Quand je suis né
Quand je suis né, paraît que j'étais affreux.
Alors je vous entends déjà, ah ben c'est marrant, parce que finalement, le temps n'a eu aucune prise sur toi, tu n'as pas tellement changé, dis donc... je vous emmerde.
Pour poursuivre donc, ma mère était en plein travail, le genre qui salissait plus les mains de ceux qui s'affairaient autour que les siennes.
Quand j'ai sorti la tête, une infirmière est tombée dans les pommes, la sage femme s'est barrée à la course et papa... ah ben papa n'était pas là.
Ma mère a paniqué, elle se demandait ce qui se passait, pourquoi tant d'émoi??
Elle a levé la tête, a regardé son entrejambe et elle a vu ma tête.
Et elle aussi s'est fait la malle, évanouie avant de m'avoir libéré.
J'étais quand même dans la merde, coincé entre deux mondes. D'autant plus que maman s'était quelque peu relâchée du mauvais côté, et avait déposé juste sous mon nez un magnifique étron.
Je l'aimais déjà, mon frère jumeau, et ce premier amour expliquerait par la suite cette propension que j'ai eue à côtoyer les emmerdes avec une admirable constance.
Finalement, un type est arrivé, je crois que c'était le préposé aux poubelles.
Habitué aux trucs un peu dégueulasses, il m'a tiré de là, puis m'a levé par un pied.
Il voulait pas me frapper, pour me faire prendre ma première respiration, cette bienvenue au monde par une fessée anticipée sur les conneries à venir.
Alors il m'a foutu devant un miroir, et ça a bien marché. J'allais pleurer durant quelques années.
Ils ont balancé le surplus aux clébards, qui se sont régalés.
Ils ont dit par la suite à ma mère, madame, ne vous inquiétez pas, il ne restera pas comme ça...enfin on espère.
Ma mère les a pas vraiment crus, mais a plutôt bien accepté et assumé la chose, même s'il est vrai que nos voisins n'ont appris mon existence que lorsque j'ai eu 10 ans.
Ok, je devais l'appeler madame en public et lui foutre la paix en privé, marcher 20 pas derrière et souvent rentrer à pied.
Mais quand même, un jour elle m'a offert un magnifique cadeau d'anniversaire, c'est bien qu'elle doit m'aimer, quand même, merde.
C'était une superbe cagoule intégrale. J'étais super content.