Recension de Sans le latin... dans Etudes

Études (14 rue d'Assas 75281 Paris Cedex 06 - 01 44 39 48 48), septembre 2012, p. 126

Chaque conférence de ce livre collectif, engagé et engageant, illustre à sa manière le but de l'Association Le latin dans les littératures européennes : promouvoir un latin « oecuménique » par des spécialistes représentant divers champs du savoir. Démonstration est faite que le latin n'est pas « l'apanage frileux des lettres classiques », mais au service de toutes les disciplines de la mémoire et du langage. Sans le latin... parle d'urgence: ne pas apprendre le latin, « langue paternelle » du français, c'est désapprendre le français dans un contexte pour le moins paradoxal d'exaltation du « patrimoine » (C. Suzzoni, H. Aupetit). Son ignorance condamne par exemple à faire de l'histoire des sciences de seconde main (J. Pigeaud) et à ne pas saisir dans ses nuances la pensée d'auteurs qui écrivent « entre les deux langues » (D. Kambouchner), alors que l'intertextualité latine est une voie d'accès privilégiée à l'œuvre d'un Freud (J. Le Rider) ou d'un Victor Hugo (R. Vignest). Réservoir poétique, le latin est également une arme contre toute idéologie totalitaire (Y. Bonnefoy) : tandis que les dieux romains nous enseignent le respect de l'altérité (J. Scheid), la cité romaine révèle que nous ne savons plus où nous vivons car nous n'agissons plus, mais subissons la « mondialisation » (P. Manent). Le latin n'est pas une langue optionnelle, parce qu'on n'a pas le choix: il s'impose. Il a occupé une place-clé dans la culture dont nous sommes les héritiers, qu'allons-nous en faire (R. Brague) ?

Nathalie Requin