De la sous-alimentation au surpoids, en passant par les maladies comme le Sida ou encore les accidents de la route, les enfants d’Asie du Sud-Est sont loin d’être épargnés par des risques en tout genre. Si les soins de santé peuvent être excellents en Thaïlande, c’est loin d’être le cas partout dans les pays limitrophes. Un des premiers freins à la résolution de cette problématique, est, comme pour beaucoup d’autres, le coût. En effet, comme l’illustre le graphique ci-dessous qui montre toutefois une évolution positive, un pourcentage important de la population vit toujours sous le seuil de pauvreté. Par exemple, au Myanmar, selon ces données datant de 2016, cela concerne 32.1% de la population. Cette pauvreté fait partie des facteurs de causalité de maladie, de mortalité infantile, de malnutrition et d’obésité ainsi que d'un accès difficile à l'eau. C'est ces différents points que nous allons respectivement aborder ici afin de voir si sont respectés les articles de la Convention des droits de l'enfant, promettant que « Chaque enfant a droit à un niveau de vie suffisant et à jouir du meilleur état de santé possible ». 23


Mortalité infantile


Tout d’abord, la mortalité infantile tend vers un mieux mais elle est malheureusement encore loin d’être éradiquée.

En effet, selon les données de la banque mondiale (2019), celle-ci concerne 3.6% des enfants au Laos, 3.5% au Myanmar, 2.2% au Cambodge, 1.5% au Vietnam et 0.7% en Thaïlande. Il est néanmoins important de considérer l’évolution de ce taux qui est passé de 23.7% à 3% en 65 ans en Asie du Sud-Est. Les chiffres actuels sont tout de même importants et sont jusqu’à dix fois plus élevés qu’en Belgique où le taux de mortalité est égal à 0.3%. Cela est dû à plusieurs lacunes dans le système de santé de ces pays, que nous allons analyser dans les prochains paragraphes. 24 25 26



Malnutrition et obésité

Premièrement, la sous-nutrition et l’obésité sont deux problématiques importantes qui ne sont pas sans influence sur le développement des enfants. En effet, selon les rapports de l’OMS et de l’Unicef datant de 2017, cela crée un retard de croissance qui touche un quart des enfants de moins de 5 ans.

Cette sous-alimentation se fait surtout ressentir durant la saison sèche dans les villages les plus reculés. Ceux-ci n’ont, en effet, pas les moyens d’irriguer les rizières, alors que le riz est un élément essentiel à leur alimentation. Les animaux d’élevage qui se baladent souvent librement dans les villages ont également moins à manger, ce qui amène à une production de viande et d’œufs encore plus faible pour les villageois. 27

Pour l’enfant, les carences en micronutriments entrainent l’anémie qui affecte les adolescentes et les femmes enceintes. De plus, ces carences ont également des conséquences négatives sur la santé comme une diminution de l'endurance, une susceptibilité accrue à la maladie et une diminution des performances mentales. 28



On peut d’ailleurs noter que, comme en témoigne la carte ci-dessous, l’émaciation touche environs 7% des enfants de moins de 5 ans dans l’ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est) malgré que cette proportion ait diminué de 35% depuis l’année 2000. 29 30 31

De même, le surpoids est très présent dans ces régions, causé par la « malbouffe » et les sodas de plus en plus répandus. Les pays ne connaissent malheureusement pas d'amélioration sur ce point. En effet, de 2000 à 2016, on constate un augmentation de cette problématique de 38%. 32


Les enfants victimes de surpoids sont plus susceptibles de subir des conséquences sur leur santé, comme le diabète, l'asthme et autres MNT (maladie non transmissibles) plus tard dans l'enfance ou à l'âge adulte. Au niveau de développement psychologique, le surpoids peut mener à une faible estime de soi, une mauvaise santé mentale ainsi qu’à un développement cognitif et un niveau de scolarité plus faibles. Les taux de surpoids chez les enfants de moins de 5 ans dans l’ASEAN varie de 1,3 % au Myanmar jusqu’à 8,2 % pour la Thaïlande.33

En plus d’impacter l’enfant directement, cela influence également leur futur et à plus long terme, l’économie du pays. En effet, lorsque la malnutrition est aiguë, en plus de devenir un fardeau pour la famille et le système de santé, le développement de l’enfant, notamment celui du cerveau, ralentit considérablement. Cela diminuera donc les perspectives de l'enfant et, à plus large échelle, la croissance économique du pays. 34


