et qui était déjà passée par ce parcours dans les classes ordinaires, mais n'avait pas eu l'occasion d'approfondir la question dans les classes spécialisées. Elle s’intéresse à votre problématique et se fait un plaisir de vous accompagner sur le chemin et de vous prêter ses lunettes conceptuelles. Il fallait à tout prix éviter que le « learned helplessness », l'impuissance apprise, ne s'installe dans votre environnement. Cela vous donne envie d'aller plus loin que les mémoires professionnels (qui était le point de notre rencontre) et de vous lancer dans une vraie recherche. Cette chercheure, c’était donc moi ; je vous conseille alors de contacter le professeur Charles Gardou, mieux placé que moi dans le domaine du handicap - tout en restant accessible pour vous tout au long du temps qui allait suivre, sur le sujet de l’approche socio-cognitive de la médiation que vous vouliez expérimenter dans votre environnement.
Dans un premier temps, il fallait lever les obstacles. C'était difficile d'organiser le temps et l'espace permettant de mener les expérimentations, de trouver les membres volontaires des groupes, nécessaires pour ce dispositif de recherche, d’avoir les accords institutionnels divers de votre hiérarchie… Mais votre engagement vous a permis d'avancer et de vous mettre en route. Avec quels outils, quels moyens ?
Vous avez souhaité mettre en œuvre une approche pédagogique de la médiation socio-cognitive pour examiner ses effets dans le cadre de votre recherche.
Cette approche réunit trois dimensions :
Une dimension praxéologique, qui offre des outils méthodologiques ; il s’agit ici des « scénarios pour comprendre », des stratégies ritualisées qui ont été conçues et expérimentées sur le terrain dans des classes ordinaires.
Une dimension explicative : un cadre théorique pédagogique, dans lequel s’inscrivent les concepts-clés qui le précisent et les outils qui le font fonctionner. Il prend la forme d’une grille d’analyse qui propose cinq conditions (ou étapes) pour favoriser la médiation socio-cognitive des apprentissages. Cette grille a été élaborée à partir de l’analyse de ce qui avait réussi dans mes expérimentations des scénarios et permet ainsi de s’ouvrir vers de nouveaux scénarios tout en respectant les principes pédagogiques énoncés.
Un cadre théorique et éthique interdisciplinaire qui fonde l’approche de manière explicite.
Vous avez jugé cette approche cohérente pour expérimenter une pédagogie de la compréhension, mise au service du développement de la pensée et de la construction du savoir. J’arrive maintenant à l’action : Que s’est-il passé ?
Dans la conduite de votre recherche, vous avez pu montrer que vous avez très bien intégré cette approche de la médiation, à la fois ses outils pédagogiques et la philosophie et l’éthique qui la fondent. En suivant les étapes de la grille, il fallait d’abord choisir votre concept clé : la compréhension d’un texte narratif. Ensuite, il fallait choisir ou fabriquer les exemples, les supports, qui pouvaient incarner ce concept, et ceci en fonction du transfert visé. Il fallait donc rendre ce savoir abstrait vivant pour en donner une expérience aux participants, leur permettre des rencontres avec le savoir mis-en-action. Et il fallait que les exemples soient cohérents avec le niveau de compréhension choisi. Vous avez donc conçu un outil cohérent avec le cadre théorique, j’y reviens.
Avec ces préparatifs en amont, afin de « rendre le savoir accessible » vous avez pu faire adhérer les enseignants à la tâche, jouant momentanément le rôle de formateur-médiateur. Le « défi » d'un problème à résoudre (reconnu par tous) ainsi que l'assurance de votre aide et d’un « accompagnement » ont effectivement engagé les participants dans un projet coopératif de recherche de sens. Ce « contrat d'intersubjectivité » a servi à rendre explicites les attentes mutuelles et les rôles de chacun, afin de créer la confiance nécessaire pour se mettre en route. Les outils, le « scénario », avec ses critères d'évaluation, ainsi que les outils-supports fournis par vos soins, ont permis à tous de participer. Vous avez mis en route ce scénario conçu pour solliciter la recherche du sens à travers une activité de conceptualisationqui invite les membres du groupe à observer, à comparer, à émettre des inférences, les argumenter et les vérifier à partir de la source (les exemples) pour arriver à la co-construction du concept visé. Qu’en est-il du résultat ? L’approche est-elle légitimée ?
