- Pourquoi et comment Deperrois avait-il commandé du cyanure ?

 

L'imagerie thermique, spécialité de l'entreprise de Jean-Marc Deperrois, consiste à mesurer des rayonnements de chaleur, au moyen de caméras sensibles dans l'infrarouge, et d'en donner une image colorée. Cela permet de repérer des échauffements suspects dans des appareillages divers : usure de l'étanchéité des fours, anomalies de circuits électriques etc …

Jean-Marc Deperrois voulait faire des tests pour le noircissement des surfaces métalliques car l'étalonnage des capteurs infrarouges se fait en filmant un corps noir. Les surfaces métalliques posent un problème en thermographie, car elles réfléchissent une grande proportion de l'infrarouge émis par d'autres sources. Il faut donc neutraliser cette propriété en les noircissant. Peu de temps avant il avait visité le laboratoire de l'entreprise de M. Bodson avec qui il collaborait dans la thermographie. Il y avait vu un bain liquide à base de cyanure ou l'on faisait du noircissement de pièce.

Il a donc entrepris des recherches sur la cyanuration des métaux :

            - Recherches bibliographiques, dans l'Encyclopaedia Universalis notamment, qu'il est allé consulter chez M. W* qui l'a confirmé durant le procès.

            - Recherches auprès de ses connaissances, en faisant appel à son jeune ingénieur ainsi que chez les fournisseurs, sans s'en cacher le moins du monde. Cela a été confirmé par tous.

Il avait commandé dans un premier temps de l'acide cyanurique, qui n'est pas dangereux, auprès d'une société de Rouen, Lecordier, qui devait le livrer en 3 jours, mais cette société a informé son secrétariat que le délai ne serait pas de 3 jours mais d'un mois.

Il avait alors pris contact avec Prolabo pour une commande de cyanure de sodium. Mais comme il n'avait pas de compte chez eux, le fait de n'être pas encore client provoquait des délais de livraison tout aussi longs que chez son fournisseur de Rouen.

C'est donc sur ces problèmes de délai de livraison qu'il s'est adressé à M. Bodson qui, lui, avait un compte chez Prolabo, ce qui a permis à Jean-Marc Deperrois d'avoir le produit dans les jours qui ont suivi. Il est allé chercher son cyanure à l'entreprise de M. Bodson, à Nanterre, le 9 mai, devant de nombreux témoins, puisqu'une trentaine de personnes fêtaient un événement dans l'entreprise ce jour-là. Il ne s'est nullement caché, au contraire, il s'est joint à eux, et a pu discuter de son projet avec plusieurs personnes.

Il a ensuite fait ses essais avec le cyanure de sodium. Ils consistaient à dissoudre le cyanure de sodium en poudre dans de l'eau, et de tremper dans cette solution des morceaux de métal qu'il saisissait avec une pince. Le noircissage du métal n'a pas été suffisant pour permettre d'étalonner les caméras. Il a donc demandé à Bodson de lui procurer du cyanure de potassium. C'est alors qu'est arrivé le drame de la petite Emilie Tanay. Il a alors demandé à Bodson de stopper la commande de cyanure de potassium car il ne voulait plus de cyanure dans l'entreprise dans ces circonstances. En outre, il a jeté son cyanure de sodium dans la Seine, et tous les éléments métalliques de ses essais dans une décharge.