Accès à l’eau

Par ailleurs, plus de 100 millions de personnes dans le monde vivent actuellement sans accès à l’eau potable. Ces pays sont encore loin de disposer de ces réseaux comme en Europe. Au Laos par exemple, 750 000 personnes sont privées d’accès à l’eau potable. Au Cambodge, cela concerne 84% de la population des zones rurales. D'autres, comme l'illustre cette photo prise au Myanmar, doivent régulièrement faire plusieurs kilomètres pour remplir des tonneaux d'eau et les ramener à leur village. 35

Les autochtones sont alors contraints de boire de l’eau sale qui est sujette à de nombreuses infections venant d’une mauvaise gestion des déchets ou des eaux usées contenant des bactéries et des produits chimiques. Les enfants qui boivent cette eau risquent des maladies comme la diarrhée, le cancer, une malformation congénitale ou encore un trouble du comportement ou de l’apprentissage. Une des solutions à ceux qui n'ont pas accès à cet élément est l'eau en bouteille. Cependant, en plus d’être néfaste pour l’environnement, cela n’est pas accessible à tous financièrement. D’ailleurs, les sodas sont souvent au même prix, ce qui encourage les enfants à boire ces boissons sucrées qui, à terme, représentent également un danger pour leur santé. 36

De plus, l’Asie du Sud-Est connait de grandes sécheresses. Les réservoirs comme en Thaïlande se sont récemment vidés plus vite que prévu, atteignant moins de la moitié de leur capacité de stockage.37



Par ailleurs, dans une période où se laver les mains devient un geste encore plus essentiel avec la Covid19, tout le monde n’a malheureusement pas accès à des robinets et du savon. Au Laos par exemple, cela concerne plus de 50% de la population. On peut néanmoins remarquer une soudaine vague d’hygiène à certains endroits comme dans des lieux touristiques, comme au Cambodge où du désinfectant est mis à disposition gratuitement pour les habitants depuis la pandémie.38 39


Enfin, alors que l’accès aux toilettes parait évident pour des Européens, ce n’est pas spécialement le cas pour les enfants d’Asie du Sud-Est qui sont parfois dans des écoles ou maisons qui n’en disposent pas. Au Myanmar par exemple, plus de 4000 enfants n’ont pas accès à des toilettes.


Que ce soit pour boire, pour cultiver ou pour se laver, l’accès à l’eau n’est donc pas toujours disponible, adapté et sans dangers pour ces enfants. Toutefois, des associations viennent prêter main forte pour, par exemple, construire des puits, des réservoirs ou distribuer des filtres à eau.


Maladies et soins de santé

De nombreux jeunes sont confrontés à de graves maladies telles que le paludisme, la tuberculose, la polio ou le tétanos mais la plus répandue est le sida qui a connu une grande vague il y a quelques années. Dans l'Asie et le Pacifique, on compte par exemple 15 000 nouvelles infections en 2019 chez les enfants âgés de 0 à 14 ans. 40 En plus d’être une charge physique, le sida représente également une charge psychologique chez les enfants porteurs qui sont souvent discriminés et rejetés par leur entourage. Cette réaction vient également du personnel soignant qui empêche parfois l’accès à leurs services pour les personnes porteuses du VIH. Une étude portant sur 1 600 agents de santé thaïlandais a montré que 60 % d’entre eux avaient peur de contracter une infection à VIH en effectuant des tâches quotidiennes. Heureusement, le ministre de la Santé en a conscience et met des choses en place pour résoudre ce problème. A titre d’exemple, on peut noter que la Thaïlande a été un des premiers pays à donner un traitement à toutes les femmes enceintes séropositives, ce qui a considérablement diminué la transmission de la mère à l’enfant. 41

Enfin, si beaucoup d’hôpitaux thaïlandais sont meilleurs qu’en Belgique mais fort coûteux, c’est encore loin d’être le cas dans les pays limitrophes où les installations hospitalières ne sont pas assez adaptées aux enfants. Beaucoup sont, en effet, mal équipées et ne disposent pas de service de pédiatrie. L’enfant est donc particulièrement sujet à toutes les infections ou maladies nosocomiales. De plus, ces infrastructures ne sont pas non plus toujours accessibles financièrement et par rapport à la distance depuis le domicile, surtout pour les habitants des campagnes. Au Cambodge, plus de trois quarts des naissances ont donc lieu à domicile, expliquant entre autres le pourcentage élevé de morts infantiles.42

