«Une femme a été retrouvée morte dans l'ancienne propriété de sa famille où elle était revenue pour la nuit.
Que s'est-il passé ce soir de pluie et d'automne au bord de la Loire entre le restaurant des Chaînes d'Or, le musée communal et l'étroit chemin qui sépare le cimetière du mur de la propriété ? »
« Je me suis dit : curieux qu'elle vienne ici, dans ce musée. Bien sûr, on a modernisé les salles, mais elle connaît certainement depuis longtemps la collection. Les musées n'étaient pas son genre. Plutôt traîner. Un garçon ou un autre. Le genre de type qu'elle choisissait pour la moto, qu'elle n'aurait seulement pas regardé six mois plus tard. Elle était belle, un peu bizarre ; ça suffisait à lui assurer des succès. Moi aussi, j'avais eu une histoire avec elle. On avait tous eu plus ou moins ce genre d'histoire. Elle devait avoir dix-sept ans ; j'en avais quinze. Et du jour au lendemain, elle vous laissait tomber sans une explication. Marie-Hélène, je me rappelais : Marie-Hélène.
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Olivier BARROT, depuis la Cité Internationale Universitaire de Paris, interviewe Dominique BARBERIS, au sujet de son roman "Quelque chose à cacher", paru chez Gallimard.Quelques images d'illustration floues ponctuent l'entretien.Banc titre de la couverture du livre.
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« Dominique Barbéris - L'enquête sur l'assassinat d'une femme volage sert d'écrin à cette sonate poétique au bord de la Loire qui charrie souvenirs et regrets.
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L'art merveilleux de Dominique Barbéris consiste à faire valoir, comme chez les maîtres flamands, ces échos de nos vies que sont les moindres objets, les reflets dans la Loire ou dans les miroirs qui dédoublent le monde et sont l'indice du regret et de la séparation de nous-mêmes.. ....»
Dominique Barbéris adore jouer au chat et à la souris, et elle s'y prend très bien. Dans les Kangourous , devenu un film d'Anne Fontaine ( Entre ses mains ), une jeune femme avait des rendez-vous, cependant qu'un assassin rôdait dans la grande ville. On avait peur pour elle, pendant tout le livre, c'était délicieux. Dans le nouveau roman, Quelque chose à cacher , il y a une femme, mais elle n'a plus de rendez-vous, elle est morte. Et si ça se trouve, c'est l'assassin qui nous raconte. Enfin, peut-être. Peut-être pas. Il est le chat, et le lecteur, la souris. C'est encore mieux. On a peur pour nous. ....
« La douceur, voilà la vérité. Quelque chose comme une très ancienne douleur. Comme le soir aux rives de la Loire, comme une femme oubliée qui revient sans crier gare, comme la fatigue en ultime horizon, comme un meurtre peut-être, puisqu'il faut bien tout de même qu'advienne quelque chose...
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Que s'est-il passé au restaurant des Chaînes d'Or entre cette femme et cet homme marié, ingénieur à la Centrale toute proche ? Un zeste de Simenon, quelque chose de Gracq, un rien de Gadenne, Dominique Barbéris a l'élégance de ne pas répondre aux questions que pose son récit. L'indécision est chez elle une morale. Infinie mélancolie des soirs d'automne, terrifiante vigueur du souvenir, la musique de ces pages est sans doute ce qui nous restera lorsque nous aurons oublié le vacarme de la rentrée.»»
« ... Prenons par exemple « Quelque chose à cacher », le sixième livre de Dominique Barbéris. Il flotte dans ces pages un magnifique égarement, un rien de Simenon, de Gracq aussi. Il y aurait un soir de pluie, les rives d'un fleuve, une ville de province, un meurtre. ....»
« «J'ai pris le chemin entre les murs et je suis descendu jusqu'au fleuve.» La phrase ouvre et ferme Quelque Chose à cacher, roman que Dominique Barbéris publie en cette rentrée 2007.
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L'histoire renvoie au crime de province – adultère, meurtre, souvenirs adolescents, rencontre d'une beauté trop fatale, trop libre, trop mystérieuse. Mais l'essentiel, et surtout la saveur du livre, est ailleurs que dans cette intrigue convenue. L'écriture se love dans le paysage, les bruits, les odeurs: «Je me souviens des soirs interminables du printemps; ça sentait la fleur blanche, le chaton de saule, la cigarette, la fumée des moteurs, le parfum bon marché.» Les mots longent les bords de Loire, glissent sur l'eau fraîche, suivent les saisons. «L'eau, c'est comme une présence» dit un personnage. Le fleuve reste muet mais, la lecture achevée, reste cette impression que c'est peut-être La Loire qui a quelque chose à cacher…»