2.1. Le contrôle des ressources

2.1. Le contrôle des ressources

Pour un État, un groupe ou une population, contrôler les ressources d’un territoire permet de répondre aux besoins essentiels et économiques de sa population. Si le territoire local n’est pas suffisant, un acteur peut tenter d’en contrôler un autre afin d’obtenir la ressource désirée. Les besoins en ressources d’États voisins peuvent s’avérer contradictoires ou bien la mise en valeur d’une ressource par l’un d’entre eux peut nuire aux autres (Alloprof). En 2016, l’ONU annonçait que « les ressources naturelles sont en cause dans 40% des conflits au cours des 60 dernières années » (ONU). Pour mieux saisir le rôle du contrôle des ressources dans l’émergence de tensions et de conflits dans le monde, consultez les sections sur trois des ressources les plus convoitées: l’eau, le pétrole et les minéraux.

2.1.1. L'eau

Première ressource essentielle à la vie, l'approvisionnement en eau est une constante source de préoccupation pour les États qui connaissent un stress hydrique. Des régions comme l’Afrique du Nord et le sud de la Méditerranée sont plus à risque que d’autres de connaître des épisodes de stress hydrique. Ceux-ci ont des conséquences domestiques sur l’usage de l’eau, mais aussi économiques et touristiques. L’un des enjeux pour ces régions est la prise de conscience du problème alors que certaines d’entre elles tentent de devenir des hydro-puissances comme l’Éthiopie.

Stress hydrique :

  • une région subit un stress hydrique lorsque ses besoins en eau sont supérieurs à la quantité disponible sur le territoire. Le besoin de base en eau d’un humain est de 500 m3 d’eau / an. En France, son utilisation moyenne est mesurée à 3300 m3. À l’opposée, celle-ci est mesurée à 200 m3 au Yémen. Les changements climatiques, les activités industrielles et le manque de gouvernance en sont des causes.

Hydro-puissance :

  • État ou région qui maîtrise les cours d’eau par l’entremise d’infrastructures comme les barrages afin d’assurer son approvisionnement en eau ou en électricité tout en exerçant une influence sur ses voisins.

Étude de cas : Conflit sur le Nil entre l'Égypte et l'Éthiopie

Mise en contexte

Le barrage de la Renaissance éthiopienne (Gerd) est un bon exemple de la gestion géopolitique des eaux, mais aussi des tensions qui peuvent en jaillir. Les pays en aval du Nil comme l'Égypte craignent une perturbation de leur approvisionnement en eau qui dépend essentiellement de ce fleuve. Ce barrage permettra également à l’Éthiopie de contrôler le débit du fleuve, un atout stratégique qui pourrait lui donner un pouvoir coercitif sur les pays en aval. Le tout crée des différends diplomatiques et préoccupe la communauté internationale.

Informations complémentaires pour la compréhension de l'enjeu

  • « La surface du globe est constituée à 71% d’eau ;

  • Moins de 3% des réserves sont de l’eau potable, dont 2,2% est renfermée dans les glaciers et nappes phréatiques ;

  • Seulement 1% de l’eau sur terre disponible pour répondre aux besoins des 7,35 milliards d’êtres humains et à ceux des espèces animales et végétales ;

  • Par conséquent, « les spécialistes préviennent que l’accès inégal à l’eau sera la principale cause des conflits de demain ».

Source

Approche par problèmes :

L'usage d'un cours d'eau par certains États peut créer, dans les pays voisins, un stress hydrique. Néanmoins, il importe de réfléchir aux questions suivantes afin de comprendre la complexité du sujet :

  • À qui appartient réellement le Nil ?

  • La gestion du Nil devrait-elle être interétatique ?

En équipe de 3 à 4 élèves, tentez de trouver une réponse à ces deux situations-problèmes (15 minutes). Nous mettrons ensuite en commun vos pistes de solution. N'hésitez pas à utiliser les outils technologiques et les manuels mis à votre disposition.

L'eau : source de tensions internationales

De nombreux chercheurs, dont A. Wolf, soulignent qu’aucun conflit n’a éclaté avec l’eau comme motif principal. Cependant, il convient aussi de se garder des conclusions trop rassurantes. Sceptique quant aux guerres de l’eau, Th. Homer-Dixon, chercheur au programme d’Études sur la paix et les conflits de l’Université de Toronto, constate lui aussi qu’aucun conflit n’a éclaté, malgré les cris des alarmistes, au sujet du partage de l’eau ; il reconnaît cependant que la tension croissante sur la ressource pourrait se traduire, si elle s’accentuait, par un frein sérieux à toute croissance économique et à la déstabilisation des sociétés.

Source

Frédéric Lasserre, « Le partage de l’eau dans le monde : un enjeu majeur du xxie siècle », Mélanges de la Casa de Velázquez [En ligne], 36-2 | 2006, mis en ligne le 14 octobre 2010, consulté le 26 novembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/mcv/2324 ; DOI : https://doi.org/10.4000/mcv.2324

Qu'en dit l'actualité ?

