Qui suis-je ?

Ce site a été  rédigé à votre attention par  Jean-Marc BOUHELIER Conseiller Pédagogique pour l’Éducation Musicale à l'Inspection Académique de la Haute-Marne ( de 1992 à 2007 , enregistré dans les tablettes de la Bibliothèque Nationale de France, (pour preuve)et actuellement en retraite.

Une expérience de Musicien , de maître formateur à l’École Primaire et de Conseiller Pédagogique pour l’Éducation Musicale  constitue un terrain d'investigation approprié et diversifié pour nourrir la réflexion sur l’Éducation Musicale . La bibliothèque Nationale reste aujourd'hui la seule trace officielle de mon passage dans l’Éducation Nationale ...


Mon parcours professionnel.

J'ai été Instituteur pendant 5 ans puis Instituteur Maitre Formateur pendant plus de 15 ans. Je conseillais donc les enseignants en formation, initiale et continue,  au sujet des différentes disciplines abordées à l’École Primaire. Ensuite je me suis spécialisé en Éducation Musicale. 

L’École a pour but d’éveiller les élèves à la connaissance et à la compréhension du monde qui les entoure. Afin que chacun puisse agir sur le monde et  trouver une   place digne parmi les autres  êtres humains. Le propre d'un enseignant en École primaire est de pouvoir tisser des liens entre les différentes disciplines. Et d'aider chaque enfant à grandir, à s'élever en mettant toutes ces ressources à sa disposition. La pédagogie différenciée qui conduit à organiser des activités selon les besoins éducatifs de chaque enfant m'a paru constituer une approche pertinente pour aider à combler des manques repérés chez les élèves. Il s'agit de "donner plus à ceux qui ont moins " . La recherche de l'équité et de l'égalité (par la compensation) ont orienté mon travail. Évidemment la constitution des groupes de besoins demande beaucoup de travail de préparation : évaluations , créations d'exercices adaptés... Cette forme de travail demande un apprentissage particulier. Certains élèves travaillent en autonomie pendant que les autres bénéficient de toute l'attention du maitre .  Chaque exercice s'organise en préparant des aides spécifiques aux élèves que l'on sait en difficulté .

Travail exigeant mais passionnant,...  et  efficace. Un enseignant a été comme un "phare" pour moi : Célestin Freinet à l'origine de la pédagogie Freinet. Et je pense souvent à la bouleversante, énigmatique et troublante  Louise Michel, autrefois institutrice en Haute-Marne, dont un collège de ma ville porte le nom. Dans cette même ville, on a ouvert un boulevard à son sinistre bourreau : Thiers.

J'apprécie toujours le principe de la Fonction Publique au sein de laquelle j'ai exercé mon métier d'éducateur. Les Français mutualisent leurs ressources pour créer des établissements d'éducation et pour salarier les éducateurs. Les Français sont donc les propriétaires de l’Éducation Nationale. Ils ont créé du Commun (du "déjà là" dirait sans doute Bernard Friot) , dans l'esprit du Conseil National de la Résistance qui avait prévu entre autres choses, la nationalisation des grandes industries, la création de la Sécurité Sociale et le droit à la retraite. La lourde responsabilité  de faire progresser  l’École et de la défendre  repose donc  sur les épaules des citoyens, tout comme ceux-ci ont la responsabilité de faire évoluer toutes les institutions. Les citoyens ont à exercer scrupuleusement le contrôle de l’Éducation Nationale. Avec le souci de l'intérêt général conformément à la définition de la République (la "chose publique"). La pesanteur étatique et hiérarchique, les directives politiquement orientées sont souvent en contradiction avec la possibilité d'une gestion collective et véritablement démocratique de l'institution. La tâche est difficile , exigeante, mais pas impossible parfois... et offre une perspective enthousiasmante pour le long terme.  Les mouvements pédagogiques parviennent à ouvrir des brèches dans le mur du conservatisme. Mon inquiétude vient en fait d'une impression catastrophique : le démantèlement voulu des fonctions publiques (Santé, Education ...) par nos dirigeants politiques actuels  au profit des intérêts privés...

J'ai apprécié les rencontres. Les échanges d' idées et les actions communément menées. D'abord avec les parents des élèves, puis plus tard avec les élus des municipalités et du département, et aussi avec les musiciens professionnels.  Je crois que là aussi nous avons beaucoup appris ensemble.

