Interviews & interventions

photo ci-dessus : Philippe Ward, auteur et Directeur de Rivière Blanche avec ma pomme sur un salon du livre.


Cette interview donnée à la Confrérie de l'Imaginaire à l'occasion de la sortie de Radu Dracula 1 en BD (2011) résume assez bien mon personnage je pense, il s'agit d'une interview en trois questions où il m'était demandé de "broder" :

MilieWB: Philippe Lemaire, qui êtes vous?

Je suis un être humain de sexe masculin, de nationalité française, j'ai 47 ans, suis marié, père, grand-père et j' écris et dessine des histoires de vampires.

J'aurais pu écrire et dessiner des histoires à l'eau de rose ou des histoires avec des petits lapins dans les champs pour amuser les enfants mais... non... une force irrésistible m'a entrainé sur les chemins du fantastique, et ce depuis déjà bien longtemps.

 J'ai passé les premières années de ma vie dans un cimetière. Mon grand père en était le gardien et comme souvent dans ce cas, sa maison avait été construite dans l'enceinte même du cimetière, celui de Cherbourg. C'est donc là que je fis mes premiers pas. Une fois les grilles fermées en fin de journée, le cimetière devenait mon terrain de jeu, il était à moi. Je connaissais tous les recoins de ce cimetière situé sur un terrain irrégulier aux pentes abruptes et ombragé par de grands marronniers. Chaque tombe m'était familière, aussi bien les anciennes qui dataient de Napoléon que les nouvelles qui apparaissaient sans cesse, quelle que soit la saison. C'est dans ce cimetière que j'ai découvert que l'on pouvait jouer avec sa peur. Mon grand père me taquinait en me disant que je n'étais pas capable de traverser le cimetière une fois la nuit tombée et je relevais le défi à chaque fois, malgré la présence de ces maudits feux follets qui me faisaient toujours sursauter.  

 Quelques années plus tard, j'ai vu mon premier vampire. Il s'appelait Von Krolock. Le film passait le soir dans la section "arts et essais" du cinéma de l'école et on nous l'avait présenté comme une parodie, un film rigolo... Hélas, je n'avais pas le recul nécessaire à 8 ans pour capter l'humour de Polanski et ce Comte Von Krolock ainsi que toute la clique qui peuplait le cimetière de son château m'avaient foutu une frousse de tous les diables ! Mais une frousse teintée d'attirance... Ce château et ses occupants effrayants avaient quelque chose de féerique. Il se passe rarement une année, aujourd'hui encore, sans que je ne me replonge avec délices dans ce "Bal des vampires".

 A l'adolescence, il allait de nouveau être question de vampires mais cette fois, c'est moi qui étais au centre du sujet. Ma mère jugeant que mes canines supérieures prenaient des proportions invraisemblables, elle me conduisit chez un dentiste. Les paroles de ce dernier résonnent encore dans ma tête : " Mais vous ne pouvez pas le laisser comme ça ! On dirait un vampire ! " . C'est ainsi que je fus dépossédé de deux attributs somme toute naturels au moyen d'une roulette de dentiste. Quand je pense que certains "gothiques" aujourd'hui cherchent à se faire implanter des dents de vampire...

 Ce nouvel épisode avait cependant piqué au vif ma curiosité. Les images du « Bal des Vampires » hantaient toujours mes nuits et voilà que j'avais dû aller me faire limer les canines. Qu'en était-il réellement de ces histoires de vampires ?... Commença alors une quête de connaissances à ce sujet qui se poursuit encore aujourd'hui. Je fis le tour de ce que le cinéma proposait sur le sujet (les 2 Nosferatus, les Dracula de la Hammer, etc...) ainsi que la littérature (le Dracula de Stoker, Carmilla de le Fanu, La Morte Amoureuse de Gauthier, etc...). C'est à cette époque que je faillis m'orienter vers une carrière de dessinateur de BD. Mon "coup de patte" naissant avait attiré l'attention d'une revue régionale à Manosque où nous vivions désormais mais mon entourage m'en dissuada immédiatement : " c'est pas un métier ça ! ".

 A l'âge de 20 ans, la destinée m'attira de nouveau sur un sombre sentier. Sans être comparable à la crise actuelle, le chômage sévissait déjà en France en 1984 et je me suis ainsi retrouvé à tenter ma chance aux... Pompes Funèbres Générales... Contrairement à d'autres branches que j'aurais préférées, on ne me ferma pas la porte au nez cette fois, et je me retrouvais à vendre des cercueils et à organiser des enterrements à Dieppe. Ca durera 11 ans au gré de mutations régulières en Normandie. Etant devenu cadre, je finis par quitter cette maison où le profit prenait le pas sur les services ; comme quoi je ne suis pas un authentique "vampire"...

