secteurs

Construction - bâtiment

Je connais une situation qui fait très mal au cœur, une femme divorcée travaille dans la construction, son labeur est son gagne-pain, cette activité donne à ses enfants à manger. Ce rôle est difficile pour les femmes, mais c’est comme ça la vie, il faut se battre avec la vie pour vivre.

Soumia

5 mots imposés

Texte rédigé dans le cadre d'un cours de FLE (français langue étrangère) de Bruxelles Formation

Soin aux personnes

Saloni m'a dit hier en Whatsapp vidéo : "Le problème quand tu t'occupes des vieux, c'est que tu sais qu'ils vont mourir. C'est ça le problème". 

Elle a vu mourir entre 2000 et 2021 presque tous ses petits vieux. Elle les appelle comme ça. Il y a eu des cancers, une chute dans l'escalier, une mort lente et les autres, elle ne sait pas trop donc elle dit : "il est mort de vieillesse". 

Maintenant, ça prend tout son sens car c'est elle qui est aux portes de la vieillesse. Elle sait tout ce qui va se passer ou ne plus se passer justement. C'est ça, le problème. 

Jennifer

Thème imposé - 10 minutes d'écriture

Textile

Je me souviens de la maison de haute mode Hirsch, que nous évoquions parfois en famille mais dans laquelle nous n'avons jamais mis les pieds. Quand on disait "Cela vient de chez Hirsch", on évoquait immédiatement la recherche dans la qualité, l'élégance et la perfection des finitions. Un petit tailleur, un manteau, un chapeau étaient des parures hors de prix pour un modeste budget.

La maison Hirsch, fondée en 1869 à Amsterdam, s'est établie rue Neuve à Bruxelles en 1946. 

Les ouvrières étaient de fines couturières travaillant à façon en fonction du souhait des clientes. On ajustait, on modifiait le modèle à l'essayage. Certaines clientes avaient leurs mesures reprises sur un mannequin fixe, en atelier, sur lequel travaillait l'ouvrière-couturière. 

En parlant de Hirsch en famille, on mentionnait le luxe des matières, imaginant et caricaturant volontiers les caprices des dames de la haute bourgeoisie. On admirait la vitrine de la rue Neuve où s'exposaient certains vêtements admirables. Les couturières modestes s'inspiraient judicieusement des rares modèles exposés et les jeunes filles rêvaient devant les robes de bal sophistiquées. 

Il n'était pas rare de voir des clientes pénétrer chez Hirsch munies d'un emballage estampillé Bally, le magasin de chaussures par excellence. Un vêtement de chez Hirsch demandait l'indispensable paire de chaussures élégantes et raffinée assortie au vêtement. 

Hirsch a fermé en 1962, probablement concurrencé par les nouveaux magasins de prêt à porter de luxe. La clientèle aisée a changé ses habitudes ou se déplace désormais vers des ateliers similaires à l'étranger. 

Jeannine

30' de lecture et d'écriture

Texte inspiré par le Cahier 30 de La Fonderie, La mode dans tous ses états

Je me souviens…j’avais quitté le lycée écoeurée par des impératifs de perfection: j’avais presque 17 ans, et j’ai pensé que mon père allait me tuer, mais il m’a dit furieux: « c’est bon, mais tu vas travailler ». Nous étions en 1963, je gagnais 3200fb par mois et je travaillais jusqu’au samedi midi soit 45h semaine.

Je me souviens que 15 jours plus tard, il me faisait engager dans la prestigieuse maison Vanderborght (ameublement, tapis, tissus de grand luxe... disparue depuis) où il travaillait lui-même.

Je me souviens que l’on m’a conduite dans une grande pièce poussiéreuse où j’ai dû, des mois durant, mesurer et étiqueter des coupons de tissus.

Je me souviens d’être allée, 6 mois plus tard, le coeur battant et le ventre noué, frapper à la porte du chef du personnel, pour obtenir une augmentation et un meilleur poste. Il m’avait nommée vendeuse en passementerie ( rubans, galons de toutes sortes).

Je me souviens, sourire aux lèvres, y avoir servi la « princesse »Paola et sa femme de chambre, et avoir fait semblant de ne pas la reconnaître pour pouvoir la faire attendre à la caisse, comme tout le monde!

J’étais ado et très rebelle…

Je me souviens de m’être faite vertement sermonner, mais j’avais joué les innocentes…

Je me souviens aussi d’y avoir rencontré mon futur mari qui officiait à l’étage en- dessous.

Je me souviens de tout cela sans nostalgie, c’est un passé révolu qui va désormais regagner sa place dans un coin de ma mémoire. 