Des centres d’intérêts variés

J'ai aimé passionnément mon métier. J'ai connu les moments d'inquiétude que les responsabilités et la difficulté de la tâche à accomplir peuvent susciter. Comme tous mes collègues j'ai aussi connu ce que je pourrais appeler des moments d' enthousiasmes et d'heureuses surprises. Je les décris tout au long de ce site. Je pense être exigeant avec moi-même et certainement aussi avec les personnes qui se forment sous ma responsabilité. J'essaie d'être bienveillant le plus possible. Je dois dire que mes élèves, petits ou grands, en retour, se sont, eux aussi, montrés plutôt  conciliants. Une chance sans doute. Je n'ignore pas que certains de mes collègues peuvent souffrir beaucoup . C'est le cas aussi pour bien des élèves malheureusement. La fatalité, les coups du sort, pas toujours dus à l’École elle-même, frappent les personnes qui fréquentent les établissements scolaires. L’École n'est pas un sanctuaire délivré des tragédies qui marquent  la condition humaine. C'est une donnée à prendre en compte, évidemment. C'est pourquoi j'ai toujours pensé que nous avions avant toute chose à prendre soin les uns des autres. Enseignants et élèves. C'est l' Objectif oublié, négligé,  mais primordial d'une formation.  A mettre au premier plan, avec l'éducation au courage.  

J'ai été intéressé (et reste intéressé ) par toutes les disciplines. Artistiques, scientifiques et sportives. Étant à même d'enseigner toutes les disciplines de l’École primaire, je suis conscient que ma curiosité a été  sans cesse stimulée dans toutes les directions. Les élèves trouvent presque toujours un intérêt privilégié pour l'une ou l'autre des matières auxquelles ils se confrontent. 

La philosophie m'inspire. La pensée de Spinoza particulièrement. Des conférenciers témoignent de la richesse de l’œuvre de ce philosophe . Voici des liens Pour la philosophie de la Joie. Pour la pensée de la Nature et du comprendre.... Et c'est le moment d'évoquer cette autre source d'inspiration : Jung, avec Frédéric Lenoir dans ce Chemin vers soi.

Les enfants ont appris à parler, presque seuls, sans l’École en tous cas. Cet apprentissage considérable et complexe, réalisé en autonomie, prouve leur  leur aptitude à apprendre. Ils savent tous établir des relations entre les objets qui leur sont présentés (mots, dessins, sons, nombres ...)  et des actions attendues. L'étymologie du mot Intelligence  nous donne des indices. Intel : entre et ligere : relier. En un mot ils sont tous intelligents. La  familiarité ,  l'accoutumance paisible, la fréquence et la qualité des contacts (les encouragements)  avec les objets et les savoirs  que l'on veut porter à leur connaissance conditionnent les acquisitions des compétences.    Je me suis toujours élevé contre ceux qui brisent l'élan et la curiosité naturelle des enfants avec des jugements hâtifs qui mutilent définitivement des êtres fragiles et en devenir. Il n'y a rien de plus terrible et de plus stupide que de dire à un jeune enfant : "tu es nul "  "tu es nul en calcul !" . Il ne faut pas s'étonner de trouver des élèves muets et introvertis , rivés à leurs chaises !  Petite compensation et remédiation possible : les introvertis, les enfants en difficulté, ceux qui doutent et dont on doute (à tort) laissent une trace sonore dans le chant choral. Et chaque voix compte. Il y a là de quoi commencer à réconcilier les enfants ... avec l’École ... et avec la vie ....


L'Histoire m'a passionné. Son enseignement surtout. 

La pédagogie en histoire m'a fait réfléchir sur les finalités de l'enseignement autant que sur les démarches à privilégier . C'est bien l’émancipation  de l'élève qui doit être visée. Et non un consentement à des idées et des notions abstraites sans que la réflexion soit exercée. Les œuvres musicales écoutées en classes appartiennent au patrimoine historique. Ce sont des documents, des témoignages d'une expression sensible  qui sont à situer dans le temps, dans le passé, souvent, tout comme les œuvres littéraires ou les œuvres des arts visuels . Et le temps du partage du sensible ( lire le livre de Jacques Rancière : "le partage du sensible") , à vivre au présent, est en soi très formateur pour les êtres sociaux que sont les élèves.

Aujourd'hui , je souhaite partager ces publications particulièrement élaborées concernant la pédagogie de l'histoire. Elles peuvent guider l'enseignant qui aborde l'éducation musicale grâce à des activités d'écoutes. 