 Je pris ensuite un bar avec mon épouse pour le revendre au bout de 11 nouvelles années. Et après ? Que faire à plus de 40 ans après avoir été cadre et indépendant ? Les vampires trottaient toujours dans ma tête et ma prédisposition naturelle pour le dessin ne m'avait pas quitté. Dès lors, pourquoi ne pas tenter le coup de vivre de cette passion du dessin cumulée à celle de mes sangsues favorites ? Il me sembla que c'était le moment où jamais.

 C'est ainsi que j' ai fait la connaissance de Philippe Ward, auteur de littérature fantastique et Directeur de la Collection Rivière Blanche qui cherchait à s' essayer à la bande dessinée en tant que scénariste. Voilà bientôt 4 ans que nous sommes complices. Un premier essai avec une bande dessinée fantastique se déroulant au cimetière (encore !) du Père Lachaise avant que nous nous entrainions mutuellement sur nos terrains de chasse favoris : je l'ai pour ma part convaincu de travailler sur le thème de Dracula tandis qu' il parvenait à me convaincre de m' essayer à l' écriture de romans.

Le chemin est encore long pour découvrir ce qu'il me reste à découvrir au sujet de mes monstres favoris et un voyage en Roumanie n'aura pas suffit pour trouver des réponses à toutes mes questions. Les roumains des campagnes transylvaines sont peu loquaces sur le sujet et le "Dracula Tour" ou autres "touristeries" ne m'attirent guère. Je cherche à puiser des renseignements dans les vieilles légendes locales, les croyances réelles des habitants des Carpates et les mots sont souvent durs à sortir. J'ai par exemple cherché des ruines près du col de Borgo comme nombre de touristes. Et comme nombre de touristes, on m'a indiqué l' hötel Castle Dracula quand on ne me conseillait pas carrément d'aller plutôt visiter les monastères de Bucovine ! Il y a pourtant bien des ruines à la réputation douteuse à quelques kilomètres du col... Il faudra que j'y retourne...  J'avance cependant dans mes recherches, lentement mais sûrement. Internet est une mine de renseignements et la Roumanie n'est pas si loin.

Pouvez-vous nous parler de la façon dont vous avez travaillé avec Philippe Ward et Alexis Vieillard-Baron ?

La façon dont je travaille avec Philippe et Alexis est basée sur le principe que chacun a son mot à dire sur tout. Ainsi, personne n'est enfermé dans son rôle principal et peut - et doit ! - donner son avis sur la prestation des autres dès qu'il juge utile de le faire. Philippe n'est pas particulièrement habile avec un crayon mais ça ne l'empêche pas de me faire refaire un dessin qui ne lui plait pas ou de faire une remarque sur la colo d'Alexis. Alexis qui est aussi dessinateur agit de même et ne se prive pas de faire des remarques sur le scénario si quelque chose l'interpelle. En général, lorsque quelque chose ne nous convient pas dans le travail des autres, on s'efforce de proposer des solutions afin que le problème soit vite réglé. Dans tous les cas, chaque désaccord fait l'objet d'une discussion qui aboutira à un accord. Ces désaccords sont cependant rares car nous sommes tous les trois des passionnés de fantastique et nos sensibilités par rapport à ce genre sont assez proches.

 Lorsqu' on démarre un nouvel album, la première partie du travail revient surtout à Philippe et moi qui sommes en charge du scénario. il nous faut commencer par définir le contenu général de l'histoire, ce qu'on va raconter dans ce nouvel opus. Un des principes établis pour la série des Radu Dracula est que chaque album doit avoir sa propre intrigue et sa propre fin. Une fois les grandes lignes de l'intrigue établies, on dispose d'un synopsis qu'on va découper en chapitres, c'est le moment de gérer l'utilisation des flash-back qu'on utilisera systématiquement. Le format standard d'un album BD étant de 46 pages, à nous de définir la place à donner à chaque chapitre. Ils peuvent être courts (3 / 4 pages) ou longs (8 / 10 pages) en fonction du contenu, des points qu'on souhaite présenter brièvement et de ceux qu’on souhaite développer. C'est le moment de gérer le rythme de l' album.  Lorsque le nombre de pages de chaque chapitre a été défini, il est temps de passer aux brouillons de chaque page qu'on appelle story-boards.

 C'est moi qui m'y colle et je commence par placer les vignettes, puis par définir les cadrages et angles de vue et enfin la position et l'emplacement approximatifs des personnages, des objets et des bulles. Le contenu des bulles peut avoir été établi d'avance (par Philippe et moi) comme ce fut le cas pour le tome 1 ou être réalisé au moment des story-boards comme c'est le cas pour le tome 2. Une fois les story-boards réalisés, c'est le moment où chacun doit impérativement donner son avis car il est aisé de les modifier.

