Normes pour la construction en terre : essais de traction indirecte (Pérou)

Les normes pour la construction en terre apparaissent à partir de la 2e moitié du XXe siècle mais sont relativement insuffisantes encore aujourd’hui. Une révision des normes de différents pays montre que peu incluent des spécifications minimum pour les caractéristiques mécaniques du matériau terre pour la construction.

Ces spécifications minimum sont évaluées par des essais en laboratoire. Cela vient en partie du fait que la construction en terre aujourd’hui concerne majoritairement l’auto-construction et le plus souvent dans des zones rurale plutôt qu’urbaine ou péri-urbaine, ce qui entraîne un faible intérêt pour normer la construction en terre.

La technique la plus présente dans les normes est celle de la maçonnerie d’adobe et commence à apparaître des références à la technique du pisé. Il n’existe pas de consensus sur les résistances minimum à respecter, ce qui fait que les normes n’indiquent généralement pas de valeurs à respecter. Et lorsqu’elles le font, c’est en s’appuyant sur des essais en laboratoire sur des échantillons de terre cubique, car elles s’appuient sur les normes et les essais existants pour le béton.

Pour les matériaux fragiles comme la terre, les essais de résistance ultime à la traction entraîne des fissurations du matériau. La terre présente une résistance à la compression beaucoup plus importante que sa résistance à la traction. Les essais de traction directe montrent peu d’intérêt pour évaluer les caractériels d’un échantillon de terre.

Pourtant dans le cas de la terre, les essais sur des échantillons cubiques sont mal adaptés car ces essais partent de la supposition la distribution isostatique des efforts se fait selon un maillage de de lignes verticales de compression uniforme. En réalité, avec la distribution isostatique réelle dans l’échantillon de terre, les dégradations se produisent du fait d’une forme de traction indirecte.

Pour être utilisable, un essai doit être simple et révéler facilement le lien entre les déformations subies et la charge appliquée à l’échantillon. Les essais de compression sur un cube de terre ne respectent pas cette règle puisque se créent une distribution de déformations complexe, du fait des actions restrictives des plateaux de la presse ainsi que des effets de bord qui produisent des fissures de traction dont les liens avec la charge appliquée ne sont pas connus.

Il n’est, par ailleurs, pas utile de soumettre un adobe à un effort de flexion et discuter si la dégradation de l’échantillon vient d’effort de coupe ou d’effort de traction par flexion car les fissures structurelles sont toujours initiées par les efforts de traction.

Quelque soit l’essai réalisé – compression, flexion, traction – les déformations de l’échantillon de terre sont dues à des efforts de traction direct ou indirect

Efforts de traction horizontale dans un essai de traction indirecte (source : rapport complet)

Par ailleurs, il y a une nécessité de développer des essais pour le mortier de terre pour la construction en adobe car la résistance de cette construction dépend en grande partie de sa qualité et sa capacité de cohésion pour unir 2 blocs d’adobe.

Photo d’essai de traction indirect sur un ensemble de 2 adobe + mortier (source : rapport complet)

Conclusions de l’étude

Il est important de connaître la qualité de la terre à travers des essais de capacité limite de déformation à la traction, qui sont les efforts qui produisent les fissures et déformations, et non pas les efforts de compression.

Le travail réalisé dans cette étude donne des pistes d’essais pour déterminer la qualité de la terre, ces essais doivent être améliorés/ajustés en laboratoire pour établir des essais pour les normes de construction en adobe et en pisé.

L’importance d’améliorer la qualité des mortiers pour la construction en adobe est soulignée par l’étude. La qualité des mortiers est un sujet qui n’est pas connu traditionnellement mais qui peut être testé relativement facilement en laboratoire.

Il est conseillé de réaliser, dans un premier temps, des tests simples pour choisir une « carrière » de terre, comme l’essai de compression manuel, pour établir s’il y a une présence suffisante d’argile (qualité et quantité), plutôt que d’utiliser les recommandations de limites inférieures/supérieures de pourcentage d’argile, sans en connaître la qualité, qui est très variable. En effet 3% d’argile de très bonne qualité peut être équivalent à 60% d’argile de mauvaise qualité.

Les constructions en terre dans les zones sismiques ne pourront éviter les fissures dues à la traction du fait des sollicitations régulières par les séismes qui vont entraîner une accumulation des dégradations. Ces constructions requièrent des structures résistantes, stables même avec des fissures et avec des déplacements contrôlables par les renforts. Il est important de connaître et pronostiquer les modèles de déformations, qui se créent du fait des efforts de traction, pour concevoir de manière adéquate les renforts.

Auteurs de la publication résumée ici : Julio VARGAS – NEUMANN