Pour répondre à ces différentes problématiques, beaucoup d’associations agissent. Certaines soignent les enfants les plus démunis ou distribuent des médicaments essentiels tandis que d'autres sensibilisent et mènent des actions de prévention. Les gouvernements aussi mettent de plus en plus de choses en place pour améliorer la situation sanitaire du pays. Au Laos, l’État vise à réduire le taux de mortalité infantile en rendant, depuis 2017, l’accès aux soins publics gratuit pour les enfants. Au Myanmar également, le ministre de l’éducation a mis en place, avec la collaboration de l’Unicef, un programme nommé National Life Skills Education Curriculum pour conscientiser les jeunes dans les écoles secondaires abordant des thèmes liés à la santé comme, le VIH et les MST, la consommation de drogues, la prévention contre les maladies et la nutrition.

Pourtant, beaucoup de jeunes restent mal informés sur la santé sexuelle comme le démontre une étude expliquant que 84% des jeunes de 15 à 25 ans ne sont pas bien informés sur la prévention du SIDA et 38 % des adolescents birmans interviewés avouent ne pas avoir su qu’une femme puisse tomber enceinte dès le premier rapport. Entre autres pour répondre à cela, un séminaire politique a été organisé par l’UNESCO en 2019. Après celui-ci, le gouvernement birman assure mettre à jour le programme Life Skills Education selon les critères de l’ONU pour que les cours d’éducation sexuelle soient plus complets et adaptés.43 44

Comme le montre le graphique ci-dessous, de plus en plus de femmes enceintes reçoivent également un traitement antirétroviral afin de prévenir la transmission du VIH de la mère à l’enfant. De plus, les États ont mis en place des programmes de vaccination qui ont permis, entre autres, d’éradiquer la polio.45

Retour sur les droits de l’enfant

Pour conclure, peut-on dire que les article 3, 6, 24 et 27 de la convention des droits de l’enfant, défendant le fait que « Chaque enfant a droit à un niveau de vie suffisant et à jouir du meilleur état de santé possible » sont respectés ?

Comme nous l’avons vu, la réponse est malheureusement négative mais on peut constater toutefois une réelle amélioration et de plus en plus de démarches pour faire respecter ce droit fondamental. Premièrement, tous les pays membres de l’ASEAN constatent une diminution de mortalité autour de la maternité allant jusqu’à 84.2% pour le Cambodge de 1990 à 2015. Certains pays comme la Thaïlande ont également pu réduire la mortalité néonatale (dans les 28 jours suivant la naissance) et infantile (jusqu’à 5 ans) de 75%.46

Cette amélioration n’est toutefois pas une raison pour fermer les yeux sur ces morts et maladies infantiles qui persistent. C’est pourquoi, de nombreuses mesures sont mises en place. Par exemple, l’Assemblée mondiale de la Santé exige que les États ne maintiennent aucune augmentation d’ici 2025. Pour répondre plus globalement à la problématique de la malnutrition, L'ASEAN a activement approuvé et promulgué des documents visant à mettre fin à cela, soutenant le droit des enfants à la nutrition. On peut citer également la Déclaration des dirigeants de l'ASEAN de 2017 sur l'élimination de toutes les formes de malnutrition et la mise en place de système de surveillance nutritionnelle de l'ASEAN 2017–2019 ainsi qu’un plan d'action stratégique de l'ASEAN pour la nutrition 2018-2030.47


Suite à toutes les actions, on remarque, notamment via les données illustrées sur le graphique ci-dessous, une nette amélioration dans le retard de croissance des enfants, ce qui a permis à des milliers d’entre eux d’atteindre leur potentiel physique et cognitif.