Mona

10' d'écriture - forme imposée

Transport

Je revenais du travail, c'était vendredi. Personne ne m'attendait, jusqu'à au moins lundi. J'avais 20 ans, les cheveux blonds et fins. Je travaillais pour les chemins de fer, comme mon père, comme ma mère. Je changeais les taies d'oreillers des wagons-lits. 

J'abandonnais mon travail et quelqu'un survenait alors je me faisais l'effet de mes taies d'oreillers qui, ayant à peine servi, s'en allaient déjà se faire blanchir. Je reprenais mon travail, ce quelqu'un s'ennuyait. "Ça fait mal au dos, ce truc" disait-il, comme si j'avais pu l'ignorer. Il s'appelait Jean-Michel, il s'appelait Fernando, il s'appelait Ducon et peu importe son prénom, il avait mal au dos. 

Je revenais du travail et seul me retrouvait. Dans les rues de Paris, c'était silence pour mon camion et moi. J'avais 30 ans et j'allais la croiser, elle me donnerait un mauvais numéro et je retrouverais le bon. Elle était le bon numéro, y a pas à dire. Dans mon camion et dans mon quatre heures du matin, je me le disais. Je ne sais plus quel métier je faisais mais j'étais déjà dans mon camion et j'étais déjà en horaires décalés. 

Je revenais du travail, personne ne m'attendait. Dans le four à micro-ondes, elle me laissait mon manger. Je mangeais seul devant la TV que je n'entendais pas car mes oreilles. Et impossible de mettre du son car les petits dormaient. Le matin très tôt, je me levais, j'allais livrer les légumes du marché de Rungis. J'avais 40 ans. 

Là-bas, j'entendais car du son, des odeurs, des hommes qui gueulaient, des monte-charges qui déboulaient. La vie perçait ma surdité. Je ramenais des légumes frais tous les soirs, au point que ma fille, ma nouçette, m'a dit un jour qu'elle pensait quand elle était petite que les légumes, c'était gratuit. 

On m'enlevait mon travail, plus seul je me sentais. J'avais 50 ans et on m'avait viré. Je volais les palettes que je revendais après les avoir repeintes. Ils m'avaient pincé grâce aux caméras. Fini Pomona. Je recherchais du travail, pas assez snob j'étais donc j'en trouvais un autre vite fait bien fait et constater que la seule chose qui avait changé, c'était ce que je livrais. Et la seule chose qui avait changé, c'est qu'elle avait demandé le divorce. 

L'appartement de taille à être intimidant pour l'homme seul me poussait à chercher du travail. J'avais 60 ans. Ma hanche s'était décalée et je marchais en boitant. Dans mon camion blanc, après les légumes et les revues de presse, c'était la ferraille. Et repenser aux jeunes cons qui se plaignaient de leur dos. Qu'est-ce qu'ils disaient maintenant ? Ils auraient pleuré sûrement. 

Je revenais du travail, toujours plus seul j'étais et seul encore, je sais. J'ai 70 ans. La ferraille toujours, quand on m'appelle, quand on me refile un plan, un chantier à débarrasser et les jeunes noirs embauchés illégalement chargent à ma place contre un petit billet. Tout Paris me connaît, le Paris de nuit, des gens qu'on n'entend pas même quand on n'est pas sourd. J'aime pas les quartiers riches, le 16ème, le 17ème. C'est des frigos ces quartiers-là, il y fait froid même en été. 

Jennifer

40 minutes d'écriture - texte inspiré de la chanson Le travail de Dominique A

Horeca

Avant toute chose, il y avait la machine. Grosse et lourde. Brûlante, mais rassurante avec son odeur de savon. L'atmosphère humide et chaude du milieu de soirée, puis collante et fatiguée de la fin, donnait à cette partie un côté parfois infernal, mais aussi nostalgique. 

Puis, à gauche, l'évier où venaient s'amonceler poêles et casseroles à un rythme qui suivait une courbe exponentielle. Du même côté, les planches et l'endroit des entrées. Mon endroit. Après les préparations démesurément longues (dix kilos d'oignons puis dix kilos de patates, puis dix litres de vinaigre, etc) qui étaient déjà sources d'épuisement, plus par leur aspect interminable que par la difficulté des tâches, il y avait la ferveur du service. 

L'angoisse de la clochette qui ne s'arrête plus. La fièvre qui nous prend quand de toute façon, on est en retard, dépassé et que la seule chose à faire pour rattraper la bourde, le raté est de se jeter puissamment dans l'action de ce service qui finira bien à un moment donné.