La situation de l'eau au Koweït : une problématique inquiétante

L'eau : source de vie...et de conflits?

Une guerre de l'eau anticipée entre le Canada et les États-Unis

Les Émirats arabes unis : à la veille d'une pénurie d'eau généralisée

Se procurer l'eau : l'autre guerre du golfe Persique

Notes de cours trouées - L'eau

Document de notes de cours

Voici un petit document de notes de cours trouées sur les sections suivantes :

  • L'eau

  • Le conflit sur le Nil entre l'Égypte et l'Éthiopie

  • L'eau : source de tensions internationales

Notes de cours - L'eau - 2.1. Les sources de tensions et de conflits.pdf

2.1.2. Le pétrole

Le pétrole est une ressource très prisée partout autour du globe. En effet, les besoins en pétrole sont énormes et beaucoup de secteurs d’activités économiques en sont dépendants comme les transports. L’utilisation du pétrole est variée (carburant, combustible, plastique, etc.) et sa demande est très élevée.

Cela implique que les pays ayant des gisements détiennent une ressource qui est demandée par tous. Ainsi, l’approvisionnement en pétrole est un enjeu majeur que les gouvernements doivent résoudre. Plusieurs conflits interétatiques sont intimement reliés au contrôle et à la gestion de cette ressource. Un bel exemple, même s’il date du siècle dernier, est l’invasion irakienne du Koweït qui a mené à la Guerre du Golfe.

Interétatique :

  • qui relie plusieurs états/gouvernements entre eux.

Étude de cas : La guerre du golfe

Mise en contexte

La création de L'OPEP

Pour assurer une meilleure stabilité économique de la ressource et éviter les conflits internationaux, une organisation s’est formée en 1960: l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Ses membres fondateurs sont l'Arabie Saoudite, l'Iran, le Koweït, l'Iraq et le Venezuela.

L'objectif de sa fondation est de lutter contre la baisse des prix imposée par les pays consommateurs d'Occident, d'où sont originaires les compagnies pétrolières, en majorité. Sa mission est d’organiser et d’unifier les politiques des compagnies productrices de pétrole de ses pays membres pour veiller à un équilibre de l’offre et de la demande. Cette organisation tente de négocier les prix sur le marché et la production de pétrole. Ainsi, cette organisation vient influencer les échanges commerciaux entre les pays producteurs et les pays importateurs, occidentaux pour la plupart. Il s’agit donc d’un intervenant qui tente d'unifier les pratiques dans le but d’éviter de futurs conflits qui pourraient être causés par une mauvaise gestion de la ressource comme dans le cas de la Guerre du Golfe.

Baisse d'influence

À partir de 1980, elle subit une baisse d'influence : l'arrivée sur le marché de nouvelles zones d'extraction, dont l'Alaska, la mer du Nord et le Mexique. À partir de ce moment, elle ne contrôle plus qu'un tiers de l'offre mondiale et n'est plus en mesure de faire respecter les quotas qu'elle imposait aux États membres.

À noter que la révolution iranienne et la guerre du Golfe ont accentué la fragilité du cartel.

Question :

  • Quels étaient les 5 membres de l'OPEP à sa fondation ?

  • Quels sont les 13 membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétroles en 2019 ?

La Guerre du Golfe

En août 1990, l’Irak de Saddam Hussein envahit et annexe le Koweït qui devient la 19e province du pays. Tout juste sorti d'un conflit long de 8 ans avec l'Iran, l'Irak, endetté, cherche à mettre la main sur les richesses du Koweït. Ce dernier bénéficiait de gisements pétroliers et d’échanges avec l’Occident, ce qui créait de la jalousie dans le camp irakien (Université de Sherbrooke). L’ONU a condamné cette invasion et a demandé à l’Irak de se retirer du territoire koweïtien, demande qui fût ignorée. C’est alors qu’une coalition de pays menée par les États-Unis se lance au combat pour libérer le Koweït des mains de l’Irak. Il s’agit d’un conflit qui a mené les Américains à bien d’autres offensives dans cette partie du globe plus tard dans l’histoire. La gestion de cette ressource aura donc poussé plusieurs pays aux armes. (Université de Sherbrooke).

Carte des événements importants de la guerre du Golfe en 1991

En conclusion

Il est donc possible de comprendre que la gouvernance des ressources naturelles constitue une importante source de conflits, et ce, partout autour du globe. En effet, les pays ayant le contrôle de certaines ressources telles que l’eau et le pétrole se retrouvent donc en situation de pouvoir contre les autres états. Les pays possédant des gisements pétroliers ont un avantage certain lors des guerres, car ils peuvent directement alimenter leurs avions et char d’assaut (Université de Montréal).