Votre réponse est oui. Selon l’évaluation faite par les enseignants, les élèves avec troubles cognitifs ont réussi à apprendre ; ils ont été capables de faire la démonstration de leur compréhension des textes narratifs étudiés, au niveau de la complexité visé. En plus, comme un « curriculum caché » les enseignants ayant participé à la recherche estiment avoir changé de paradigme, ils ne voient plus les élèves, le savoir et leur rôle de la même façon, ils ont changé de regard. C’est peut-être là l’effet le plus important d’une participation des enseignants à la recherche qui a, en même temps, servi de formation.
En conclusion, je ne peux qu’exprimer ma satisfaction en voyant que vos résultats vont dans le même sens que les miens, bien que vous vous trouviez dans un autre contexte, avec d’autres variables. Et c’est bien cela l’originalité de votre recherche. A priori, j’aurais pensé que les problèmes ne se posaient pas de la même façon avec des enseignants ayant reçu une formation pour faire face aux troubles cognitifs. Mais votre recherche montre que ce problème est réel.
Je trouve également important qu’il soit reconnu dans le cadre des sciences de l’éducation, qu’un professionnel de l’éducation, dans son rôle de chercheur, puisse réutiliser des outils existants pour les expérimenter dans le cadre de son domaine professionnel. Je vous remercie donc de cet effort pour valider mon approche dans le cas de la compréhension des textes narratifs par des élèves avec troubles cognitifs. Cela renforce votre conclusion qui est également la mienne : il faut faire évoluer la formation des enseignants, tant initiale que continue, et notamment celle des enseignants spécialisés, en les impliquant et en les outillant à porter plus d’attention à la manière dont les élèves apprennent et comprennent. Pour cela il faut également offrir des supports concrets qui doivent être en cohérence avec la compétence visée et le cadre théorique évoqué. L’outil-soutien de 36 textes que vous avez élaboré va dans ce sens et fait partie des contributions de votre travail.
Britt-Mari BARTH
19 mars 2018
Cher Donald,
J'étais, ce dernier temps, plongée dans la lecture, l'analyse et l'écriture d'un rapport en vue de participer dans le jury de soutenance d'une doctorante que j'ai accompagnée ces dernières années - bien que Charles Gardou (handicap à Lyon) était son directeur officiel et avec qui elle a suivi les séminaires ces dernières années. La soutenance a eu lieu à l'Université Lumière-Lyon2, et malgré quelques inquiétudes avec une professeure de Genève (dans le jury) qui avait fait un pré-rapport un peu étonnant, cela a été très bien. La doctorante a été très bien accueillie et elle était méritante! Je vous mets ci-dessous l'introduction de mon "allocution" en tant que membre du jury; avant de commenter et poser des questions, je voulais situer notre rencontre. C'était un événement important pour moi (comme elle appliquait ma recherche pour faire la sienne) et je suis heureuse de penser que ses outils peuvent servir et avoir un impact auprès des enfants rencontrant des difficultés dans ce domaine.
En plein milieu de tout cela, j'ai reçu un courriel de vous avec plein de nouvelles que j'ai lu avec intérêt - mais figurez-vous, maintenant que je voulais le retrouver, impossible à le trouver!! Disparu! Pouvez-vous me le renvoyer?
J'ai bien appris avec soulagement (par Jocelyne) que l'opération a eu lieu!! C'est magique que ce soit possible!! Je suis tellement heureuse pour elle et pour lui! Pourvu maintenant que les premiers six mois se passent bien sans rejet!
Sinon tout va bien, nous avons encore de la neige sur Paris, mon jardin est tout blanc! et cache les jonquilles!!! En dehors de l'ISP et les tâches régulières, je dois préparer une conférence à tenir à Chambéry (colloque organisée par une Association un peu comme AQETA) sur l'apprentissage et la mémoire. Je me suis également engagée à faire le chapitre (20 pages, avec une structure imposée) sur Bruner dans un ouvrage universitaire collectif sur des "Penseurs en éducation". Ensuite il y a le colloque à Genève... Toujours pas de problèmes de loisirs!!
