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Journal d’un jeune incompris

Dimanche 14 mai

Sous réserve d’erreur de jugement de ma part, je peux affirmer que mes parents ont abdiqué volontairement leur autorité pour la reléguer à l’école. En effet, mon apprentissage des normes sociales se fait désormais sous la férule des professeurs alors que lors de ma petite enfance mon éducation morale s’accomplissait sous la houlette de mon père et que celle sentimentale se façonnait sous l’égide de ma mère.

Sous les yeux de mes parents, impuissants, les fonctions traditionnelles de la famille s’altèrent et perdent du terrain sous l’action d’une école qui s’arroge le droit de forger ma personnalité et sous l’effet d’une institution qui se déclare unique source de connaissances et de valeurs. Ma formation, mon éducation et même la charge de ma protection se font sous la conduite de maîtres omniscients, omnipotents et omniprésents. Par conséquent, toute influence parentale sur ma personne est sous la menace de l'effilochage.

Pour moi, rien n’a changé: j’étais sous la patte d’un couple et je me place, à présent, sous la responsabilité d’une communauté. Mais, pour mes parents, c’est différent. Sous le coup de cette brutale spoliation d'autorité, ils sont restés sans voix. Et c'est sous le couvert du silence consentant qu'ils cachent un lancinant sentiment d'humiliation.

Mohamed Néjib TAYEB