Début d’un conflit pétrolier entre l’Arabie saoudite et la Russie

Le Mend et la guerre du pétrole

Compte-rendu d'une guerre du pétrole saccadée au Nigeria

La convoitise autour du pétrole libyen

La diplomatie du pétrole : Chavez à la conquête du monde

Création de l'Organisation des pays producteurs de pétrole

2.1.3. Les minéraux

Par définition, les minéraux sont généralement des roches ou des substances qui peuvent être mises à contribution dans le processus de fabrication d’objets du quotidien. En passant par la fabrication des composantes d’un téléphone cellulaire et par les pièces d’une automobile, les minéraux sont essentiels dans la vie de tous les jours.

Avec les nouvelles politiques d’électrification des transports, la demande en terres pour la fabrication de batterie est en forte croissance. Ainsi, l’exploitation minière (Encyclopédie canadienne) est une source de conflits constante entre de nombreuses entreprises, groupes sociaux et nations. Le contrôle des zones où se trouvent certains minéraux par les grandes industries peut créer des situations de monopole, d’exploitations illégales, mais aussi de tensions avec la population locale. La situation en République démocratique du Congo illustre bien les différents types de conflit qui peuvent survenir dans le domaine de l’exploitation minière.

Étude de cas : Le conflit minier en république démocratique du Congo

Ce conflit se concentre essentiellement dans la partie est du pays et est à la fois interétatique et international. La plus grande source de tension est en lien avec les minéraux des conflits. Ces derniers regroupent le tantale, le tungstène, l’or et l’étain.

Le cobalt est également l’une des ressources qui attire l’attention des entreprises étrangères dans le pays. La République démocratique du Congo possède un sous-sol extrêmement riche en minéraux, l’un des plus riches au monde. Les entreprises étrangères sont donc en compétition l’une contre l’autre afin d’extraire le plus de minéraux possibles. Chaque année, ces compagnies extraient l’équivalent de 10 milliards (Le Devoir) de dollars américain en minéraux du sol congolais.

L’exploitation illégale et le marché noir sont également un fléau qui touche de nombreux sites miniers. Depuis plusieurs années, il y a une concurrence entre les industries et la population locale. Les mineurs locaux sont très souvent expulsés des sites industriels, car les grandes compagnies veulent garder l’exclusivité de l’exploitation. Ces expulsions ont causé beaucoup de blessés, de morts et ont aussi causé une perte de revenus pour de nombreux mineurs locaux. Les zones d’exploitation minière artisanales sont donc toujours plus réduites.

Les minéraux de conflits

  • L'étain

  • Le tantale

  • Le tungstène

  • L'or

  • Le cobalt

Les nombreuses sources de conflits et de tensions relatives à l’exploitation minière dans la République démocratique du Congo ne sont pas un phénomène nouveau. En 2018, le gouvernement a mis de l’avant une loi qui obligeait les différentes sociétés minières sur le territoire à financer certains projets locaux afin de compenser pour les revenus perdus par les mineurs. Toutefois, le président du pays n’a toujours pas appliqué de mesures directes pour promouvoir la création des zones d’exploitation artisanales et favoriser le développement de l’économie locale (Source).

Les conditions de travail et humaines dans les mines de la République démocratique du Congo sont des enjeux très controversés. L’une des raisons derrière cette polémique est le travail des enfants. Selon plusieurs études, il y a près de 40 000 enfants qui travaillent actuellement dans les différentes mines. Les accidents sont très nombreux pour ces derniers, car ils n’ont pas la même force et la même expérience que les adultes. Il y a même de nombreux cas d’esclavage (source) le territoire du Congo. En 2013, il y a eu au moins 866 cas d’esclavage confirmés, de ce nombre, 23% des cas étaient liés à des enfants. Le travail forcé, c’est-à-dire un travail fait sous la menace d’un châtiment, est une situation très répandue sur l’ensemble du territoire.

Le travail des enfants dans les mines d'or du Mali

La RDC : cobalt congolais ou chinois?

La ruée vers l'or tchadien

Le contrôle des ressources : conclusion

Comme vous avez pu le constater, plusieurs pays font face à des conflits en liens avec le contrôle des ressources naturelles telles que l’eau, le pétrole ou les minéraux. D’autres ressources comme les terres agricoles sont de plus en plus convoitées pour des pays qui cherchent à atteindre la souveraineté alimentaire. La carte ci-dessous représente les principaux enjeux reliés au contrôle des ressources naturelles.

Ressources complémentaires

Remerciements

Je tiens à remercier tout spécialement Mme Ariane Aubry, M. Jérémie Galuppi, M. Francis Fortier et M. Dany Milot pour la co-construction de cette page pédagogique dans le cadre de leur cours de didactique de l’univers social à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Un merci tout spécial à M. Danny Legault, chargé de cours à l’UQAM, sans qui la réalisation de ce projet n’aurait jamais vu le jour.