 L'étape suivante est la réalisation des crayonnés sur les planches définitives. Il sera encore temps de les modifier si besoin est, mais on essaye d'éviter d'avoir à le faire car les crayonnés sont assez détaillés et toute modification occasionne une perte de temps bien plus conséquente que la modification d'un story-board. Cette étape est enfin suivie de l'encrage où je commets l'irréparable.

 La planche encrée est ensuite scannée et arrive entre les mains d'Alexis. Suivant les chapitres, la manière de procéder est alors différente. Si Alexis "sent bien" telle ou telle partie de l'histoire, il attaque la colorisation avec les choix de couleurs qu'il aura faits. S'il se sent moins à l'aise sur un chapitre, il me demande mon avis et on discute jusqu' à trouver l'option qui nous semble la meilleure. Mon encrage étant très chargé, la difficulté pour Alexis est de ne rien retirer des effets de l'encrage (textures, ombres, etc...) tout en les renforçant. Dans certains cas, il se peut aussi qu'il ait besoin de "passer par dessus" l'encrage, d'en effacer une partie avec la couleur quoi. Ces étapes un peu délicates sont toujours réalisées après concertation. La documentation utilisée pour des bâtiments historiques ou des objets anciens est commune au dessinateur et au coloriste afin d'en obtenir une représentation la plus juste possible.

 Une fois la colorisation d'Alexis terminée, elle est soumise à l'avis de ses deux complices et contrairement à l' encrage, toute modification reste possible. Alexis utilise en effet une colorisation numérique (basée sur la superposition de calques) tandis que je travaille " à l'ancienne " : crayons, plumes, pinceaux et encre de chine.

Pour la dernière question, je voulais vous demander de nous faire partager vos goûts en matière de fantastique, en nous présentant un artiste, ou une oeuvre, qui vous plait mais reste peu connu ou encore inconnu.

Faire partager mes goûts en matière de fantastique à travers des artistes méconnus va, hélas, se révéler impossible pour moi car ceux qui ont ma préférence ont tous une certaine notoriété et sont pour la plupart devenus des "classiques".

 Je vais néanmoins détailler qui ils sont et pourquoi j'aime leurs créations. Avant de le faire, je tiens à préciser que les artistes ne sont pas les seuls responsables de mon goût pour le fantastique, même s'ils y ont fortement contribué pour certains. Le cimetière où j'ai grandi, par exemple, avait quelque chose d'authentiquement fantastique avec ses grands arbres, ses tombes multi-centenaires et son terrain en pente irrégulière. Le côté naturellement fantastique des Carpates est bien réel aussi comme le sait tout voyageur ayant fréquenté l'endroit. Enfin, impossible de parler de mes penchants pour le fantastique sans parler de la pratique du spiritisme qui m'a parfois fait vivre des moments tout à fait fantastiques !

 Mais venons-en aux auteurs. Deux m'ont plus particulièrement marqué : l'un avec le cinéma, l'autre par la littérature.

 Pour le cinéma, je l'ai déjà mentionné en répondant à la première question, c'est « Le Bal des Vampires » de Polanski. Le fait que j'ai découvert ce film à l'âge de 8 ans y est forcément pour quelque chose, mais quarante ans plus tard, le charme de ce film reste intact à mes yeux. Je ne conçois pas le fantastique sans la beauté car je trouve que c'est elle qui permet à la noirceur de donner sa pleine mesure, un peu comme le Bien met en évidence les monstruosités du Mal.

Or, ce Bal des Vampires est beau. Les décors naturels de montagnes enneigées sont quasi-féeriques, le château du Comte Von Krolock est majestueux - tout en restant réaliste - et surpasse de loin les productions de la Hammer. Les intérieurs du château sont somptueux, chaque objet est une oeuvre d'art mais... tout est corrompu par le Mal qui règne en ces lieux.

Les araignées se sont chargées d' aménager le décor, les tableaux représentant des générations de Von Krolock sont grandioses mais les personnages peints ont vraiment de sales mines, et l' actuel Comte Von Krolock est plutôt bel homme, richement vêtu, distingué et courtois mais... il est si pâle... ses regards sont si inquiétants... révélateurs de la contradiction qui habite ces lieux : on imagine sans peine que ce château a dû être un château de contes de fées dans le passé et que quelque chose est venu corrompre l' endroit. Que le Mal y règne désormais en Maître.

 Le professeur Abronsius, représentant du Bien sous les traits d'un Einstein farfelu, s'efforcera bien d'arracher la belle Sarah aux griffes de la famille Von Krolock mais comme disent les roumains : "autant mettre le doigt dans la mer pour en mesurer la profondeur". Une oeuvre fantastique ne peut pas, ne doit pas, se conclure par la victoire du Bien. C'est contre-nature !

