"Education nationale"
Le titre « Education nationale » a été réalisée en 2009 et est présent dans l’album « Troisième temps » de Grand Corps Malade. Selon l’Insee, plus de la moitié des Français possédaient un diplôme inférieur au bac dans cette période. C’est l’inégalité aux chances de réussite que le le slameur veut dénoncer à travers son texte. Il a eu l’inspiration de celui-ci alors qu’il discutait avec les élèves d’une petite école primaire d’Epinay lors d’un atelier d’écriture.
Le slam raconte l’histoire d’un enfant nommé Moussa qui étudie dans une école publique dans les quartiers de Seine-Saint Denis, en France. Au début du slam, Grand Corps Malade se met dans la peau de ce garçon et témoigne de la pauvreté et le manque d’équipement de cette école. Il souligne ici que ce n’est pas la faute de la maitresse qui est pourtant motivée mais bien du gouvernement qui ne se concentre pas assez sur ces écoles défavorisées. Après cette première partie plus narrative, Grand Corps Malade enchaine sur un discours aussi argumentatif que poétique sur les disparités de l’éducation qui termine sur des propositions de solutions comme ajouter des postes d'assistants ou d'auxiliaires qui aident aux devoirs. Grand Corps Malade termine le slam en se remettant dans la peau de Moussa, expliquant qu’il a moins de chance de réussir plus tard, notamment le bac, car il n’a pas eu une éducation équivalente aux autres.
Ensuite, au niveau du texte, on perçoit beaucoup d’éléments intéressants, mis en gras dans les paroles ci-dessous et expliqués plus bas
J'm'appelle Moussa, j'ai dix ans, j'suis en CM2 à Épinay
Ville du 93 où j'ai grandi et où j'suis né
Mon école elle est mignonne même si les murs sont pas tous neufs
Dans chaque salle y a plein de bruit, moi dans ma classe on est vingt-neuf
Y a pas beaucoup d'élèves modèles et puis on est un peu dissipé
J'crois qu'nous sommes ce qu'on appelle des élèves en difficulté
Moi en maths j'suis pas terrible mais c'est pas pire qu'en dictée
Ce que je préfère c'est seize heures j'retrouve les grands dans mon quartier
Pourtant ma maitresse j'l'aime bien elle peut être dure mais elle est patiente
Et si jamais je comprends rien elle me réexplique elle est pas chiante
Elle a toujours plein d'idées et de projets pour les sorties
Mais on a que deux cars par an qui sont prêtés par la mairie
Je crois que mon école elle est pauvre, on n'a pas de salle informatique
On n'a que la cour et le préau pour faire de la gymnastique
À la télé j'ai vu que des classes faisaient du golf en EPS
Nous on a que des tapis et des cerceaux et la détresse de nos maitresses
Alors si tout se joue à l'école, il est temps d'entendre le SOS
Ne laissons pas se creuser le fossé d'un enseignement à deux vitesses
Au milieu des tours y a trop de pions dans le jeu d'échec scolaire
Ne laissons pas nos rois devenir fou dans des défaites spectaculaires
L'enseignement en France va mal et personne peut nier la vérité
Les zones d'éducation prioritaires ne sont pas des priorités
Les classes sont surchargées pas comme la paye des profs minés
Et on supprime des effectifs dans des écoles déjà en apnée
Au contraire faut ajouter des profs et des autres métiers qui prennent la relève
Dans les quartiers les plus en galère, créer des classes de quinze élèves
Ajouter des postes d'assistants ou d'auxiliaires qui aident aux devoirs
Qui connaissent les parents et accompagnent les enfants les plus en retard
L'enseignement en France va mal, l'état ne met pas assez d'argent
Quelques réformes à deux balles pour ne pas voir le plus urgent
Un établissement scolaire sans vrais moyens est impuissant
Comment peut-on faire des économies sur l'avenir de nos enfants
L'enseignement en France va mal car il rend pas les gens égaux
Les plus fragiles tirent l'alarme mais on étouffe leur écho
L'école publique va mal car elle a la tête sous l'eau
Y a pas d'éducation nationale, y a que des moyens de survies locaux
Alors continuons de dire aux petit frères que l'école est la solution
Mais donnons-leur les bons outils pour leur avenir car attention
La réussite scolaire dans certaines zones pourrait rester un mystère
Et l'égalité des chances un concept de ministère
Alors si tout se joue à l'école, il est temps d'entendre le SOS
Ne laissons pas se creuser le fossé d'un enseignement à deux vitesses
Au milieu des tours il y a trop de pions dans le jeu d'échec scolaire
Ne laissons pas nos rois devenir fous dans des défaites spectaculaires
J'm'appelle Moussa, j'ai dix ans, j'suis en CM2 à Épinay
Ville du 93 où j'ai grandi et où j'suis né
C'est pas de ma faute à moi si j'ai moins de chance d'avoir le bac
C'est simplement parce que j'vis là, que mon avenir est un cul de sac
Premièrement, on peut remarquer le champ lexical de l’école : « dictée, classe, maitresse, CM2… ». Le vocabulaire est assez familier pour être cohérent avec la parole de l’enfant et toucher davantage le public. De plus, le slameur utilise ici l’impératif et le présent pour appuyer le fait que ces paroles sont d’actualité et que ça nous concerne maintenant. « Ne laissons pas… » «Il est temps ».
Ensuite, beaucoup de rimes sont riches, sous la forme AABB : neufs/vingt-neuf ; relève/élève… En plus des phrases argumentatives telles que « Comment peut-on faire des économies sur l'avenir de nos enfants », on remarque plusieurs figures de style telle que des allitérations « la détresse de nos maitresses », des comparaisons et des personnifications telles que « des écoles déjà en apnée ». On peut également observer une métaphore reprise deux fois, où l’école est comparée à un jeu d’échec « dans le jeu de l’échec scolaire ». Par ailleurs, le texte est appuyé par une musique calme de guitare sur laquelle vient s’ajouter du piano au fur et à mesure que le texte et la musique s’amplifient.
Personnellement, j’aime bien le côté engagé de ce slam qui s’exprime d’une manière poétique mais ferme. On sent vraiment que cette thématique touche le slameur et qu’il veut faire passer un message pour améliorer la situation de ces enfants. Je trouve également que la voix posée de Grand Corps Malade donne beaucoup de puissance au texte et permet de nous y accrocher. J’apprécie également la structure du slam qui laisse place à un discours poétique. Enfin, je trouve que le rythme et la musique assez calmes sont bien choisis car ils laissent beaucoup de place au texte et nous laissent le temps de comprendre le message qu’il y a derrière.
Pour conclure, ce slam engagé a pour but de dénoncer à travers le personnage de Moussa et les arguments poétiques de Grand Corps Malade les inégalités auxquelles font face les écoles publiques. Il dit que cela impacte le futur des élèves, notamment leur chance de réussir le bac. Ce texte est parsemé de figures de styles et de phrases très réfléchies, le tout sur une musique assez simple qui laisse beaucoup de place aux mots et aux messages qu’ils délivrent.