Examen régional de Meknès session de rattrapage 2014

Examen régional : Académie de Meknès-Tafilalt (session de rattrapage juillet 2014)

TEXTE :

Vers le milieu de ce Pont-au-Change, si large et si encombré que nous cheminions à grand-peine, l'horreur m'a pris violemment. J'ai craint de défaillir, dernière vanité ! Alors je me suis étourdi moi-même pour être aveugle et pour être sourd à tout, excepté au prêtre, dont j'entendais à peine les paroles, entrecoupées de rumeurs.

J'ai pris le crucifix et je l'ai baisé.

- Ayez pitié de moi, ai-je dit, à mon Dieu! Et j'ai tâché de m'abîmer dans cette pensée.

Mais chaque cahot de la dure charrette me secouait. Puis tout à coup je me suis senti un grand froid. La pluie avait traversé mes vêtements, et mouillait la peau de ma tête à travers mes cheveux coupés et courts.

- Vous tremblez de froid, mon fils? m'a demandé le prêtre.

- Oui, ai-je répondu.

Hélas! pas seulement de froid.

Au détour du pont, des femmes m'ont plaint d'être si jeune.

Nous avons pris le fatal quai. Je commençais à ne plus voir, à ne plus entendre. Toutes ces voix, toutes ces têtes aux fenêtres, aux portes, aux grilles des boutiques, aux branches des lanternes; ces spectateurs avides et cruels; cette foule où tous me connaissent et où je ne connais personne; cette route pavée et murée de visages humains... J'étais ivre, stupide, insensé. C'est une chose insupportable que le poids de tant de regards appuyés sur vous.

Je vacillais donc sur le banc, ne prêtant même plus d'attention au prêtre et au crucifix.

Dans le tumulte qui m'enveloppait, je ne distinguais plus les cris de pitié des cris de joie, les rires des plaintes, les voix du bruit; tout cela était une rumeur qui résonnait dans ma tête comme dans un écho de cuivre.

Mes yeux lisaient machinalement les enseignes des boutiques.

Une fois, l'étrange curiosité me prit de tourner la tête et de regarder vers quoi j'avançais. C'était une dernière bravade de l'intelligence. Mais le corps ne voulut pas; ma nuque resta paralysée et d'avance comme morte.

J'entrevis seulement de côté, à ma gauche, au-delà de la rivière, la tour de Notre-Dame, qui, vue de là, cache l'autre. C'est celle où est le drapeau. Il y avait beaucoup de monde, et qui devait bien voir.

Et la charrette allait, allait, et les boutiques passaient, et les enseignes se succédaient, écrites, peintes, dorées, et la populace riait et trépignait dans la boue, et je me laissais aller, comme à leurs rêves ceux qui sont endormis.

Tout à coup la série des boutiques qui occupait mes yeux s'est coupée à l'angle d'une place; la voix de la foule est devenue plus vaste, plus glapissante, plus joyeuse encore; la charrette s'est arrêtée subitement, et j'ai failli tomber la face sur les planches. Le prêtre m'a soutenu.

- Courage! a-t-il murmuré.

Extrait de « Le Dernier jour d’un condamné » de Victor Hugo

QUESTIONS

I. ÉTUDE DE TEXTE (10 pts)

Relisez le texte et répondez aux questions suivantes :

1) Victor HUGO est un grand écrivain français.

Quand et où est-il né ? Citez une de ses œuvres autre que « Le Dernier Jour d’un Condamné ».

Quand et où est-il mort ?

Pour répondre, vous pouvez choisir parmi les informations suivantes : 1782, 1802, 1885, 1902 à Nice, à Paris, à Besançon, « Rêver du Maroc », « Les misérables », + ? 1,5 pt

2) D'après votre lecture de l’œuvre,

a) Où le narrateur est-il conduit ?

b) Combien de temps lui reste-t-il à vivre ?

Justifiez votre réponse ? 1 pt

3) Recopiez le tableau suivant puis mettez « vrai » ou « faux » dans la case qui convient :

Les phrases VRAI FAUX

« Le dernier jour d’un condamné » est une autobiographie.

« Le dernier jour d’un condamné » est un conte.

« Le dernier jour d’un condamné » est un roman à thèse.

4) Relevez dans le texte quatre termes appartenant au champ lexical du bruit. 1 pt

5) a) Dégagez et nommez deux figures de style employées dans le passage allant de:

« …cette route pavée et murée de visages humains... » à « …un écho de cuivre. »

b) Quelle idée chacune de ces deux figures de style met-elle en relief ? 1 pt

6) D'après votre lecture de l’œuvre, pourquoi la foule se masse-t-elle? 0,5 pt

7) a) Donnez deux sentiments éprouvés par le narrateur dans le texte.

b) Qu’est-ce qui est à l’origine de chacun d’eux ? 2 pts

8) a) Ce texte est-il surtout : a) ironique, b) pathétique, c) épique ?

b) Justifiez votre réponse. 1 pt

9) Que pensez-vous (en deux phrases) du comportement de la foule envers le condamné dans ce texte? 1 pt

II. PRODUCTION ÉCRITE (10 pts)

Sujet :

« Notre époque devient de plus en plus étrange. Les jeunes filles d'aujourd'hui ne sont plus celles d'hier. Elles manquent de réserve, ignorent la pudeur…» dit un personnage de « La Boîte à merveilles ».

Les propos de ce personnage vous semblent-ils toujours valables ?

Rédigez un texte dans lequel vous développerez votre point de vue sur le sujet.

meknesrattrapage2014.pdf