Rester ouverte juste des oreilles aux ordres hurlés. Activer ses mains, ses jambes le plus vite possible et tenir, tenir jusqu'à ce que mes forces me le permettent. 

Virginie

10 minutes d'écriture - thème imposé  

Je me souviens du premier entretien dans le bureau du type que je croyais être le boss mais en fait, c'était juste un des 4 managers. Il s'appelait Pascal et après Aziz m'a dit qu'il avait sauté mais je bossais déjà plus là-bas. 

Je me souviens qu'on m'a mise en cuisine puis on devait me passer en salle. La salle, c'était des gros pourboires parce que c'était la grand-place. Mais j'ai tellement aimé la cuisine, son rush et ses collègues que quand on m'a dit "tu passes en salle", j'ai dit "non". Apparemment, j'étais la première à refuser et à vouloir rester en cuisine. "Les étudiants, ils veulent tous être en salle" on m'a dit. 

Je me souviens d'un aprem fin août, ils n'avaient pas prévu assez de renfort car ils pensaient que ce serait calme. J'étais seule et j'ai tellement travaillé que quand j'ai regardé l'heure la première fois, il était 14 heures et quand j'ai eu le temps de re-regarder l'heure, il était 20 heures. Les collègues de la salle sont venus me féliciter mais pas au point de partager les pourboires, ce qui était une discussion en cuisine. 

Je me souviens que ce jour-là, et ça ne m'est jamais arrivé depuis, je bossais tellement que j'ai senti une goutte de sueur perler à travers ma charlotte, et couler sur mon front. 

Je me souviens de Mike qui faisait n'importe quoi de sa vie alors qu'il attendait son deuxième. Un jour, il m'a fait un bisou dans le cou et les autres collègues ont poussé un cri en rigolant. La seule raison pour laquelle ça m'a pas dérangée, c'est qu'il ressemblait à Vivien sur qui j'étais encore en kiffe. 

Je me souviens être revenue et Ludgi m'a dit que presque tout le monde avait pété, que tout se dégradait et que même les étudiants comme moi, c'était de la concurrence déloyale. 

Jennifer

Forme imposée - 10 minutes d'écriture

Industrie

Dimanche 6 mars

Ce soir je me couche tôt : demain je commence à 6h et il me faudra un peu plus d’une heure pour être à la Fabrique. Je travaillerai à pause : une semaine de 6 à 14h et la semaine suivante de 14 à 22h. Le travail de nuit est interdit aux femmes. J’aurais préféré ne pas travailler en pause mais faire uniquement la nuit entre 22 et 6h du matin. Tant pis, c’est comme ça.

Je n’ai pas réussi à m’endormir à 20h (c’est à cette heure-là qu’il faut que je me couche pour arriver à me lever à 4h15). Je me retournais encore dans le lit quand Luis est venu se coucher. On a fait l’amour. Je crois que c’est après que je me suis endormie.

Lundi 7 mars

Il faisait nuit noire quand le réveil a sonné. Il m’a fallu quelques minutes pour comprendre. Luis a ronchonné et m’a poussée hors du lit. J’ai éteint la sonnerie. Il s’est retourné en tirant la couverture à lui. Il faisait froid,  j’ai frissonné. Dans l’obscurité, J’ai enfilé le premier vêtement qui me tombait sous la main. Un vieux pull de Luis, celui avec lequel il bricole sa moto. J’ai marché à tâtons à travers la chambre en évitant de me cogner les orteils. J’ai refermé la porte de la chambre doucement et j’ai allumé dans le salon. Rien n’était rangé : la table du souper n’était pas desservie et les cendriers débordaient. Il aurait fallu retaper les coussins du canapé et ranger les livres. Pas le temps. J’ai eu une pensée pour Maman qui faisait son ménage avant de quitter la maison. J’espérais que Luis s’occuperait de ranger avant sa réunion. Je me suis lavée à l’évier. Il faudra que je pense à vider l’évier de la vaisselle sale le soir avant de me coucher. J’avais peur de perdre du temps et de rater mon bus. Je m’organiserai. J’ai bu un café. Je n’avais pas faim. Je me suis habillée, j’ai pris mon sac et mon manteau et j’ai claqué la porte involontairement. Il faudra que je m’habitue.

Je n’avais jamais vu la rue ainsi : déserte et silencieuse. Les arbres du parc dessinaient de grandes ombres chinoises. Il faisait froid et j’ai resserré mon col, « Demain je mettrai une écharpe ». J’ai entendu le premier bus arriver et j’ai couru  jusqu’à l’arrêt. Il n’y avait que le chauffeur. On s’est dit bonjour. Je lui ai demandé de m’indiquer l’arrêt où descendre. Je suis restée debout à côté de lui. Il était étonné : d’habitude, à cette heure,  il n’embarque personne dans ce quartier. Il m’a demandé ce que je faisais  à une heure pareille. Je lui ai dit que c’était mon premier jour à la Fabrique, que je venais de me faire embaucher.