Pour conclure, je citerai quelques autre films qui ne m'ont pas laissé indifférent, ils ont hélas tous de l' âge car je ne suis guère réceptif aux versions de ces dernières années qui ont choisi d' oublier les bases du mythe. Je mentionnerai donc :

- Le Nosferatu de Murnau pour le jeu hallucinant de Max Shreck qui reste inégalé à ce jour d' après moi.

- Le Nosferatu d' Herzog pour sa sombre beauté. (Klaus Kinski y est magistral aussi)

- Les Subspecies de Ted Nicolaou qui reviennent aux bases du mythe avec un Radu terrifiant. 

 - et le Dracula de Coppola quand même pour l'esthétique des images, même si son "Prince Vlad" ne ressemble guère au monstre de Stoker.



Une autre donnée à Des Encres Sur Le Papier :

Parlez-nous un peu de vous Philippe Lemaire...

D’où vous est venue cette passion pour l’écriture ? 

Ce n’était pas une passion au départ. Ma passion première dans le domaine de la communication via l’édition allait uniquement vers le dessin, la bande dessinée essentiellement. C’est en réalisant une bande dessinée avec un auteur de romans / Directeur de collection (Philippe Ward / Rivière Blanche) que ce dernier m’a contraint et forcé à me mettre à l’écriture. Je ne suis donc parvenu à l’écriture que sous la menace en fait ! 

Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ?

Bram Stoker. A l’instar d’Oscar Wilde, je continue à penser que son Dracula est peut-être le plus beau roman de tous les temps. Stephen King pour son génie. Frédéric Dard pour les heures de plaisir que San Antonio m’a procuré, pour ce sens de l’humour décalé que j’utilise maintenant moi-même dans mes propres créations, fussent-elles d’un tout autre genre. Enfin, Fred Saberhagen pour son approche du mythe de Dracula qui nous a, semble-t-il, communément hanté. Il aurait tout de même pu faire l’effort de s’apercevoir que Vlad Tepes n’est pas le vampire de Stoker cependant . 

Parmi tous vos romans, de quels personnages êtes-vous le plus proche ? Pourquoi ?

D’aucun. Je suis un observateur et lorsque je n’ai rien à observer, mon imaginaire prend le dessus. Il ne m’est jamais venu à l’esprit de m’identifier à un de mes personnages et je ne pense pas que ce serait une bonne chose. Mon propre personnage vaut ce qu’il vaut mais si quelqu’un doit écrire à mon sujet, autant que ce soit un autre. Ce serait plus juste je pense, car, à l’instar de mon vampire Radu, je ne suis pas toujours objectif !

Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ?

En remerciant leurs auteurs de leur aide lorsqu’elles sont objectives ou  constructives, en leur répondant avec verve lorsqu’elles sont injustifiées. On dit souvent que « le plus fin se tait » et j’avoue être tout à fait incapable de respecter ce précepte lorsque je tombe sur quelqu’un de mauvaise foi ou de mal intentionné. Un auteur est responsable de ce qu’il écrit, à mon sens. Pourquoi un critique d’auteurs ne le serait-il pas ? Ils n’ont pas plus le droit que nous d’écrire n’importe quoi.

 Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? 

Impatient. Anxieux. Prêt à tout arrêter. Prêt à repartir de plus belle. Presque aussi fébrile que le croque-mort qui se demande s’il a pensé à demander au marbrier d’ouvrir le caveau lorsqu’il achemine le convoi funéraire vers la porte du cimetière.

Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ? 

Aucun en particulier. J’ai travaillé avec plaisir avec Philippe Ward (Radu Dracula, tome 1), qui m’a en quelque sorte initié à l’écriture, mais je préfère écrire (ou dessiner) seul. C’est bien assez difficile de se battre avec son propre imaginaire je trouve.

Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? 

Ma réponse à la question 1 convient aussi pour celle-ci je pense. 

Avant de publier un livre, le faites-vous lire  à des personnes de votre entourage ?

Jamais. A mon éditeur seulement. J’œuvre dans un registre que je pense maitriser, je sais où je vais et je ne pense pas que mes propres lecteurs pourraient m’aider. Et puis ne comptent-ils pas sur moi pour continuer à les faire cauchemarder ? Ne seraient-ils pas déçus que je sois contraint de recourir à leur aide ? Par ailleurs, indépendamment de ces interrogations et une fois encore, c’est bien assez difficile de se battre avec son propre imaginaire.

Quels sont vos projets ? 

