Que faire sans préparation ni référence ?
La préparation d'une ouverture à domicile, avec la puissante assistance que, comme nous l'avons vu, peut apporter un ordinateur infatigable, présente de sérieux avantages : moins de stress, moins de temps de réflexion et une meilleure prise en compte des pièges à éviter, et dès lors une plus grande confiance en soi.
S'ajoute à ces atouts une réelle emprise psychologique qu'il sera possible de maintenir durablement sur l'adversaire, surtout si celui-ci a été pris au dépourvu. Ou encore s'il appréhende, s'il s'aventurait flamberge au vent dans la suite de l'ouverture, de faire les frais d'arcanes ou de chausse-trappes insoupçonnables que, pour sa part, il n'a pas eu le loisir d'envisager confortablement à domicile.
Fort heureusement, la situation la plus fréquente aux Échecs se produit lorsque les adversaires se retrouvent en même temps Out of Book
. Ainsi rencontre-t-on souvent cette situation où un joueur se trouve soudainement perdu dans ses réflexions, à la croisée des chemins dans une ouverture moyennement utilisée dans la pratique contemporaine.
De multiples continuations s'offrent à lui.
Pourtant, aucune ne lui semble à rejeter a priori.
On le verra, dans ce cas, la suite que vous privilégierez répond avant tout à votre état d'esprit.
C'est une question de tempérament.
Et pourquoi pas ? ... de style.
Typologie des styles : 1) l'Attaquant
- Mikhaïl TAHL (U.R.S.S.) qui n'accéda au titre suprême que pendant un an (1960) à une époque où le tenant déchu avait droit à sa revanche ; le regretté Magicien de Riga († 1992) déstabilisait ses adversaires par de redoutables sacrifices, quelquefois incorrects, certes, mais pratiquement irréfutables dans le feu de l'action ;
- un autre Letton, même s'il joua quelques années pour la fédération espagnole, était lui aussi capable de mettre le feu à l'échiquier, en particulier pendant sa période faste au tournant du siècle ; il s'agit d'Alexeï SHIROV.
Typologie des styles : 2) le Puissant
- Garri KASPAROV (U.R.S.S. / Russie), qui fut Champion du Monde de 1985 à 1993 avant de faire sécession en fondant la PCA ; il était toujours à la recherche du
Power Play
, c'est-à-dire de créer des déséquilibres sur des secteurs bien particulier de l'échiquier ; ses sacrifices à lui s'appuyaient en règle générale sur une excellente compréhension de la position et ne visaient qu'à créer des déséquilibres temporaires destinés à tourner en sa faveur ; - le Bulgare Veselin TOPALOV qui devint Champion du Monde de la FIDE de 2005 avant de s'incliner un an plus tard lors de la réunification des deux fédérations ; il reste redouté, en particulier pour son agressivité au sortir de l'Ouverture.
Typologie des styles : 3) le Dynamique
- Le dissident soviétique Viktor KORTCHNOÏ dont la longévité au sommet (du Tournoi des Candidats de Curaçao en 1962 à son éviction par Kasparov en 1983) fut alimentée par un jeu devenant de plus en plus rebondissant au fil du temps : Kortchnoï, ou le ressort qui se détend ;
- le Kid de Brooklyn, considéré comme meilleur joueur de tous les temps par ceux qui ont vécu son ascension vers le titre de 1970 à 1972, qu'était Robert J. (dit Bobby) FISCHER apporta de la fraîcheur et de la spontanéité au jeu, avec cet art consommé de mettre ses adversaires sous pression, ainsi que nous l'avons vu dans la Leçon 1.
Typologie des styles : 4) le Renard
- Anatoli KARPOV fut le joueur qui se dota du plus riche palmarès en tournois et qui connut un très long règne (de 1976 à 1985 et de 1993 à 1999) ; joueur universel par excellence, il incarne la ligne claire et le classicisme par excellence aux Échecs ;
- le prodige Russe qui détrôna Kasparov en duel singulier à Londres en 2000 se nomme Vladimir KRAMNIK ; il ne faut jamais lui permettre de réfléchir à partir d'une situation de jeu objectivement banale, car il en profiterait pour redéployer ses troupes au mieux de ses intérêts, défensifs comme offensifs, et faire prévaloir par des moyens simples sa compréhension phénoménale de la position.
Typologie des styles : 5) le Patient
- Le Suédois Ulf ANDERSSON fut longtemps l'archétype du joueur apte à paraître manœuvrer avec nonchalance ses pièces massées derrière des chaînes de pions inextricablement imbriquées, puis à soudain prendre le dessus sur son adversaire ;
- même si le Champion du Monde depuis 2013 est fréquemment présenté comme le Mozart des Échecs à cause de sa précocité, il brille essentiellement par son endurance et par son aptitude à faire craquer ses adversaires après plusieurs heures de jeu ; le Norvégien Magnus CARLSEN, puisque c'est de lui dont il s'agit, choisit assez souvent des ouvertures qui ne lui procurent au mieux qu'un jeu sensiblement égal à ses opposants, avant de les éreinter progressivement.
Typologie des styles : 6) le Défenseur
- Comment ne pas voir dans ce profil psychologique le Tigre ? Tigran PETROSSIAN n'obtint que des résultats médiocres en tournois, faute d'avoir cherché à bousculer ses adversaires ; par contre, en match, il fit merveille au point d'être Champion du Monde de 1963 à 1969.