Une professeure, Laurence De Cock,  propose une approche passionnante de l'enseignement de  l'Histoire. 


Prises de conscience 

Je viens d'une famille ouvrière. 

J'ai compris très vite que "les patrons"  n'avaient guère de bienveillance  pour les laborieux, et qu'il fallait se méfier. "Surtout ne vends pas tes bras!" .  A 12 ans, je savais pertinemment qu'il me faudrait "échapper à l'usine". L'usine autour de laquelle gravitaient les cités ouvrières, l'église, les écoles et collèges techniques, et les supermarchés : toutes structures créées par les propriétaires de la firme.  L'argent venu d'en haut, circulait et retournait immanquablement dans les mêmes  poches. Partout la présence de l'autorité paternaliste pesait sur le monde ouvrier. Le patron propriétaire et père nourricier , le père éternel et ses saints patrons dont on craignait les colères ,  les directeurs d'études techniques  qui montraient que  beaucoup des enfants des ouvriers ne méritaient rien d'autre que d'être affectés "à la chaine" ... mais c'était "une place" assurée.  Cette analyse, je ne l'ai faite que bien plus tard, vers 18 ans, en m'appuyant sur la base d'un vécu rude, mais fertile pour assoir la réflexion.  Autour de l'enfant que j'étais, on savait que l'"on n'avait pas volé l'argent qui tombait à la fin du mois . On l'avait bien mérité." Par ailleurs, on ne se sentait pas capable des initiatives que des familles fortunées avaient prises pour le "bien de toute la région.". Il y avait les syndicats et les Comités d'Entreprises qui veillaient. On s'en remettait à eux et aux dires des délégués syndicaux : "Eugène Descamps et Edmond Maire sont des types bien. Ils veulent créer un mouvement autogestionnaire. " Moi, encore trop jeune je ne comprenais pas ce que cela voulait dire. Surtout dans le cadre d'une entreprise au sein de laquelle on fabriquait des autos. Mais, bien plus tard  je me suis rappelé du mot qui avait étrangement résonné à mes oreilles. Il faut dire que j'avais l'oreille musicale. Tout jeune musicien, je m'étais réjoui lors des examens de musique fédéraux qui se déroulaient dans des ateliers de l'usine . J'avais été pressenti pour faire partie de  l'Harmonie de la firme. Cet ensemble musical vedette était au générique de l'émission télévisée : "Les musiciens du soir". 

Je pense avec une tendresse émue à ce questionnement au moment des élections : "Et celui-là , il est pour le Gros ou pour le Petit ?".  Évidemment, chez nous , on se rangeait du côté du Petit.  C'était une façon simplissime mais claire de  décrire la société divisée en deux classes qui s'affrontent : la classe des dominants (les Gros) et la classe des dominés (les Petits).  Le registre du langage familier, chargé d'humour, était  prépondérant dans le quartier  des gens des "Castors". Il me faut quand même dire que tous ces gens avaient construit eux-mêmes et ensemble leurs petits pavillons. Ils s'étaient regroupés, avaient fondé une association et avaient élaboré un beau projet. Chacun deviendrait "un Castor". Chacun contribuerait à la réalisation du lotissement selon sa qualification et en participant au chantier durant un nombre d'heures important et fixé d'avance. Des heures prises sur les congés et les soirées . En plus du travail à l'usine. Mon père qui était électricien a assumé la responsabilité des installations électriques des pavillons. D'autres se chargeaient de l'édification des murs sous l’œil des maçons professionnels inscrits pour l'acquisition d'un pavillon. Des "gratte papiers" s'étaient chargés des tâches administratives. Certains d'entre eux devenaient de simples manœuvres sous la direction des  professionnels qualifiés en terrassement, en maçonnerie, en électricité ... Les rôles étaient  parfois l'inverse de ceux qui étaient remplis à l'usine. Les bureaucrates, proches des "chefs" à l'usine, devenaient de simples exécutants. Les exécutants à l'usine, par ailleurs reconnus par leurs compétences, se voyaient confier des responsabilités que l'usine leur avait refusées. Mon père ne se plaindra jamais d'une quelconque autorité parmi les Castors. Comme si la hiérarchie avait été nivelée. Comme si l'égalité avait été le fort de l'organisation. Et chacun se découvrait ... "capable". Des horizons et le champ des possibles s'ouvraient grâce à ce type d'organisation sociale ... C'est le sentiment que j'ai retenu et que je veux encore retenir, moi, "l'enfant des Castors".

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