Je vais terminer la série des Radu Dracula. Le tome 5 qui sortira au printemps prochain est déjà écrit et je clôturerai cette série avec le tome 6. Je réfléchirai alors à l’opportunité de continuer à écrire, ce qui , dans mon cas, ne peut se faire que dans le domaine du fantastique. Du côté de la bande dessinée, j’attends la sortie de" Vikings et Vampires" chez Roymodus pour décider de la tournure à donner à mes prochaines créations mais ce sera là aussi du fantastique quoi qu’il arrive.

Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ?

D’aller faire un tour ici : https://sites.google.com/site/philip63lemaire/home



Une autre pour un article de presse paru dans le Réveil Normand, Ouest France et Paris Normandie :

 

Liens vers les différents articles : 

https://l.facebook.com/l.php?u=https%3A%2F%2Factu.fr%2Fnormandie%2Fsaint-ouen-sur-iton_61440%2Fdessinateur-romancier-st-ouen-sur-iton-philippe-lemaire-dracula-vampires-dans-sang_13049777.html&h=ATNOXNLtVqzJamuKO3F6TPNeNkb1_iY6z6y4oddc0Ruk_1rkUC7oC0P--H0WP6VtY9FNSH34K7KArU-_yxMWrKkzoypJTvsq-PnsySARSHYG4zVVXyZGZ0a3d7B9kCM97Qk8w9WTYQ
https://www.ouest-france.fr/normandie/saint-ouen-sur-iton-61300/la-passion-pour-dracula-coule-dans-ses-veines-5366051
http://www.paris-normandie.fr/region/le-monde-fantastique-de-philippe-lemaire-auteur-installe-a-saint-ouen-sur-iton-AN11580734

Si mes anciens profs savaient que je suis retourné dans une école, il est vraisemblable que les plus fragiles feraient une attaque, et que les plus vaillants préviendraient les autorités... 

C'est pourtant bien ce qui s'est passé le 19 décembre 2017, au 

lycée Jacques Prévert de Domfront 

où j'étais convié à animer une conférence sur le thème de Dracula et du fantastique. 

Ma présence a du amuser Dame Nature car elle n'a pas trouvé mieux que de couvrir le collège d'un épais brouillard au moment de mon apparition... 

Mais au final, il n'est sorti que du positif de cette conférence où les questions des adolescents qui m'étaient livrés (classes de 4ème) n'ont cessé de fuser pendant plus de trois heures. 

Une première du genre pour moi, qui devrait se renouveler dans les mois à venir dans d'autres établissements scolaires.

Une autre interview, avec Anne Ledieu aux questions, laquelle remplit la lourde tâche d'être ma correctrice pour les versions numériques de mes romans qui paraissent chez Lune Ecarlate.


Interview par Anne Ledieu, complice de mes forfaits.

  

Bonjour Philippe, et merci de te prêter à la question…

 – Toujours partant pour raconter des bêtises ^^

Comment aborde-t-on un personnage qui a exercé autant de métiers que toi avant d’être illustrateur, scénariste, musicien et auteur ? Je pensais franchement que ton parcours dans les pompes funèbres était une blague…

 – Bah non. Assistant funéraire au sortir de l’armée (20 ans), cadre à 25 ans, puis démissionnaire à 30 ans parce qu’il était hors de question que je pousse à la faute – comme on me le demandait – une salariée à qui je n’avais rien à reprocher (la direction voulait la foutre à la porte sans avoir à payer le licenciement et comptait sur moi pour l’y aider…)

 – Comment en es-tu venu à l’écriture ?

– Ça, c’est la faute à Philippe Ward. Après de nombreux échanges via le net et des rencontres sur des salons (nous avons réalisé deux bandes dessinées ensemble quand je n’étais que scribouilleur), il a fini par me sortir : « Toi, tu devrais écrire ». Comme je suis très naïf, je l’ai cru. 

Pourquoi le mythe du vampire à la Bram Stoker ?

– D’abord pour rendre hommage à Bram Stoker dont le Dracula m’a traumatisé lorsque j’étais jeune, puis pour rappeler aux amateurs de « twilighteries » et autres vampires à l’américaine ce qu’est le mythe de ces vilaines sangsues à la base.

Pourquoi ce virage à partir de Stryges,Moras et Résurrection ? ?

 – À mon sens, le virage le plus marqué a été réalisé au moment de l’écriture de La Demoiselle de Tonneville[1], puisque j’abandonne l’approche du vampire en tant que « revenant de corps » pour le présenter comme un spectre capable de matérialisations.

Stryges a été l’occasion de faire évoluer une jeune femme de notre époque dans un passé lointain.

Moras est un western fantastique et Résurrection de la SF fantastique, puisque c’est ce qu’on me demandait (toujours Philippe Ward), mais les trois abordent le mythe du vampire sous le même angle. D’ailleurs, Résurrection clôture cette série de romans en faisant référence aux précédents ouvrages à de multiples reprises. C’est, quelque part, une suite de Radu Dracula, de Stryges et de Moras.