Il m’a dit : « c’est dur… c’est très dur. Une fille comme toi, tu n’as pas fait d’études ? »

J’ai répondu, « Oui, un peu mais je n’ai pas fini…. Je n’ai pas mon diplôme » et que j’avais besoin d’argent tout de suite, pour le loyer et tout ça. Et puis, si les autres femmes le faisaient, pourquoi pas moi ?

Il m’a dit « Bien sûr. Tu verras. Enfin quand tu en auras assez, tu pourrais toujours essayer à la société des bus de la Région, on engage des femmes maintenant, des jeunes comme toi de préférence »

« Pour faire quoi ? »

« Ca dépend de tes études. Si tu n’en as pas fait beaucoup, tu peux devenir receveuse sur les véhicules. Les horaires changent aussi, si t’as des enfants ça ne va pas…

« J’en ai pas »

« Si tu as des diplômes tu peux faire guichetière  ou alors, et ça c’est le mieux, tu peux travailler à l’administration centrale. »

A ce mot, j’ai fait la grimace. Ca représentait tout ce que je ne voulais pas.

Il a souri et il m’a dit « Tu verras bien, c’est avec l’expérience qu’on revoit ses opinions. Ton arrêt, c’est ici et le bus pour Herstal est là, de l’autre côté de la place. Grouille-toi ! »

Je suis descendue, on s’est salués et j’ai couru à travers la place.

A l’arrêt, il y avait une file d’hommes et de femmes. Ils se connaissaient. Les femmes riaient entre elles et portaient toutes des fichus sur la tête, même les plus jeunes. Les hommes parlaient haut et  fumaient. Je reconnaissais les paquets verts des Saint-Michel sans filtre et ceux des Johnson&Johnson. Une femme m’a remarquée, elle m’a interpelée : 

« Tu viens à la Fabrique avec nous ? « 

« Ben … oui »

« Allez les filles, poussez-vous, laissez passer la nouvelle »

Je suis montée dans le bus avec elles, j’avais l’impression, avec tous ces regards qui convergeaient vers moi, d’être un spécimen de musée ou alors un animal exotique. Le bus était plein,  nous étions serrés.  Je ne sentais plus le froid. Les hommes abandonnaient les places assises aux femmes. Je les ai trouvés sympas. Les filles voulaient savoir qui j’étais, d’où je venais et si je savais déjà à quelle unité je serais affectée. J’ai répondu que je l’ignorais.

« Tu vas d’abord passer la visite médicale. Tu as bu ce matin ? »

« Un café »

« Un conseil : pisse avant la visite ! »

Je ne comprenais pas.

« Il va te demander de pisser dans un petit pot. Tu crois quand même pas que c’est pour ta santé, non ? »

«  Mais pourquoi alors ? »

Les filles rigolaient dans mon dos.

« Si t’es enceinte, on te dira que tu conviens pas pour ce type de boulot, tu piges ? Si on te demande si t’as des envies de marmot, tu réponds que non »

« Enceinte… je ne suis pas … »

« Non, mais c’est une chose que quand ça t’arrive, tu le sais pas toujours …. »

« Et elle, là, elle est enceinte pourtant … » dis-je en désignant une femme assise à l’air fatigué ;

« Oui, mais ça fait des années qu’elle travaille à la Fabrique, elle cherche pas à se faire embaucher comme toi. Le patron il est obligé de lui donner un travail adapté et il peut pas la renvoyer… »

« Et pourquoi on ne convient pas quand on  est enceinte ? »

« Que tu fasses un ou quinze marmots, il s’en fiche. Ce qui l’embête c’est de payer pour les quatorze semaines de l’accouchement … »

-« Hé là, Catherine, raconte pas n’importe quoi ! Le patron il paie pour la 1ere semaine de repos, après c’est la mutuelle qui intervient. Et la mutuelle, c’est avec la cotisation des travailleurs et une part patronale. Faut pas relayer les mensonges des patrons qui pleurnichent qu’ils paient tout … »

- « Ca va Gus, on va pas faire dans le détail. C’est pour expliquer à la gosse dans quel monde elle entre »

-« Cath, le diable se cache dans les détails »

Rolande

Forme imposée - 40' d'écriture

Les usines Bollinckx a Bruxelles - vous connaissez ? Les ateliers, tout près de la rue de l’école ?

