«Au Bataclan, il y avait trop de victimes pour faire du cas par cas.»
Mathieu Langlois, médecin-chef du RAID
Il y a dix ans, la France vivait l’horreur absolue.
132 morts, des centaines de blessés.
Le 13 novembre 2015, une série d’attentats coordonnés frappe Paris et Saint-Denis : trois kamikazes se font exploser aux abords du Stade de France, trois autres ouvrent le feu sur les terrasses de cafés dans le 10ᵉ et le 11ᵉ arrondissement, avant que trois derniers n’entrent dans la salle de concert du Bataclan.
L’islamisme radical venait de transformer la capitale en champ de bataille.
Sur les terrasses, les blessés sont étendus à même le sol. Les premiers médecins du SAMU, des SMUR et de la BSPP improvisent des postes de triage dans la rue.
Au Bataclan, les primo-intervenants sont les médecins des colonnes d’assaut. Mathieu Langlois pour le RAID, et Denis Safran, médecin-chef de la BRI, qui racontera :
« Je vois dans la salle du Bataclan plein de morts, et dans la fosse, des dizaines de gens enchevêtrés les uns dans les autres, criant, appelant à l’aide. »
Dans les HIA de Percy et de Bégin, la nuit fut tout encore plus longue. Les blessés arrivaient par vagues. Les chirurgiens, habitués des théâtres d’opérations décrivent « Kaboul à Paris ». Pour ces victimes ce fut « la guerre sans les gilets pare-balles ».
Plaies par balles, éclats, polytraumatismes : les protocoles de guerre s’invitèrent soudain dans les blocs d’Île-de-France.
Et nous, dix ans plus tard, qu’en retenons-nous ?
Que la frontière entre le médical civil et le médical militaire est désormais poreuse. Que la médecine de guerre n’est pas réservée aux champs de bataille lointains. Qu’elle est une culture, un réflexe, une manière d’envisager l’extrême.