 – À partir de quand as-tu décidé de visiter les lieux maudits et en quoi cela t’apporte-t-il l’inspiration ? Je me souviens de la photo de l’étang proscrit de la demoiselle de Tonneville et de ta photo… Franchement, j’étais impressionnée. Peux-tu nous la publier et nous en dire davantage ?

 – J’ai cherché à me rendre sur les lieux concernés par mes forfaits dès le début, puisque je me suis rendu au col de Borgo, en Roumanie, afin de pouvoir écrire sur le mythe de Dracula. Ça m’apporte plus que de l’inspiration, ça me permet de m’imprégner de l’atmosphère de l’endroit, ce qui n’est pas rien pour quelqu’un qui est un peu médium sur les bords ^^. 

 Concernant l’étang Percy, ce lieu est vraiment plus qu’étrange et plutôt dérangeant. Une sorte de jungle abandonnée depuis des siècles, à quelques kilomètres seulement d’une agglomération de cent mille habitants. Ça ressemble à un sanctuaire naturel, en fait, ce qui n’a rien de rassurant quand on sait que c’est précisément à cet endroit que le fantôme de la terrible Demoiselle commettait ses forfaits (il semblerait qu’à présent, elle se contente d’y apparaître par moments). 

 Pour ce qui est de la photo, je n’ai pu que constater « la chose » en développant cette prise de vue où le flash n’avait pas fonctionné. J’avais la nette impression d’être observé en actionnant mon appareil, au point que je ne me suis guère attardé sur place, et j’ai découvert plus tard ce cliché. Le plus curieux est que je m’y attendais presque. J’avais l’intuition que la vilaine Demoiselle serait peut-être visible sur une des photos, et il y a donc eu celle-là :

[1]Ndlr : à paraître le 31 octobre chez Lune Écarlate

Question traditionnelle pour terminer : vers quels lieux sombres te prépares-tu à nous amener, cette fois ?

 – Je vais poursuivre mon travail d’approche du « vampire spectral » commencé avec la Demoiselle de Tonneville, car il y a encore beaucoup à écrire sur cette théorie (qui me semble par ailleurs plus crédible que celle du « vampire revenant de corps »).

 Si rien ne vient me faire changer d’avis, je vais me diriger vers un nouveau roman post-apocalyptique, car j’aime bien pointer du doigt ce qui ne me plaît pas dans ce monde,et ce type de récit s’y prête particulièrement bien. Ayant déjà écrit deux romans post-apocalyptiques (Moras & Résurrection), il me faut évidemment créer un univers qui ne ressemble en rien à ces précédents forfaits ; j’en suis là pour l’instant. J’écris très vite quand toutes les bases du roman sont posées, mais je suis beaucoup moins rapide à construire ces bases.

 – Merci, Philippe, pour cet entretien.

 

 Stryges (version revue) : parution le 15 mai2019 chez Lune-Écarlate (e-book).

Moras (version revue) : parution le 15 juin 2019  chez Lune-Écarlate (e-book).

Résurrection (version revue) :parution le 15 juillet 2019 chez Lune-Écarlate (e-book).

La Demoiselle de Tonneville : parution le 31 octobre 2019 chez Lune-Écarlate (e-book).

Vous pouvez retrouver cette interview sur le site de Lune Ecarlate en cliquant sur le logo ci-dessous.

Nouveaux articles parus dans le Réveil Normand, Paris Normandie & Ouest France.

Une Interview donnée au blog Belisam'Art.

Bonjour Philippe Lemaire,

Merci de bien vouloir te présenter en quelques lignes.

Difficile de résumer 58 ans de vie en quelques lignes, je me contenterai donc de dire que, suite à une incarnation sans doute malencontreuse sur cette Terre, je poursuis un parcours quelque peu chaotique commencé il y a bien des années, lequel est toutefois régulièrement agrémenté de bons moments, ou encore de surprises.

Quel a été ton parcours ? Les difficultés rencontrées, combien de temps as-tu mis pour trouver un éditeur. Sur quel choix d’éditeur t’es-tu porté ? Comment se passent tes relations avec la maison d’édition ?

J’ai commencé par sévir dans la bande dessinée en tant que dessinateur et scénariste, étant parvenu assez facilement à trouver des petites maisons d’édition qui acceptèrent ces premiers forfaits. Le hasard (si le hasard existe…) a voulu que je réalise une de ces bandes dessinées (« 16, rue du repos ») avec un certain Philippe Ward, lequel n’a pas tardé à me sortir un jour : « Toi, tu devrais écrire ! ». Philippe Ward étant par ailleurs un des patrons de la maison d’édition Rivière Blanche, c’est tout naturellement qu’il a édité mes premiers romans, puisque c’est lui-même qui m’a incité à les écrire.