Notes de bas de page

23 Unicef, opcit


24 Banque Mondiale, données, Taux de mortalité infantile, sur https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.DYN.IMRT.IN, consulté le 12/01/21


25 Humanum, Mortalité infantile « La mortalité infantile dans le monde », sur https://www.humanium.org/fr/mortalite-infantile/, consulté le 12/01/21


26 Wikipédia, Liste des pays par mortalité infantile, https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_taux_de_mortalit%C3%A9_infantile consulté le 12/01/21


27 Unicef, World Health Organisation, Aesean, Europe: « Regional report on nutrition security in ASEAN », volume 1, sur https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/Regional%20Report%20on%20Nutrition%20Security%20in%20ASEAN%20%28Volume%201%29.pdf, consulté le 12/01/21


28 World Health Organization, Regional Office for South-East Asia, ‘Prevention of iron deficiency anaemia in adolescents” New Delhi, 2011, p. 6, consluté le 13/01/21


29 CNA, “Instant noodle diet harms Southeast Asian Children”: UNICEF, interview de Zafrin Chowdury, chief of communication Philippines sur YouTube: https://youtu.be/NMyzuzuaDkw, regardé le 12/01/21


30 ONU info, « Asie du Sud-Est : les enfants confrontés à l'obésité et à la sous-alimentation, selon un rapport de l'ONU” sur https://news.un.org/fr/story/2016/03/332002-asie-du-sud-est-les-enfants-confrontes-lobesite-et-la-sous-alimentation-selon, consulté le 12/01/21


31 The ASEAN Post Team, « Malnutrition in Southeast Asia, 4 novembre 2018, consulté le 13/01/21 sur https://theaseanpost.com/article/malnutrition-southeast-asia


32 Unicef, World Health Organisation, Aesean, Europe: « Regional report on nutrition security in ASEAN, volume 2, sur https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/Regional%20Report%20on%20Nutrition%20Security%20in%20ASEAN%20%28Volume%202%29.pdf, consulté le 12/01/21


33 Association of Southeast Asian Nation, Unicef, “Children in ASEAN, 30 Years of the Convention on the Rights of the Chlid”, 2020, P34, pdf disponible sur https://www.unicef.org/eap/reports/children-asean


34 Unicef, opcit


35 Nation Unies droits de l’homme, haut-commissariat, “Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport de la République démocratique populaire lao » rapport du comité des droits de l’enfant publié le 21-10-2018 et consulté le 21-03-21


36 Eco-Buisnes, Sam Geall, Southeast Asia and the right to safe water, 18/11/19, sur https://www.eco-business.com/opinion/southeast-asia-and-the-right-to-safe-water/, consulté le 13/01/21


37 Enfant du Mékong, « Cambodge : eau potable pour tous ? » sur https://www.enfantsdumekong.com/eau-potable-avenir-bleu/, consulté le 13/01/21


38 Stockholm Environment Institute, “Access to water and Covid-19: seven measures countries in Asia can take now”, sur https://www.sei.org/perspectives/access-to-clean-water-is-vital-in-the-fight-against-covid-19-here-are-seven-measures-that-countries-in-asia-can-take-now/ , consulté le 13/01/21


39 Athira Nortajuddin, Survivre à la pandémie sans eau potable, le 13 avril 2020, sur https://theaseanpost.com/article/surviving-pandemic-without-clean-water, consulté le 13/01/21


40 UNAIDS “Fact sheet-World aids day 2020-global HIV statistics” publié en 2020 et consulté le 29-05-2021


41 ONUSIDA, « Bangkok : des populations clés fournissent des services de santé par le biais de leurs propres organisations » publié le 27-01-2020 et consulté le 29-05-2011 sur https://www.unaids.org/fr/keywords/thailand#:~:text=Une%20%C3%A9tude%20portant%20sur%201,au%20moins%20une%20attitude%20stigmatisante.t


42 Interview orale d’une ergothérapeute, bénévole au Laos


43 UNESCO, « Résultats positifs en matière de santé, d'éducation et d'égalité des sexes pour les jeunes du Myanmar », publié le 17/04/2019 sur https://en.unesco.org/news/positive-health-education-and-gender-equality-outcomes-myanmar-youth


44 Ministère de l’Europe et des affaires étrangères, Plus de 200 enfants sauvés par l’ONG Santé-France-Laos en 20 ans

sur https://la.ambafrance.org/Plus-de-200-enfants-sauves-par-l-ONG-Sante-France-Laos-en-20-ans


45 Association of Southeast Asian Nation, Unicef, opcit, P29



46 Thailand and Singapore: ‘UN Inter-agency Group for Child Mortality Estimation’, , accessed 26 September 2019


47 Association of Southeast Asian Nation, Unicef, opcit, P34


Bibliographie