Le modèle systémique et développemental de T. MAROT

Notes personnelles d’après l’intervention de T. MAROT (Formation CAPA-SH 2004)


Aspect systémique :

Ce modèle développe simultanément 3 entrées

On met la langue dès le départ dans sa réalité de complexité. Avancer sur ces trois chemins de façon parallèle, tout au long de la scolarité. Viser un équilibre entre les trois entrées.

La difficulté de l’apprentissage sera alors l’expression d’un déséquilibre entre ces trois systèmes. La difficulté ne sera pas due à un manque de compétences mais à un déséquilibre.


Différentes sortes de déséquilibres :


Surinvestissement de l’entrée phonique

« Ça s’écrit comme ça se prononce ». Dépendance de l’oral, focalisation sur le message oral. En situation de lecteur, « lire, c’est sonoriser ». L’élève est alors un déchiffreur compétent. Ce n’est pas pour lui un exercice de compréhension. Tout est indexé sur une réalité phonique, une conception phonique. Les habitudes cognitives s’installent. Plus l’enfant est pris en charge tôt, plus on peut rééquilibrer. On peut rééquilibrer en privilégiant les deux autres entrées, en s’appuyant ou pas sur les compétences de l’enfant, selon le contexte : L’enfant accepte-t-il d’aller vers l’inconnu ? Pas de réponse toute faite. Pour tel enfant, quelle est la stratégie la plus juste ? Ne pas hésiter à changer de stratégie. On ne peut savoir à l’avance.


Surinvestissement de l’entrée sémantique

L’élève est un devineur. Dépendance sémantico contextuelle. C’est celui qui, le premier, donne la trame du texte. Plus loin dans le questionnement, il ne saurait plus répondre. Recherche de compréhension / pas de déchiffrage. Il peut arriver très vite au sens, mais c’est un producteur de texte défaillant car, bien qu’il ait l’imagination, il lui faudrait passer aux contraintes de l’écrit. Cet élève est souvent perçu comme étant en grande réussite en maternelle. Mais plus on passe à l’écrit, plus il est en difficulté. Cela peut aller jusqu’à un blocage face à l’écrit.


Surinvestissement de l’entrée scripturale

Obsédé de l’écriture. Il ne voit dans l’acte d’écrire que l’aspect de son écrit. Tatillon, il met de la couleur,

compte les carreaux, écrit bien… Ecrire, pour lui, ce n’est pas produire : c’est respecter les normes…

catastrophe de la rature… il recommence tout.

Besoin du modèle, et il veut faire mieux que le modèle. Il ne va lire que les mots qu’il sait écrire, mots

mémorisés de façon alphabétique et non phonique. Cet élève est un bon « faussaire » → belle écriture, belle présentation, orthographe correcte.


Actions à mener auprès de l’enfant, mais aussi auprès des enseignants : co-intervention pour rééquilibrer les entrées – Dialogue – Agir simultanément sur les trois entrées (et non pas une entrée puis l’autre)→ équilibrer « à la semaine ».


Dimension développementale :


On va s’intéresser au sujet et aux opérations cognitives du sujet dans son appropriation de la langue. Deux opérations cognitives vont être exploitées :


1ère étape : Compétences de compréhension

  • Dimension qualitative de la langue

    • Comprendre la réalité phonique de la langue → C’est la conscience phonique.

    • Comprendre la réalité scripturale de la langue → C’est la conscience scripturale.

    • Comprendre la réalité de sens de la langue, faire la différence entre un mot et un logatome, c’est la

conscience sémantique.


2ème étape : Compétences de mémorisation

  • Dimension quantitative de la langue

    • Des savoirs phoniques : apprendre par cœur les 36 sons de la langue française, apprendre les liaisons…

    • Des savoirs scripturaux : apprendre l’alphabet par coeur…

    • Des savoirs sémantiques : acquérir un vocabulaire précis / champ sémantique…


Pour chaque entrée, il peut il avoir surinvestissement d’une opération sur une autre. La compréhension

doit passer AVANT la mémorisation, sinon on a un profil de répétiteur.