J’entretiens bien entendu d’excellentes relations avec cet éditeur qui fut d’abord mon co-auteur et, aujourd’hui encore, il lui arrive régulièrement de m’inciter à écrire sur tel ou tel sujet (j’y reviendrai un peu plus loin). J’ai le même rapport avec Guillaume Belloy, le patron d’Inanna, lequel n’hésite pas non plus à me pousser à commettre tel ou tel nouveau forfait littéraire.

Le fait d’être auto-édité est assez différent, car au final, tu fais tout le travail éditorial, comment ça se passe ? Pourquoi ce choix ? Tu travailles avec un ou une correctrice, un ou une illustratrice ? Quels soucis rencontres-tu ?

Je n’utilise l’autoédition que pour les premiers ouvrages que j’avais réalisés en bande dessinée, car les éditeurs qui les avaient signés ont tous « disparu », sauf Roymodus de Jacques Cézard qui semble être réapparu soudainement et avoir encore pignon sur rue (structure à éviter, bien entendu, pour ceux qui liront cela). J’en vends malgré tout régulièrement, même si ce n’est pas mon activité principale.

Quelle est ta routine d’écriture si tu en as une ? Plutôt papier ou ordi/tablette ? As-tu des petites manies quand tu écris ? Comment écris-tu, dans le sens comment construis-tu ton histoire ? Quel est le processus qui t’amène à vouloir écrire une histoire jusqu’au manuscrit fini ?

Depuis Radu Dracula, tome 1, mon premier roman sorti en 2011, je n’ai plus jamais arrêté d’écrire. Hormis quelques nouvelles et collectifs d’auteurs, j’en suis à 13 romans publiés, aujourd’hui, le 14ème est en cours d’écriture, et je connais déjà la trame principale du 15ème et du 16ème qui suivront. Je travaille uniquement sur PC pour des raisons de confort et d’accès simplifié à l’inévitable documentation que nécessitent généralement mes récits. Mes romans sont construits sur la base d’un schéma grossier pour commencer (ce que je vais raconter dans les grandes lignes), je procède ensuite à un découpage par chapitres afin d’en étoffer le contenu et de m’assurer de l’efficacité du rythme, puis je passe enfin à l’écriture proprement dite où je me laisse emporter par le récit (quitte à revoir pas mal de choses en cours de route, je ne suis jamais prisonnier du plan que j’ai mis en place).

Peux-tu nous parler de tes livres, romans, nouvelles. Ton univers littéraire pour les auteurs de SFFF. Tes personnages… Pourquoi ce choix ? Qu’est-ce que tu aimes dans le fait d’écrire ? Travailles-tu sur un projet actuellement ? Qu’envisages-tu pour l’avenir ? Tu te vois où dans cinq ans ?

Mes 13 premiers romans racontent tous des histoires de vampires, dans des contextes souvent très différents (une revisite du mythe de Dracula pour les Radu, du western post apocalyptique pour les Moras, une immersion dans le monde celte pour Stryges, dans une légende locale pour La demoiselle de Tonneville, de la science fiction pour Résurrection, à nouveau du post apocalyptique futuriste pour Odyssée spectrale, et une incursion dans le monde des esprits pour L’Obscur et la lueur). Wikipédia et d’autres m’ont donc d’ores et déjà affublé de l’étiquette d’auteur de fantastique.

Mes personnages diffèrent énormément d’un roman à l’autre, on y trouvera aussi bien des femmes que des hommes, jeunes ou vieux, forts ou faibles, vertueux ou odieux, attachants ou répulsifs (et parfois même les deux en même temps). Ces personnages sont construits en même temps que la trame principale, je les affuble du caractère qui me semble le plus judicieux par rapport aux aventures qu’ils vont vivre.

Ce que j’aime dans le fait d’écrire est l’immersion que ça procure. Je vis dans ma tête les scènes que je raconte, c’est comme si elles étaient réelles dans un coin de mon esprit (un peu comme les « formes-pensées » auxquelles je fais référence dans L’Obscur et la lueur).

Sinon, j’écris actuellement un roman qui revisite le même de… Tarzan ! Ça peut sembler curieux pour un auteur qui n’avait jusque là sévi que dans le fantastique, mais je prends autant de plaisir à revisiter ce mythe qu’à mettre des vampires en scène. La maison d’édition Inanna (qui avait déjà pris la demoiselle de Tonneville) s’est montrée immédiatement enthousiasmée par ce projet qui vise à rétablir ce qui pourrait bien avoir été la vérité au sujet d’un enfant perdu dans la jungle africaine. Cette même maison d’édition m’a déjà commandé un western qui suivra la publication de « mon Tarzan », et Rivière Blanche m’a récemment proposé de m’essayer au thriller, car ils estiment que c’est un genre qui collerait bien à ma façon d’écrire. Je ne me pose donc aucune question sur mon avenir puisqu’on me sollicite avant même qu’une nouvelle idée de roman ne m’ait traversé l’esprit. Dès lors, je vais écrire ces livres, m’éloignant ainsi pour un temps du fantastique, mais auquel je retournerai certainement avant cinq ans car je crois bien que c’est dans mon ADN.