Portez-vous bien et tenez moi au courant,
Amitiés,
B-M
Voici l'introduction de mes commentaires lors de la soutenance. Je vous enverrai une photo par ailleurs, vous allez reconnaître Charles Gardou et Michel Develau.
Britt-Mari Barth, Professeure émérite de sciences de l’éducation, Institut Supérieur de Pédagogie, membre du jury.
Soutenance de thèse de Patricia Girardet le 14 mars 2018 à l'Université Lumière 2, Lyon.
Titre de la thèse : La construction de la compréhension des textes narratifs par des élèves avec troubles cognitifs : recherche conduite au sein d’unités localisées pour l’inclusion scolaire.
Félicitations pour le travail accompli. Une démarche exemplaire de recherche. Persévérance, implication. Travail soigné. Bonne connaissance du terrain, avec la volonté que tous les élèves atteignent le même objectif : réussir à apprendre. L’intérêt de votre sujet va sans dire et votre problématique est d’une grande actualité. En tant que chercheure, je ne peux qu’être heureuse de voir mon approche pédagogique utile dans un contexte spécifique qui est le vôtre.
Pour commencer je voudrais brièvement revenir sur votre parcours et notre rencontre sous forme de récit : Jerome Bruner nous a bien montré que le mode narratif de pensée est un mode complémentaire pour appréhender la réalité. Ensuite je reviendrai sur quelques points précis de ce parcours pour échanger avec vous.
D’abord le prologue :
Dans la situation initiale dont vous êtes le personnage principal l’objectif de faire réussir à apprendre les élèves avec troubles cognitifs, vous pose problème. Les enseignants ont du mal à réussir la tâche qui consiste à aider leurs élèves qui rencontrent des difficultés à comprendre des textes, notamment des textes narratifs. Pour vous, conseillère pédagogique, c'est une situation inacceptable, les enfants dans l’école inclusive ne doivent pas être exclus, dites- vous. Les enseignants se sentent impuissants et insatisfaits, les élèves perdent confiance en eux... vous sentez que vous devez agir.
Alors une rencontre se fait lors d’un colloque, vous rencontrez une chercheure qui s'intéressait justement à cette problématique et qui était déjà passée par ce parcours dans les classes ordinaires, mais n'avait pas eu l'occasion d'approfondir la question dans les classes spécialisées. Elle s’intéresse à votre problématique et se fait un plaisir de vous accompagner sur le chemin et de vous prêter ses lunettes conceptuelles. Il fallait à tout prix éviter que le « learned helplessness », l'impuissance apprise, ne s'installe dans votre environnement. Cela vous donne envie d'aller plus loin que les mémoires professionnels (qui était le point de notre rencontre) et de vous lancer dans une vraie recherche. Cette chercheure, c’était donc moi ; je vous conseille alors de contacter le professeur Charles Gardou, mieux placé que moi dans le domaine du handicap - tout en restant accessible pour vous tout au long du temps qui allait suivre, sur le sujet de l’approche socio-cognitive de la médiation que vous vouliezexpérimenter dans votre environnement.
Dans un premier temps, il fallait lever les obstacles. C'était difficile d'organiser le temps et l'espace permettant demener les expérimentations, de trouver les membres volontaires des groupes, nécessaires pour ce dispositif de recherche, d’avoir les accords institutionnels divers de votre hiérarchie… Mais votre engagement vous a permis d'avancer et de vous mettre en route. Avec quels outils, quels moyens ?
Vous avez souhaité mettre en œuvre une approche pédagogique de la médiation socio-cognitive pour examiner ses effets dans le cadre de votre recherche.
Cette approche réunit trois dimensions :
Une dimension praxéologique, qui offre des outils méthodologiques ; il s’agit ici des « scénarios pour comprendre », des stratégies ritualisées qui ont été conçues et expérimentées sur le terrain dans des classes ordinaires.
Une dimension explicative : un cadre théorique pédagogique, dans lequel s’inscrivent les concepts-clés qui le précisent et les outils qui le font fonctionner. Il prend la forme d’une grille d’analyse qui propose cinq conditions (ou étapes) pour favoriser la médiation socio-cognitive des apprentissages. Cette grille a été élaborée à partir de l’analyse de ce qui avait réussi dans mes expérimentations des scénarios et permet ainsi de s’ouvrir vers de nouveaux scénarios tout en respectant les principes pédagogiques énoncés.