Quelques exemples de compétences dans les 3 entrées :


Conscience sémantique (à aborder très tôt, à l’oral)

- Associer un écrit à un contenu de sens

- Puiser des informations d’une consigne orale, simple puis complexe

- Différencier un message oral de sens d’un message oral sans sens

- Repérer un écrit incompréhensible

- Identifier les intrus de sens dans une image (ex : un skieur au milieu des baigneurs sur une plage…)

- Identifier un changement d’histoire dans un message oral

- S’appuyer sur des données visuelles autres que textuelles (indices) pour accéder au sens

- Situer, dans un texte, des mots visuellement connus

- Anticiper la suite ou un complément de l’histoire

- Comprendre l’intérêt et les finalités de l’acte de lecture


Savoirs sémantiques : (En prévention, travailler le vocabulaire)

- Mémoriser des mots appartenant à la même famille sémantique

- Identifier une série de mots sur leur seule silhouette

- Développer une attention sur toutes les particularités d’un écrit

- Connaître des structures de phrases et des expressions porteuses de sens

- Repérer les indices visuels des mots

- Reconnaître les différents registres d’un écrit

- S’intéresser à toutes les questions que l’on pourrait poser sur un texte

- Mémoriser des mots porteurs de sens mais ne possédant pas de particularité visuelle

- Établir des liens entre des parties de texte

- Offrir des commentaires sur l’histoire d’un récit


Conscience phonique

- Etre sensibilisé à la rime et participer à des jeux de rimes à l’oral

- Reproduire à l’oral des formes langagières complexes

- Manifester une aisance sur l’énonciation verbale (diction, théâtralisation du message, marionnettes…)

- Repérer et identifier des éléments sonores

- Segmenter les mots en multiples syllabes orales

- Isoler, dans son propre langage, des syllabes orales et des phonèmes

- Identifier les différents phonèmes d’un mot simple

- Différencier et définir la syllabe la syllabe orale et le phonème

- Différencier la « musique » de la lettre de son nom alphabétique

- Associer un phonème à une mais surtout à plusieurs réalités graphiques (polygraphie sur un même

phonème)


Savoirs phoniques

- Identifier automatiquement, à l’oral, les différents phonèmes d’un long mot (ex : crocodile)

- Mémoriser les principales graphies des phonèmes de la langue française

- Développer, dans une activité d’écriture, un comportement de vigilance à l’égard du message oral

- Identifier et connaître les caractéristiques de la liaison


- Oraliser un mot en segmentant les syllabes et les phonèmes

- Reconstituer un mot par la combinaison des phonèmes ( « s », « a », « k » )

- Identifier un mot inconnu par recomposition des unités phonémiques visuelles

- Imaginer et construire un poème en respectant les conventions

- Adapter une intonation en fonction de la présence d’un signe écrit

- Rythmer le débit d’une lecture selon la présence des signes de ponctuation


Conscience scripturale

- Prendre en compte la linéarité de la transcription graphique

- Respecter le sens de la gauche vers la droite

- Comprendre l’ordonnancement des signes alphabétiques

- Percevoir la correspondance entre un message entendu et un message écrit

- Nommer quelques lettres en utilisant la dénomination alphabétique

- Différencier le concept de lettre du concept de phonème

- Reconnaître un écrit de langue française d’un écrit d’une autre langue (japonais, arabe)

- Repérer et identifier des concepts spécifiques de l’écrit comme la majuscule ou la lettre muette

- Lettre muette permanente (Langue écrite)


- Repérer la segmentation de l’écrit

- Séparer les signes graphiques de la langue et les signes graphiques de la numération


Prise de conscience puis mémorisation (apprendre par coeur les mots commençant par h…)

Attention : Lettre contextuelle (s du pluriel) ¹ Lettre muette → Notion de sens.


- Mettre du sens à une réalité scripturale : la lettre, qu’est-ce que c’est ?...

- Anagrammes

- Voyelles / consonnes

- Lettre muette

- Majuscule

- Sens conventionnel de l’écriture

- Taille des lettres

- Donner une valeur phonique / sonore à une lettre

- Passer d’une écriture à une autre

- Prise de conscience des différentes écritures : l’écriture du livre (script), l’écriture que j’utilise (cursif)


Savoirs scripturaux

- Retenir toutes les lettres de l’alphabet

- Mots croisés

- Jeu de reconstitution de prénoms (cartes lettres)

- Introduire progressivement, puis en grand nombre, des signes graphiques dans ses écrits

- Reproduire la réalisation scripturale d’un texte en tenant compte des conventions, respect des normes de l’écriture lors d’une copie

- Développer une connaissance des mots-initiales : CP, TGV, NRJ…

- Reproduire les différentes écritures (majuscules, minuscules)

- Manifester une habileté graphique de plus en plus élaborée

- Copier un écrit en restant fidèle à la présentation

- Identifier tous les concepts de l’écrit

- Transcrire sur ordinateur

- Rédiger une histoire personnelle par écrit


[D’après un document de Thierry MAROT, 14/10/2004]