Par ailleurs, j’essaye d’inculquer certaines valeurs consécutives à mon expérience de la vie dans mes bouquins, et c’est sans doute pour ça que ça me plaît d’écrire. Si l’expérience de ceux qui ont survécu aux horreurs que certains veulent faire subir peut servir à d’autres, autant que ce soit le cas, fût-ce par des biais détournés comme le fantastique qui, dans ce cas, n’est sans doute que de la pudeur.

Aurais-tu quelques anecdotes liées à ton métier d’écrivain ? Qu’est ce que tu aimes ou détestes dans le fait d’aller en dédicaces, salons… ?

J’ai fait beaucoup de salons à mes débuts, mais l’état de santé de mon épouse ne me permet plus de m’y rendre. Lorsque j’y apparaissais fréquemment, je n’aimais ni ne détestais ces manifestations, il y avait des moments agréables et d’autres moins, comme à chaque fois qu’il y a une concentration d’humains, me semble-t-il. Sinon, hormis mes contacts très cordiaux avec des éditeurs qui sont, en fait, des complices, j’ai eu la surprise de constater qu’une agrégée de lettres (j’espère que c’est le bon diplôme ! ^^) m’ayant servi de correctrice pouvait également avoir une influence particulièrement bénéfique sur mes forfaits. Il s’agit pourtant là d’une Belge, baptisée qui plus est Anne Ledieu, j’ai donc toutes les raisons de me méfier d’un nom pareil, comme vous pouvez vous en douter. Elle m’a cependant été d’un grand secours pour m’aider à mieux torturer les finesses de la langue française, moi qui avais été viré comme un malpropre des écoles publiques à l’âge de 16 ans.

Quel lecteur es-tu ?

Alors ça, je n’en sais rien du tout, je ne me suis jamais posé cette question. Mon auteur fétiche est sans doute Stephen King, mais je lis des choses aussi variées que les grands classiques de la littérature ou que les délires psychédéliques d’un nouvel auteur. Je crois être bon public, si toutefois le récit présente de l’intérêt et qu’il est agréable à lire.

As-tu d’autres passions que l’écriture et la lecture ?

Oh oui, j’en ai beaucoup. Le dessin en fait partie puisque j’ai été dessinateur de BD (et suis toujours illustrateur), mais on peut rajouter la pratique de la guitare basse, le billard (pool anglais) où j’ai évolué à haut niveau lorsque j’étais plus jeune, le tir (arc et armes à feu), la mer et ses activités, les animaux, et j’en oublie forcément.

Quelle est ton actualité du moment ? Dédicaces, salons, festivals ? Un prix ?

C’en est fini pour moi des salons comme je l’ai dit plus haut, donc j’écris, j’écris, j’écris… et je dessine aussi entre deux pour mes propres besoins ou ceux de confrères (comme pour le Concile des quarante sorti il y a quelques jours chez Zonaires éditions).

Ça te dit de faire un petit jeu avec nous ? Un petit portrait chinois ?

A : Si tu étais une créature laquelle serais-tu ?

Sans surprise, va pour un vampire puisque ce sont mes monstres de prédilection et que, si on ne m’avait pas limé les canines à l’âge de 14 ans, j’en aurais tout à fait la tête. ^^

B : Si tu étais un animal ?

Un chat (c’est mon signe astrologique chez les Vietnamiens)

C : Un plat ?

Difficile, j’aime presque tout. Va pour une paëlla.

D : Un groupe, chanteur(se), musicien(ne)… préféré(e) ?

Kiss pour leurs outrances et le côté grand guignol qu’ils assument, ne se prenant pas au sérieux.

E : Une couleur ?

Noir, sans doute.

F : Si tu étais un roman ?

La tour sombre.

G : Si tu n’avais pas été écrivain qu’aurais-tu aimé faire ?

Bassiste dans un groupe de hard ou de métal, pour jouer à Lemmy Kilmister ou à Gene Simmons.

Aurais-tu un petit mot pour tes lecteurs(trices) ou potentiels lecteurs(trices) ?

Vivez vos rêves et écoutez du rock, c’est très bon pour la santé.

Merci Philippe d’avoir répondu à cette longue interview.


(Lien vers la page de Belisam'Art)

Interview donnée en mars 2024 pour parution dans le Réveil Normand, Paris Normandie et Ouest France :