Un cadre théorique et éthique interdisciplinaire qui fonde l’approche de manière explicite.
Vous avez jugé cette approche cohérente pour expérimenter une pédagogie de la compréhension, mise au service du développement de la pensée et de la construction du savoir. J’arrive maintenant à l’action : Que s’est-il passé ?
Dans la conduite de votre recherche, vous avez pu montrer que vous avez très bien intégré cette approche de la médiation, à la fois ses outils pédagogiques et la philosophie et l’éthique qui la fondent. En suivant les étapes de la grille, il fallait d’abord choisir votre concept clé : la compréhension d’un texte narratif. Ensuite, il fallait choisir ou fabriquer les exemples, les supports, qui pouvaient incarner ce concept, et ceci en fonction du transfert visé. Il fallait donc rendre ce savoir abstrait vivant pour en donner une expérience aux participants, leur permettre des rencontres avec le savoir mis-en-action. Et il fallait que les exemples soient cohérents avec le niveau de compréhension choisi. Vous avez donc conçu un outil cohérent avec le cadre théorique, j’y reviens.
Avec ces préparatifs en amont, afin de « rendre le savoir accessible » vous avez pu faire adhérer les enseignants à la tâche, jouant momentanément le rôle de formateur-médiateur. Le « défi » d'un problème à résoudre (reconnu par tous) ainsi que l'assurance de votre aide et d’un « accompagnement » ont effectivement engagé les participants dans un projet coopératif de recherche de sens. Ce « contrat d'intersubjectivité » a servi à rendre explicites les attentes mutuelles et les rôles de chacun, afin de créer la confiance nécessaire pour se mettre en route. Les outils, le « scénario », avec ses critères d'évaluation, ainsi que les outils-supports fournis par vos soins,ont permis à tous de participer. Vous avez mis en route ce scénario conçu pour solliciter la recherche du sens à travers une activité de conceptualisation qui invite les membres du groupe à observer, à comparer, à émettre des inférences, les argumenter et les vérifier à partir de la source (les exemples) pour arriver à la co-construction du concept visé. Qu’en est-il du résultat ? L’approche est-elle légitimée ?
Votre réponse est oui. Selon l’évaluation faite par les enseignants, les élèves avec troubles cognitifs ont réussi à apprendre ; ils ont été capables de faire la démonstration de leur compréhension des textes narratifs étudiés, au niveau de la complexité visé. En plus, comme un « curriculum caché » les enseignants ayant participé à la recherche estiment avoir changé de paradigme, ils ne voient plus les élèves, le savoir et leur rôle de la même façon, ils ont changé de regard. C’est peut-être là l’effet le plus important d’une participation des enseignants à la recherche qui a, en même temps, servi de formation.
En conclusion, je ne peux qu’exprimer ma satisfaction en voyant que vos résultats vont dans le même sens que les miens, bien que vous vous trouviez dans un autre contexte, avec d’autres variables. Et c’est bien cela l’originalité de votre recherche. A priori, j’aurais pensé que les problèmes ne se posaient pas de la même façon avec des enseignants ayant reçu une formation pour faire face aux troubles cognitifs. Mais votre recherche montre que ce problème est réel.
Je trouve également important qu’il soit reconnu dans le cadre des sciences de l’éducation, qu’un professionnel de l’éducation, dans son rôle de chercheur, puisse réutiliser des outils existants pour les expérimenter dans le cadre de son domaine professionnel. Je vous remercie donc de cet effort pour valider mon approche dans le cas de la compréhension des textes narratifs par des élèves avec troubles cognitifs. Cela renforce votre conclusion qui est également la mienne : il faut faire évoluer la formation des enseignants, tant initiale que continue, et notamment celle des enseignants spécialisés, en les impliquant et en les outillant à porter plus d’attention à la manière dont les élèves apprennent et comprennent. Pour cela il faut également offrir des supports concrets qui doivent être en cohérence avec la compétence visée et le cadre théorique évoqué. L’outil-soutien de 36 textes que vous avez élaboré va dans ce sens et fait partie des contributions de votre travail.
Britt-Mari BARTH