 

J’écris mes premières lignes à l’abri de grandes toiles qui nous présentent la vue générale des usines dans l’exposition de La Fonderie.

De loin, le dessin ancien essaie de me mesmériser avec ses lignes fumées, en sépia. Mon regard se pose sur la fumée des fourneaux, sur le toit des grands bâtiments sur lesquels le dessinateur a sans doute appliqué des étiquettes qui décrivent l’affectation de chacun d’eux : chaudronnerie, bois et modèlerie, outillage, montage.

De près, la vue commence à perdre son allure, on peut voir des silhouettes des hommes (pas de femmes), des chevaux et pièces de métal, des grues. On se rend rapidement compte qu’ici c’est le métal qui règne, au moins dans la cour des ateliers, car de l’autre côté règne le silence.

 

En poussant la porte on arrive tout juste dans l’arène ou l’homme s’attaque à dompter le métal. On voit le tour tout noir, graisseux, on peut entendre son souffle, son sifflement quand il montre ses défenses et il tourne, tourne en cercle. Malgré lui, il continue à tourner et à façonner d’autres pièces en métal, en grinçant des dents dans des charges interrompues d'étincelles.

 

Comment pouvoir expliquer, dans une publicité, ce qui se passe dans l’atelier ? Sur le papier on voit seulement des bouts de métaux rassemblés, des outils. On comprend leur utilité... au moins, les autres magiciens du métal la comprennent et les commandent en continuant de faire tourner une autre courroie, insaisissable, qui bouge les autres usines, des autres bureaux et qui domptent les autres métaux, les plus précieux. Celle qu’on voit dans l’atelier et qui nous effraye le plus est celle qui fait courir le tour a métaux. Le même matériel que la bride qui aide les travailleurs à porter leurs sabots.

La peau de grosses bêtes qui même mortes continuent à aider, donner au métal la forme requise.

La vie et la mort qui font porter le monde. La peur et la fierté qui font naitre des nouvelles choses.

Je regarde à nouveau le dessin. On voit les silhouettes des hommes, on ne sait rien d’eux, on voit seulement le métal, les bâtiments, les sabots.

Mara

50' de recherches, lecture et écriture - texte faisant le lien entre différents objets exposés au Musée bruxellois des industries et du travail

Métal

Allée verte 1985, industrie, canal, péniches ventrues chargées d’acier qui partent vers la Ruhr en Allemagne souvent; bruit constant des presses où s’écrasent les voitures des maîtres et des valets, enfin égaux et anonymes; cubes colorés entassés, autour desquels s’agite une main-d’oeuvre peu spécialisée: hommes en casques et chaussures renforcées, mains mal protégées du froid, salopettes abimées et cigarette aux commissures. Travail ingrat, ils sont dehors par tous les temps. 

En face du grossiste, le petit négociant, où une clientèle diverse vient vendre ses métaux, même les éboueurs pouvaient encore y trouver un peu de  « drinkgeld », « pour…boire »! 

Dans la cour, contre les murs: tôles, vieilles machines à laver, zinc, cuivre, laiton, alu et au centre, le conteneur pour le fer et l’acier.

De derrière la fenêtre, où elle fait son repassage, elle regarde la cour vide, et ce commerce qu’elle va fermer. La poussière de mitraille s’infiltrait partout dans la petite maison ouvrière, il fallait récurer le carrelage tous les jours.

Demain, la grande double porte d’acier va se refermer. La maladie a frappé; une page se tourne, mais, banale, la vie continue. 

Mona

20' d'écriture

5 mots obligatoires : travail-industrie-main d’oeuvre-repassage-maladie

Je sentais la chaleur m’envahir, mes joues étaient en feu. Même collée contre le poêle de mes grands-parents, je n’avais jamais ressenti une telle chaleur.

Je regardais les couleurs qui faisaient naitre cette chaleur, effrayée. Le rouge, l’orange, le jaune sortaient d’une grosse bouche de métal en branlant et en brayant. Les couleurs devenaient des cercles, je ne pouvais même imaginer les toucher, même si l’envie était là, même si les cercles étaient mous, comme une spirale jouet dans les mains d’un géant. Si j’étais un géant, j’aurais pu jouer avec.

La bande passait en dessous de nous, les couleurs s’estompaient, refroidies. Ma mère me tenait la main, j’étais une gamine de 5 ans. Elle ne disait rien, car le bruit nous faisait nous comporter comme des sourds-muets. Mais j’avais bien compris ce qu’elle voulait me dire : le lamineur, c’était là son travail dans l’usine.

Mara

10 minutes d’écriture – thème imposé